• Aucun résultat trouvé

D. Traitements de la douleur neuropathique centrale post accident vasculaire cérébral

2. Des anticonvulsivants aux propriétés antihyperalgésiques

L’efficacité des anticonvulsivants ou antiépileptiques sur les douleurs neuropathiques et plus particuliè- rement la DCPA reste un sujet de controverses. Ils ont cependant été utilisés pour le traitement de di- verses conditions douloureuses (Siniscalchi et al., 2012). Les anticonvulsivants sont des régulateurs négatifs de l’excitabilité neuronale. Ils empêchent l’activité électrique excessive soit en favorisant les mécanismes inhibiteurs ou en altérant les mécanismes excitateurs au niveau du SNC (Pineyro and Azzi, 2005). La gabapentine et la carbamazépine sont deux molécules ayant été développées pour leurs pro- priétés anticonvulsivantes et dont les mécanismes d’action sont distincts (Pineyro and Azzi, 2005).

2.1. La gabapentine

La gabapentine [1-(aminomethyl) cyclohexane acetic acid], est un analogue structural du GABA (Mao and Chen, 2000).

2.1.1. Etudes cliniques

Plusieurs études ont démontré l’efficacité de la gabapentine dans le traitement de douleurs neuropa- thiques telles que les neuropathies diabétiques, la douleur post-herpétique, la douleur cancéreuse neu- ropathique, ou la sclérose en plaque (Mao and Chen, 2000). Dans une étude évaluant l’effet de la gaba- pentine par rapport au placebo chez des patients souffrant de douleur neuropathique centrale ou péri- phérique, une diminution de l’allodynie tactile et au froid a été observée (Attal et al., 1998). Cette drogue atténuerait également la douleur spontanée paroxystique lancinante ou de type brûlure (Mao and Chen, 2000). Ces caractéristiques sont souvent rencontrées dans la DCPA. Des résultats semblables ont été rapportés sur des modèles animaux de douleur neuropathique (Chogtu et al., 2011; Coderre et al., 2005; Densmore et al., 2010). Par exemple, dans un modèle de douleur centrale induite par un hé- matome impliquant le thalamus et les ganglions basaux chez le rat, il a été observé que la gabapentine pouvait renverser la douleur neuropathique induite par la lésion (Roy et al., 2011).

36 2.1.2. Effets indésirables de la gabapentine.

Les effets secondaires de la gabapentine rapportés chez l’homme incluent le plus souvent des étourdis- sements, de la somnolence, de la confusion et de l’ataxie (Mao and Chen, 2000). Chez l’animal, on observe surtout de la sédation et de l’ataxie (Plumb, 2011).

2.1.3. Mécanismes d’action de la gabapentine

Le mécanisme d’action de la gabapentine demeure méconnu et résulterait d’une synergie complexe entre une augmentation de la synthèse du GABA, un antagonisme des récepteurs au glutamate non- NMDA, et une action sur des récepteurs calciques voltage-dépendants (Bennett and Simpson, 2004). Concernant son activité sur le système gaba-ergique, bien qu’étant un analogue structural du GABA, la gabapentine ne se fixe pas sur les mêmes récepteurs. Cependant, elle augmente la synthèse du GABA à partir du glutamate et sa libération par les astrocytes (Bennett and Simpson, 2004). Les anticonvulsi- vants tels que la gabapentine, agissent également sur les canaux voltage dépendant sélectivement per- méables au Ca 2+ de type N, en se fixant sur la sous-unité α2δ du canal (Pineyro and Azzi, 2005). Les canaux calciques voltage dépendant de type N jouent un rôle majeur dans la douleur neuropathique et leur expression est notamment liée à la plasticité neuronale (Walczack and Beaulieu, 2005). Ces canaux contrôleraient la libération des neurotransmetteurs au niveau des afférences primaires ainsi que la dépo- larisation post synaptique des neurones de la corne dorsale (Pineyro and Azzi, 2005). Ainsi, l’administration de gabapentine bloquerait ces canaux ce qui préviendrait l’influx calcique intracellu- laire, la libération d’acides aminés excitateurs et les cascades d’activation post-synaptique subsé- quentes. Cette action serait le support de son action anti-allodynique et anti-hyperalgésique.

2.2 La carbamazépine

Comme la gabapentine, la carbamazepine est un anticonvulsivant pouvant être utilisé pour le traitement de certaines douleurs neuropathiques (Hahm et al., 2012). Elle est également utilisée comme stabilisa- teur de l’humeur dans les désordres bipolaires (Pineyro and Azzi, 2005). Son mécanisme d’action est différent de celui de la gabapentine puisqu’elle agît elle, sur des canaux excitateurs sélectivement per- méables au Na+ (Pineyro and Azzi, 2005).

2.2.1 Efficacité clinique de la carbamazépine

En plus de son activité anticonvulsivante, la carbamazépine est reconnue pour le traitement de la dou- leur paroxystique associée à la névralgie trigéminale (McQuay et al., 1995). Elle serait également effi- cace pour le traitement de la migraine (McQuay et al., 1995). L’effet de la carbamazépine sur la dou- leur centrale post AVC a été évalué dans une étude chez l’homme par comparaison avec un placebo.

37

Malheureusement, bien qu’une réduction de la douleur soit décrite chez certains patients, le soulage- ment n’était pas statistiquement significatif par comparaison avec le placebo (Leijon and Boivie, 1989).

2.2.2. Effets indésirables de la carbamazépine

L’utilisation de la carbamazépine est souvent limitée par ses effets secondaires (Hansson, 2004). Bien qu’elle puisse être efficace lors de douleur centrale paroxystique lancinante, des effets indésirables demeurent relativement fréquents, les vertiges, la somnolence et les étourdissements étant les plus sou- vent rapportés (McQuay et al., 1995).

2.2.3. Le mécanisme d’action antihyperalgésique

Au niveau des terminaisons nerveuses lésées et en particulier au niveau des fibres de gros diamètre A- β, des décharges ectopiques spontanées peuvent être observées. Ce phénomène serait dépendant de l’activation de canaux sodiques voltages dépendants et contribuerait à l’allodynie et à l’hyperalgésie, caractéristiques de la douleur neuropathique (Millan, 1999). Le mécanisme responsable de ces dépola- risations spontanées est un remodelage membranaire conduisant à un excès de canaux sodiques au ni- veau des terminaisons nerveuses de la lésion tissulaire ou des zones démyélinisées (Bennett and Simp- son, 2004). La carbamazépine préviendrait ces décharges ectopiques en bloquant les canaux sodiques voltage dépendants. Ceci stabiliserait la membrane présynaptique et préviendrait alors la libérations d’acides aminés neuroexcitateurs et ainsi l’installation d’hyperalgésie (Hahm et al., 2012).

Documents relatifs