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Chapitre II : Synthèse et caractérisation de couches minces

II.3. Dépôt par couches atomiques (ALD)

II.3.1. Description et utilisation générale

A la fin des années 1970, Suntola et ses collaborateurs ont développé et breveté une nouvelle technique de dépôt appelée atomic layer epitaxy (ALE) [8]. Le développement de l’ALE, plus souvent appelée atomic layer deposition (ALD), a été motivé par le besoin d’une technique pour élaborer, sur de grandes surfaces, des films diélectriques luminescents (thin film electroluminescent-TFEL), plus particulièrement le ZnS, de haute qualité pour les affichages à écran plat. La production des affichages de type de TFEL a constitué la première application industrielle de l’ALD et continue encore aujourd’hui [9]. L’intérêt que suscite actuellement la technologie ALD, particulièrement dans l’industrie de la microélectronique, réside dans sa capacité à produire, à des températures relativement basses, des films ultra- minces, denses et uniformes sur des substrats de grandes surfaces avec un contrôle de l’épaisseur et de la composition au niveau atomique. L’ALD permet aussi d’obtenir des interfaces nettes avec une excellente adhésion aux reliefs du substrat, qu’il soit dense ou poreux [10-13]. En effet, bien qu’à l’origine l’ALD ait été développée pour la fabrication de couches minces sur des substrats plans et denses, des dépôts sur des poudres de grandes surfaces [14-18] ainsi que sur des substrats poreux de silicium [19;20] ont été réalisés. Dans le cadre de ce travail, des dépôts denses ont été élaborés sur des substrats plans (silicium) et poreux (LSM et NiO-YSZ).

II.3.2. Principe de fonctionnement

L’ALD est une variante de la CVD, et à la différence de celle-ci, pour laquelle les réactifs sont apportés en même temps dans la chambre de réaction, l’ALD se base sur l’introduction séquentielle des précurseurs qui vont réagir selon des réactions de saturation de surface avec la surface du substrat. Les pulses (envoi d’un précurseur pendant un temps donné) sont séparés par une purge de gaz inerte qui élimine l’excès de molécules de précurseur dans la chambre de réaction, évitant ainsi de possibles réactions en phase gazeuse avec les autres réactifs. Le gaz de purge le plus souvent utilisé est l’azote. Il est aussi utilisé comme gaz vecteur.

La croissance du dépôt s’opère de façon cyclique. La figure II.1 présente de manière simplifiée un cycle de dépôt ALD d’un oxyde métallique imaginaire. De manière générale, un cycle de croissance se déroule en quatre étapes:

1- un précurseur métallique gazeux est envoyé sur le substrat où il subit des réactions de chimisorption qui saturent la surface de réaction ;

2- un gaz inerte est envoyé pour éliminer l’excès de précurseur ;

3- un oxydant (O2, H2O ou O3) est envoyé de manière à éliminer les ligands et à oxyder le

métal déposé sur le substrat ;

4- un gaz inerte est à nouveau envoyé dans le réacteur pour éliminer les produits de réaction et le surplus d’oxydant.

Fig.II.1. Illustration schématique d’un cycle de dépôt ALD menant à un film d’oxyde métallique de composition imaginaire (métal : , oxygène : , L : ligand du précurseur) [21].

Dans le cas idéal, chaque étape du cycle est complète. Les réactions de saturation de surface (réactions de chimisorption) entre les molécules de précurseur et le substrat donnent lieu à une seule monocouche atomique adsorbée sur la surface par cycle. Dans ces conditions, la croissance du dépôt est auto-limitante et la quantité de matériau déposée après chaque cycle est constante. Ainsi, seul le nombre de cycles détermine l’épaisseur de la couche déposée et le contrôle de l’épaisseur se fait de façon simple et précise [22]. En pratique, l’encombrement

(c) (f) (e) Fenêtre ALD (a) (b) (d) V ite ss e de c ro is sa nc e Température

stérique et le nombre limité de sites réactionnels sur la surface réduisent la vitesse de croissance par cycle à une fraction précise de l’épaisseur d’une monocouche. Néanmoins, la vitesse de croissance reste constante, et le contrôle de l’épaisseur reste possible.

Les principaux paramètres qui doivent être pris en compte dans une croissance par ALD sont la température de croissance, la volatilité et la stabilité des précurseurs, leur pression partielle et la durée des pulses [23;24].

L’effet de la température sur la vitesse de croissance par ALD engendre différents régimes de croissance illustrés sur la figure II.2. L’intervalle de température pour lequel la vitesse de croissance du film est constante est appelé fenêtre ALD et est propre à chaque précurseur. Il est limité aux basses températures par la condensation des réactifs ou par une réactivité insuffisante des précurseurs. Aux températures élevées, la décomposition ou la désorption des précurseurs détruit le mécanisme de croissance auto-limitant de l’ALD. Si la vitesse de croissance dépend du nombre de sites réactifs disponibles comme pour le cas (f), aucune fenêtre ALD n’est observée [21].

Fig.II.2. Différents modes de croissance en ALD en fonction de la température. (a) fenêtre de travail ALD limitée par (b) condensation du précurseur, (c) réactivité insuffisante, (d) décomposition du précurseur et (e) désorption du précurseur. (f) aucune fenêtre ALD n’est observée.

La température de dépôt, la vitesse de croissance et la qualité des dépôts obtenus dépendent de la nature des précurseurs utilisés. La croissance de la couche peut varier en raison de la différence de réactivité entre deux précurseurs et de l’effet de l’encombrement

stérique pour chaque réactif. La durée des pulses de précurseurs dépend de leur réactivité : plus elle est forte, plus la durée du pulse sera courte. La durée des pulses est choisie de telle sorte que la surface soit recouverte de façon homogène.

Contrairement à la CVD classique où les précurseurs ne doivent pas être trop réactifs les uns vis-à-vis des autres, l’ALD permet d’utiliser des précurseurs très réactifs car ils ne se rencontrent jamais en phase gazeuse.

Les précurseurs utilisés dans le procédé ALD doivent être volatils, thermiquement stables à la température de dépôt et posséder une pression partielle suffisamment élevée pour assurer un transport de matière performant. Comme la croissance par ALD est contrôlée par des réactions de saturation de surface, il est important que les précurseurs présentent une affinité suffisante à la fois avec le substrat et avec la couche en cours de formation [10; 25; 26].

Différents types de précurseurs métalliques ont été employés en ALD : halogénures (plus particulièrement des chlorures), composés alkyls, alcoxydes, composés organométalliques tels que les composés de type cyclopentadienyl.