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2- Diagenèse de la Formation de Beauharnois

2.4 Discussion de l'évolution diagénétique des dolomies

Les milieux diagénétiques

Les dolomies de Beauhamois ont subi une série de modifications diagénétiques, débutant dès leuraccumulationet se poursuivant lors del'enfouissement. Le milieu de diagenèse précoce des dolomies, soit un environnementde sabkha, est possiblement à l'originede la dolomitisation intensive des sédiments et de la miseen place de sulfates interstitiels (Morrow, 1982; Kendall, 1984). La silicification, le deuxième événement reconnu dans ces dolomies, est aussi un processus diagénétique précoce, carelle est à l'origine de la conservation de fines structures sédimentaires. Elle reflète possiblement l'influence d'une nappe d'eau météorique, les eaux continentales étant sursaturées parrapport à la silice, au contraire des eaux marines normales (e.g. Blatt, 1979).

La formation d'excroissance limpide de dolomite sur des cristaux pré-existants (épisode 3) contribue à modifier les textures et structures sédimentaires et se produit vraisemblablement au toutdébut de l'enfouissement. Cettedolomitelimpide tardive est plus stable quela phase précoce et résulte possiblement d'une précipitation lente etordonnée (Longman et Mench, 1978). Les événements plus tardifs, soit lasulfatisationrestreinte (épisode 4), la carbonatisation des sulfates (épisode5)et ladédolomitisation (épisode 6)sonttous associés à la diagenèse d'enfouissement. L'épisode de carbonatisation semble nettement relié à l'apparition de réactions thermocatalytiques, suite à l'enfouissement (Tassé et Schrijver, 1986). L'épisode de dédolomitisation, et possiblement de sulfatisation peuvent également être reliés à ces phénomènes. La réaction thermocatalytiqueen cause correspond à une réduction des sulfates, qui s'exprime de lafaçon suivante (Orr, 1982):

(1) SO4-2 + ÎHjS = 4S° + 2H2O + 20H-

En laboratoire, ces réactions se réalisent à des températures de 175° à 250°C, mais selon Orr (1982), laréduction des sulfatespar H^S etla matière organique peut aussi se produire sous des conditions géologiques, à des températures aussi basses que 100°C. Ces conditions sont satisfaites dans les Basses-Terres du St-Laurent.En effet, des travauxportant surla maturation delamatière organique présente dans la séquence Phanérozoïquedes Basses-Terrres, indiquent une température moyenne atteinte d'environ 140°C (Bertrand et al., 1983). Des travaux plus spécifiques effectués dans le sondage Bald Mountain St-Roch no. 1 (INRS-Pétrole, 1976), montrent que la température atteinte dans les dolomiesde Beekmantown serait légèrement inférieure à 200°C. Ces températures sont donc compatibles avec celles requises pour les réactions 1 et 2. La présencede dolomite baroque au sein de ces dolomies vient aussi appuyer l'hypothèse de réactions thermocatalytiques à l'origine de l'épisode de carbonatisation de sulfates. La dolomite baroque, utilisable commegéothermomètre(60 à 150°C, Radke etMathis, 1980), apparaît seulement au cours de l'épisode5,où elle remplacedes sulfates nodulaires.

En présence de sulfates de calcium, les réactions 1 et 2 peuvent prendre l'une des formes suivantes (Anderson, 1983):

(3) 2CaSO4 + Mg+2 +2CH4 = 21^5 + CaMg (CO3)2 + Ca+2 + 2^0

(4) CaSO4 + CH4= H2S + CaCO3 +H2O

Ces réactions expriment leremplacementdes sulfates par les carbonates, au cours de l'épisode 5. L'anhydrite estremplacée par de la dolomite, s'il y a assez de Mg+2 en solution (équation 3). Dansle cas contraire, ou suite àun appauvrissement en magnésium des solutions conséquent à laformation de dolomite, il y aura formationde calcite (équation 4). La réduction des sulfates pourrait également expliquer l'épisode restreint de sulfatisation (épisode 4) observé dans les dolomies de Beauhamois. Eneffet, une oxydation locale du H2S libéré et mobilisé pourrait

êtreà l'origine de la formationd'anhydrite tardive,bien qu'ellepuisse également résultée d'une mise en solutionsuivied'unereprécipitation.

Facteurs contrôlant la dédolomitisation et le type de remplacement

Leremplacement de dolomite par de la calciteest un phénomène de plus en plus fréquemment reconnu dans les carbonates. Les chercheurs s'étant intéressés à la question s'entendent pour faireintervenirdes solutions avecun rapport Ca/Mg élevé dans le processus de dédolomitisation (Evamy, 1967; DeGroot, 1967; Baker et Kastner, 1981). Des solutions avec un tel rapport peuvent être obtenuessuite à une dissolution de sulfatesévaporitiques (Evamy, 1963; Shearman et al., 1961; Folkman, 1969), ou peuvent dériver de solutions météoriques dans des environnements de surface ou de sous-surface (Goldberg, 1967; Braun et Friedman, 1970; Chafetz, 1972). Ces solutions peuvent aussi dériver de fluides diagénétiques modifiés lors de l'enfouissement (Budai et al., 1984), comme c'est possiblement le cas pourles dolomies de Beauharnois. En effet, le remplacement des sulfates par des carbonates (épisode 5) pourrait contribuer à modifierla composition des fluides diagénétiques susceptibles d'êtreà l'originede l'épisode de dédolomitisation.

Pour obtenir un rapport Ca/Mg élevé, la quantité de Ca+2 en solution doit augmenter ou, au contraire, le nombre d'ions Mg+2doit diminuer. Le remplacement d'anhydrite parde la dolomite est un mécanisme susceptibled'agir en ce sens. L'équation 3 montre que le remplacement de sulfates par ce carbonate est responsable de la capture d'ions Mg+2 et éventuellement de la libération de Ca+2. Ces échanges modifient vraisemblablement la composition des eaux interstitielles dans le sensdésiré.

Dans lesdolomies de Beauharnois,lesobservations pétrographiques ont démontré que la phase précoce de dolomite (coeur du rhomboèdre) est pluspropiceau remplacement par lacalcite, que

la phase tardive sous forme d'excroissance limpide (type 1, fig. 10). Lesdolomites calciques non-stochiométriques (Katz, 1968) et les dolomites riches en fer, métastables sous des conditions diagénétiques oxydantes (Katz, 1971; Al-Hashimi et Hemingway, 1973; Frank,

1981), seraient les plus susceptibles d'être remplacéespar de la calcite. Cependant, les tests de coloration auferricyanure de potassium effectués surles dolomies étudiées n'ont pu mettre en évidence, dans les cristaux de dolomite, des zones plusrichesen fer, éventuellement sensibles à ladédolomitisation. De plus, il faudrait entreprendre des analyses quantitativespourdéterminer si cette phase précoce est effectivement plus riche en Ca+2 ou en Fe+2 que la phase tardive limpide. Une métastabilité en surface de la dolomiteriche en ferreste à démontrer, le contexte suggérantplutôtunedédolomitisation lors de l'enfouissement.

La grande densité d'inclusions dans les phases précoces des cristaux de dolomite estaussi un facteur susceptible d'affaiblir le réseau des dolomites et de les rendre sensibles à la dédolomitisation. Ce facteur, combiné éventuellement à un excès de calcium dans les dolomites précoces, pourrait expliquer pourquoi le coeur des rhomboèdres estplus facilement dédolomitisé que la phasetardive limpide(type 1, remplacement intracristallin). En ce qui concerne lacalcite de type 2 (fig. 11: remplacement intercristallin), nous croyons que lacalcite microsparitique a possiblement remplacé de petits cristaux de dolomite composés essentiellement de la même phase précoce, dite "instable".

Enfin, lesplages irrégulièresde calcite sparitiquecontenantdes rhomboèdres de dolomite intacts ou partiellement remplacés (fig. 13) représentent possiblement un stade plus intensif de dédolomitisation. Les analyses isotopiques (C et O) de ces carbonates montrent des affinités avec celles des types 1 et 2, lapétrographie suggérant un remplacement plus intensif, laissant descristaux de dolomite (réfractaires àla dédolomitisation) flottantsdansla calcite. Cette calcite estappeléequelque fois calcite à texture poecilitique (LandetPrezbindowski, 1981).

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