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CHAPITRE 4 INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES ET DISCUSSION

4.6 Discussion générale

Dans ce qui suit, une discussion générale permettra d’aborder, avec recul, certaines thématiques qui ont entouré ce projet. Cette discussion ne se substitue pas à celle proposée à la fin du chapitre 3, où des éléments de discussion plus spécifiques sont retrouvés.

L’analyse des documents de référence (CSA, 2006; ATC 2010; AASHTO 1989; AASTHO 2012) a permis de faire ressortir les règles qui régissent la conception et la validation des parapets de pont. Il en est ressorti, autant au Canada (CSA, 2006) qu’aux États-Unis (AASHTO, 2012), que le recours au crash-tests est la seule méthode légale qui permet de valider la conception. Cependant, les crash-tests demandent des ressources importantes et requièrent beaucoup de planification. Certaines légères modifications de concept ne peuvent justifier de tels investissements. Ainsi, nonobstant cette prérogative, les codes permettent l’adaptation des parapets préalablement crash-testés. Cependant, les règles entourant les modifications ne sont que vaguement précisées. Il en revient donc au jugement du concepteur (ATC, 2010) de ne pas modifier de manière significative (CSA, 2006) le comportement des parapets de référence, afin de conserver l’interaction véhicule-structure initiale en cas d’accident. Les concepteurs ne disposent que d’une petite marge de manœuvre. Ainsi, à moins de recourir à un crash-test, les géométries de parapets préfabriqués devront toujours être basées sur les modèles de parapets existants et homologués (celui de la Ville de Montréal dans ce projet). Il faudra au minimum s’assurer de dépasser les charges statiques équivalentes spécifiées par les codes. Ces dernières sont fournies afin de permettre le dimensionnement initial de parapets et d’ancrages préalablement à un crash-test. Il faut également s’assurer que la rigidité initiale du parapet de référence est conservée pour préserver l’interaction véhicule-structure du parapet de référence. Cela étant dit, l’impact des modifications apportées, et notamment le comportement du système d’ancrage, devront toujours être validés par les méthodes admissibles (ATC, 2010). Parmi ces méthodes figurent les essais expérimentaux statiques, les essais expérimentaux dynamiques, les analyses numériques ou les méthodes analytiques. Il est possible d’avoir recours à des essais dynamiques sur des parapets préfabriqués en laboratoire tel que réalisé dans d’autres projets (Amimansour, 2004; Niamba, 2009; Duchesneau, 2010). Ces essais permettent d’établir le comportement dynamique de la structure face à un impact mais ne donnent aucune indication sur

les accélérations et dommages subis par le véhicule et ses passagers. Par ailleurs, une résistance dynamique supérieure est anticipée pour les parapets en béton (CSA, 2006; Niamba, 2008; Duchesneau, 2010). Les travaux de Duchesneau et de Niamba ont démontré que les parapets ayant bien performé en condition de charge statique ont également performé adéquatement sous charge dynamique. En fait, pour un niveau de chargement identique, l’état d’endommagement du parapet est toujours plus sévère sous charge statique. Dans ce contexte, des essais statiques combinés à une validation numérique ont été privilégiés dans le cadre de ce projet. L’effet d’une charge dynamique n’a pas été évalué, mais il pourra éventuellement être pris en compte de manière numérique dans le cadre d’un autre projet.

Il est ressorti des essais que les trois spécimens dépassaient largement la force de conception statique pondérée du code canadien (CSA, 2006). Cependant, le parapet en BFHP ne dépassait pas la force de conception statique pondérée du code américain (AASHTO, 2012). Il a donc été nécessaire de rehausser la capacité du spécimen préfabriqué en BFHP pour qu'il convienne à l'ensemble des exigences en Amérique du Nord. Des options ont été proposées et validées numériquement pour y parvenir dans le chapitre 3.

Une orientation des fibres plus défavorable que prévue a été constatée. Pour rappel, une fibre bien orientée est une fibre positionnée perpendiculairement à la macro fissure. Les fibres s’orientent généralement dans le sens de l’écoulement. Il n’en reste pas moins que l’orientation des fibres pendant une coulée est complexe à prédire. Pour des géométries prismatiques et élancées (dalle, poutres, etc.), le flux donné au béton frais est souvent suffisant pour obtenir une orientation favorable. Pour des géométries plus complexes (changement d’angle, de section, etc.) des dispositions supplémentaires doivent souvent être prises. À cet effet, il avait été décidé de couler les parapets avec trottoir intégré à l’envers. Cette mesure devait permettre d’aligner les fibres horizontalement dans le trottoir et verticalement dans le parapet. La validité de la méthode utilisée reste difficile à établir, même après le carottage des spécimens. Qui plus est, le profil de fissuration obtenu a rendu difficile la bonne orientation des fibres dans le plan de rupture. À vrai dire, face à une fissure en arc, il n’y avait pas d’orientation idéale. Cette réalité a fait en sorte qu’une résistance plus faible que celle anticipée lors la phase de conception a été obtenue. La décision de couler les parapets et les trottoirs de manière monolithique a donc eut deux effets contraires. Elle a permis d’obtenir de plus grandes résistances par la contribution mécanique du

trottoir. En contrepartie, la fissure en arc de cercle a réduit la contribution attendue des bétons fibrés.

L’utilisation de béton renforcé de fibres a permis des réductions significatives des volumes de béton et d’acier. Dans le parapet et le trottoir du spécimen en BFHP les quantités de béton et d’armatures ont été réduites de 22% et de 59% respectivement par rapport à la référence en BHP. Dans le parapet et le trottoir en BFUP ces quantités ont été réduites de 29% et de 72% respectivement. Malgré les réductions des volumes de béton et d’acier, et malgré une orientation défavorable des fibres, les parapets préfabriqués avec trottoir intégré dépassent largement les exigences de résistance du code canadien. Par ailleurs, ils présentent des rigidités similaires à celle du parapet de référence jusqu’à 175 kN. La combinaison de ces deux conditions permet de penser que les deux parapets préfabriqués devraient être suffisamment résistants lors d’un impact de véhicule sans que l’interaction véhicule-structure initiale ne soit significativement modifiée. Un succès au crash-test est attendu.

Ce projet a été réalisé dans le cadre d’un partenariat industriel. Lors de la conception d’éléments de béton préfabriqué, il est important de garder un regard sur la reproductibilité du processus de production et la facilité d’installation. En effet, il s’agit d’une industrie qui se prête à la production de masse et à la chaîne. Les parapets préfabriqués, bien qu’étant des prototypes, devaient utiliser des méthodes reproductibles. Deux stratégies ont permis d’aller en ce sens. Premièrement, les parapets et les trottoirs ont été coulés de manière monolithique. Entre la coulée et le mûrissement du béton, il faut généralement compter 4 à 5 jours. Si trottoirs et parapets devaient être coulés séparément, ce serait 4 à 5 jours d’immobilisation dans le processus. Une coulée monolithique permettait de remédier à cette problématique. Deuxièmement, plutôt que d’avoir recourt à des armatures conventionnelles coupées, pliées et installées dans une niche de petites dimensions, l’utilisation de rails préfabriqués avec goujons a permis des gains appréciables de temps. Par ailleurs, le choix d’utiliser des tuyaux d’injection compatibles avec les pompes permet aussi d’envisager une connexion rapide en chantier. Pour des raisons de place au laboratoire, la longueur des spécimens avait été fixée à deux mètres. Dans la pratique, il est envisagé de fabriquer des spécimens de 4 m et de les connecter longitudinalement. L’effet des connexions longitudinales ne faisait pas partie de ce projet. Cependant, Namy (2012) a démontré que la continuité longitudinale permettait aux parapets préfabriqués d’offrir le même niveau de

résistance et aux dalles de pont de présenter le même niveau d’endommagement que les éléments de ponts conventionnels.

L’ensemble des remarques précédentes permet donc de considérer que les parapets avec trottoir intégré de ce projet de recherche s’avèrent une solution économique, rapide et performante mécaniquement. Ces concepts devraient donc être considérés pour la construction.

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