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Diminution de la viscosité sur la silice amorphe épaisse

CHAPITRE 1 INTERACTION ION – MATIERE

2. Diminution de la viscosité sur la silice amorphe épaisse

Un deuxième effet nucléaire, induit par l’irradiation avec des ions, est une réduction de la viscosité. De telles observations ont été faites sous irradiation avec des ions légers (H et He) [Primak 1964] à température ambiante. Le même effet a été trouvé par Volkert et Polman après des irradiations avec du Si et Au à une énergie inférieure à 0.8 MeV [Volkert 1992].

2.I.B.b. - Effets électroniques

Le matériau cible peut aussi être affecté par les interactions inélastiques entre les ions incidents et les électrons du spécimen à irradier. Comme dans le cas des défauts nucléaires les défauts électroniques sont soit microscopiques, soit macroscopiques.

2.I.B.b.α. - Défauts microscopiques

Les interactions des rayonnements γ et électrons avec des cibles sont dominées par des processus électroniques, et la concentration des défauts produits est liée à l’énergie totale déposée dans le matériau. Concernant les défauts microscopiques, l’irradiation avec des ions lourds produit des défauts analogues à ceux induits par le rayonnement γ.

Il est bien connu que, le rayonnement γ induit des défauts de type centre E’ [Dooryhée 1987] . Les centres E’ produisent une bande d’absorption de 5.85 eV [Arnold 1959] . Dans le cas des irradiations avec des ions lourds de haute énergie, Dooryhée et al. [Dooryhée 1988] observent une deuxième raie dans le spectre RPE située dans le voisinage de la raie correspondante aux centres E’γ, observées dans les matériaux irradiés avec des γ. Celle-ci a été corrélée avec un fort dépôt d’énergie électronique localisé dans la trace de l’ion [Dooryhée 1988].

La création des défauts de type peroxyde a été mise en évidence avec des rayonnements γ, ainsi qu’avec des ions lourds. Dooryhée et al. [Dooryhée 1988] observent la création du radical peroxyde après des irradiations avec des ions de U, Xe, Kr, Ar, O à des énergies entre 16.5 et 93.7 MeV/u. L’efficacité de la création de ce type de défaut augmente avec la perte d’énergie électronique.

Les irradiations avec des ions de moyenne énergie (Cl et F à 17 MeV) induisent des centres E’ [Chengru 1988]. La création des défauts est proportionnelle à la fluence d’irradiation pour atteindre une saturation à des fluences de 1013 ions/cm2. Cette fluence est comparable avec la fluence de saturation obtenue par Dooryhée suite à des irradiations avec des ions de très haute énergie.

2.I.B.b.β. - Défauts macroscopiques

Les distorsions structurales produites par des effets nucléaires peuvent également être produites par des effets électroniques comme nous allons le démontrer à partir des résultats déjà obtenus. Deux phénomènes nouveaux apparaissent dans le cas des ions lourds rapides en plus des phénomènes déjà observés dans le cas des effets nucléaires : une déformation anisotrope et la création de zones avec des propriétés différentes après le passage d’un ion, nommées traces latentes.

1. Compaction et déformation anisotrope du a-SiO2 massif

En 1992 Benyagoub et al. [Benyagoub 1992] ont étudié la déformation du a-SiO2 (pour des épaisseurs entre 7 et 13 µm) sous irradiation avec des ions lourds de moyenne énergie. Les ions utilisés sont : 20Ne, 36Ar, 58Ni, 129Xe. Les énergies comprises entre 2.8 et 4.20 MeV/u conduisent à des valeurs des pertes d’énergie dans le domaine électronique, (dE/dx)e compris entre 1.6 et 15.1 keV/nm. Le parcours de l’ion, entre 28 et 40 µm, est supérieur aux épaisseurs des échantillons. Les pertes d’énergie par collisions nucléaires ((dE/dx)n entre 1.1 et 35 eV/nm) sont bien inférieures aux pertes d’énergie électronique.

La silice présente une compaction de 3% à faible fluence (comparée à celle utilisée dans le cas des effets nucléaires).

Benyagoub et al. [Benyagoub 1992], ont mesuré la variation relative de la largeur et de l’épaisseur des échantillons dans deux géométries différentes. La première géométrie correspond à un faisceau d’ions normal à la surface de l’échantillon et la deuxième à 45° par rapport à la normale. A partir de ces deux géométries, il a été conclu que la compaction est isotrope à basses fluences (< 1013 ions/cm2). Pour des fluences plus élevées ( > 1013 ions/cm2) ils ont observé une croissance anisotrope : la dimension perpendiculaire au faisceau d’ions augmente, sans tendance à la saturation, tandis que les dimensions parallèles diminuent.

Les deux phénomènes, la compaction ainsi que la croissance anisotrope, ont été reproduits par un modèle dont les paramètres étaient la section efficace de création des défauts (σ0) et le coefficient d’expansion (σ1) de la surface endommagée, perpendiculairement à la direction de l’ion. Les évolutions de ces deux paramètres ont montré le même seuil d’endommagement du a-SiO2 situé vers 2 keV/nm (figure 2.3). Ils suivent une évolution linéaire avec la perte d’énergie électronique.

0 2 4 6 8 10 12 14 16 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 1.4 1.6 1.8 (*10 13 ions /c m 2 ) (dE/dx)e (keV/nm) σ0 σ1

Figure 2.3 : Evolutions de la section efficace d’endommagement (σ0) et du facteur d’expansion (σ1) en fonction de la perte d’énergie électronique [Benyagoub 1992]

Pour des ions avec des pertes d’énergies inférieures à 2 keV/nm, la déformation anisotrope ne se produit pas, mais la compaction a toujours lieu. Cela signifie que l’apparition de cette croissance anisotrope trouve ses racines plutôt dans les phénomènes liés aux excitations électroniques qu’aux effets nucléaires. La compaction est indépendante du régime d’irradiation (électronique ou nucléaire).

Pour conclure cette partie, il faut dire que, l’endommagement par excitation électronique du a-SiO2 massif se produit sous l’action des ions lourds de moyenne énergie à partir d’un seuil de perte d’énergie électronique de 2 keV/nm pour des vitesses des ions autour de 2 MeV/u.

2. Diminution de la viscosité sur la silice amorphe épaisse

La compaction de la silice amorphe, ainsi que la déformation anisotrope, ont été expliquées par une diminution de la viscosité. Trinkaus et Ryazanov [Trinkaus 1995] proposent un modèle, qui explique la diminution de la viscosité d’un matériau amorphe sous irradiations avec des ions énergétiques, par un refroidissement rapide d’une phase liquide créée le long du passage d’un ion. Le passage d’un ion énergétique produit des excitations électroniques ainsi que des ionisations. Ces processus sont suivis par un transfert de l’énergie vers le système sub-atomique. Ainsi autour du passage de l’ion il apparaît une zone cylindrique fluide où toute contrainte va relaxer. Dans un temps très court cette zone peut s’étaler au maximum sur quelques nanomètres. Le refroidissement rapide de cette zone (vers la température ambiante) crée une phase différente du matériau.

Pour expliquer la compaction ainsi que la déformation anisotrope de la silice amorphe Benyagoub et al. [Benyagoub 1998] se sont basés sur le modèle proposé par Trinkaus et Ryazanov [Trinkaus 1995]. Des calculs de pointe thermique nous montrent que, la conversion de l’énergie des excitations électroniques en énergie thermique, induit dans la trace des températures jusqu’à 10000 K en fonction de la distance par rapport au passage de l’ion (les régions les plus proches étant les plus chaudes). De plus, la dynamique moléculaire montre que pour des températures comprises entre 3000K et 6000K le liquide se compacte et en conséquence le refroidissement rapide de cette zone fige ce matériau plus dense sans induire de contrainte. Cela a comme effet la création transitoire d’une zone cylindrique de l’ordre de 3 nm, de viscosité infiniment petite à l’intérieur d’une zone solide.

3. Déformation anisotrope des colloïdes de silice sous irradiation avec des ions

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