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Radioprotection du patient en radiologie interventionnelle

5.4 Outils de recherche

5.4.2 Développements de Borrego et al

Le travail de Borrego et al. [118] a porté sur le développement d’une méthode pour quantifier la dose

aux organes internes du patient par le code Monte Carlo MCNPX12, couplée à un algorithme analytique de

cartographie de la dose à la peau du patient via l’utilisation des fichiers RDSR pour accéder aux données des interventions. Les différentes morphologies de patient sont modélisées grâce à la famille fantômes anthropomorphes UF/NCI [119], représentative de la morphologie des populations d’adultes et d’enfants vivant aux États-Unis. La position du patient par rapport à la table étant inconnue, l’approche dite « tête-centrée » est utilisée. C’est-à-dire que le fantôme représentant le patient est placé au centre de la table avec sa tête positionnée à 5 cm du bord de celle-ci (section III.5.4).

Le temps moyen de traitement d’un fichier RDSR d’une intervention est en moyenne de 38 minutes

sur une grille de calcul de 12 CPU. Le nombre de particules primaires par simulation est de 7,5 × 107. La

dose des organes présents dans le champ a une incertitude statistique de moins de 1%, et les organes hors champ ont une incertitude de moins de 10%.

Borrego et al. [118] ne présentent cependant pas de validation expérimentale de leur résultats de dose aux organes.

5.4.3 Conclusion

La simulation Monte Carlo est devenu un outil incontournable pour reconstruire la dose aux organes du patient lors des procédures de radiologie interventionnelle. La modélisation de ces procédures passe par l’exploitation des données contenues dans les fichiers de sortie des machines au format RDSR. Il ressort de l’étude de la littérature que la maitrise de certains paramètres est essentielle à la fidélité de la modélisation des procédures et à la précision des calculs de dose, dont notamment :

— la prise en compte de l’atténuation de la table et du matelas, — la fidélité de la représentation de la morphologie du patient,

— le positionnement du patient par rapport à la table et au faisceau de la machine. Ces paramètres seront abordés en détail dans les chapitres III et IV.

6 Niveaux de référence

Afin de permettre au praticien d’optimiser ses actes et de limiter au maximum l’exposition des patients, des niveaux de référence diagnostiques ont été définis. Les niveaux de référence diagnostiques sont des indicateurs dosimétriques de la qualité des pratiques destinés à identifier les situations nécessitant une action correctrice. Ils sont définis par type d’examens et de patients. Les niveaux de référence diagnostiques introduits par la publication 60 de l’ICRP [47], repris dans la publication 73 de l’ICRP [120] et intégrés au niveau européen par la communauté européenne de l’énergie atomique par la directive 97/43/EURATOM

[121] puis dans sa directive 2013/59/EURATOM [54] sont en vigueur dans le droit français13.

Aujourd’hui en France les valeurs des niveaux de référence diagnostiques sont définies pour la radiologie conventionnelle, la scanographie et la médecine nucléaire. À ce jour, aucun niveau de référence réglementaire

n’est en vigueur pour la radiologie interventionnelle en France. Dans ce contexte, le projet RAY’ACT14,

porté par le Collège National des Cardiologues a mené une étude en 2014 afin de mettre à jour les niveaux de référence en cardiologie interventionnelle [122]. Cette étude a exploité les données de 61 centres, soit 93451 actes de procédures coronariennes (angiographies et angioplasties coronaires). De même, la Société Française de Physique Médicale (SFPM) et la Société Française de Radiologie (SFR) ont collaboré sur l’établissement de niveaux de référence sur les actes les plus courants ou les plus exposants de radiologie interventionnelle (hors procédures cardiaques) chez l’adulte [123, 124]. Cette étude a exploité les données de 36 centres sur 15 procédures différentes, soit environ 4300 actes au total.

Plusieurs définitions des niveaux de référence en radiologie interventionnelle coexistent actuellement. Les travaux de Georges et al. [122], Etard et al. [123] et de la SFPM [124] définissent les niveaux de référence comme la valeur arrondie du troisième quartile de la distribution globale pour chaque paramètre

dosimétrique. Dans sa publication 135 [125], l’ICRP recommande d’utiliser préférentiellement le 75ème

centile des valeurs médianes par salles dans le cas d’études multi-centres. Les termes 75ème centile et

troisième quartile correspondent à la même définition, à savoir la donnée qui sépare les valeurs 75% inférieures et 25% supérieures de la distribution des données et sont illustrés figure II.10. Les niveaux de référence sont établis pour le temps de scopie, le nombre total d’images de graphie, le kerma dans l’air au point de référence et le produit kerma surface.

7 Exposition typique

Le rapport 168 de la NCRP définit les procédures fortement irradiantes comme celles dont 5% des

opé-rations dépassent 3 Gy pour le kerma dans l’air au point de référence ou 300 Gy.cm2pour le produit kerma

13. Arrêté du 12 février 2004 puis du 24 octobre 2011 relatif aux niveaux de référence diagnostiques en radiologie et en médecine nucléaire

14. Acronyme anglais de Patient’s exposure to X-RAY during Coronary Angiography and percutaneous transluminal

25% 25%

médiane

25% 25%

50ème centile 25ème

centile 50èmecentile valeur

minimale maximalevaleur

100ème centile 3ème quartile 1er quartile

Figure II.10 – Illustration des termes centile et quartile sur une distribution de données.

surface [45]. Les procédures les plus irradiantes sont l’angioplastie coronaire transluminale percutanée et l’ablation cardiaque par radiofréquence [45]. Ainsi la majorité de la littérature sur la dose en radiologie interventionnelle est dédiée aux procédures cardiaques.

Le tableau II.4 présente les résultats du projet RAY’ACT mené en 2014. Ce dernier présente les valeurs médianes et les estimations des niveaux de référence pour les procédures interventionnelles coronariennes. Dans ce tableau les valeurs dosimétriques correspondant au terme angioplastie coronaire font référence aux procédures d’angioplastie seules ainsi qu’à celles se déroulant immédiatement après une angiographie. Table II.4 – Synthèse des valeurs médianes et, entre parenthèses, les niveaux de référence des indicateurs dosimétriques pour les procédures coronariennes de cardiologie interventionnelle [122]. Les niveaux de référence sont établis pour le temps de scopie (FT), le nombre total d’images de graphie (NI), le kerma

dans l’air au point de référence (Ka,r) et le produit kerma-surface (PKS).

Procédure PKS (Gy.cm2) Ka,r (mGy) FT (min) NI

Angiographie coronaire 15 20,8 (38) 294 (522) 3,3 (6) 404 (584)

Angioplastie coronaire 16 45,2 (80) 747 (1273) 9,8 (15) 676 (957)

Le tableau II.5 reprend les données issues de l’étude menée par la collaboration entre la SFPM et la SFR afin d’estimer les niveaux de référence radiologique pour les procédures interventionnelles les plus fréquentes en 2015.

7.1 Dose maximale à la peau

Le tableau II.6 synthétise la distribution de la dose maximale à la peau pour un ensemble de procédures de radiologie interventionnelle effectuées sur des patients atteints de cancer en 2006 [126].

15. Procédure aussi appelée coronarographie

16. Procédure aussi appelée intervention coronarienne percutanée 17. Malformation Artério-Veineuse

Table II.5 – Synthèse des valeurs médianes et, entre parenthèses, les niveaux de référence des indicateurs dosimétriques pour les procédures interventionnelles (à l’exception de la cardiologie interventionnelle) les plus fréquentes en 2015 [123, 124]. Les niveaux de référence sont établis pour le temps de scopie (FT),

le nombre total d’images de graphie (NI), le kerma dans l’air au point de référence (Ka,r) et le produit

kerma-surface (PKS).

Procédure PKS (Gy.cm2) Ka,r(mGy) FT (min) NI

Artériographie cérébrale 45,4 (90) 312 (630) 5,7 (11) 256 (390)

Artériographie médullaire 88,0 (185) 639 (1420) 15,1 (26) 229 (310)

Embolisation d’un anévrisme cérébrale 130,8 (190) 1718 (2770) 37,2 (58) 610 (1080)

Embolisation d’une MAV 17cérébrale 169,9 (285) 2019 (3230) 44,5 (68) 577 (970)

Artériographie des membres inférieurs 38,1 (75) 55 (150) 2,2 (6) 166 (250)

Drainage biliaire 14,2 (35) 95 (260) 9,1 (16) 2 (10)

Pose de cathéter central par voie humérale 0,6 (1,2) 2 (4) 0,5 (1,0) 1 (1)

Pose de port à cathéter 0,5 (1,5) 2 (5) 0,4 (0,8) 1 (2)

Chimio-embolisation hépatique 120,6 (250) 520 (990) 17,7 (28) 105 (200)

Embolisation des artères bronchiques 68,7 (135) 328 (830) 25,0 (38) 149 (240)

Embolisation d’un fibrome utérin 73,7 (175) 390 (800) 20,3 (29) 75 (160)

Embolisation d’une hémorragie de la délivrance 145,5 (255) 581 (930) 15,8 (25) 108 (260)

Embolisation des artères rénales 128,4 (325) 750 (1700) 14,3 (22) 162 (210)

Shunt porto-systémique intrahépatique 99,3 (185) 376 (780) 24,1 (39) 71 (120)

Vertébroplastie 35,8 (70) 370 (770) 7,3 (11) 10 (320)

Table II.6 – Synthèse de la distribution de la dose maximale à la peau pour un ensemble de procédures de radiologie interventionnelle effectuées sur des patients atteints de cancer en 2006 [45, 126].

Dskin,max (Gy) Fréquence Pourcentage Pourcentage cumulé

<0,01 1381 34,7 34,7 0,01 - 0,1 1520 38,2 73,0 0,1 - 0,2 368 9,3 82,2 0,2 - 0,3 215 5,4 87,6 0,3 - 0,4 109 2,7 90,4 0,4 - 0,5 57 1,4 91,8 0,5 - 0,6 54 1,4 93,2 0,6 - 0,7 34 0,9 94,0 0,7 - 0,8 23 0,6 94,6 0,8 - 0,9 13 0,3 94,9 0,9 - 1,0 19 0,5 95,4 1 - 2 104 2,6 98,0 2 - 3 44 1,1 99,1 3 - 4 15 0,4 99,5 4 - 5 10 0,3 99,7 5 - 6 4 0,1 99,8 6 - 7 1 0,0 99,9 7 - 8 4 0,1 100,0 8 - 9 1 0,0 100,0

8 Conclusion

Le calcul de la distribution de dose à trois dimensions est une problématique actuelle en radiologie interventionnelle pour l’optimisation et le suivi de la dosimétrie du patient. Cependant, les outils cliniques permettant ces estimations restent peu nombreux et de précision limitée.

de l’exposition et la récupération des données des interventions via les fichiers de sortie des machines. Ces développements soulèvent cependant plusieurs problématiques, telles que l’optimisation entre la précision et le temps de calcul, la question du réalisme de la modélisation du patient, ou encore la prise en compte de la table et du matelas de la machine. Il est intéressant de remarquer que les développements actuels ne permettent pas un calcul Monte Carlo en parallèle de la dose à la peau et de la dose aux organes.

L’objectif de ce travail de thèse est de proposer un outil permettant la reconstruction complète de la dosimétrie du patient par calcul Monte Carlo, utilisant une modélisation précise des procédures et se basant sur les informations contenues dans les fichiers de sortie RDSR [127]. Cet outil devra ainsi permettre une reconstruction précise, tout en conservant un temps de calcul raisonnable et une simplicité d’utilisation compatible avec une utilisation en routine clinique. L’objectif est de permettre la production d’un rapport de dose à la peau et aux organes à la fin des procédures, comme suggéré par l’ICRP [39]. Les choix du code de simulation Monte Carlo, des différentes méthodes d’optimisation des calculs, ainsi que du type de fantôme anthropomorphe sont présentés dans le chapitre suivant.

Calcul Monte Carlo et outils de