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5. ETUDE DE CAS

5.4 Discussion autour des interviews

En étudiant ces interviews, nous relevons tout d’abord que les places où une l’ambiance est perçue comme étant bonne, positive ou agréable par les individus, sont effectivement des lieux à forte sociabilité. Ainsi, cela soutiendrait l’idée que l’ambiance a un effet sur la sociabilité des individus.

Nous relevons ensuite que certains facteurs contribuant à instaurer une ambiance positive sont communs chez tous les quatre individus : le soleil est un facteur qui est cité dans tous les interviews comme contribuant à un ressenti positif et agréable de la place. Cela va de pair avec les observations théoriques de Levitte, développées dans un des chapitres précédents, affirmant qu’une journée ensoleillée peut évoquer des impressions d’avantage positives.

Nous relevons également que les termes « espacé » ou « aéré » reviennent dans trois des quatre interviews. Ainsi, l’étendue d’une place et son degré d’ouverture jouent un rôle dans

43 l’ambiance. La présence d’un espace relativement espacé et d’une morphologie ouverte semble donc contribuer à instaurer une ambiance confortable, tranquille et calme à la place.

Le facteur du paysage naturel est également mentionné comme étant un facteur contribuant à instaurer une bonne ambiance, voire à transporter l’individu dans un monde imaginaire. Nous constatons cela notamment au Bourg-de-Four, où la rue donnant accès à la vue sur le Salève est particulièrement appréciée par le monsieur interviewé, qui la considère comme un de ses éléments préférés de la place, en dehors de sa composante humaine, parce qu’elle fait ressurgir chez lui un imaginaire historique attrayant.

Nous remarquons également que les deux personnes interviewées au Bourg-de-Four mettent en valeur la situation topographique « en hauteur » de la place, qui lui confère un attrait particulier. Ainsi, la topographie en élévation contribue également à instaurer du charme à l’ambiance de la place.

Nous constatons de plus que le mobilier urbain d’une place peut contribuer positivement à son ambiance. Au Bourg-du-Four par exemple, les terrasses sont des composantes incontournables de l’ambiance, parce qu’elles confèrent une certaine convivialité invitante à la place, et permettent le regroupement des individus. Le même phénomène est constaté à Simon-Goulart, où les bancs et les tables en bois jouent le même rôle et sont particulièrement appréciés par les personnes interviewées, celles-ci mentionnant que ces éléments contribuent à instaurer un ressenti positif et une ambiance de confort et de convivialité.

Nous remarquons que l’histoire d’une place est aussi un facteur contribuant à y instaurer une ambiance charmante pour certaines personnes, parce qu’elle confère une certaine richesse unique à l’endroit. Néanmoins, ce facteur n’est mentionné que par une seule des deux personnes interviewées au Bourg-de-Four. Cela pourrait être expliqué par le fait qu’il s’agit d’une personne ayant grandi à Genève. Ce dernier partageant d’avantage de valeurs et de références culturelles et symboliques avec le Bourg-de-Four, il se pourrait que l’histoire serait un facteur plus prépondérant dans son interprétation personnelle de l’ambiance, contrairement à la deuxième personne interviewée sur Bourg-de-Four, qui ne vit à Genève que depuis 15 ans.

Nous relevons finalement un facteur incontournable qui revient dans toutes les interviews en tant qu’élément contribuant à la richesse, au dynamisme et à la particularité d’une ambiance : il s’agit du facteur humain, de la présence humaine sur la place. Parmi tous les facteurs mentionnés précédemment, ce facteur semble avoir une influence prépondérante dans l’interprétation de l’ambiance : les personnes affirment que la présence humaine affecte leur perception de l’ambiance, que ce soit de manière positive ou négative. Dans notre étude de cas, la présence humaine évoque le plus souvent la perception d’une ambiance de convivialité. Nous notons que cette composante humaine de l’ambiance semble toujours avoir un effet sur le comportement des individus dans la place : l’étudiante affirme que la présence des autres personnes l’attire à Simon-Goulart, et rend l’endroit convivial. De son côté, l’employée rencontrée au même endroit mentionne que la présence d’autres travailleurs contribue à rendre l’ambiance charmante. Le monsieur interviewé à Bourg-de-Four nous explique qu’il adore être dans une terrasse, parce qu’il peut observer les personnes et entendre le brouhaha des discussions. Finalement, la femme au foyer nous explique qu’elle se rend également à la terrasse parce qu’elle apprécie la présence d’autres individus. La présence d’artistes de rue est également un facteur humain qui contribue à attirer la foule et instaurer une ambiance dynamique et intrigante. De ce fait, nous observons chez tous ces individus que la présence humaine est un facteur incontournable qui joue un grand rôle dans le ressenti d’une ambiance.

44 Même si une grande diversité de facteurs entre en jeu pour constituer une ambiance, et même si l’ambiance est interprétée de manière subjective chez chacun, toutes les personnes interviewées mentionnent le facteur humain en tant que composante de l’ambiance, et posent un accent particulier dessus. Nous constatons qu’une importance particulière est apportée à la présence humaine par les individus. Ces derniers voient généralement la présence d’autres individus comme étant un facteur positif, contribuant généralement à rendre une ambiance positive, agréable et conviviale. Ainsi, la présence d’individus sur les espaces publics contribue fortement à influencer l’ambiance de cet espace.

L’étude de cas nous montre également que l’ambiance influence le comportement de sociabilité des individus à travers le processus interprétatif de l’ambiance (perception-interprétation-comportement), que nous avons expliqué précédemment dans ce travail. Ainsi, l’étude de cas nous démontre qu’une ambiance perçue comme étant bonne, agréable ou positive, motive d’avantage un comportement de sociabilité des individus.

En guise d’illustration, nous faisons référence au Bourg-de-Four, où l’ambiance agréable et conviviale pousse les individus à engager des conversations avec de parfaits étrangers, comme l’a expérimenté la mère au foyer que nous avons interviewé. Nous observons cette même influence de l’ambiance à Simon-Goulart, où l’employée que nous avons interviewé nous raconte qu’elle a tendance à éviter la place de Simon-Goulard en fin d’après-midi, parce qu’il y règne une ambiance négative à cause de la présence des groupes de jeunes. Ainsi, le comportement d’ « anti-sociabilité » qu’elle adopte est influencé par l’ambiance qu’elle perçoit.

Ainsi, nous pouvons à travers cette étude de cas vérifier notre hypothèse que l’ambiance

influence effectivement le comportement de sociabilité, et ce à travers le processus

d’interprétation de l’ambiance que nous avons expliqué dans la première partie théorique du travail.

Néanmoins, nous constatons à travers l’étude de cas que ce processus ne se fait pas à sens unique. Effectivement, l’ambiance n’influence pas simplement le comportement de sociabilité. L’ambiance est également influencée par le comportement de sociabilité. Les propos des personnes interviewées nous le démontrent, lorsque par exemple les individus mentionnent qu’ils perçoivent une ambiance conviviale et attrayante dans une place, parce qu’il y a du monde dans la place, ce qui montre donc que les personnes contribuent à l’ambiance.

Ainsi, nous constatons que la relation entre l’ambiance et la sociabilité dans un espace public ne s’effectue pas à sens unique, mais elle s’effectue dans un processus cyclique, où l’ambiance influence la sociabilité, qui influence l’ambiance en retour.

Ainsi, une bonne ambiance attire d’avantage de personnes, ce qui contribue à d’avantage de sociabilité. Cette sociabilité accrue contribue à améliorer l’ambiance perçue dans un espace public. Une bonne ambiance attire d’avantage de personnes dans cet espace, et ces personnes contribuent à leur tour à d’avantage de sociabilité, qui contribuera à améliorer la qualité de l’ambiance, qui attirera encore plus de personnes, et ainsi de suite, dans un cycle de d’influence mutuelle. Ainsi, nous concluons que l’ambiance et la sociabilité s’inscrivent dans un processus de co-production dans l’espace public, phénomène que nous illustrons dans le schéma ci-après :

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Processus de co-production entre l’ambiance et la sociabilité, dans le cadre de l’espace public

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