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D´ egradation d’un blochet par la fatigue

Le tunnel sous la Manche pr´esente un des trafics les plus ´elev´es au monde avec 4 types de trains en circulation : Eurostar, passenger, navette de camion et train de marchandise. Le nombre de trains circulant dans le tunnel chaque ann´ee est sup´erieur `a cent mille trains (voir le d´etail dans le tableau 4.12). Avec ce nombre de trains, on peut estimer le nombre d’essieux empruntant le tunnel par ann´ee `a environ sept millions, ce qui correspond `a un mˆeme nombre de cycles de chargement-d´echargement par an.

Ann´ee 2012 2013 Eurostar 18 419 18 561 Tmar 2 327 2 547 Camions 62 150 62 463 Passagers 30 403 30 8061 Total 113 299 114 337

Table 4.12 – Nombre de trains circulant dans le tunnel sous la Manche

Apr`es vingt ans de service, on peut donc estimer que chaque syst`eme LVT a support´e environ une centaine de millions de cycles de chargement-d´echargement. Les questions qui se posent sont alors :

— Quelle est la dur´ee de vie d’un blochet ?

— Quel est le niveau d’endommagement du b´eton apr`es une centaine de millions de cycles ?

Ces questions rentent dans le cadre de la fatigue m´egacyclique du b´eton, un ph´enom`ene mal-maitris´e encore aujourd’hui. De plus, la norme ne pr´econise qu’un test de 10 millions de cycles pour les structures ferroviaires. Pour r´eponse `a ces questions, nous allons d’abord appliquer les lois empiriques de la fatigue du b´eton pour avoir une id´ee de l’ordre de grandeur de la dur´ee de vie des blochets en utilisant le r´esultat de la simulation pr´ec´edente.

4.5.1 Application des lois empiriques de la fatigue du b´eton

La dur´ee de vie du b´eton peut ˆetre tr`es dispers´ee. Les applications ci-dessous sont juste une indication pour voir la probl´ematique du ph´enom`ene parce que les lois empiriques existantes sont plutˆot appliqu´ees dans le cadre de la fatigue normale et pour un type de b´eton pr´ecis (voir la section 1.5.2 du chapitre I).

R´esistance en traction σu MPa 4.7

Contrainte maximum en traction σmax MPa 2.0 ± 0.1

Contrainte minimum σmin MPa 0

Table 4.13 – Param`etres pour appliquer les lois empiriques

Pour estimer la dur´ee de vie, on utilise les param`etres du chargement et du mat´eriau donn´es dans le tableau 4.13. Avec ces param`etres, on peut calculer les param`etres du

4.5. D´egradation d’un blochet par la fatigue 111

chargement cyclique comme suit :    Smax = σmax σu = 0.425 ± 0.021 R = σmin σmax = 0 (4.10)

o`u Smax est la contrainte maximale sans dimension (c’est-`a-dire, la r´esistance est ´egale `a 1).

Ici, on a une variation de Smax ce qui correspond `a la variation de la contrainte maximale

(propos´ee de 0.1MPa).

Mod`ele d’Aas-Jakobsen

Le mod`ele d’Aas-Jakobsen qui concerne la dur´ee de vie en fatigue normale du b´eton propose l’´equation suivante pour d´eterminer la dur´ee de vie en fonction de Smax :

Smax= 1 − β(1 − R) log N

avec β = 0.0684. Pour des chargements avec les param`etres donn´es par l’´equation (4.10), on obtient une dur´ee de vie du b´eton du blochet qui varient entre 122 et 152 millions de cycles. On voit donc qu’une petite variation de la contrainte maximale (ici 0.1MPa) peut causer une grande variation de la dur´ee de vie estim´ee du blochet. Ce r´esultat montre que si la loi empirique est applicable, il y aura une grande dispersion lors d’essais r´ealis´es en laboratoire.

Mod`ele de Thomas T.C.Hsu

Le mod`ele de Thomas T.C.Hsu propose pour la fatigue normale et m´egacyclique l’expression suivante :

Smax = 1 − 0.0662(1 − 0.556R) log N − 0.0294 log T

o`u T est la p´eriode du chargement cyclique en seconde. Pour la norme fran¸caise, f = 5Hz correspond `a la p´eriode T = 0.2s. La dur´ee de vie des blochets estim´ee `a l’aide de ce mod`ele est comprise entre 464 et 2039 millions de cycles.

Mod`ele de Cornelissen H.A.W

Le crit`ere de Cornelissen a ´et´e ´etabli pour un chargement en flexion ou en traction. En flexion, il s’´ecrit :

log N = 12.53 − 10.95σmax σF

u

On en d´eduit alors une dur´ee de vie estim´ee comprise entre 34 et 126 millions de cycles. En traction, il s’´ecrit : log N = α − 14.52σmax σT u + 2.79σmin σT u

avec α = 14.81 pour le b´eton sec. On obtient la dur´ee de vie estim´ee entre 210 et 871 millions de cycles.

Mod`ele Nmin Nmax

Aas-Jakobsen 122 512

Thomas 464 2.039

Cornelissen (flexion) 43 126 Cornelissen (traction) 210 871

Table 4.14 – Dur´ee de vie du b´eton de blochet par les lois empiriques existantes

R´esum´e

Le tableau4.14 pr´esente les r´esultats des calculs de dur´ee de vie du b´eton du blochet avec les diff´erents mod`eles empiriques de la litt´erature portant sur la fatigue du b´eton. Dans ce tableau, on voit que la variation de 0.1MPa (´equivalent `a 5% de la contrainte maximum) peut mener `a une tr`es large variation de la dur´ee de vie estim´ee. Cette variation vient du fait que la dur´ee de vie d´epend de fa¸con exponentielle de la contrainte maximale.

Pour les voies du tunnel sous la Manche, le chargement peut atteindre 7 millions de cycles par an. Apr`es 20 ans de servie, le nombre de cycles est coh´erent avec l’ordre de grandeur de la dur´ee de vie donn´ee par ces mod`eles. De plus, les mod`eles empiriques ne prennent pas en compte des surcharges li´ees aux d´efauts de la voie (comme les d´efauts du blochet, des roues,...). Il est donc n´ecessaire de faire des essais de fatigue m´egacyclique en laboratoire pour comprendre la dur´ee de vie et la proc´edure de d´egradation par la fatigue du b´eton.

4.6

Conclusion

Le trafic global (fret et passagers) du tunnel sous la Manche est l’un des trafics les plus importants au monde. Ce trafic important a donc un impact sur les composants des syst`emes LVT install´es sur la voie. Le nombre de cycles de chargement/d´echargement que subit chaque support de rail est estim´e `a 7 millions cycles par an. Par cons´equent, un vieillissement important a ´et´e observ´e sur tous les composants des syst`emes de support rail des voies du tunnel. Pour analyser les cons´equences des chargements cycliques, nous avons tout d’abord d´etermin´e les champs de contrainte dans le syst`eme support `a l’aide d’une mod´elisation par ´el´ements finis. Le r´esultat montre que la contrainte la plus critique est la contrainte de traction dans la direction longitudinale du blochet car le blochet travaille en flexion. En appliquant des lois empiriques de la fatigue du b´eton, nous avons d´etermin´e l’ordre de grandeur de la dur´ee de vie du b´eton des blochets en tenant compte du trafic total dans le tunnel depuis son ouverture `a la circulation. Ces r´esultats montrent que certains blochets peuvent avoir atteint leur dur´ee de vie. Pour confirmer cette pr´evision, des essais de fatigue du blochet en flexion vont ˆetre men´es `a la suite de ce travail de th`ese.

Chapitre 5

D´etection de l’endommagement

des blochets

5.1

Introduction

Dans le chapitre pr´ec´edent, nous avons vu que les composants d’un syst`eme LVT de voie sur dalle peuvent se d´egrader sous l’effet d’un trafic tr`es ´elev´e. Parmi ces composants, le blochet joue un rˆole tr`es important parce qu’il supporte le rail. La dur´ee de vie du blochet repr´esente donc la dur´ee de vie du syst`eme. D’autre part, la surveillance du syst`eme est assez complexe. Comme le blochet est int´egr´e dans le chausson et lui mˆeme int´egr´e dans la dalle b´eton, les fissures `a l’int´erieur ou sur les surfaces inf´erieures du blochet ne sont pas observables facilement. De plus, lorsqu’on enl`eve le syst`eme LVT de sa cavit´e dans la dalle, la remise en place du syst`eme s’av`ere tr`es complexe si le blochet est endommag´e (on doit souvent remplacer le syst`eme complet). Par cons´equent, il faut pouvoir disposer d’une m´ethode non-destructive et simple pour rendre la surveillance des blochets plus facile et pouvoir effectuer une maintenance p´eriodique.

Nous allons proposer dans ce chapitre une m´ethode de d´etection des endommagements en voie des blochets du syst`eme LVT. Cette m´ethode se base sur l’analyse modale. Pour cela, nous avons dans un premier temps effectu´e la mesure des r´eponses vibratoires des blochets afin d’identifier les fr´equences et les amortissements des modes propres de blochets. Ces mesures permettent de mettre en ´evidence la variation de ces param`etres en fonction du niveau et du type d’endommagement des blochets. Nous avons de plus r´ealis´e un travail de mod´elisation des modes propres des blochets `a l’aide de la m´ethode des ´el´ements finis afin de d´eterminer quantitativement les valeurs des fr´equences des modes propres en corr´elannt ces valeurs avec les types et les niveaux d’endommagement. Pour appliquer ces r´esultats dans l’analyse des d´egradations d’une voie r´eelle, nous avons ´etudi´e l’influence des conditions externes sur les r´eponses vibratoires d’un blochet. Cette ´etude a ´et´e men´ee en r´ealisant des essais sur une voie assembl´ee en laboratoire et en voie dans le tunnel sous la Manche. Enfin, nous avons d´evelopp´e le logiciel ”EuroDetection” qui int`egre la m´ethode de d´etection des endommagements et qui permet d’automatiser la m´ethode de d´etermination de ces endommagements en voie.