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Ce chapitre se veut une réflexion sur la matière présentée tant au niveau des expériences que des développements. Nous procédons d’abord à une récapitulation des résultats obtenus. Nous poursuivrons en soulignant le succès du projet sur le plan médical en commentant la contribution potentielle des résultats obtenus. Nous terminerons en abordant les limites du projet.

7.1 Sommaire des travaux

Cette recherche avait comme but de poursuivre les travaux entrepris par les membres du laboratoire de NanoRobotique de l’École Polytechnique de Montréal qui visent à trouver un moyen peu invasif, efficace et peu coûteux d’utiliser un microtransporteur ayant la capacité de naviguer dans le système vasculaire humain pour assurer le transport actif d’agents thérapeutiques anticancéreux directement aux cellules cancéreuses en épargnant le plus possible les cellules saines d’un patient.

À cette fin, un parcours de l’ensemble des technologies actuellement disponibles en microrobotique a été fait afin de constater que peu de choix s’offrait à nous pour entreprendre nos expériences. Seules des recherches provenant du laboratoire de NanoRobotique confirmaient la possibilité d’utiliser et de contrôler des microrobots à distance en deux dimensions sous l’influence de champs magnétiques.

Ces microrobots naturels sont des bactéries identifiées sous le nom MTB de type Magnetococcus

Marinus MC-1, mesurant 2 μm de diamètre, qui se propulsent par elles-mêmes et qui sont dotées d’un comportement magnétotactique, donc influençable par champs magnétique.

Ce mémoire décrit des techniques novatrices, à ce jour exempte de la littérature couverte, qui permettent d’en faire usage en les contrôlant à distance en trois dimensions par l’intermédiaire de champs magnétiques générés par la plateforme expérimentale munie d’un générateur de champs magnétiques actionnée par un logiciel informatique spécialement conçu dans le cadre de ce projet de recherche.

Un premier chapitre dédié à la caractérisation du comportement de ces bactéries nous a permis d’établir les limites physiques auxquelles sont assujetties les techniques de contrôle. Tel que décrit au Chapitre 3, l’utilisation d’une induction magnétique supérieure à 10 mT peut entraîner

un changement de polarité au niveau de la chaîne de magnétosomes contenues dans ce type de MTB lorsque celles-ci rencontrent un obstacle dans leur trajectoire.

La connaissance de ces limites et du comportement de ces bactéries en présence d’un champ magnétique nous a ensuite permis de développer des applications logicielles pour analyser vectoriellement les champs magnétiques générés par la plateforme et prédire le comportement de ces bactéries lorsqu’exposées à différentes séquences magnétiques, tel que présenté au Chapitre 4. Des simulations effectuées en appliquant différentes séquences magnétiques ont confirmé la possibilité théorique de générer des agrégats de MTB dans un environnement tridimensionnel. Une description de la configuration de la plateforme expérimentale ainsi que de l’application informatique permettant de générer les séquences magnétiques sur des échantillons de MTB ont également été présentées dans ce même chapitre.

Les séquences magnétiques correspondant aux exigences ont ensuite été testées expérimentalement au Chapitre 5 en utilisant cette plateforme magnétique afin de valider notre capacité de générer des agrégats de MTB à distance dans un environnement tridimensionnel. Les résultats positifs obtenus ont confirmé ce que nous considérons être une première dans le domaine. En effet, au meilleur de notre connaissance, aucune mention littéraire ne fait état de la capacité de générer et de diriger des agrégats de MTB dans un environnement tridimensionnel, autre que celle mise de l’avant dans ce travail.

Finalement, plusieurs essais ont été conduits à l’intérieur d’animaux vivants. Lors de ces expériences, décrites au Chapitre 6, des MTB ont été introduites et dirigées de façon contrôlée en trois dimensions à l’intérieur du tissu animal par l’usage de champs magnétiques inspirés des séquences magnétiques validées expérimentalement au Chapitre 5. Les résultats convaincants de ces expériences pratiques ont validé notre capacité de diriger ces micros transporteurs à l’intérieur d’un tissu humain.

En se référant aux expériences et résultats présentés au cours de ce mémoire, nous sommes en mesure d’évaluer quelle pourrait être la contribution potentielle au domaine médicale ainsi que les limites de l’application d’une telle technologie. Ces deux aspects sont analysés dans les deux prochaines sections.

7.2 Contribution au domaine médical

La capacité d’introduire et de contrôler le cheminement de microrobots à l’intérieur d’un système biologique, ou d’un tissu, est un atout non négligeable qui pourrait complémenter voire même améliorer les techniques courantes d’administration de médicaments dans un patient. Dans le cas d’un cancer par exemple, il est possible de considérer que la greffe d’une charge thérapeutique au microtransporteur permettrait non seulement de le guider à l’intérieur de la vasculature humaine ou d’un tissu en particulier, mais d’également livrer le médicament à un endroit ciblé. Cette capacité pourrait potentiellement permettre d’améliorer l’efficacité des médicaments anticancéreux en les ciblant à l’endroit désiré et en réduisant la perturbation des régions saines. En effet, comme il en a été question dans notre revue de la littérature, l’environnement tumoral possède des caractéristiques qui nuisent à la diffusion des agents thérapeutiques anti-cancéreux. Par rapport à un tissu sain, une région atteinte souffre d’une pression interstitielle plus élevée, de régions hypoxiques mal vascularisées, d’un réseau chaotique de capillaires, etc. Doté d’un agent thérapeutique, le microtransporteur bénéficie d’un mode de propulsion qui lui permettrait de surmonter l’environnement hostile dans lequel il navigue pour atteindre le tissu tumoral et livrer le médicament. Ce moyen protège, par le fait même, les tissus sains en limitant la diffusion aléatoire des agents thérapeutiques à travers l’organisme. Il en découle donc que les applications envisageables liées à l’utilisation éventuelle de ces microorganismes au niveau médical sont nombreuses et pourraient contribuer au mieux-être des patients en dirigeant plus effectivement les médicaments.

Nous portons à votre attention qu’au cours de notre recherche nous avons également construit un prototype d’instrument médical, dont il n’a pas été question jusqu’à présent dans ce mémoire. En effet, la production d’un tel instrument se voulait un moyen d’opérer un transfert technologique pour poursuivre des tests cliniques basés sur la technique de livraison de médicament développée dans ce projet. Un rapport sommaire de l’instrument médical en question apparaît à l’annexe 3 et a été développé en collaboration avec les professionnels de la santé de l’hôpital général juif de Montréal. Les détails concernant la conception de cet instrument ne sont pas décrits dans ce mémoire pour limiter la longueur de ce mémoire.

7.3 Limitations

Ce système de livraison active de médicament vers un site tumoral semble très prometteur, mais il s’accompagne de certaines limites.

Tout d’abord, les microorganismes dont il est question ne mesurent que 2 μm de diamètre et peuvent atteindre une vitesse moyenne d’environ 200μm/s en se propulsant par eux-mêmes. Ils possèdent une bonne motilité dans des environnements peu turbulents, mais peuvent facilement se désorienter en présence de courants ou de turbulence à l’intérieur d’un fluide. Dans le cas du réseau vasculaire humain, le débit sanguin est un élément très important. En considérant le débit de sang dans ce réseau, nous constatons que la seule région du système sanguin humain qui se prête favorablement au contrôle des bactéries est celui des capillaires. C’est en effet, le seul endroit où le débit sanguin est inférieur à 1 mm/s.

Figure 7-1: Figure qui présente les caractéristiques de taille et de débit sanguin dans divers vaisseaux sanguins du corps humain. Image adaptée de [71]. Le débit sanguin moyen ainsi que le diamètre des vaisseaux sanguins sont identifiés.

La seconde limitation concerne la réaction immunitaire du patient face à la présence des microorganismes administrés. En effet, un des rôles du système immunitaire du patient est de réagir pour éliminer tout corps étranger rencontré. Malgré que des études préliminaires sur des souris démontrent une réaction immunitaire minime, le risque d’une réaction plus agressive demeure présent dans le cas du système immunitaire humain.

Une troisième lacune importante liée à cette technique consiste en l’absence de rétroaction au cours du processus de ciblage des bactéries. À ce jour cette absence nous contraint d’utiliser ce système en boucle ouverte ce qui signifie que la réussite du guidage ne peut se vérifier qu’une fois le protocole de ciblage terminé soit, après avoir traité le patient. Elle est d’autant plus significative qu’elle ne laisse place à aucune marge d’erreur ce qui implique que les bactéries magnétotactiques chargées de médicaments peuvent atteindre un endroit différent. Deux conséquences majeures découleraient d’une telle cette situation. D’abord, le tissu cible n’est pas atteint et aucun traitement n’a lieu à cet endroit. De plus, la dose de médicaments injectée se retrouvera ailleurs dans le corps du patient pouvant provoquer des dommages importants à des tissus sains. Cette dernière conséquence est d’autant plus importante puisqu’elle risque d’empirer la condition du patient plutôt que de l’améliorer.

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