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Les poches résiduelles après traitement des parodontites sévères ne signifient pas l’extraction des dents atteintes, mais sont une réalité clinique où ces poches peuvent être maintenues au fil des suivis réguliers et fréquents, augmentant ainsi la survie de ces dents parfois à pronostic réservé. Même si cela requiert une quantité considérable de temps de traitement par les professionnels de la santé buccale tels que les hygiénistes dentaires et/ou dentistes, une étude a recensé 704 poches résiduelles avec une profondeur de sondage > 4 mm comptées à la fin du traitement actif de la maladie parodontale dans une cohorte de 172 patients, soit 4.1 poches par patient en moyenne (Matuliene et al., 2008). Après environ 11 ans de suivi parodontal, on compte un total de 959 poches, soit 5.4 poches par patient, toujours suivies au sein du maintien parodontal : des dents fonctionnelles contribuant à la mastication et à l’amélioration de la qualité de vie quotidienne de chaque patient dans un système de maintien régulier (Matuliene et al., 2008).

Plusieurs études cliniques ont démontré que l’ablation répétée de dépôts bactériens réduit l’inflammation et augmente la fermeté du tissu parodontal (Mombelli, 2005). Les résultats de notre étude présentée au sein de cette thèse ci-présente sont en ligne avec la littérature scientifique concernant le maintien parodontal après traitement de parodontites sévères, ainsi qu’en accord avec trois études de design similaires, publiées auparavant par notre division. Pour la première de ces trois études, il a été affirmé que la plaque bactérienne nouvellement formée peut aussi être éliminée grâce à « l’aéro-polissage », une technologie capable de nettoyer ou polir la surface dentaire grâce à un jet d’air-comprimé contenant une poudre abrasive (Petersilka et al., 2003). En utilisant un agent moyennement ou peu abrasif ainsi qu’un embout spécial capable d’entrer dans une poche parodontale, il est possible d’enlever le biofilm sous-gingival de la surface radiculaire des poches résiduelles. L’innocuité, l’acceptation de la part des patients ainsi que les effets microbiologiques à court terme (7 jours) de cette méthode ont été évalués pour la première fois par notre groupe chez 50 patients avec des poches résiduelles d’une profondeur > 4 mm, par le biais d’un nouvel embout spécial qui a permis la projection sous-gingivale d’un jet d’air, poudre et eau sur les surfaces radiculaires (Moëne et al., 2010). Aucun effet secondaire n’a été recensé chez aucun des patients inclus. Selon l’échelle visuelle analogue présentée aux patients, ces derniers ont qualifié ce traitement d’être significativement moins douloureux/inconfortable comparé à l’instrumentation manuelle

(p>0.001). Le clinicien a traité ces poches en moins de temps grâce à l’aéro-polissage, tandis que le traitement par détartreur ultrasonique a davantage réduit le saignement au sondage en comparaison à l’aéro-polissage. Il n’y a pas eu de différences statistiquement significatives en ce qui concerne le nombre total des 6 parodontopathogènes du microbiome sous-gingival récoltés des sites traités par ultrasons ou par aéro-polissage. Une étude split-mouth de deux mois chez 20 patients en maintien parodontal a confirmé ces résultats cliniques, sans différences notables des issus cliniques et microbiologiques entre aéro-polissage sous-gingival et débridement ultrasonique (Wennstrom et al., 2011). Ces dernières études citées ci-dessus ont évalué une application unique d’aéro-polissage et ainsi, les bénéfices de cette intervention n’ont pu être appréciés qu’à court terme.

Afin de déterminer les effets cliniques et microbiologiques à long terme, notre groupe de l’Université de Genève, Division de Parodontologie, a conduit une deuxième étude afin d’évaluer le bénéfice d’aéro-polissage sous-gingival répété chez des patients en maintien parodontal, ayant des poches résiduelles d’une profondeur > 4 mm sur une période d’une année. Les profondeurs des poches traitées ont été réduites de manière semblable selon les deux protocoles de soins (aéro-polissage sous-gingival vs. débridement ultrasonique sous-gingival), sans différence statistiquement significative entre les deux groupes (Müller et al., 2014).

La troisième étude est une étude clinique randomisée de 6 mois qui a évalué le bénéfice de la thérapie photo-dynamique en plus du débridement sous-gingival par ultrasons, en une ou deux applications sur l’intervalle d’une semaine, chez des patients précédemment traités pour parodontites sévères et ayant des poches résiduelles d’une profondeur > 4 mm (Müller Campanile et al., 2015).

Rappelons que l’hypothèse de cette étude se basait sur les effets bactéricides et de détoxification alloués à la thérapie photo-dynamique, qui était suggérée être bénéfique dans le traitement mécanique de maintien parodontal (Wilson et al., 1993). En effet, la thérapie photo-dynamique est efficace grâce à une substance photo-active appliquée, qui se lie aux cellules cibles et qui peut être activée par exposition lumineuse à une longueur d’onde précise et adéquate (Wilson, 1994). Ainsi, des radicaux libres d’oxygène, ayant un effet bactéricide sur les bactéries et leurs produits, sont libérés. Les bactéries Gram-positives sont les plus touchées par cette thérapie, or, en choisissant la bonne substance photo-active ainsi que la longueur d’onde appropriée, il est aussi possible de cibler et tuer les bactéries Gram-négatives parodontales (Kömerik et al., 2003). En comparant les trois modalités de traitement effectués dans l’étude (Müller Campanile et al., 2015), la seule différence

traitement ultrasonique avec laser et thérapie photo-dynamique en une ou deux fois, comparés aux traitements par ultrasons sans laser et agent photo-active. Toutefois, les résultats entre les trois modalités n’étaient plus statistiquement significatifs 6 mois après traitements. Dans le contexte du maintien parodontal, les ultrasons restent donc l’option la plus fiable et la moins coûteuse à long terme.

En examinant les résultats de toutes ces études précédentes en comparaison à notre travail présenté dans cette thèse, il est important de noter que tous les sites suivis ont été traités de nombreuses fois auparavant au sein du traitement actif de la maladie parodontale, de manière non-chirurgicale, puis avec ou sans une approche chirurgicale, et par la suite, ces mêmes sites ont été exposés plusieurs fois au débridement mécanique dans le contexte du maintien parodontal. Il est donc certainement plus difficile d’obtenir de meilleurs résultats cliniques sur de telles lésions résiduelles, en comparaison avec des poches précédemment non-traitées.

De plus, le tabagisme de certains patients inclus a sûrement joué un rôle de facteur de risque environnemental dans l’étiologie et la progression de la maladie parodontale (Palmer et al., 2005 ; Johnson and Hill, 2004), puisqu’il est reconnu que le tabac est un facteur de risque majeur pour la parodontite (Tomar and Asma, 2000). Il a été aussi montré que la quantité de cigarettes consommées influence les résultats du traitement parodontal (Kaldahl et al., 1996) et qu’il faut s’attendre à moins de réduction des profondeurs de poches comparativement à un non-fumeur sur le long terme (Bergstrom, 2004; Bergstrom et al., 2000). Dans toutes nos études discutées ci-dessus, il est important de comprendre que selon la pratique courante dans le maintien parodontal, une décision de traitement était prise pour chaque site individuel lors de chaque visite, soit un traitement selon le protocole prédéfini pour chaque poche d’une profondeur > 4 mm.

D’autre part, les études sur la reproductibilité du sondage parodontal ont montré qu’une déviation dans la profondeur de sondage mesurée de ± 1 mm doit être attendue dans environ un tiers des poches qui sont re-sondées une à trois semaines plus tard (Isidor et al., 1984; Mombelli et al., 1989).

Cela signifie que quelques sites avec une profondeur de sondage initiale de 4 à 5 mm n’ont probablement pu être traités qu’à la deuxième, troisième ou quatrième séance de maintien parodontal.

La diminution des profondeurs de poches sévères d’environ 1 mm, sans induire de récession supplémentaire, correspond favorablement aux résultats obtenus par aéro-polissage, thérapie photodynamique et laser mentionnés ci-dessus, de même que par détartreur ultrasonique conventionnel durant plus de 11 ans de maintien parodontal (Matuliene et al., 2008).

Afin d’avoir un effet remarquablement soutenu sur une longue période, il est indispensable que l’agent chimique utilisé, quel qu’il soit, reste dans la poche parodontale à une concentration adéquate durant un certain temps. Théoriquement, une activité antibactérienne prolongée dans le temps peut être attendue si l’agent chimique pouvait se lier à la surface radiculaire, d’où un système de relargage pourrait libérer l’agent sous sa forme active. Cela a effectivement été observé dans les concentrations salivaires de Chlorhexidine après rinçage buccal avec de la Chlorhexidine (Bonesvoll and Gjermo, 1978). Cependant, les effets potentiels de 5 secondes d’aéro-polissage, de 60 secondes de bleu de méthylène suivi de laser, ou bien de 30 secondes d’hypochlorite de sodium/acides-aminés à basse concentration suivi d’une deuxième application après traitement, ne peuvent créer un réservoir d’agent antimicrobien de taille significative pour obtenir un effet soutenu dans chaque poche parodontale. Par contre, il a été montré qu’avec un programme de maintien régulier tous les 3 à 4 mois, il était possible par débridement sous-gingival et instructions d’hygiène de maintenir de manière relativement stable la situation osseuse et le niveau d’attache sur de longues périodes (Rosling et al., 2001).

C’est pourquoi, un bref débridement sous-gingival méticuleux et fréquent à chaque maintien parodontal, avec ou sans agent antimicrobien, est efficace et suffit pour préserver les dents et leur santé parodontale pendant de nombreuses années.

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