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4.1) Retour sur les résultats

De multiples associations qui pourraient potentiellement expliquer l’implication d’APOE4 dans la MA ont été établies par le passé chez l’animal et l’humain. De plus, l’administration d’insuline possède des bénéfices thérapeutiques chez les patients atteints de la MA, ce qui n’est toutefois pas le cas chez ceux qui sont de génotype APOE4. Les résultats obtenus suite à notre étude, présentés au Chapitre 2, ont permis de déceler une altération de la réponse cérébrale à l’insuline dans le cerveau des souris transgéniques ayant subi un remplacement du gène APOE murin par un allèle APOE4 humain. Cette altération se traduit par une activation augmentée de la voie de signalisation PI3K/AKT chez les souris APOE4 en comparaison aux souris APOE3.

Dans le cadre de cette étude, j’ai réalisé les ITT, les tests de comportement, le sacrifice des animaux ainsi que les expérimentations post-mortem (extraction protéique, technique de déplétion capillaire et immunobuvardages de type Western). J’ai également fait l’analyse statistique des résultats obtenus et rédigé les premières versions de l’article Altered cerebral insulin response in transgenic mice expressing

the epsilon-4 allele of human apolipoprotein E gene, présenté au Chapitre 2.

4.1.1) Effet de l’insuline sur le comportement

L’insuline étant impliquée dans l’amélioration de la mémoire de reconnaissance, la formation et le remodelage des synapses (Chiu et al. 2008 ; Marks et al. 2009 ; Nisticò et al. 2012 ; Vandal et al. 2014b), nous avons vérifié l’effet d’une injection d’insuline sur l’anxiété, l’activité locomotrice ainsi que les capacités mnésiques des souris APOE3 et APOE4. Nous n’avons détecté aucun effet de l’insuline sur les paramètres comportementaux étudiés. Ces résultats ne vont pas dans le même sens que les conclusions tirées d’une étude précédente, réalisée par notre équipe de recherche (Vandal et al. 2014b). Toutefois, il est difficile de comparer les deux études puisque cette dernière a été réalisée avec un modèle animal différent, les souris 3xTg-AD, ce qui peut expliquer la différence de résultats. De plus, dans l’étude de Vandal et al., les animaux parmi lesquels un effet de l’insuline a été détecté sur la mémoire, étaient nourris avec une diète riche en gras, tandis que ceux de la présente étude étaient sur diète contrôle. Nos résultats indiquent toutefois que l’index de reconnaissance des souris APOE4 est approximativement 15% moindre que celui des APOE3 lorsque l’on regroupe les souris injectées au salin et à l’insuline, ce qui suggère l’existence

d’une altération dans la mémoire de reconnaissance chez les souris APOE4. Ce résultat confirme les dysfonctions mnésiques rapportées dans la littérature chez les souris APOE4 (Raber et al. 1998 ; Bour et al. 2008 ; Siegel et al. 2012) de même que chez les humains de ce génotype (Baxter et al. 2003 ; Scarmeas et al. 2005 ; Greenwood et al. 2005b ; Caselli et al. 2009 ; Liu et al. 2010).

Concernant les concentrations corticales d’apoE humaine, aucune différence n’a été observée entre les souris APOE3 et APOE4 dans la fraction protéique soluble. Ce résultat ne concorde pas avec une étude précédemment réalisée par notre équipe de recherche, qui montrait une baisse d’apoE humaine chez les souris APOE4 pour cette fraction (Vandal et al. 2014a). Afin d’expliquer cette différence, il est plausible d’évoquer la variabilité des résultats d’une étude à l’autre. En effet, bien que les résultats de la présente étude soient différents de ceux obtenus par Vandal et al., ils vont dans le même sens que ceux d’études menées par d’autres groupes de recherche (Sullivan et al. 2011; Youmans et al. 2012).

4.1.2) Réponse à l’insuline

4.1.2.1) En périphérie

Dans un premier temps, l’ITT effectué chez les animaux a révélé que le génotype APOE des souris n’a pas d’influence sur la sensibilité à l’insuline en périphérie. En effet, les deux génotypes APOE ont montré des réponses similaires à l’insuline au niveau périphérique. Dans un deuxième temps, nous avons la certitude que l’injection d’insuline précédant le sacrifice a été administrée avec succès, puisque la dose injectée stimule efficacement la signalisation (White et al. 2010) et que des augmentations de la phosphorylation de la protéine kinase B (AKT) à la sérine 473 et de la glycogène synthase kinase 3-bêta (GSK3β) à la sérine 9 ont été observées dans le muscle gastrocnémien des souris APOE3 et APOE4, comparativement aux groupes injectés au salin.

4.1.2.2) Au cerveau

Suivant l’injection d’insuline, nous avons étudié la signalisation de cette hormone au cerveau via différentes voies. La voie PI3K/AKT est amorcée par le recrutement, puis l’activation de la phosphatidylinositol 3- kinase (PI3K), qui elle entraîne l’activation d’AKT (Whiteman et al. 2002). Cette dernière phosphoryle GSK3β à la sérine 9, menant à son inhibition (Cross et al. 1995). En étudiant la voie PI3K/AKT, nous avons trouvé que le ratio pAKT/AKT (pSer473) dans le cortex pariéto-temporal des souris APOE4 était approximativement 2,6 fois plus élevé que celui des APOE3, lorsque normalisé avec les valeurs des

animaux injectés au salin. Cette différence n’a pas été observée avec les protéines d’autres voies de signalisation, en aval d’AKT, qui étaient à l’étude : GSK3β (pSer9), protéine kinase activée par mitogène (MAPK) (pThr202, pTyr204, pThr185, pTyr187) et protéine kinase c-Jun N-terminal (JNK) (pThr183, pTyr185). De plus, l’insuline a augmenté le ratio cortical pAKT/AKT (pSer473) de 60% chez les souris

APOE4, lorsque les données ont été normalisées à celles des souris injectées au salin. Toutefois, puisque

le rapport pAKT/AKT des animaux contrôles, injectés au salin, est défavorable pour les souris APOE4, il est important de mentionner la possibilité que cette augmentation du rapport, observée suite à l’injection d’insuline, soit due à ce déséquilibre initial. Nous avons aussi observé que l’insuline a diminué de 52% le ratio pJNK/JNK (pThr183, pTyr185) dans le cortex des souris APOE3, lorsque les données ont été normalisées à celles des souris injectées au salin. Ce résultat suggère que la cascade des JNKs/c-Jun est inhibée spécifiquement chez les porteurs d’APOE3 suite à l’injection d’insuline.

Nous avons également vérifié les concentrations corticales de deux phosphatases impliquées dans le processus de déphosphorylation de la protéine tau : la sous-unité catalytique de la protéine phosphatase 2A (PP2Ac) et la protéine phosphatase 2B (PP2B). Aucun effet de l’insuline sur la concentration de ces protéines n’a été détecté. Bref, l’ensemble de ces résultats montre que la réponse cérébrale à l’insuline diffère entre les souris APOE3 et APOE4 et que la cascade cellulaire d’AKT est davantage activée dans le cortex des souris APOE4 que dans celui des APOE3.

Au niveau des cellules endothéliales des capillaires cérébraux, aucune différence dans les voies de signalisation de l’insuline étudiées, soit PI3K/AKT et GSK3β, n’a été rapportée. Nous avons également vérifié la concentration de récepteurs à l’insuline dans ces cellules et aucun effet n’a été détecté suite à l’injection de l’hormone. Ces résultats suggèrent donc qu’il n’y a pas de différence dans la signalisation de l’insuline au niveau des cellules endothéliales entre les souris APOE3 et APOE4.

4.1.3) Effet de l’insuline sur la phosphorylation de la protéine tau

Puisqu’une accumulation accrue de tau hyperphosphorylé a été rapportée dans les neurones hippocampiques de souris APOE4 dans une étude précédente (Liraz et al. 2013) et que la pathologie tau semble impliquée dans l’augmentation de la part de risque associée au génotype APOE dans la MA chez les femmes (Altmann et al. 2014), nous avons évalué la concentration de tau phosphorylé à différents sites

202, d’approximativement 44% par rapport aux souris APOE3, a été détectée chez les souris APOE4. Les résultats étaient similaires pour les autres sites de phosphorylation de tau (pSer396, pSer404 et pThr181), sans toutefois atteindre la significativité. Ce résultat est en accord avec des études précédentes montrant une phosphorylation augmentée de la protéine tau à la sérine 202 suivant l’administration d’insuline (Freude et al. 2005) ou de pioglitazone, un sensibilisateur à l’insuline employé dans le traitement du DT2, chez les souris APOE4 (To et al. 2011). L’augmentation de la réponse cérébrale à l’insuline chez les souris APOE4 pourrait donc être associée avec l’hyperphosphorylation de tau, un marqueur neuropathologique de la MA.

4.1.4) Effet de l’insuline sur les concentrations de RAGE et LRP1

Comme le génotype APOE4 a précédemment été associé avec une accumulation d’Aβ au cerveau (Drzezga et al. 2009) ainsi qu’avec une clairance déficiente de ce peptide (Deane et al. 2008 ; Castellano et al. 2011), nous avons voulu vérifier l’effet de l’insuline sur la clairance d’Aβ en évaluant les concentrations corticales de RAGE et de LRP1 (low density lipoprotein receptor-related protein 1), protéines impliquées respectivement dans l’influx et l’efflux d’Aβ au cerveau (Deane et al. 2003 ; Zlokovic et al. 2010 ; Deane et al. 2012), chez les souris APOE3 et APOE4. Aucun effet de l’insuline, ni du génotype APOE sur ces protéines n’a été observé dans le cortex des souris. Nos résultats suggèrent donc que l’insuline et le génotype APOE n’ont pas d’effet sur le transport d’Aβ au niveau du cortex des souris APOE3 et APOE4. Nous avons aussi vérifié l’effet de l’insuline sur les concentrations de RAGE et de LRP1 au niveau des cellules endothéliales qui tapissent les capillaires cérébraux de la BHE à partir d’un hémisphère cérébral. Puisque le cortex regroupe plusieurs types cellulaires différents, la concentration des capillaires nous permet d’étudier ces protéines spécifiquement au niveau des cellules endothéliales. Nous avons observé que l’insuline a réduit la concentration de RAGE chez les souris APOE3 et APOE4, ce qui suggère que cette hormone pourrait intervenir dans la réduction du transport d’Aβ au cerveau et, par conséquent influencer son accumulation cérébrale à la baisse. Ce résultat doit toutefois être confirmé puisqu’il y avait une importante variation entre les différents échantillons et que nous disposions de peu d’animaux dans chacun des groupes. Dans cette optique, il serait intéressant d’étudier l’effet de l’insuline sur les transporteurs d’Aβ au niveau des capillaires cérébraux des souris APOE3 et APOE4 à plus grande échelle.

4.2) Interprétation des résultats

De précédentes études cliniques montrent l’influence du génotype APOE sur l’efficacité de certains traitements dans la MA (Farlow et al. 1996 ; Sparks et al. 2006 ; Choi et al. 2008 ; Kennelly et al. 2012 ; Loeffler 2013 ; Relkin 2013 ; Wang et al. 2014). En effet, les immunoglobulines intraveineuses (IgIV) (Loeffler 2013 ; Relkin 2013), des inhibiteurs de la cholinestérase comme le donépézil (Choi et al. 2008) ainsi que des hypocholestérolémiants comme l’atorvastatine (Sparks et al. 2006), sont des exemples d’interventions dont la valeur thérapeutique varie en fonction du génotype APOE. L’administration d’insuline par voie intranasale ne fait pas exception puisque les patients APOE4, contrairement aux non-porteurs, ne retirent pas de bénéfices de cette approche (Reger et al. 2006 ; Reger et al. 2008 ; Claxton et al. 2013). L’absence d’amélioration cognitive chez les porteurs d’APOE4 suite à ce traitement suggère un état de résistance à l’insuline chez ces patients (Elosua et al. 2003 ; Claxton et al. 2013). Toutefois, les résultats obtenus dans le cadre de notre étude proposent plutôt une augmentation de la réponse cérébrale à l’insuline chez les souris de génotype APOE4 comparativement à celle de génotype APOE3, du moins en ce qui a trait à la voie PI3K/AKT. Cette réponse amplifiée suite à l’injection d’insuline chez les souris

APOE4 était accompagnée d’une augmentation de la phosphorylation de tau à la sérine 202, suggérant que

l’activation de la signalisation de l’insuline mène à la phosphorylation de tau chez les souris APOE4.

4.2.1) Augmentation de la réponse cérébrale à l’insuline chez les

souris APOE4

À notre connaissance, la résistance cérébrale à l’insuline n’a jamais été étudiée chez les souris APOE auparavant. Nos résultats ne reflètent pas entièrement l’association entre la MA et la résistance à l’insuline qui a été établie précédemment chez les souris (Kohjima et al. 2010 ; Mody et al. 2011) et chez l’humain (Kuusisto et al. 1997 ; Steen et al. 2005). En effet, en étudiant la voie PI3K/AKT, nous avons détecté une réponse cellulaire à l’insuline augmentée dans le cerveau des souris APOE4 suivant l’injection d’insuline. Bien que nous avions émis comme hypothèse l’existence d’une différence entre la réponse cérébrale à l’insuline chez les souris APOE3 et APOE4, nous nous attendions davantage à une insulinorésistance ou à une réponse diminuée chez les souris APOE4, étant donné que ce génotype constitue le principal facteur de risque génétique de la forme sporadique de la MA. Notre étude ne permet pas d’élucider les mécanismes impliqués dans cette altération de la réponse cérébrale à l’insuline, mais suggère que la

résistance à l’insuline n’est pas impliquée dans l’insuccès du traitement à l’insuline chez les patients

APOE4 atteints de la MA.

4.2.2) L’augmentation de la phosphorylation de tau chez les

souris APOE4 pourrait contribuer à la progression d’une

pathologie s’apparentant à la MA

En étudiant l’effet du génotype APOE sur les marqueurs neuropathologiques de la MA, nous avons détecté un effet plus prononcé de l’injection d’insuline sur la phosphorylation de la protéine tau chez les souris

APOE4 que chez les APOE3. En effet, la concentration de tau phosphorylé à la sérine 202 suite à l’injection

d’insuline était plus élevée dans le cortex des souris APOE4 que dans celui des APOE3. Puisque l’hyperphosphorylation de cette protéine dans le cortex est fortement associée à l’expression clinique de la MA (Arriagada et al. 1992 ; Tremblay et al. 2007), cette phosphorylation plus importante de tau pourrait potentiellement promouvoir le développement d’une pathologie s’apparentant aux dégénérescences neurofibrillaires présentes dans la MA chez les souris APOE4.

4.2.3) L’altération de la réponse cérébrale à l’insuline pourrait

contribuer à augmenter la phosphorylation de tau chez les souris

APOE4

La suractivation de la voie AKT suivant l’injection d’insuline chez les souris APOE4 comparativement aux

APOE3 pourrait être impliquée dans l’hyperphosphorylation de la protéine tau via différents mécanismes.

Des travaux antérieurs ont montré que la forme activée d’AKT, en plus d’activer la voie de signalisation GSK3β (Cross et al. 1995), était en mesure de phosphoryler la protéine tau à différents sites, dont la thréonine 212 et la sérine 214 (Ksiezak-Reding et al. 2003 ; Kyoung Pyo et al. 2004). Le traitement à l’insuline a été précédemment associé à un métabolisme du glucose et à une température corporelle plus faibles et ces deux paramètres corrèlent avec la phosphorylation de tau chez les souris (Planel et al. 2004). À faible température, GSK3β tend à être inhibé en raison d’une augmentation de sa phosphorylation à la sérine 9, mais aucun changement dans l’activation des voies JNK et MAPK n’a été détecté dans cette étude (Planel et al. 2004). L’activation, suivant l’injection d’insuline, des kinases de la voie PI3K/AKT ciblant la protéine tau joue donc un rôle modéré dans la phosphorylation de tau comparativement à l’inhibition des phosphatases durant l’hypothermie (Planel et al. 2004). De plus, GSK3β est en mesure de réguler la phosphorylation de tau (Takashima et al. 1996), notamment en phosphorylant la sérine 202 de la protéine (Mandelkow et al. 1992 ; Ishiguro et al. 1995 ; Illenberger et al. 1998 ; Reynolds et al. 2000). Nos résultats

montrent une activation de la voie PI3K/AKT et une phosphorylation de tau, suivant l’injection d’insuline, plus importantes chez les souris APOE4 que chez les APOE3, ce qui est en accord avec l’implication des voies de signalisation de l’insuline dans la phosphorylation de tau rapportée dans la littérature, en particulier chez les souris APOE4. Des altérations dans la signalisation de l’insuline pourraient activer fortement la voie PI3K/AKT, menant à une augmentation de la phosphorylation de tau dans le cortex des souris APOE4 (Figure 9). Si tel est le cas, administrer un traitement d’insuline à des patients atteints de la MA de génotype

APOE4 n’est probablement pas recommandé et cette piste de recherche mérite d’être approfondie avant

d’entreprendre d’éventuelles études cliniques.

Figure 9 : Conséquences d’une signalisation cérébrale altérée de l’insuline chez les souris APOE4 (suite à une injection d’insuline). (PI3K = Phosphatidylinositol 3-kinase, AKT = Protéine kinase B, Ser = Sérine)

4.3) Limitations et perspectives

Notre étude comporte certaines limitations. D’abord, nous disposions d’un faible nombre d’animaux par groupe, particulièrement en ce qui a trait aux expérimentations de déplétion capillaire. Ensuite, les doses d’insuline utilisées ont été testées chez un autre modèle animal, en l’occurrence les souris 3xTg-AD. De ce fait, les doses ne sont pas nécessairement optimales pour les souris APOE utilisées dans notre étude. Enfin, le modèle animal choisi possède également ses propres limites. Bien que les souris APOE nous permettent d’étudier les effets des différents isoformes de l’APOE humain in vivo, sans aucune co-

expérimental (Sullivan et al. 1997). Premièrement, le nombre de copies du transgène peut varier considérablement entre des animaux de même génotype. Deuxièmement, il existe des différences marquées au niveau de l’expression des transgènes à différents emplacements chromosomiques. Troisièmement, la présence de protéines murines endogènes complexifie l’interprétation des résultats. En raison de ces sources de variabilité, intrinsèques aux animaux transgéniques, les comparaisons entre les différents isoformes d’APOE sont plus risquées (Sullivan et al. 1997). De ce fait, nos résultats ne sont pas nécessairement applicables à l’humain.

Pour une éventuelle suite du projet, il serait souhaitable d’augmenter le nombre d’animaux par groupe, surtout pour la technique de déplétion capillaire. De plus, afin de déterminer la dose optimale d’insuline à injecter aux souris APOE, il serait de mise de faire une étude à dose croissante d’insuline. Un protocole d’injections multiples pourrait également être envisagé. Il serait aussi intéressant de comparer le transport de l’insuline au cerveau en fonction du génotype APOE de ces souris par la technique de perfusion cérébrale in situ (PCIS) et de mesurer le taux d’insuline plasmatique des animaux en complément.

Afin de confirmer les résultats obtenus en ce qui concerne une réponse à l’insuline augmentée chez les souris APOE4 comparativement aux APOE3, il serait important d’étudier la voie PI3K/AKT en profondeur en évaluant la concentration d’autres protéines qui y sont reliées. D’autres voies impliquées dans la signalisation de l’insuline, comme celles de la pyruvate déshydrogénase kinase (PDK) (Chen et al. 2001) et de la cible mammalienne de la rapamycine (mTor) (Lee et al. 2008) mériteraient également d’être survolées afin de mieux comprendre la signalisation de cette hormone chez les souris APOE. Puisque nous avons étudié les transporteurs d’Aβ, c’est-à-dire RAGE et LRP1, il serait intéressant de compléter en dosant Aβ dans le cerveau des animaux par la méthode immuno-enzymatique enzyme-linked immunosorbent assay (ELISA). Également, il serait utile de vérifier la concentration de marqueurs de la clairance d’Aβ, tels que l’enzyme de dégradation de l’insuline (IDE) et la néprilysine (NEP).

Les expérimentations de notre étude pourraient également être réalisées chez d’autres modèles murins. Par exemple, les souris exprimant différents isoformes d’APOE dans les neurones ou les astrocytes (Jain et al. 2013) se prêteraient bien aux expériences précédemment énoncées. Il serait aussi pertinent d’étudier les mêmes paramètres chez les souris montrant une expression neuronale des fragments neurotoxiques d’APOE4 (Harris et al. 2003), afin de les comparer aux résultats obtenus avec les souris possédant un

allèle APOE4 humain. Une autre avenue serait de répéter l’étude chez des souris transgéniques pour d’autres gènes que l’APOE, comme les souris APP/PS1 ou 3xTg-AD, modèles murins de la MA.

Les possibilités d’expérimentations sont infinies et certaines d’entre elles pourraient constituer d’intéressants compléments à nos méthodes. Par exemple, l’électrophysiologie nous permettrait de vérifier l’intégrité des fonctions synaptiques des animaux et des techniques d’imagerie cérébrale, comme l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), nous permettraient de comparer l’activité cérébrale des souris en fonction de la nature de l’injection qu’elles reçoivent et de leur génotype APOE notamment. En alternative à l’insuline, il serait intriguant d’utiliser des agonistes ou différentes formulations de cette hormone comme l’insuline détémir, afin de comparer la réponse cérébrale des souris en fonction du produit qui leur est administré. De plus, en se basant sur les résultats que nous avons obtenus in vivo, il pourrait être intéressant d’entreprendre des études avec des systèmes de cultures cellulaires in vitro, afin d’étoffer nos connaissances sur les effets APOE-dépendants de l’insuline.

4.4) Conclusion

L’insuline est suggérée avoir un potentiel comme outil thérapeutique dans la MA. Plusieurs études cliniques se sont penchées sur l’effet de l’administration intranasale de cette hormone sur la cognition en fonction du génotype APOE (Reger et al. 2006 ; Reger et al. 2008 ; Claxton et al. 2013). Les données montrent dans leur ensemble que les porteurs d’APOE4 ne bénéficient pas d’un traitement à l’insuline, ce qui nécessite l’identification des mécanismes impliqués (Claxton et al. 2013). Comme le génotype APOE4 est prédominant dans la MA relativement à la population générale (Farrer et al. 1997), il est impératif de trouver pourquoi l’insuline n’améliore pas la condition de ces patients.

Les données de notre étude montrent que la voie de signalisation PI3K/AKT répond plus fortement à l’insuline chez les souris APOE4, se traduisant en une rapide augmentation de la phosphorylation de tau à la sérine 202 après une seule injection de cette hormone. À première vue, cette réponse amplifiée à l’insuline ne correspond pas entièrement à ce que rapporte la littérature, qui suggère que la résistance

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