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Chapitre 2 : Les fentes vélo-palatines et leur prise en charge

E) Description de syndromes

Françoise Vernel-Bonneau et Catherine Thibault (1999) détaillent les anomalies graves qui peuvent accompagner une fente. Elles évoquent également les syndromes polymalformatifs qui peuvent présenter dans leur tableau clinique une fente faciale. Dans ce cas-là, la problématique est bien plus grave, avec parfois une mise en jeu du pronostic vital.

Trouble de l'oralité

Le réflexe de succion-déglutition néonatal est un marqueur fonctionnel de l’oralité alimentaire et motrice. Sa défaillance avec fausse route ventilatoire est un signe capital de dysmaturation du fonctionnement de tous les noyaux moteurs du tronc cérébral évoquant une pathologie plus lourde.

La succion est appréciée lors de la tétée dont la durée est en moyenne de quinze minutes. Une tétée inexistante, ou pour certains une tétée trop longue, témoigne d’une immaturité de ce réflexe.

Une toux fréquente lors de la déglutition correspond à un trouble de la coordination succion-déglutition. En effet, un trouble de déglutition entraine un manque de protection des voies aériennes. L’écoulement de lait aux commissures labiales avant la fin de la tétée a la même signification.

Toute tentative forcée d’alimentation orale peut être responsable de fausses routes respiratoires fatales. Rappelons que la succion-déglutition réflexe ne peut être rééduquée.

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Dans le cas de trouble de succion-déglutition de cet ordre, l'alimentation orale peut devenir très problématique. C'est une cause de transfert du nouveau-né vers un service de néonatalogie avec la pose éventuelle d'une sonde naso-gastrique.

Trouble de la respiration

C’est ce qui est apprécié en priorité et qui pourra entraîner un transfert immédiat de l’enfant vers un service de néonatalogie. Certaines malformations faciales comme la séquence de Robin s’accompagnent dès la naissance d’une détresse respiratoire qui nécessite une intubation nasotrachéale. Cependant, en pratique, en dehors de ces situations d’urgence, il convient de regarder, d'écouter respirer et crier le nouveau-né, pour repérer une dyspnée obstructive pendant le sommeil ou au cours de l’alimentation. Il s'agit également de dépister une pâleur ou une cyanose péribuccale lors de la prise du biberon, des sueurs abondantes lors du sommeil. Des examens pourront également être effectués afin d’objectiver un trouble de la respiration. Il convient d'être vigilant car certaines syndromes, notamment la séquence de Pierre Robin, ne sont pas toujours détectés en anténatal.

Exemple de la séquence de Pierre Robin

Ce syndrome est un exemple clinique de la défaillance précoce des fonctions du tronc cérébral touchant l’oralité primaire, les régulations respiratoire, cardiaque et digestive. Cette anomalie se retrouve chez 1 cas sur 8 500 naissances.

Comme nous l'avons vu précédemment, dans le tableau clinique de cette pathologie, la langue ne descend pas dans la cavité buccale et empêche la fermeture du palais secondaire. De ce fait, la langue, qui reste incluse dans la cavité stomodéale, imprime sa forme à la fente palatine.

La micrognatie témoigne du défaut de succion-déglutition, tandis que la glossoptose et les obstructions respiratoires correspondent à un trouble central du tonus musculaire mandibulo-pharyngo-lingual et pharyngo-laryngé. Dans la plupart des cas, l'enfant étant maintenu après la naissance en décubitus ventral, la rétromandibulie va régresser.

Les pauses respiratoires, les bradycardies (ralentissement du rythme des battements cardiaques) profondes et l’asynchronisme pharyngo-sphinctérien complètent l’expression de cette grave anomalie de l’organisation sensori-motrice du tronc cérébral.

L’exploration de ces défaillances, diversement associées, permet une classification selon un indice de gravité et une prise en charge thérapeutique adaptée. On distingue trois

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-le type 1 ne nécessite qu’une surveillance staturo-pondérale, il est de bon pronostic,

-le type 2, dysoral, est caractérisé par la défaillance centrale de la succion-déglutition que seule la pose d’une sonde naso-gastrique permet de suppléer les premiers mois en attendant l’apparition de la praxie orale à la cuillère. L’équilibre respiratoire reste précaire,

-le type 3 est dysoral et défini par une insuffisance respiratoire chronique. Les nouveau-nés sont trachéotomisés et nourris par sonde. Ce mode d’alimentation est progressivement relayé par l’apport alimentaire à la cuillère.

Le traitement de la division palatine sera alors effectué en un temps vers 12-18 mois, pour ne pas compromettre la croissance de la face qui est très importante au cours de la 1ère année de la vie. Cependant, il existe des variantes selon les chirurgiens et selon l’importance de la fente.

Malformations associées

Rappelons que les fentes labio-maxillaires et vélo-palatines sont isolées dans 95% des cas et associées dans 5% des cas à d’autres malformations.

La présence de malformations associées conditionne l’avenir. Les malformations faciales s’accompagnent, dans 10% des cas, d’anomalies morphologiques du tronc cérébral et de ses nerfs et/ou de malformations somatiques, cardiaques, digestives, urinaires. Les déficits visuels, moteurs et auditifs, les malformations oculaires et les troubles moteurs oropharyngés sont alors très fréquents.

Voici, d'après le site internet Orphanet, une liste non exhaustive des trisomies et des syndromes pouvant présenter dans leur tableau clinique une fente vélo-palatine :

-la trisomie 13 : Elle est caractérisée pas des malformations cérébrales (holoprosencéphalie=défaut de séparation des ébauches des deux hémisphères cérébraux), une dysmorphie faciale, des anomalies oculaires, des malformations viscérales (cardiopathie) et un retard psychomoteur très sévère. Son incidence est estimée entre 1/8000 et 1/15000 naissances. Plus de 95% des fœtus atteints décèdent in utero. La présentation neurologique est sévère : hypotonie, hyporéactivité.

-la trisomie 18 : Elle est caractérisée par un retard de croissance, un crâne allongé (dolichocéphalie), un visage caractéristique, des anomalies des membres et des malformations

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viscérales. L'incidence est estimée à 1/6000 à 1/8000 naissances. Plus de 95% des fœtus atteints décèdent in utero. Sans que l’on puisse pour l’instant l’expliquer, la survie des fœtus féminin est meilleure, d'où une prépondérance de filles porteuses de trisomie 18 observée à la naissance.

-le syndrome CHARGE : (acronyme anglosaxon signifiant colobome, malformations cardiaques, atrésie choanale, retard de croissance et/ou de développement, hypoplasie génitale, anomalies des oreilles et/ou surdité) Il est décrit comme un ensemble d'anomalies survenant de manière concomitante plus fréquemment que si c'était le simple fait du hasard. L'incidence du syndrome est évaluée à 0,1 à 1,2/10 000 naissances vivantes. Ce chiffre n’est pas très fiable en raison de la difficulté à diagnostiquer ce syndrome.

-le syndrome EEC : (electrodactylie - ectodermal dysplasia - clefting) C'est une anomalie du développement embryonnaire d'origine génétique caractérisée par la présence de trois troubles principaux. Il s'agit d'une syndactylie (accolements des doigts et/ou des orteils), d'une dysplasie ectodermique (avec des anomalies au niveau de la peau, des cheveux, des dents, des ongles et des glandes exocrines) et de fentes labiales ou palatine. La prévalence exacte n'est pas connue. Plus de 300 cas ont été décrits dans la littérature.

Il apparaît évident que la prise en charge de ces cas problématiques est plus délicate que la prise en charge d’une fente vélo-palatine simple. Il ne faudra pas appréhender ces deux situations de la même manière.

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