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Le diagnostic de l’infection par le VIH et la Médecine Générale

B. Analyse

1. Le diagnostic de l’infection par le VIH et la Médecine Générale

Le dépistage de l’infection par le VIH en pratique

Neuf médecins généralistes interrogés ont indiqué clairement qu’ils attribuaient une importance

particulière au dépistage de l’infection par le VIH dans leur pratique quotidienne : « je suis

plutôt sensibilisé à ça, je donne une importance plutôt forte au dépistage du VIH. » (Med 1).

Pour un des médecins, le VIH reste une maladie encore trop peu diagnostiquée : « c’est

important parce que ce n’est pas, enfin voilà, c’est sous-diagnostiqué. » (Med 11).

Quatre médecins interrogés (Med 5, 7, 8 et 11) ont déclaré ne pas penser au dépistage de

l’infection par le VIH dans leur pratique quotidienne : « Je l’oublie. » (Med 5). En consultation

de médecine générale, un des médecins explique que le dépistage de l’infection par le VIH n’est

pas une priorité absolue : « quelle importance [le dépistage] ? … Je dirais modérée… Ce n'est

pas ce qui me préoccupe le plus. » (Med 4).

Les patients arrivant tous avec des motifs différents de consultations, le dépistage de l’infection

par le VIH ne fait pas partie systématiquement du dialogue : « En général, ce n'est pas le

problème que je pose spontanément en général. C'est donc, disons une importance relative, une

petite importance. » (Med 4).

Les idées préconçues autour de la maladie et la sexualité des patients peuvent probablement

amener les médecins à avoir des difficultés à aborder le sujet, notamment chez des patients peu

à risques : « Mais, chez les personnes qui vivent en couple, que je suis le mari et l’épouse, ce

n'est pas toujours très bien perçu. » (Med 16).

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patientèle (différente selon la localisation géographique du cabinet et l’objectif principal de la

structure de soins), les comportements du médecin quant au dépistage de l’infection par le VIH

peuvent être différents : « Quand j’étais au planning familial, là oui j’y pensais, je le faisais

beaucoup plus, mais en pratique de ville, je l’oublie. » (Med 5). Les personnes ayant travaillé

au CISIH déclarent qu’ils accordent une attention particulière au dépistage de l’infection par le

VIH : « ayant travaillé 5 ans au CISIH, c'est un sujet qui m'intéresse et je suis très sensibilisée

au VIH. » (Med 2).

Un des médecins explique accorder une importance singulière au fait de dépister l’ensemble de

la population de 15 à 70 ans, en dehors de prises de risques identifiées, et vise à ce que « chacun

l’ait [le dépistage] une fois dans sa vie. » (Med 6).

En dehors d’un tel dépistage systématique, les principales indications retenues par les médecins

sont les pratiques sexuelles à risque, l’existence d’un nouveau partenaire, les bilans lors de

l’introduction d’une méthode contraceptive ou les tableaux cliniques pouvant faire évoquer une

primo-infection VIH.

Un généraliste explique que la consultation médicale ne débouche pas seulement sur la

prescription d'une sérologie VIH en laboratoire, mais que le rôle du médecin traitant est aussi

d’aborder toutes les pathologies et sujets concernant la sexualité des patients, et de prévenir les

risques d’infection par le VIH en alertant sur les comportements à risque, à travers le dialogue :

« On vient chercher une sérologie HIV mais ça débouche sur les autres IST, sur la prévention

ensuite, sur la contraception… » (Med 3).

Malgré tout, en médecine de ville, 13 médecins sur 16 (1, 3, 4, 6, et 8 à 16) s’accordent à dire

qu’en règle générale, les demandes de dépistage viennent des patients eux-mêmes. « Souvent

la demande, elle arrive des patients, donc on prescrit. » (Med 8).

Un généraliste montre que l’intérêt qu’il porte au dépistage va être modulé en fonction du

patient, en dehors des recommandations de l’HAS (6): « C’est un peu à la demande du patient

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pour moi. Donc l’importance c’est plutôt l’importance que le patient lui accorde. » (Med 6).

Un des médecins rapporte que les représentations mentales erronées et les à priori qui persistent

encore autour de l’infection par le VIH peuvent influencer leur pratique de dépistage : « Et je

pense, qu'il y a peut-être des patients, à qui je ne propose pas du tout, avec des idées reçues là-

dessus, et que ce n'est peut-être pas très bien. Je ne suis pas sûr que tous mes patients aient eu

un dosage VIH. » (Med 14).

Le médecin traitant peut jouer le rôle de facilitateur dans le dialogue avec le patient pour le

dépistage de l’infection par le VIH : « dès que les gens semblent vouloir en parler ou tourner

autour, je la propose [la sérologie] parce que c’est vrai que c’est un thème qu’ils ont, parfois,

du mal à aborder. » (Med 9).

Le médecin traitant apparait même comme un confident dans certaines familles : « je pense à

une maman qui m’avait appelé en me disant : « Mais vous savez mon fils il ne vous a jamais

dit que ceci cela, j’ose pas vous en parler donc voilà, il faut en parler la prochaine fois. » (Med

7).

La presque totalité des médecins généralistes qui ont été interrogés (à partir du médecin numéro

5) sur la fréquence des dépistages (9/10) (Med 5, 7, 9, et 11 à 16) font réaliser au moins 2

sérologies VIH en laboratoire par mois.

L’annonce de l’infection par le VIH

La moitié des médecins (Med 1, 2, 3, 5, 7, 8, 13, 16) que nous avons interrogée a été confronté

à l’annonce d’une séropositivité. Deux de ces annonces diagnostiques ont été faites à l’hôpital

(Med 3 et 7, lors de consultations dédiées au VIH ; ces médecins exerçaient alors au CISIH ;

ils pratiquent la médecine générale depuis plus de 30 ans).

Quel que soit le cadre de l'annonce diagnostique (CISIH ou cabinet libéral), cela reste une

situation marquante et stressante pour les professionnels de santé : « [C’est] stressant

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traumatisme : « Cela a été difficile pour moi je pense, peut-être plus que pour lui. » (Med 16).

Pourtant, les médecins généralistes déclarent avoir une certaine habitude à annoncer une

pathologie grave : « on fait aussi des annonces de cancers, on récupère des gens après des AVC

ou des infarctus qui ont des séquelles et qui en prennent, bien sûr que ça leur a été annoncé,

mais ils en prennent conscience dans leur vie de tous les jours, je dirai, presque avec nous.

Donc finalement on est habitué à accompagner les gens dans des difficultés » (Med 9).

L’infection par le VIH est une situation qui peut bouleverser de manière profonde aussi bien la

sphère personnelle médicale du patient que la sphère intime et sociale, en particulier familiale

voire professionnelle. L’annonce d’une séropositivité reste de ce fait, malgré tout, une annonce

singulière, qui marque la carrière professionnelle d’un médecin : « oui, c'est même très

clair…[j’ai annoncé une sérologie positive] deux fois, depuis que je suis installé, depuis 25 ans.

Uniquement, deux fois. Ah bah, c'est sûr que l'on s’en souvient. » (Med 3).

Malgré tout, 6 médecins sur 16 (Med 1, 2, 3, 5, 8, 13) relatent que la plupart des patients

séropositifs s’attendaient au diagnostic lors des consultations d’annonce, étant conscients de

leurs prises de risques : « elle savait que quand elle est allée faire son test, elle savait qu’il

serait positif, parce qu’elle avait des signes de primo-infection, elle avait étudié son affaire et

cela ne l’a pas du tout étonné son test positif. » (Med 5).

Cet état d’esprit dans lequel vient le patient en consultation aide à l’annonce : « je pense que

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