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DESCRIPTION DES MATRICES ENCAISSANTES

MEILLERET CHATILLON

Groupe 4 : éléments volcaniques

2.4. DESCRIPTION DES MATRICES ENCAISSANTES

2.4.1. REMARQUES LIMINAIRES

Les blocs lenticulaires décrits plus haut (2.2., 2.3.) sont entourés d'une matrice de nature argileuse ou marneuse, qui fait parfois totalement défaut mais qui représente, dans certains cas, plus de 80 % de la surface affleurante. Nous distinguons ici deux types de matrice : d'une part les matrices exogènes, formées de matériel étranger au bassin sédimentaire où se forme le complexe chaotique, d'autre part les matrices endogènes constituées de sédiments autochtones.

Les matrices du premier type sont souvent très déformées et renferment des

associations paléontologiques généralement plus anciennes que celles des lentilles les plus jeunes. En outre, elles présentent de grandes ressemblances lithologiques avec les termes argileux ou marneux de la série constituant le faciès chaotique. Ce type de matrice résulterait donc de la désagrégation des niveaux tendres lors du

démantelement d'une séquence stratigraphique. Les lentilles, quant à elles, seraient formées des horizons compétents disloqués.

Les matrices de la deuxième catégorie ne montrent qu'une faible déformation et contiennent des associations paléontologiques contemporaines ou plus jeunes que celles des lentilles les plus récentes. Si elles ne présentent pas d'affinités lithologiques particulières avec les niveaux marneux ou argileux de la série composant le faciès chaotique, les matrices endogènes comportent par contre des analogies

pétrographiques avec les horizons tendres immédiatement sous- jacents à celui-ci.

Nous les interprétons donc comme un sédiment pélagique autochtone, contemporain de la formation du wildflysch.

Dans les différents wildflyschs de notre secteur, nous avons pu identifier trois matrices du premier type et une du second.

2.4.2. LES ARGILITES LIE-DE-VIN Figures 39, 46

Ces roches sont associées sur le terrain à des blocs décamétriques de biomicrite claire à radiolaires, protoglobigérines et débris d'ammonites (faciès "tithonique", PK 410 et 415). Elles consistent en schistes satinés lie-de-vin, riches en minéraux ferrifères et pratiquement dépourvus de quartz détritique (moins de 5 %, taille 0.05 mm). Une analyse aux RX révèle la présence de chlorite, pics à 14.15

A

(00 l) et 7.06

A

(002) et d'illite bien cristallisée, pic étroit à 10.01

A,

traduisant l'effet d'un léger

métamorphisme. Ces roches ne contiennent aucun organisme.

Les argilites lie-de-vin ne se rencontrent qu'en deux endroits au-dessus de la Berchère (coordonnées: 932.4/127.8/1315 rn - feuille Cluses 1-2, 1:25.000).

Elles correspondent aux "schistes bariolés" de LILLIE (1937). Cet auteur n'a cependant pas signalé leur association avec les calcilutites du Jurassique supérieur.

Des argilites similaires sont intercalées stratigraphiquement dans les dolomies triasiques du domaine alpin externe (COLLET 1910, BADOUX 1945, RICOUR &

LIENHARDT 1954, AMBERGER 1960, LOMBARD 1983, CARON & al. 1967, ACKERMANN 1986a et b, CHAROLLAIS & al. 1987). Dans la nappe de la Brèche, les pélites lie-de-vin sont attribuées d'une part au Permien supérieur (faciès

Verrucano resédimenté en "mégablocs" dans la "Brèche inférieure", WEIDMANN 1972) et d'autre part au Jurassique supérieur (?) en association avec des calcaires blancs à radiolaires ("Schistes ardoisiers", SCHROEDER 1939, CHESSEX 1959).

Enfin, les schistes versicolores des zones plus internes sont attribués au Permien sans preuve paléontologique (LEFEVRE 1966, SEPTFONT AINE & WERNLI 1972, WERNLI & BRONNIMANN 1973).

Les argilites lie-de-vin évoquent fortement les roches analogues du Permien

(TRÜMPY 1966) et du Trias. Cependant, leur étroite association sur le terrain avec des biomicrites de faciès "tithonique" ne permet pas de les rattacher à l'une ou l'autre de ces périodes. Elles apparaissent plutôt comme des dépôts resédimentés au

Jurassique supérieur sous forme de mégablocs ou de matrice de conglomérat et pourraient être mises en analogie avec les "Schistes ardoisiers" de la nappe de la Brèche.

2.4.3. LES ARGILITES NOIRES Planche 15 : E-H

Figures 29, 30, 31, 33, 34, 35bis, 36, 39, 41, 42, 43, 51, 52, 53

Ce type de matrice est représenté par des argilites sombres très fissiles. Leur contenu en muscovite varie selon les endroits; une analyse aux RX de quelques prélévements montre la présence d'illite, de chlorite, d'interstratifiés 10-12 A et de smectite.

Tous les lavages effectués dans ces roches se sont révélés stériles. En outre, les préparations palynologiques et nannopaléontologiques ont livré des résultats contradictoires. Ainsi, l'échantillon PK 155, prélevé sur la grande niche

d'arrachement à l'intersection de la dept. 6 et du ruisseau de l'Ally (coordonnées : 932.3/124.8/950 rn, feuille Cluses 1-2, 1:25.000) présente d'une part des nannofossiles paléogènes comprenant (communication écrite, H. MANIVIT 1983) :

petits Prinsiaceae

Coccolithus pelagicus SCHILLER Ericsonia cava PERCH-NIELSEN

Ericsonia ovalis BLACK

et d'autre part une microflore de pollens et de dinokystes du Jurassique inférieur-moyen dont les fossiles les plus typiques sont des représentants du genre

Nannoceratopsis (N.gracilis; communication écrite, P. HOCHULI 1984).

En tous les cas, l'âge de cette matrice obtenu à partir de son contenu

micropaléontologique apparaît plus ancien que celui déduit des lentilles qu'elle renferme. Les plus récentes d'entre elles sont en effet attribuées à l'Eocène supérieur (couches de Samoëns, 2.2.13 ), voire à l'Oligocène basal (couches de la Plaigne 2.2.15.,

grès de Taveyannaz 2.3.12.). ·

Fig. 29 : Torrent du Verney, 1060 m. Affleurement de wildflysch à matrice argilo-schisteuse noire et lentilles plurimétriques de calcilutite et de grès.

Souvent mentionnées comme formant le liant des wildflyschs des Préalpes inférieures romandes et chablaisiennes (LILLIE 1937, BADOUX 1945, GUILLAUME 1957, MOREL 1980, LOUP 1987), les argilites noires constituent la matrice la plus répandue dans le complexe chaotique entre Arve et Giffre. Elles apparaissent particulièrement bien entre le torrent du Nant d'An et les Saix, dans le torrent du Verney et ses affluents ainsi qu'au S de la Frasse (ruisseau de la Grangette, de l'Ally et des Rots). Plusieurs auteurs (FERRAZZINI 1981, LOUP 1987) ont déjà remarqué leur ressemblance lithologique avec l"'Aalénien des cols". Ils expliquent cette

convergence de faciès par des phénomènes de dissociation et de resédimentation de cet horizon plus ancien lors de la formation du wildflysch.

Cette hypothèse semble être largement confirmée par la présence de pollens et de dinokystes du Jurassique inférieur-moyen dans les argilites noires ainsi que par leur remarquable analogie minéralogique avec les couches de St-Sigismond (2.2.2., fig. 30) Ces argilites apparaissent donc comme une matrice exogène résultant du remaniement de schistes aaléniens par des coulées boueuses.

2.4.4. LES MARNES SOMBRES

Ces roches de couleur brun-foncé se distinguent de celles du type précédent par

l'absence de muscovite et une forte réaction à l'acide chlorydrique. Nous les avons observées à Bémont d'en bas, en rive droite du Nant d'An, où elles renferment des blocs lenticulaires de calcilutites claires du Crétacé supérieur (3.3.2.). Elles nous ont fourni à cet endroit une association de nannofossiles néocomiens comprenant (comm.

écrite, H. MANIVIT 1983) : W atznaueria barnesae BLACK Cyclagelosphaera margerelii NOEL Diazmatholithus lehmanii NOEL

Cretarhabdus crenulatus BRAMLETTE & SULLIVAN

De lithologie très banale, ces roches montrent néanmoins certaines ressemblances avec les horizons marneux du Crétacé inférieur ultrahelvétique (couches du Nant d'An, 2.2.7.; CHAROLLAIS & al. 1981; ANATRA 1986).

Les marnes sombres représenteraient donc une matrice exogène, formée par la remobilisation de sédiments d'âge néocomien.

pk 3 7 3 pk 1 5 5

Fig. 30 : Comparaison des diagrammes de minéraux argileux des couches de St-Sigismond (PK 373) et de la matrice argileuse noire du wildflysch (PK 155).

i = illite, cl = première réflexion de la chlorite, c2 = deuxième réflexion de la chlorite; is = interstratifiés

2.4.5. LE MARNO-MICACE

Ce type de matrice est constitué de marnes micacées peu déformées tectoniquement de couleur brune. Souvent laminées, ces roches comportent en outre de minces horizons gréseux ou calcaires. Ce liant marno-micacé est bien visible dans le torrent des Rots (3.3.1.), le ruisseau de Gron (1385 rn) ainsi que sur l'escarpement du Plon du Dard (3.3.3.). Sur le premier affleurement, il renferme des lentilles décimétriques à métriques, analogues au faciès arkosique des couches de Samoëns (2.2.13.) et nous a fourni (PK 308a et 681 à 686) :

Globigerina cf. ciperoensis BOLLI Cassigerinella sp.

Chiloguembelina sp.

Pseudohastigerina sp.

Cette association de foraminifères planctoniques serait attribuable à l'Oligocène inférieur (communication écrite, R. WERNLI 1987). Au Plon du Dard, il semble être intercalé entre les couches du Taffon (2.2.4.) et celles des Rosières (2.2.5.); il contient en outre des nannofossiles de l'Eocène (communication écrite, H. MANIVIT 1983).

Le marno-micacé correspond à une matrice endogène. Il représente la sédimentation autochtone du bassin helvétique lors de la formation de l'olistostrome sommital.

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