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CHAPITRE 1 : LES DIFFERENTES ETAPES DE LA RECEPTION DES FILMS DE

1.3 Les étapes de la réception des films de Wong Kar Wai en France

1.3.2 La deuxième étape : la découverte par le public français

La deuxième étape va de la sortie de Chungking Express en 1995 à la sortie des

Anges déchus en 1997.

Chungking Express est sorti dans les salles françaises en mars 1995. Il y a 83,271

entrées.103 C’est le troisième film de Wong, mais c’est le premier film de Wong sorti en France.

« Chungking Express est aujourd’hui considéré comme un des plus grands films asiatiques contemporains ».104 Le critique pense que c’est un film qui n’existerait pas

sous une autre forme parce que le manque de narration est précisément sa caractéristique. Le critique écrit que chez Wong, les sentiments ne se basent pas sur l’histoire, mais sur la mise en scène, les actions et les paroles, « car avant tout le génie hongkongais est un poète de l’image ».

« Il y a, dans Chungking Express, des idées magnifiques sur les sentiments, naissants ou finissants, et sur la confusion qui les accompagne ».105 Pour les spectateurs français, ce qui est remarquable est l’interprétation des sentiments. La ville de Hongkong est grande et moderne. La vitesse de la vie y est rapide. Ce qui est éternel, c’est l’amour caché dans un coin de la rue. Il est quand même fragile. Avec l’inattention, on le perd vite. Mais si l’on fait l’attention, il nous approche facilement.

Comme Isabelle Danel l’écrit, dans Chungking Express, tout est double. Il y a deux histoires d’amour de deux policiers dans deux quartiers hongkongais. Respectivement, ce sont deux histoires très simples. Mais chez Wong, elles sont montrées par un film avec un petit lien, celui de la rencontre occasionnelle du garçon de la première histoire et de la fille de la deuxième histoire. Donc, quand les spectateurs essaient de trouver un lien logique entre les deux parties de Chungking Express, ils sont perdus. Il ne faut pas forcément de chercher une logique dans les films de Wong Kar Wai.

Pour les spectateurs, les sentiments du film sont magnifiques. C’est le premier pas pour les Français pour connaître Wong Kar Wai. Et c’est un pas réussi.

103 http://frames.free.fr/1/chungking.htm

104 GILI N., « Chungking Express (Wong Kar-wai, 1994) », le 22 mars 1995.

(https://www.screenmania.fr/film-critique/critique-chungking-express-chung-hing-sam-lam-1994/)

105 DANEL Isabelle, « Critique lors de la sortie en salle de Chungking Express », le 25 mars 1995.

Après le succès de Chungking Express, son deuxième film Nos années sauvages est sorti dans les salles françaises. Nos années sauvages est sorti en France en mars 1996. Il y a 28,656 entrées.106

Serge Kaganski écrit que le choc de Nos années sauvages traduit un phénomène qui existe depuis des années : c’est que la Chine est au premier rang du cinéma mondial.107 Le critique considère Wong Kar Wai comme « une nouvelle vague à lui tout seul ». Et en partageant l’idée du critique chinois Zheng Xianghong, le critique pense que dans le cinéma chinois, Chen Kaige et Zhang Yimou sont les réalisateurs les plus connus en Chine continentale, Hou Hsia Hsien et Tsaï Mingliang sont remarquables à Taiwan, et les John Woo et Wong Kar Wai sont les « stakhanovistes » de l'industrie de Hong Kong.

Les spectateurs pensent que ce film est « difficile à définir »108 parce qu’il est mystérieux. Mais ce sont les mystères qui rendent le film merveilleux. Car le réalisateur entremêle des indices et les trajectoires de l’histoire, la communication des personnages devient un jeu. Comme les critiques de Chungking Express, les critiques de Nos années

sauvages se concentrent sur les sentiments du film. La façon de montrer les sentiments

n’est pas de raconter l’histoire, mais de bien traiter les moments de rencontres et de correspondances. Donc le film ressemble aux souvenirs forts mais aussi confus.

Les cendres du temps est sorti dans les salles françaises en décembre 1996. Il y a

761 entrées.109

Cette fois, Wong Kar Wai perd l’admiration des spectateurs français. « Le style d'un maniérisme exacerbé ne fait qu'ajouter à notre perplexité. »110 Le spectateur est perdu dans les histoires entremêlées, avec un mélange des personnages réels avec ceux du passé qui apparaissent en flash-back.

Pour les Français, Wong est déjà considéré comme le maître du genre. Les spectateurs savent que la complexité est sa griffe. Mais ce film d’adaptation d’un roman d’art martiaux est ampoulé. Donc c’est difficile pour les spectateurs de le comprendre.

106 http://i.mtime.com/fengyingshouce/blog/4270423/

107 KAGANSKI Serge, « Nos années sauvages », le 6 mars 1996.

(http://www.lesinrocks.com/cinema/films-a-l-affiche/nos-annees-sauvages/).

108 MORICE Jacques, « Critique lors de la sortie en salle de Nos années sauvages », le 9 mars 1996.

(http://www.telerama.fr/cinema/films/nos-annees-sauvages,38299,critique.php)

109 Le chiffre paraît très faible, mais c’est celui indiqué par le site :

http://i.mtime.com/fengyingshouce/blog/4270423/.

110 SCHIDLOW Joshka, « Critique lors de la sortie en salle de Chungking Express », le 7 décembre 1996.

Les anges déchus est sorti en France en mars 1997.111

Les critiques ne sont pas très positives, chez les spectateurs comme chez les critiques.

Les personnages des Anges déchus sont typiquement wongiens : ils sont mélancoliques, marginalisés, autistes, et en plus, pour cette fois, aphasiques. Ils ne peuvent bien communiquer qu’avec la voix-off et le juke-box.

« Wong Kar-wai s’essouffle en fin de parcours ».112 Pour le critique, le film commence par « une virtuosité éblouissante » qui appelle l’amorce du film : « éblouissant, vertigineux, suffocant, de vitesse, d'assurance, de liberté ». Mais à la fin, « l'émotion et la fascination s'estompent, font place à une légère déception ».

La première partie est plus admirée que la deuxième partie. Parce que dans la première histoire, le récit s’attache à deux tueurs qui se connaissent mais ne se voient jamais. Donc c’est un amour à sens unique du tueur féminin pour son partenaire masculin. Mais dans la deuxième partie, Wong mélange des intrigues parallèles, en ajoutant les deux autres personnages principaux. La première histoire est coupée et mélangée avec la deuxième. Donc la charme de la première partie ne continue pas jusqu’à la fin.

« Chronologiquement, ce vrai nouveau film vient juste après le passionnant

Chungking Express. Et entre-temps, on a pu découvrir Nos années sauvages (avec

plaisir) et Les cendres du temps (avec réserve). »113 L’auteur de cette critique est un admirateur de Wong Kar Wai. Il compare les personnages des Anges déchus avec ceux de Nos années sauvages, et l’ambiance des Anges déchus avec celle de Chungking

Express : les personnages manquent de fascination et de la magie, et l’air est connu

chez Wong avec des flashes et « les trajets solitaires fusent et ne se mêlent pas ». Pour les spectateurs, Les anges déchus perd ce qui est séduisant dans Chungking

Express. L’histoire est en fait l’idée abandonnée de la troisième partie de Chungking Express. Mais Wong Kar Wai fait un système pour montrer son style parce qu’« il

remodèle, fait plier, retourne, plaque et distend les corps et les espaces filmés ».114

111 Manque des sources du box-office.

112 BONNET Sophie, « Les Anges Déchus », le 5 mars 1997. (http://www.lesinrocks.com/cinema/films-

a-l-affiche/les-anges-dechus/)

113GORIN François, « Critique lors de la sortie en salle des Anges déchus », le 8 mars 1997.

(http://www.telerama.fr/cinema/films/les-anges-dechus,40022,critique.php)

114 BONNET Sophie, « Les Anges Déchus », le 5 mars 1997. (http://www.lesinrocks.com/cinema/films-

Donc pour les spectateurs français, il semble que le style des Anges déchus est fait par exprès.