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CHAPITRE 8 DISCUSSION GÉNÉRALE ET RECOMMANDATIONS

8.2 Les limites des résultats obtenus

8.2.1 Des hypothèses sur la modélisation des facteurs d’incertitude

L’ajout de l’incertitude de base à l’incertitude additionnelle ainsi que la détermination des facteurs d’incertitude passe par la modélisation de ces derniers; modélisation qui implique quelques choix. Les effets de ces choix ne sont pas quantifiés ici, ils sont plutôt caractérisés qualitativement expliquant d’où l’incertitude de modélisation des facteurs d’incertitude pourrait provenir.

Un des premiers choix effectués est celui du paramètre représentant le facteur d’incertitude. Il a été mentionné précédemment que différents paramètres avaient été proposés par les auteurs, parmi eux le CV, le carré de l’écart-type géométrique et l’écart-type logarithmique (cf. section 3.3.2). Dans le cadre de cette thèse, le CV a été utilisé pour l’application de l’approche pedigree à l’ensemble des distributions de probabilités (cf. Chapitre 5) et le GSD2

pour le développement de facteurs d’incertitude réalisé dans le cadre du troisième article (cf. Chapitre 6). Bien qu’il n’ait pas d’incidence sur les résultats en eux-mêmes, ce manque de cohérence autour de ces deux choix peut avoir une incidence sur la clarté des résultats présentés. En appliquant le lien existant

entre le CV et le GSD pour une distribution log-normale (cf. Tableau 5-0-2), les facteurs d’incertitude peuvent facilement être exprimés en termes de CVs et donc être directement appliqués avec les résultats obtenus au deuxième article.

Comme stipulé à la phrase précédente, il est supposé ici que les facteurs d’incertitude suivent une distribution log-normale. Le choix de cette distribution joue un rôle important notamment pour l’application du théorème de Bayes qui permet ici l’obtention de facteurs d’incertitude. En effet, le choix de la distribution à priori a une incidence pour l’application du théorème et, suivant son type, peut influencer la distribution à posteriori (Morita, et al., 2010). La distribution log-normale utilisée à priori permet, puisqu’elle est à support de définition semi-infini, de ne discriminer aucune valeur positive possible pour le facteur d’incertitude. Par des applications successives du théorème de Bayes, l’influence initiale de l’information à priori tend de plus à diminuer.

Afin de tester l’influence de cette distribution à priori, le théorème de Bayes est appliqué une seconde fois pour certains facteurs d’incertitude additionnelle génériques avec le choix d’une distribution à priori uniforme. Comme les distributions uniforme et log-normale (représentant la fonction de vraisemblance) ne sont pas conjuguées, le théorème de Bayes doit être appliqué de manière numérique. Pour ce faire, les techniques de Monte-Carlo par chaînes de Markov (MCMC) sont utilisées en utilisant le logiciel OpenBUGS. Le minimum et le maximum de la loi uniforme sont déterminés en fonction des données de l’Annexe D. Les résultats obtenus pour une simulation de 5000 pas sont comparés avec ceux obtenus au troisième article (cf. Chapitre 6) et sont présentés au Tableau 8-1. Ces résultats montrent que le type de distribution utilisé à priori a une incidence sur les résultats. Cette incidence est due à la forme de la distribution uniforme, le fait qu’elle soit bornée fait en sorte que la distribution à posteriori ne peut être définie à l’extérieur de ces bornes. Ceci est illustré à la Figure 8-1. Compte tenu du fait que la manière dont le jugement d’experts a été élicité pour le développement de facteurs d’incertitude initiaux n’est pas documentée et qu’aucune information sur leurs valeurs minimale et maximale n’est donnée, le choix d’une distribution non bornée est justifiée ici. Néanmoins, avec ce choix vient une hypothèse reliée à l’incertitude sur le facteur d’incertitude et plus spécifiquement sur la valeur de l’écart-type logarithmique servant à modéliser la distribution log-normale à priori.

Tableau 8-1 Résultats de l’analyse bayésienne par MCMC pour une fonction à priori uniforme et comparaison avec les résultats obtenus à l’article 3. La fonction à posteriori1 représente la fonction obtenue à l’article 3 et la fonction à posteriori2 représente celle obtenue dans le cas d’une loi à priori uniforme.

Indicateur pedigree Score Paramètre de la loi uniforme utilisée à priori Facteur d'incertitude générique issue de la fonction à posteriori 1 Facteur d'incertitude générique issue de la fonction à posteriori 2 Erreur relative min max Justesse 2 1.05 1.54 1.01 1.05 3.96% 3 1.02 1.64 1.21 1.37 13.22% 4 1.20 1.69 1.25 1.42 13.60% 5 1.50 5.10 2.36 3.81 61.44% Corrélation temporelle 2 1.00 1.22 1.09 1.11 1.83% 3 1.00 1.73 1.55 1.58 1.94% 4 1.01 2.88 2.22 2.49 12.16% 5 1.01 3.86 2.49 3.22 29.32% Corrélation géographique 2 1.00 1.40 1.14 1.26 10.53% 3 1.02 1.64 1.23 1.41 14.63% 4 1.03 2.57 2.36 2.32 1.69% 5 1.10 2.57 2.30 2.32 0.87% Corrélation technologique 2 1.00 1.37 1.19 1.26 5.88% 3 1.02 1.65 1.52 1.50 1.32% 4 1.07 2.08 1.95 1.88 3.59% 5 2.00 2.80 2.23 2.54 13.90%

Figure 8-1 Représentation des distributions à priori (prior) uniforme et à posteriori (posterior) ainsi que de la fonction de vraisemblance (likelihood) pour le score 5 de l’indicateur justesse

8.2.2 La représentativité des données utilisées pour développer de nouveaux

facteurs d’incertitude

Les données utilisées pour développer les facteurs d’incertitude proposés à l’article 3 sont issues de nombreuses sources de données. Si au moment de la collecte de ces données, un effort particulier a été fait pour accéder à des données représentatives de l’ensemble des secteurs industriels, cette représentativité peut être discutée. La Figure 8-2 témoigne de ce manque de représentativité. Pour chaque secteur industriel spécifique, le pourcentage de sous-secteurs déterminés par la classification NAICS au niveau 6 est représenté, au mieux c’est près de 60% de ces sous-secteurs qui sont représentés dans l’analyse menée. Ce manque de représentativité est lié à l’accessibilité de ces données. Dans ce projet, les données ont été collectées à la main (ce qui peut aussi entraîner des erreurs dans leur traitement) au travers des sources à disposition. L’accès et la collecte de données d’inventaire –libres- reste encore aujourd’hui une problématique en ACV (Steinmann et al., 2014). En plus d’une limite dans la représentativité, ce difficile accès aux données a fait en sorte que l’approche, et notamment le développement des facteurs d’incertitude,

n’a pu être réalisée pour certains types de données utilisées en ICV (par exemple les paramètres permettant de relier une propriété physique, économique ou temporelle à des flux d’inventaire).

Figure 8-2 : Pourcentages des sous-secteurs NAICS définis au niveau 6 représentés dans l’analyse de données pour chaque secteur industriel spécifique

L’utilisation de la méthode bayésienne permet néanmoins de s’affranchir partiellement de cette limite puisque l’accès à de nouvelles ou à de « meilleures » données permettra de mettre à jour les facteurs d’incertitude obtenus et de les raffiner. Les résultats présentés ici ne doivent donc pas être considérés comme définitifs mais plutôt comme les premiers pas d’un processus itératif qui permet le développement de facteurs d’incertitude qui représenteront de mieux en mieux la réalité qu’ils modélisent.