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: De la Grande guerre aux révolutions (1914-1923)

Dans le document Le monde de 1850 à nos jours (Page 44-54)

2 e partie : Crises des sociétés modernes (1914-1945)

Chapitre 1 : De la Grande guerre aux révolutions (1914-1923)

A Entrer dans la guerre

Pourquoi les sociétés et les gouvernements acceptent-ils le risque de la guerre ? 1 « Le narcissisme des petites différences ». Freud

L’Europe du 19e siècle est contaminée par les thèses racistes qui visent à établir une hiérarchie entre les Européens et les autres peuples… mais aussi entre les Blancs eux-mêmes. Le pangermanisme prône la conquête de la Mittel Europa jugée nécessaire pour établir un espace vital indispensable à la prospérité de la race aryenne. Ce Lebensraum se ferait au détriment des Slaves jugés comme des races inférieures qui seraient soit réduites à l’esclavage soit expulsées vers l’est. Le panslavisme répond à cette démarche en visant à établir une unité « raciale » et religieuse (chrétienne orthodoxe) garantissant le contrôle direct ou indirect de toute l’Europe centrale à la Russie. Tout conflit aussi mineur soit-il dans cette région est aussi vu comme la préfiguration d’un combat apocalyptique entre races dont l’objet est la mise sous tutelle voire la disparition de tout un groupe humain. Les stéréotypes nationaux se diffusent largement dans toute l’Europe. Aux images d’un Français ripailleur, décadent et indiscipliné diffusées dans la presse allemande répondent les caricatures d’Hansi dénonçant des colons allemands gras, vulgaires et stupides qui persécutent les bons Alsaciens restés attachés à la France. La presse hexagonale s’enflamme régulièrement pour de beaux militaires qui appellent à la Revanche (général Boulanger) ou défendent le colonel Marchand, qui défend le drapeau tricolore à Fachoda contre des « politicards parisiens » qui négocient en sous main avec la perfide Albion (pour finalement obtenir 5 ans plus tard l’alliance indispensable à la revanche contre l’Allemagne). Les instituteurs de la 3e République montrent sans cesse sur les cartes de France la « ligne bleue des Vosges » pour rappeler les enfants à leur devoir futur.

Partout en Europe, Etat, groupements nationalistes structurés, organes de presse grand public favorise la diffusion d’un nationalisme agressif, exaltant la communauté nationale et dévalorisant les pays voisins.

2 La culture de guerre en Europe

La guerre et son histoire sont l’objet de nombreux ouvrages savants et populaires au 19e siècle.

L’image du combattant chevaleresque envahit les livres d’histoire de l’école républicaine.

Vercingétorix, Charles Martel, Roland, Bayard, Jeanne d’Arc deviennent des modèles pour les petits Français. S’opposant à l’envahisseur, défendant leur patrie jusqu’à la mort, ces lointains héros préparent mentalement les jeunes gens au sacrifice suprême.

Le service militaire, obligatoire pour tous les hommes âgés de 18 ans, permet de donner une instruction militaire individuelle et collective assez poussée. En mélangeant classes sociales et origines géographiques, la conscription a également pour but de faire naître un esprit de corps et entretient la fibre nationaliste. Individuellement, ce temps compose pour des millions de jeunes gens un rite de passage entre l’enfance et l’âge adulte et une expérience radicalement nouvelle par

Le saviez-vous ?

Sur les cartes scolaires représentant la France de 1871 à 1914, les frontières étaient symbolisées par un trait noir sauf celles avec l’Allemagne, dont le caractère provisoire était rappelé par l’usage de la couleur bleue.

Cours rédigé par C. Meignat et C. Delaunay (Lycée Descartes de Tours) Juillet-août 2011

l’éloignement de la cellule familiale et villageoise. La guerre, le combat représente une possibilité d’affirmer sa virilité et donc revêt un aspect positif pour la majorité des Européens.

Le modèle antique du conflit s’impose dans les esprits : la guerre se résume à une bataille décisive qui apparait comme un acte de justice divine. En France, le souvenir mythifié de Valmy et des victoires napoléoniennes, notamment Austerlitz, répond à la mémoire officielle du 2e Reich rappelant sans cesse que sa fondation se fit « par le fer et le sang » selon l’expression de Bismarck.

Les triomphes de Sadowa (1866) et de Sedan assurèrent aux Prussiens la domination sur l’espace allemand et l’affaiblissement durable de leurs potentiels adversaires.

Pourtant cette mémoire de guerre est fort sélective, elle oublie (volontairement ?) que la modernisation de l’armement a conduit :

1. à un allongement des batailles et à la mise en place de structures défensives indispensables pour se protéger de l’artillerie (à l’efficacité décuplée depuis la mise en place de l’obus propulsé par des canons striés assurant une grande stabilité de tir) lors de la guerre de Crimée (1853) et des guerres balkaniques (1912-1913)

2. à de véritables massacres quand les stratégies offensives étaient prônées par l’État-major comme à Magenta et Solferino.

Le public préfère lire La Guerre des mondes de George Orwell, qui pris au premier degré, fait l’apologie de la technologie comme outil de puissance et de domination. Beaucoup de Français aiment à penser que le canon de 75 et le fusil Lebel qui progressivement renvoie le Chassepot à l’âge de la préhistoire soient les assurances d’une victoire certaine.

La guerre est donc vue comme une épreuve difficile, sanglante mais brève qui, en fin de compte, récompense le camp défendant la justice, le Bien et valorise le citoyen-soldat, base de la société moderne.

3 Les premiers contacts avec la guerre

Les mobilisations se déroulent dans l’ordre et la discipline partout en Europe, les taux de désertions sont quasi-nuls, y compris dans les Empires multinationaux qui craignaient la rébellion ou du moins des résistances de la part des minorités allogènes (Tchèques ou Roumains dans l’Empire d’Autriche-Hongrie, Polonais du Reich…). Les pacifismes et antimilitarismes socialistes ou religieux s’effondrent, l’assassinat de Jaurès fait basculer la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière) dans l’Union Sacrée (cf carte postale de 1914) : Albert Thomas, l’un de ces leaders devient même secrétaire d’Etat aux munitions ! Cependant, il faut très sérieusement nuancer l’impression laissée par les photographies montrant un peuple enthousiaste acclamant les soldats partant « la fleur au fusil ». Les

enquêtes menées par les instituteurs et institutrices montrent au contraire qu’un grand scepticisme s’empare de la population lors de la proclamation de la mobilisation générale. Aux sombres réflexions et aux doutes succède la résignation ferme mais angoissée. La communauté villageoise, démunie de ces hommes valides, doit avant tout penser à organiser le travail des champs tandis que les mobilisés font avec courage et sérieux leur

Le saviez-vous ?

C’est lorsqu’il constate le terrible bilan humain de la bataille de Solferino (1859) qu’Henri Dunan décide de fonder la Croix-Rouge, organisation qui, à l’origine, avait pour mission de soigner les blessés des 2 camps.

devoir. Au départ vers le front, les hommes devenus militaires, désinhibés par l’alcool, prennent un air bravache et ne peuvent faire triste mine devant l’objectif des rares et peu discrets photographes mais aussi et surtout devant leurs camarades d’infortune. Une nouvelle sociabilité virile se met déjà en place.

La réussite initiale du plan Schlieffen et l’avancée rapide des troupes allemandes en Belgique puis en France du Nord permettent à l’Etat français de développer une propagande insistant sur la nécessité d’une mobilisation totale pour sauvegarder la République et la Patrie ralliant ainsi à lui toutes les tendances du spectre politique. La diffusion dans la presse d’informations alarmistes concernant les atrocités allemandes commises en Belgique et dans le Nord-Pas-de-Calais renforcent le nationalisme et la volonté de s’opposer aux « Huns ».

B La guerre totale, un tournant dans l’histoire

En quoi les affrontements de la guerre marquent-ils un franchissement de seuil de violence ? 1 Au front, tenir et détruire

Après une courte période de guerre de mouvement (été-automne 1914) où Français et Allemands essaient mutuellement de se déborder jusqu’à atteindre la mer du Nord, commence une guerre de position qui durera jusqu’au printemps 1918. La guerre, dite de tranchée, donne la primauté à la défense. La première ligne, en contact quasi direct avec l’ennemi, est reliée aux autres lignes de défenses par des boyaux de communications permettant d’acheminer ravitaillement et munitions. Le soldat doit travailler quotidiennement à l’entretien de ce vaste système de protection.

Il faut sans arrêt lutter contre les éboulements de terre provoqués par les pluies et les bombardements .Le no man’s land étant parfois limité à quelques dizaines de mètres, la mise en place d’un puissant système de barbelés est indispensable. Il doit ralentir une éventuelle percée adverse, des points d’observation (avec parfois des périscopes) et des cagnas sont aménagés.

Les premiers ennemis sont donc l’harassement lié à un travail pénible, toujours risqué, des conditions climatiques rendues encore plus rugueuses par l’affaiblissement des corps dû à la faim et

Vue aérienne de la Ligne Hindenburg près de Cambrai. En haut à gauche, le no man's land. Les traits noirs à gauche sont des réseaux de fils de fer barbelé ; les lignes crénelées sont les premières lignes de tranchée.

Le saviez-vous ?

En France, les surnoms péjoratifs pour désigner les Allemands se sont multipliés pendant la première guerre mondiale. Quelques exemples et leurs significations ou significations :

Boches (tête de bois), Schleu (diminutif de Deutsch), Vert de gris (couleurs des uniformes allemands), Fritz (diminutif de Fredrich, prénom allemand le plus courant en 1914), Casques à pointe (de la forme du casque réglementaire de 1914), Schpountz (mot provenant du yiddish désignant l’idiot du village)

Pendant la seconde guerre mondiale se rajoutera l’expression « les doryphores », petits insectes friands de pomme de terre qui pullulèrent pendant l’occupation car les Allemands avaient réquisitionné la plupart des insecticides.

Cours rédigé par C. Meignat et C. Delaunay (Lycée Descartes de Tours) Juillet-août 2011

aux parasites (rats, tiques, poux…). Aux questions physiques s’ajoutent les blessures psychologiques. Les trop rares permissions ne permettent pas aux soldats de sortir de cet univers dévasté et profondément a-normal et im-moral (inversion des règles sociales et des codes moraux).

Les combattants sont coupés de leur sphère familiale et amicale, de leurs racines villageoises et s’inquiètent du sort des leurs qui doivent organiser leur vie sans eux.

Les attaques peuvent être ponctuelles mais se concentrent le plus souvent lors de batailles se déroulant sur des points précis du front. Elles peuvent alors durer plusieurs mois (Chemin des Dames : 16 avril-23 octobre 1917, Verdun : 21 février-19 décembre 1916…). L’artillerie est utilisée de façon massive pour préparer les offensives de fantassins attaquant par vagues. Celles-ci se heurtent alors aux défenses de la tranchée adverse. Les pertes sont colossales. Les innovations se multiplient alors pour percer le système défensif. Sur terre, les Français inventent les chars, véhicules blindés dont les premières utilisations ne sont pas couronnées de succès. Les Allemands utilisent les premiers gaz de combat, qui au-delà de leur efficacité réduite, sème la terreur et marque la conscience des combattants. Les tactiques d’infiltration se substituent progressivement aux offensives massives à partir de 1917. Mais la guerre se déplace aussi sous la terre avec le creusement de sape servant à placer des charges explosives pour détruire les défenses adverses.

L’écoute avec des stéthoscopes et la contre-sape doivent permettre de détecter ces infiltrations souterraines. La voie des airs est aussi utilisée, ballons et zeppelins composant des cibles trop faciles à atteindre, l’aviation, invention très récente est utilisée pour procéder à des observations mais aussi aux premiers bombardements.

La guerre prend une autre dimension en déterritorialisant le champ de bataille. Pour approvisionner le front en armes, il faut faire tourner des usines qui ont besoin de matières premières provenant parfois de contrées très lointaines. Les premiers bombardements à longue distance sont opérés par les Allemands avec la Grosse Bertha, certes peu précise mais qui terrifie la population parisienne. La France a perdu les régions du nord et de l’est fort riches en charbon et fer, elle a donc recours à ses colonies pour lui fournir ces matières premières indispensables à l’activité de l’industrie sidérurgique. Pour lutter contre la supériorité maritime des Alliés qui acheminent hommes et ressources de leur possessions ultramarines aux métropoles et opèrent un éprouvant blocus contre les puissances centrales, les Allemands développent la guerre sous marine avec les fameux U-Boot.

Pour aller plus loin, un extrait d’un film qui fit pleurer les foules anglaises en 1916, The Battle of the Somme

http://www.youtube.com/watch?v=-Tv5gBa9DQs Le saviez-vous ?

Le terme de poilu, qui qualifie les combattants de la première guerre mondiale, n’a rien à voir avec le fait qu’ils ne pouvaient pas se raser régulièrement. Dans le langage courant, le terme de poilu désigne un brave, un héros viril depuis le 15e siècle. Ainsi, tu peux lire cette réplique dans Les précieuses ridicules (scène 11) de Molière.

MASCARILLE: Ne vous étonnez pas de voir le Vicomte de la sorte; il ne fait que sortir d'une maladie qui lui a rendu le visage pâle comme vous le voyez.

JODELET: Ce sont fruits des veilles de la cour et des fatigues de la guerre.

MASCARILLE: Savez-vous, Mesdames, que vous voyez dans le Vicomte un des plus vaillants hommes du siècle? C'est un brave à trois poils.

2 L’arrière, la clé de la guerre

Après une courte période brouillonne liée à l’impréparation face à un conflit long, l’Etat organisa la production en déterminant les entreprises prioritaires pour la réception des matières premières, fixant les prix de production et les salaires. Le personnel des entreprises stratégiques fut strictement encadré afin d’éviter sabotages, grèves ou infiltration d’espions. La France s’avéra être la meilleure organisatrice de l’arrière. Sous la houlette de Clémenceau et Albert Thomas (secrétaire d’Etat aux munitions), le gouvernement prévint l’essentiel des conflits du travail, organisa un rationnement bien accepté par la population et sut mobiliser la main d’œuvre féminine, coloniale et eut l’intelligence de rapatrier 500 000 affectés spéciaux (ingénieurs et ouvriers spécialistes de l’armement et de la sidérurgie) du front. Les dimensions industrielle, financière (mobilisation de l’épargne pour financer la guerre), technologique (conception de nouvelles armes ou innovations sur des armes anciennes) et logistique (capacité à acheminer matières premières et armes) se révèlent être les clefs d’une guerre qui mobilise toute la population.

A contrario, malgré les efforts de Rathenau, l’Allemagne fut beaucoup moins efficace. La population eut à souffrir d’un rationnement, dont la rigueur fut aggravée par le sévère blocus allié certes, mais qui fut mal maitrisé. Ainsi lors de l’hiver 1916/17, la crainte de l’impossibilité de nourrir le cheptel ovin conduit-il à l’abatage de tous les porcs. Désormais les Allemands durent se priver de viande : cet épisode est appelé la Saint Barthélémy du cochon ou l’hiver des navets. A partir de là, les stocks de nourriture furent prioritairement envoyés au front, provoquant pénurie et marché noir : la surmortalité touche les plus fragiles, cristallisant les tensions et les oppositions à la guerre. Le 9 novembre 1918, des manifestations à majorité féminine balayent un pouvoir affaibli par les défaites du printemps et de l’été. La capitulation de l’Allemagne (11 novembre 1918) s’explique autant par ses revers militaires sur le front ouest que par l’état de déliquescence dans lequel l’arrière était rentré dans l’hiver 1917/18.

3 La propagande, mobiliser et diaboliser

La liberté de la presse est suspendue dès l’entrée dans le conflit. Toutes les publications passent sous le contrôle de comités de censure militaire qui empêchent la publication d’articles jugés défaitistes, démoralisants ou pouvant potentiellement renseigner l’ennemi. Les carrés blancs se multiplient, frustrant un public en quête d’informations dans cette période d’inquiétude. La nature ayant horreur du vide, la population crée sa propre information se répandant par le bouche à oreille : c’est le temps des rumeurs d’autant plus incontrôlables que la foule recherche de l’information à tout prix. C’est alors que l’armée et l’Etat développent la propagande dans les journaux ou sous forme d’affiches. Cette guerre est donc aussi une guerre psychologique. La propagande repose sur quatre leviers : l’adhésion, le rejet, le respect de l’autorité (d’un homme, d’une allégorie), la conformité (à la masse à laquelle on appartient). Cette mobilisation des esprits, tournée vers un seul objectif : la victoire, est mal maitrisée au début de la guerre. Aberration, décalage trop violent avec une réalité qui arrive à filtrer malgré la censure (exemple de l’automne 1914 : les balles allemandes sont de si mauvaise qualité qu’elles ne tuent pas nos soldats !!!) provoquent la méfiance d’une population rétive au « bourrage de crâne ». La propagande va donc considérablement se perfectionner et se développer, contribuant à l’enracinement de stéréotypes racistes et xénophobes allant jusqu’à nier l’humanité de l’adversaire et glorifiant à l’extrême une communauté nationale menant une guerre juste.

C Un ordre européen fragile

Comment peut-on reconstruire l’Europe aux lendemains de la guerre ? 1 Une guerre totale engendrant un désastre humain

Ce conflit fut à l’époque le conflit le plus meurtrier de l’Histoire avec ses 10 millions de morts. L’Allemagne et la Russie payèrent les plus lourds tribus avec 2,4 millions de morts chacune, suivent la France (1,4 million de morts) et l’Italie (1million de morts) et encore ce bilan ne prend-il pas en compte les décès de civils liés aux maladies engendrées par l’affaiblissement des populations

Cours rédigé par C. Meignat et C. Delaunay (Lycée Descartes de Tours) Juillet-août 2011

sous et mal-nourries (la plus connue étant la grippe espagnole qui tua 6 millions d’Européens en 1918/20 dont plus de 400 000 Français). Ce bilan terrifiant fut d’autant plus terrible pour la population européenne que 40% des corps des combattants ne purent être identifiés (70% des décès sont liés à l’artillerie), que les soldats furent souvent enterrés à la hâte sans point de repère précis (malgré les croix de bois posées par leur camarade) et que les circonstances de la mort sont souvent mal connues voire que leur sort ne soit pas établi clairement (plus de 100 000 soldats français ont disparu sans laisser de trace !!). Le deuxième élément pour comprendre le choc qui frappa l’ensemble des pays européens, est que ce continent était entré depuis le milieu du 19e siècle dans une phase de transition démographique marquée par une baisse de la mortalité infantile et juvénile : les parents commençaient à concevoir comme anormale la mort de leurs enfants. La canalisation de la douleur collective prit forme avec la mise en place de monuments aux morts dans toutes les villes et villages. Ce fleurissement de tombeaux commémoratifs s’explique par le désir de la communauté d’honorer ses morts servant de modèles aux générations futures et la nécessité pour les endeuillés de se regrouper pour partager leur deuil. Individuellement, les réactions furent, par nature, extrêmement diverses mais l’on peut dégager quelques grandes tendances : retour au religieux et plus largement au spirituel avec l’explosion de l’occultisme, culte du disparu conduisant à son omniprésence (photographie, prénom donné aux neveux…).

2 Une guerre totale engendrant un désastre économique

Les dégâts colossaux précités se localisent cependant uniquement aux zones de combats. Ils ont été engendrés par l’artillerie et la politique de la terre brulée organisée par les états-majors avant leur repli. Les problèmes se situent plus sur les terrains financiers et humains. L’Europe a perdu la fine fleur de sa jeunesse la privant de cadres, d’ingénieurs, de penseurs, plus largement le vieux continent manque de bras pour se reconstruire, innover, progresser. L’endettement colossal provoqué par l’achat d’armes plonge les Etats européens à accroitre les ponctions fiscales qui ne suffisent cependant pas à rembourser les bailleurs de fonds privés et les États-Unis qui sont passés du stade de débiteur à celui de premier créancier du monde en l’espace de 4 ans ! La reconversion des entreprises de guerre se fait lentement, la réadaptation des soldats à la vie civile et au travail est difficile, d’autant plus que les femmes (et pensons aux centaines de milliers de veuves et aux femmes devenues pourvoyeuses principales de revenus du foyer avec le handicap de leurs maris) rechignent à rendre les postes obtenus lors du conflit. Partout règnent les pénuries, l’inflation et la misère. Les populismes, l’idéologie communiste et en général toutes les formes de contestation du système se développent sur ce terreau de pauvreté, d’interrogations (A quoi a servi la guerre ? A qui

Les dégâts colossaux précités se localisent cependant uniquement aux zones de combats. Ils ont été engendrés par l’artillerie et la politique de la terre brulée organisée par les états-majors avant leur repli. Les problèmes se situent plus sur les terrains financiers et humains. L’Europe a perdu la fine fleur de sa jeunesse la privant de cadres, d’ingénieurs, de penseurs, plus largement le vieux continent manque de bras pour se reconstruire, innover, progresser. L’endettement colossal provoqué par l’achat d’armes plonge les Etats européens à accroitre les ponctions fiscales qui ne suffisent cependant pas à rembourser les bailleurs de fonds privés et les États-Unis qui sont passés du stade de débiteur à celui de premier créancier du monde en l’espace de 4 ans ! La reconversion des entreprises de guerre se fait lentement, la réadaptation des soldats à la vie civile et au travail est difficile, d’autant plus que les femmes (et pensons aux centaines de milliers de veuves et aux femmes devenues pourvoyeuses principales de revenus du foyer avec le handicap de leurs maris) rechignent à rendre les postes obtenus lors du conflit. Partout règnent les pénuries, l’inflation et la misère. Les populismes, l’idéologie communiste et en général toutes les formes de contestation du système se développent sur ce terreau de pauvreté, d’interrogations (A quoi a servi la guerre ? A qui

Dans le document Le monde de 1850 à nos jours (Page 44-54)