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DESCRIPTION RATIONNELLE DE L'ANGINE DE POITRINE

Dans le document De la pathogénie de l'angine de poitrine (Page 112-118)

Nosologiquement l'angine de poitrine rentre dans les cadres des maladies du système artériel.

Elle a pour siège l'aorte et les gros vaisseaux qui en partent.

Son substratum anatomique est une altération plus ou moins étendue des parois vasculaires, qui se traduit par la diminution de leur élasticité (troubles de la nutrition géné-rale, aortite aiguë, end artérite chronique déformante).

Les causes qui favorisent l'exagération de la pression sanguine prédisposent par là aux accès. Elles agissent par trois voies différentes : 1 o en augmentant le pouvoir re-foulant du cœur (hypertrophie du myocarde, particulière-ment du ventricule gauche, et agrandisseparticulière-ment de sa cavité);

2° en mettant des obstacles à la circulation périphérique, soit par artério-sclérose généralisée (sénilité,. goutte, alcoo-lisme, syphilis, etc.), soit par des troubles vaso-moteurs chroniques (hystérie, neurasthénie, dyspepsie, intoxications tabagique; saturnine, etc.) ; 3° en diminuant la fluidité du sang (diabète sucré, peut-être aussi la goutte, certaines in-toxications, etc.).

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ff4.-Toutes les causes qui élèvent brusquement, d'une ma-nière connue ou inconnue, la pression sanguine, déter-minent des accès ; telles sont : les émotions (par influence sur le cœur), le froid (marche contre le vent, par constric-tion des vaisseaux périphériques), les efforts musculaires, la digestion (Zadek, 85), l'irritation mécanique ou ther-mique des parois stomacales par l'ingestion des aliments (Mayer et Pribram, 51) 1, le premier sommeil 2, etc., etc.

L'accès éclate généralement d'une manière soudaine, sans prodromes. Le malade éprouve ~ubitement dans le thorax une douleur déchirante profonde. Elle siège tan-tôt sous la région précordiale, tantan-tôt en arrière du sternum, de préférence sous sa portion supérieure et un peu à droite ; dans d'autres cas la douleur se manifeste primitivement au dos, entre les omoplates, correspondant à la colonne verté-brale; enfin, dans une autre catégorie de cas, elle est indi-quée au niveau de l'épigastre, mais toujours profondément.

La durée des aceès est très variable. Parfois la crise ne persiste que quelques instants ; la douleur s'évanouit aussi subitement qu'elle était survenue ; dans ces cas ce symp-tôme résume, pour ainsi dire, toute l'attaque. Mais géné-ralement l'accès a une durée plus longue qui peut aller de quelques minutes jusqu'à plusieurs

heures.-Ordinairement la douleur thoracique s'irradie dans

di-i. ·Peut-être le sondage de l'estomac, a-t-il une influence réflexe ana-logue par l'irritation mécanique de l'œsophage (notre obser. II), ainsi que le séjour des matières fécales dans l'intestin (cas de Traube, 76, p. 1.76) ou l'irritation de l'urètre par la sonde vésicale (cas de lVI. Au-deoud, 2, p. 368) ?

2. Probablement par reflux du sang du cerveau.

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-verses directions : aux membres supérieurs, de préférence à celui du côté gauche et spécialement dans le· domaine du nerf cubital, au cou, dans l'abdomen, les extrémités infé-rieures, etc.

Pendant l'accès souvent le malade éprouve la sensation caractéristique de constriction thoracique, comme si le sternum était violemment rapproché de la colonne verté-brale; d'autres fois_, c'est une sensation inverse .de pléni-tude thoracique qui lui nonne l'illusion que la poitrine menace d'éclater de dedans en dehors.

Instinctivement les malades s'immobilisent dans des atti-tudes forcées des plus variées, dont l'effet commun est d'arrêter la respiration, car les mouvements respiratoires augmentent les douleurs.

Pris entre deux feux, une douleur intense et le besoin impérieux de respirer, le malade endure les souffrances les plus terribles. Ne pouvant plus retenir son souffle, il tâche d'en atténuer les effets par une respiration superfi-cielle et haletante.

Cependant la douleur ne persiste pas nécessairement pen-dant toute la durée de l'accès avec la même intensité ; des in-tervalles d'accalmie relative séparent les exacerbations des souffrances ; à ces moments la respiration devient libre et les malades en profitent pour faire des inspirations pro-fondes.

Dans les cas où l'on observe des paroxysmes et des interrnissions (Eichwald) dans une mêmè attaque, le pouls devient intermittent ; il se ralentit ou s'accélère avec l'ap-parition et la disl'ap-parition des pa~oxysmes. Dans d'autres cas le pouls est tantôt ralenti, tantôt accéléré ; quelquefois

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116-il parait ne pas subir de changement, mais il n'est jamais rigoureusement le même pendant, et en dehors des accès.

Ceux-ci cessent aussi subitement qu'ils étaient survenus.

A la fin de l'accès on observe souvent une abondante sudation et l'émission d'une grande quantité d'urine claire (effet de l'hyperpression sanguine).

Une fois la crise passée, le malade n'en garde que le sou venir. Quelquefois cependant il lui reste une sensation de meurtrissure dans le thorax et l'engourdissement du membre où s'est faite l'irradiation douloureuse.

La mort peut survenir pendant l'un de ces accès. On constate alors, à l'autopsie, des altérations plus ou moins avancées du myocarde, liées ordinairement au rétrécisse-ment ou à l'oblitération des artères coronaires ; quelquefois on trouve la rupture du ventricule gauche, exceptionnelle-ment celle d'une artère coronaire.

Le diagnostic de l'angine de poitrine est des plus faciles lorsque les symptômes sont au complet. Mais il s'en faut de beaucoup qu'il en soit toujours ainsi et alors on doit

· faire le diagnostic différentiel :

1) avec certaines formes douloureuses de péricardite ; 2) avec des palpitations douloureuses du cœur ;

3) avec l'asthme ;

4) avec une névralgie intercostale ou cervico-brachiale ; 5) avec un abcès ou une tumeur, ordinairement maligne, du médiastin, pouvant donner lieu à des douleurs pério-diques;

6) avec une oblitération instantanée ou rapide des ar-tères coronaires soit par une embolie, soit par une plaque d'aortite aiguë ;

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117-7) avec une rupture du cœur pouvant simuler un pre-mier accès mortel d'angine de poitrine.

Un point qu'on ne devrait pas perdre de vue dans le diagnostic, c'est la possibilité de l'association de l'angine de poitrine avec ces états morbides 1.

Par contre, les douleurs thoraciques profondes qui ac-compagnent une aortité aiguë et surviennent par accès à l'occasion d'un effort, d'une émotion, etc., lors même qu'elles se présentent isolées, doivent être assimilées à des ébauches d'angine de poitrine.

Nous ne pouvons pas entrer ici dans les détails du dia-gnostic différentiel. Notons seulement que les phénomènes respiratoires décrits précédemment sont tellement caracté-ristiques qu'on peut les considérer comme pathognomoni-ques ; lorsqu'ils seront nettement ébauchés, ils trancheront le diagnostic.

Le pronostic dépend des variétés. Il est des plus fa.vo-rables, malgré l'intensité des souffrances, dans l'angine de poitrine liée à certains états généraux : hystérie,neurasthé-nie, dyspepsie, intoxication tabagique, etc., en un mot, dans les cas qu'on a qualifiés improprement de pseudo-an-gines.

Lorsque l'angine de poitrine coexiste avec des altérations

1.. M. Huchard a reproduit (d'après Lecorché et Talamon, Traité de l'albuminurie, 1888),une observation où l'angine de poitrine a coïncidé chez un brightique saturnin avec l'oblitération presque complète des deux artères coronaires par une plaque d'aortite subaiguë (3!, p. 883).

Le fait ne doit pas nous étonner : l'angine de poitrine est une mani-festation de l'aortite et l'oblitération des coronaires en est une autre.

Cette interprétation est d'autant plus justifiée que le brightisme prédis-pose à de brusques élévations de la pression sanguine.

organiques du cœur et de l'aorte_, l'issue fatale est à craindre dans un accès.

L'absence des signes de lésions organiques aidera ordi-nairement à différencier les variétés ; cependant on ne doit pas toujours s'y fier. L'angine de poitrine peut être quelquefois le premier symptôme appréciable d'une aortite aiguë (obs. de M. Huchard, 31, p. p. 118-119) et même d'un anévrysme commençant de l'aorte dont Trousseau a rapporté des exemples (79, p. p. 531, 532 et 533 ; voir aussi notre obs. II).

Le traitement curatif par excellence des accès consiste dans les inhalations de nitrite d'amyle. Dans les cas rares où ce médicament reste sans effet, on recourra à tous Jes moyens dépresseurs de la pression sanguine. Les émis-sions sanguines elles-mêmes ne doivent pas être négligées;

Hervieux a rapporté un exemple remarquable où les accès cédaient à mesure que le sang s'écoulait (29) ; la saignée nous semble particulièrement indiquée, dans l'angine de poitrine des brightiques.

Le traitement préventif sera dirigé contre les causes prédisposantes et déterminantes précédemment énumérées.

Il visera spécialement_, selon la prédominance de tel ou tel élément, tantôt le cœur (sédatifs), tantôt la circulation périphérique, tantôt les altérations du sang (diabète).

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