• Aucun résultat trouvé

2.2 Etude viscosimétrique des liquides ioniques

3.1.4 Discussion

Avec l’ensemble des observations faites à partir des résultats obtenus, nous pouvons claire-ment dire que la solubilité des gaz dépend essentielleclaire-ment de la nature du gaz et de l’anion constituant le liquide ionique. Les gaz étudiés sont respectivement plus et respectivement moins solubles dans les liquides ioniques étudiés contenant les anions Ntf2et C2SO4. Même si encore peu d’études expérimentales sont disponibles avec ces liquides ioniques en fonction de la température, la compilation de l’ensemble des données disponibles dans la littérature est en accord avec cette conclusion [12, 85, 140, 149, 152, 162, 170].

3.1.4 Discussion

Afin de juger l’exactitude de nos résultats, il est intéressant de comparer les résultats obte-nus avec les systèmes contenant le plus de données expérimentales présentes dans la litté-rature. Il a été décidé de faire cette analyse pour la solubilité du dioxyde de carbone dans le [C4C1IM]+[PF6] et dans le [C4C1IM]+[BF4], car c’est pour ces systèmes qu’une plus grande variété de données existe actuellement. Le manque de données de solubilité de gaz dans les liquides ioniques traduit à la fois la nouveauté de ces liquides et la difficulté des mesures en particulier pour les gaz peu solubles comme le monoxyde de carbone ou l’hydro-gène. Dans les Figures 3.12 et 3.13, les déviations des valeurs par rapport à la corrélation des constantes de Henry de ce travail (c.f. Tableau 3.4) sont représentées avec :

Discussion Section 3.1

Fig. 3.12 – Comparaison de nos mesures avec la littérature de la solubilité du dioxyde de carbone dans le [C4C1IM]+[BF4] en fonction de la température. 4 : Kroon et al. [163] ; 2 : Cadena et al. [162] ; O : Shiflett et al. [104, 159] ;N : Anthony et al. [85] ; ◦ : Camper et al. [167, 168, 140] ; • : Ce travail [172]. La ligne de base correspond aux constantes de Henry calculées à partir du Tableau 3.4.

Fig. 3.13 – Comparaison de nos mesures avec la littérature de la solubilité du dioxyde de carbone dans le [C4C1IM]+[PF6] en fonction de la température.  : Kamps et al. [165] ; 4 : Kim et al. [128] ; 2 : Cadena et al. [162] et Anthony et al. [85] ;O : Shiflett et al. [104, 159] ; ♦ : Zhang et al. [157] ;  : Liu et al. [135] ; ◦ : Camper et al. [167, 168, 140] ; • : Ce travail [173]. La ligne de base correspond aux constantes de Henry calculées à partir du Tableau 3.4.

Chapitre 3 Propriétés thermodynamiques d’équilibres entre phases

A partir de ces deux représentations graphiques, nous pouvons remarquer que la plupart des valeurs obtenues dans la littérature sont en accord avec celles obtenues lors de cette étude à ±5% près. Les déviations obtenues entre les résultats expérimentaux obtenus et les lignes de bases, qui représentent les fonctions de corrélation des constantes de Henry en fonction de la température (cf. Tableau 3.4), témoignent de la précision de ce travail.

Pour l’étude de la constante de Henry du dioxyde de carbone dans le [C4C1IM]+[PF6], la plus forte déviation a été obtenue avec celle de Kamps et al. à 293 K [165] (valeurs inférieures aux notres de 9%). Cependant, dans leurs travaux, il est stipulé que la précision de leur constante de Henry pour cette température est de ±5% ce qui permet d’expliquer en grande partie la déviation obtenue avec cette valeur. Les valeurs reportées par Shiflett et al. [104, 159] à 283 K, par Kim et al. [128] à 293 K et par Zhang et al. [157] à 303 et 308 K présentent toutes de fortes déviations par rapport à nos valeurs de constantes de Henry. Etant donné que ces valeurs ont été obtenues après avoir extrapolé leurs données expérimentales en fonction de la pression le long des isothermes et vues les différentes valeurs obtenues lors de ce travail et collectées dans la littérature, ces valeurs peuvent être écartées.

Les autres valeurs non représentées dans ces figures ont été écartées soit parce que les dif-férents auteurs ont remesuré leurs valeurs de solubilité, c’est le cas du groupe de Brennecke [12, 85, 154, 160, 161, 162] et des mesures effectuées au LTSP [88, 155, 172, 173], soit parce que les valeurs de la littérature présentaient des déviations incohérentes par rapport à celles obtenues lors de cette étude [170].

A partir des Figures 3.12 et 3.13 et des commentaires précédents, nous pouvons donc estimer que nos résultats sont fournis avec une précision de ±1% et une exactitude de ±5%. Afin de juger le véritable potentiel des liquides ioniques en vue de leurs utilisations dans les technologies propres, il est intéressant de comparer les solubilités de gaz dans ces liquides et dans des solvants très souvent employés dans les technologies existantes. Nous avons re-porté dans le Tableau 3.6, les valeurs de la solubilité de différents gaz, exprimées en fractions molaires calculées à p = 0, 1MPa, pour différentes espèces moléculaires fréquemment utili-sées dans l’industrie et pour différents liquides ioniques.

Discussion Section 3.1 Tab. 3.6 – Solubilité des gaz, exprimée en fraction molaire, dans des liquides ioniques, dans diffé-rents solvants organiques et dans l’eau à 298,15 K.

104 xgaz [184, 185]

gaz Eau Heptane Cyclohexane Benzène Ethanol Acetone CO2 6,111 120,2 76,00 97,30 63,66 185,3 C2H6 0,3345 319,6 235,9 148,7 68,37 96,29 CH4 0,2507 34,53 32,75 20,77 12,80 18,35 O2 0,2298 21,66 12,48 8,165 5,841 8,383 N2 0,1173 13,54 7,610 4,461 3,593 5,395 H2 0,1413 6,859 4,142 2,580 2,067 2,996 Ar 0,2516 24,87 14,80 8,815 6,231 9,067 CO 0,1724 17,24 9,910 6,680 4,843 7,719 104xgaz

gaz [C4C1IM]+[BF4]− [C4C1IM]+[PF6]− [C4C1IM]+[Ntf2]− [C2C1IM]+[Ntf2]− [N4111]+[Ntf2]− [C2C1IM]+[C2SO4]−

CO2 179,0 193,7 303,1 292,6 305,0 117,1 C2H6 33,20 48,11 103,11 60,422 - -CH4 11,20 13,77 - - - -O2 6,325 9,316 - - - -N2 5,871 8,356 - - - -H2 4,939 4,633 7,331 6,835 8,725 4,744 Ar 6,964 10,05 - - - -CO 5,784 8,116 10,533 8,4753 -

-1 : Anthony et al. [85] 2: Camper et al. [168] 3 : Dyson et al. [150]

Il est observé que la solubilité des gaz dans les liquides ioniques est, similaire pour la plupart des cas étudiés, à celle dans les solvants organiques couramment utilisés, et plus élevée que celle dans l’eau. Il semblerait que, du point de vue de la solubilité des gaz, les liquides ioniques peuvent être utilisés comme solvants alternatifs aux solvants organiques (notamment aux solvants organiques polaires) avec l’avantage de l’absence de solvant dans la phase vapeur et de la large plage liquide utilisable.

Quelques relations entre la solubilité des gaz et les interactions gaz-liquide ionique ont déjà pu être établies par différents auteurs [162, 178, 181]. Par exemple, la solubilité impor-tante du dioxyde de carbone dans les liquides ioniques a pu être expliquée par l’importance

Chapitre 3 Propriétés thermodynamiques d’équilibres entre phases

des interactions électrostatiques soluté-solvant à l’aide de la simulation moléculaire. L’im-portance des interactions électrostatiques semble moins significative pour des gaz présentant des moments quadrupolaires plus faibles comme l’azote (Tableau 3.7).

La solubilité relativement élevée des gaz apolaires tels que l’éthane (mesuré dans ce travail) ou même le butane [186] semble plus difficile à expliquer. Elle serait compatible avec l’existence de microphases polaires et apolaires au sein du liquide ionique [139], (discutée dans la Section 2.2 d’après les travaux de Canongia Lopes et Pádua), qui permettrait d’expliquer le fait que les liquides ioniques peuvent dissoudre des gaz polaires et apolaires.

Pour les gaz moins solubles, la différence de solubilité peut être explicitée également par la polarisabilité des solutés gazeux. Les valeurs des polarisabilités, des moments dipolaires et quadripolaires pour les gaz étudiés sont reportées dans le Tableau 3.7.

Tab. 3.7 –Polarisabilité : α, moments dipolaires : µ et moments quadripolaires : Q des gaz étudiés [144].

gaz 1024 α/cm3 1018 µ /esu cm 1026 Q /esu cm2

CO2 2,64 0 4,3 C2H6 4,50 0 0,65 CH4 2,60 0 0 O2 1,58 0 0,40 N2 1,74 0 1,4 H2 0,806 0 0,64 Ar 1,64 0 0,40 CO 1,95 0,1 2,5

A partir de ces données, il est possible de montrer l’influence de la polarisabilité des gaz sur leur solubilité dans le liquide ionique [C4C1IM]+[PF6] (Figure 3.14).

Discussion Section 3.1

Fig. 3.14 – Relation entre la polarisabilité des gaz et leurs solubilités dans le [C4C1IM]+[PF6]. ◦ : C2H6;  : CH4;  : CO ; N : N2; H : Ar ; • : O2;♦ : H2.

Cette figure montre que plus la polarisabilité d’un gaz est faible plus sa solubilité est faible, de plus, il est intéressant d’observer que la polarisabilité décrit plutôt bien la solubilité des gaz moins solubles que le dioxyde de carbone. Il semblerait donc que les forces de dispersions jouent un rôle non négligeable sur la solubilité de ces gaz dans les liquides ioniques. Par contre, la faible solubilité du monoxyde de carbone ne peut être expliquée, car cette molécule présente un moment dipolaire et un moment quadripolaire supérieur à celui de l’azote, ce qui laisserait penser, à première vue, que ce gaz serait plus soluble que les gaz apolaires.

Chapitre 3 Propriétés thermodynamiques d’équilibres entre phases