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Dimensions d’étude des systèmes complexes

CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE

1.3 Systèmes complexes ouverts et auto-organisés holarchiques

1.3.2 Dimensions d’étude des systèmes complexes

Ces axes engendrent des approches théoriques et opérationnelles pour mesurer et gérer des systèmes complexes. Ils permettent d’aborder, quantitativement, mais également

qualitativement différents aspects qui guident l’évolution des systèmes complexes. Les outils d’étude, de modélisation et de gestion de systèmes complexes doivent donc passer par l’un ou plusieurs de ces axes pour être cohérents. Les axes spatial, temporel et organisationnel peuvent être étudiés sous trois dimensions qui permettent de donner plusieurs perspectives du même système. La contingence historique, la connectivité et l’hétérogénéité sont les dimensions qui permettent de comprendre les structures qui forment les systèmes complexes (Cadenasso et al, 2006; Hsui et Wang, 2013).

La contingence historique explique comment le futur d’un système est dépendant de son passé (Ehrenfeld, 2009). Elle permet de comprendre les dynamiques qui ont mené le système à l’état actuel. Ces dynamiques sont généralement pertinentes pour comprendre et formuler des scénarios évolutifs plus réalistes. L’impact le plus déterminant du rôle de la contingence historique est l’influence des conditions initiales sur les systèmes. L’évolution non linéaire des systèmes complexes permet d’amplifier certaines différences infinitésimales entre deux systèmes (Hook, 2011). Elles sont donc totalement dépendantes des conditions initiales exactes. C’est ce qui donne à la modélisation la capacité de créer des scénarios et non de recréer la réalité.

La connectivité est associée à l’étude de réseaux généralement. Elle est utilisée pour décrire la manière dont les réseaux sociaux fonctionnent ou encore la manière dont les systèmes de transports se comportent. La connectivité est généralement étudiée en écologie industrielle et dans les études urbaines par des méthodes issues la théorie des graphes. Elles ont permis de trouver les points névralgiques des structures organisationnelles, notamment avec le concept de centralité. Les mesures de centralité par exemple permettent de comprendre les holons qui sont les plus importants dans les structures sociales, énergétiques ou encore dans les systèmes transport. La centralité permet d’expliquer l’importance de certaines zones, notamment pour la disposition des activités commerciales sur un territoire et donc du rôle de certains coins de rues, quartiers ou villes. Il s’agit d’une dimension largement étudiée pour caractériser les systèmes biologiques, augmenter le capital social, améliorer la logistique de transport ou comprendre les liens entre les caractéristiques géographiques et économiques.

L’hétérogénéité est un élément fondamental des systèmes complexes, ses caractéristiques guident les comportements et les relations des composantes et des sous-systèmes d’un système complexe (Rotmans et Loorbach, 2009). L’hétérogénéité se définit comme la complexité ou la variabilité quantitative de propriétés du système dans l’espace ou le temps. Elle dépend de l’échelle et de la résolution des structures analysées (Li et Reynolds, 1995). Dans les études en écologie industrielle, bien qu’elle soit considérée importante, cette caractéristique des systèmes industriels est peu étudiée : les caractéristiques hétérogènes nécessaires aux symbioses demeurent mal connues (Lombardi et al, 2012). Dans l’étude des formes urbaines, elle est considérée comme importante, car elle engendre la possibilité de coopération et de symbiose. Elle permet la redondance fonctionnelle sur un territoire. Une plus grande hétérogénéité des acteurs peut également augmenter la productivité sous forme de production primaire sur un territoire (Jensen et al, 2012). L’augmentation de l’hétérogénéité, plus précisément de la diversité des holons et de leurs relations et donc de la complexité, est une source d’émergence de la soutenabilité (Parrot, 2010). La productivité accrue est le produit d'une augmentation de la complémentarité spatiale et temporelle des acteurs composant les structures holarchiques des systèmes complexes ouverts (Cardinale et al. 2007). Dans les processus évolutifs naturels, l’hétérogénéité de ces structures dans l’espace et le temps agit comme un processus catalytique qui engendre davantage de biomasse en améliorant les possibilités d’optimisation au travers de niches écologiques. Ces avantages existent également dans le monde industriel tel que le démontrent les études sur les symbioses industrielles et les systèmes urbains. Il semblerait que ces structures correspondent aux ensembles systémiques les plus complexes qui font émerger la soutenabilité des ensembles biotiques. Ces structures ne se limitent pas aux flux énergétiques, mais également aux flux d’information et de matière (Odum, 2003). Elles pourraient ainsi expliquer la nature autosimilaire des métabolismes croissants en fonction de la dimension des villes (Batty et Longley, 1994) Ces structures ne sont ni entièrement aléatoires, ni entièrement organisées (Parrot, 2010). Les modèles de gestion de l’hétérogénéité sur un territoire sont donc dépassés ; ils requièrent une compréhension des phénomènes d’émergence qui doivent être utilisés pour comprendre et diriger l’ordre spatial apparent (Batty, 2007).

Les méthodes de planification et de gestion centralisée des systèmes urbains comme le zonage euclidien sont donc obsolètes. La soutenabilité et la viabilité des systèmes urbains et périurbains devraient donc reposer sur l’articulation de ces structures holarchiques hétérogènes. Il serait alors possible d’influencer les différents sous-systèmes en modifiant les propriétés des attracteurs locaux qui guident les processus. La distribution de ces holons modifie également les niches industrielles et donc les possibilités de développer des symbioses entre les acteurs. Il est donc important de développer des outils de caractérisation non seulement les réseaux, mais également l’hétérogénéité des composantes, les holons, des systèmes complexes qui définissent nos modes de production et de consommation. La plus grande difficulté de caractérisation de cette hétérogénéité réside dans sa nature géométrique : leurs empreintes ne suivent pas la géométrie euclidienne et sont donc très difficiles à décrire sur une base quantitative (Frankhauser, 1998). La maîtrise d’un outil non euclidien qui permet d’étudier et d’agir sur l’ordre spatial des activités humaines permet d’influencer l’émergence des propriétés des systèmes. L’usage de nouveaux outils d’analyse pour caractériser la composition hétérogène des systèmes est donc requis (Sayed et Turner, 2012). Elle permettra de comprendre les niches pour ensuite identifier les solutions qui sont applicables aux systèmes locaux (Thomas et al, 2010).