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CHAPITRE II : ETAT DE L’ART ET PROPOSITION D’UNE REPRESENTATION GENERIQUE

3. A NALYSE DE PLUSIEURS APPROCHES DE R ETOUR D ’E XPERIENCE

3.3. De la description à l’expérience

3.3.1. SEP – Division Grosse Propulsion à Liquides (France)

La SEP (Société Européenne de Propulsion) travaille sur des programmes aérospatiaux de longue durée, pour lesquels il est nécessaire de maintenir les connaissances techniques des acteurs. Dans ce cadre, l’entreprise a mis en place une démarche de Retour d’Expérience qui est initialisée par l’apparition de trois types d’événements [Kretzschmar et Thevenot 96] :

? les anomalies, qui englobent les non-conformités de production et tout événement anormal apparaissant à tout instant du cycle de vie d’un produit,

? les dysfonctionnements, liés à des défauts de management, de décision inadaptée ou de non- respect de procédures par exemple,

? les événements issus du marché, qui consistent en l’analyse des produits concurrents.

Pour les deux premiers types d’événements, une analyse conduit à la définition d’actions curatives et correctives, respectivement dans les systèmes GOT-ANO (Gestion des Objets Techniques – Anomalie) et GOT-ACTION (Gestion des Objets Techniques – Action). Les informations issues de la base GOT (Gestion des Objets Techniques) sont utilisées pour faire le lien avec les modes de défaillance d’un produit analysés par une méthode AMDEC. Lorsque le mode de défaillance est

Défaillances équipements Caractérisation du contexte MAINTENANCE Application Informatique REX - FIAB Fiche d’indisponibilité Demandes d’intervention

observé, il est immédiatement lié aux informations de la base GOT relatives à l’évé nement qui l’a provoqué.

Pour les événements issus du marché, les descriptions fonctionnelles des systèmes propulsifs pour fusées et des incidents majeurs de produits concurrents sont collectées dans la base de données MERMOS (Mémorisation de l’Expérience Rassemblée sur les Moteurs). Ces informations sont alors prises en compte dans les processus industriels de l’entreprise (conception, industrialisation, maintenance…). Cette démarche est illustrée sur la figure II-3.

Figure II-3 : démarche de Retour d’Expérience à la SEP – Division Grosse Propulsion à Liquides, France.

L’analyse des événements conduit ici à la mise en place de solutions (curatives et correctives) : la description du contexte n’est donc plus réalisée seulement pour établir des calculs statistiques et il est alors nécessaire de l’enrichir avec des informations plus précises.

Comme la COGEMA, la SEP ne travaille que sur des événements négatifs. Dans cette démarche, la source d’événements peut être externe à l’entreprise. C’est notamment le cas lorsque le marché est mis sous surveillance et que les événements collectés proviennent de la concurrence. De plus, nous pouvons noter que cette démarche conduit à une gestion coordonnée orientée produit, avec la base GOT-ANO, et orientée projet, avec la base GOT-ACTION.

3.3.2. Air France

Depuis plusieurs années, l’objectif prioritaire d’Air France en matière de prévention des accidents, est la conduite d’un système cohérent de Retour d’Expérience, adapté à la culture d’entreprise et à la nature des risques encourus. Une démarche de Retour d’Expérience a donc été mise en place au sein du Service Prévention et Sécurité des vols, Assurance Qualité Exploitation (au sein de la Direction de la Qualité et de la Sécurité) [Courville 00]. Ce service ne traite pas la partie maintenance, mais la partie exploitation, c’est-à-dire, les événements qui se sont produits sur des avions en bon état.

La démarche conduit à identifier les événements et à les analyser, afin de réduire la probabilité d’accident en améliorant de manière continue les programmes de formation et d’entraînement, ainsi que les documents, les procédures opérationnelles et la conscience des risques chez les personnels de la compagnie. La démarche mise en place est schématisée sur la figure II-4.

Anomalies

Dysfonctionnements Actions curatives et correctives

PROCESSUS INDUSTRIELS GOT - ANOMALIE GOT - ACTION MERMOS

Surveillance du marché Enseignements sur les moteurs

Figure II-4 : démarche de retour d’expérience mise en place à AIR FRANCE.

Différents canaux de remontée et de traitement des informations ont été mis en place de façon à obtenir le maximum d’informations possible.

Les Air Safety Reports (ASR)

Ils sont renseignés par les membres d’équipage qui rapportent les événements ayant ou pouvant avoir un lien avec un scénario d’accident. C’est un support formalisé parfaitement identifié (nom du personnel et numéro de vol) en liaison directe avec un outil informatique : l’événement est saisi au niveau central par le Service et mis à disposition, à l’aide du réseau interne, des services qui sont intéressés ou concernés par ce type d’événement.

Ce canal permet de recueillir un large éventail d’événements et de sujets, pour lesquels le support est formaté de telle manière que la saisie soit relativement simple. Ce type de retour d’expérience, associé à une base informatique permet de réaliser le suivi avec une base de données exploitée en réseau. Il apparaît cependant que le Service obtient peu d’information lorsque l’équipage se sent mis en cause. De plus, la culture du personnel vis-à-vis du risque est différente selon le secteur : certains événements peuvent laisser indifférents un ensemble d’acteurs, alors qu’il peuvent déclencher un rapport pour d’autres.

Deux cent personnes environ sont connectées et habilitées à lire dans la base de données qui stocke trois mille rapports par an. Chaque mois, les événements se situant au dessus du niveau minimum de gravité (combinaison de la probabilité d’occurrence et de la gravité) sont publiés selon plusieurs niveaux : minimum, low, medium, high, severe. Ces documents sont publiés librement auprès de tous les équipages de la compagnie.

Le Quick Access Recorder (QAR)

Le QAR est un dispositif de surveillance qui enregistre de manière systématique les paramètres du vol. Ainsi, les anomalies opérationnelles les plus significatives sont automatiquement détectées. Elles sont restituées aux équipages concernés qui sont encouragés à décrire dans le détail les scénarios, les circonstances, les difficultés rencontrées et les leçons tirées à titre personnel. Les informations relatives à tous les vols sont systématiquement dépouillées et analysées tous les deux mois par la Commission d’Analyse des Vols. Les événements les plus intéressants sont alors publiés deux fois par an.

Le QAR est un support objectif avec des mesures réelles, ce qui permet de réaliser des analyses statistiques. Une partie confidentielle et anonyme de ce support permet de compléter la partie quantitative (mesures) en recueillant certains éléments concernant l’équipage. Il apparaît extrêmement important de maintenir un haut niveau de confiance afin d’encourager le personnel à s’exprimer sur certaines situations.

Incidents en exploitation Expérience

PROCESSUS D ’EXPLOITATION

Diffusion Air Safety Reports

Quick Access Recorder

Rapports spontanés confidentiels Sondages ponctuels

Les rapports spontanés confidentiels (Rex)

Chaque membre d’équipage a la possibilité, lorsqu’il le juge utile, de partager son expérience (essentiellement humaine) sur une situation vécue en utilisant un support confidentiel. En moyenne, une cinquantaine de rapports sont rédigés par an par le s membres d’équipage. L’ensemble de ces documents est soumis à une commission. Des mesures préventives sont prises et les événements les plus significatifs et les plus pédagogiques sont communiqués, deux ou trois fois par an, avec leur analyse à tous les équipages de la compagnie. Cette communication est réalisée sous forme de publication ou alors, est répercutée en termes de formation et d’intégration dans les documents de référence utilisés par le personnel.

Ce canal permet de recueillir les aspects non visibles des événements et notamment ceux relatifs au facteur humain. Il complète ainsi les canaux ASR et QAR.

Les sondages ponctuels

Les sondages ponctuels, des questionnaires portant sur des points précis, pour lesquels il n’y a pas de remontée d’informations, sont envoyés aux équipages (au maximum deux par an).

L’avantage de ce canal est de traiter les événements à faible visibilité. De plus, il constitue un support efficace de sensibilisation à des problèmes qui peuvent être sous-estimés par une population. Cependant, la qualité des réponses est aléatoire et le taux de réponse est souvent modeste (15%).

L’originalité du système d’Air France réside dans la mise en place de différents canaux de remontée de l’information. Ils permettent de couvrir de façon assez complète les événements. La saisie, lors du stockage des informations, est généralement réalisée de façon manuelle, sur des supports mis à la disposition des équipages.

Le traitement de l’info rmation récoltée est alors réalisé de manière uniforme : les événements sont analysés, puis mis à disposition, avec une forte campagne de diffusion auprès des équipages. Cependant, cette démarche demande une forte implication des acteurs qui sont souvent freinés par la peur de la sanction. La plupart des canaux utilisés dépendent directement de la volonté des équipages. La qualité et la quantité des informations sont alors difficilement garanties.

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