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CHAPITRE I. CADRE THEORIQUE

4. Aspects psychologiques de la grossesse et de la transition vers la parentalité

4.3. Détresse psychologique

suivant le paradigme de Lazarus et Folkman (1984). Les auteurs ont conclu que l’action directe ciblée sur le problème, la recherche d’information et les processus intrapsychiques ciblés sur le problème étaient les stratégies de coping les plus utilisées par les adolescentes afin de se préparer à leur futur rôle parental. En revanche, une minorité d’adolescents qui ont utilisé les processus intrapsychiques ciblés sur l’émotion en tant que stratégie de coping

préférentielle refusaient l’idée que l’arrivée du bébé viendrait changer leur vie et évitaient de réfléchir sur la paternalité.

Diemer (1997) a aussi contribué à cette discussion sur le coping lors de la transition vers la paternalité en soulignant que la participation des pères au cours de préparation à la naissance peut aider au développement des compétences de coping promotrices de l’adaptation au nouveau rôle parental.

4.3. Détresse psychologique

La transition vers la parentalité est actuellement, une étape du cycle de vie très étudiée compte tenu de l’impact qu’elle a sur le fonctionnement affectif des femmes et des hommes et des enjeux sous-jacents (Terry, 1991). Les exigences d’ajustement physique, psychologique et social entraînent un pourcentage important de personnes qui présentent une symptomatologie dépressive et/ou anxieuse pendant la grossesse et la période postnatale (Matthey, Barnett, Ungerer et Waters, 2000). Cette symptomatologie peut atteindre un niveau dit clinique et a un impact négatif important sur la relation précoce entre les parents et l’enfant (Webb et Ayers, 2014).

Les premières recherches sur la détresse psychologique et la psychopathologie lors de la transition vers la parentalité se sont consacrées surtout à l’étude du fonctionnement psychologique de la femme après l’accouchement (Conde, 2008). Ces études ont permis d’accroître les connaissances sur la prévalence, les antécédents et les conséquences des différents états et psychopathologies du postpartum ainsi que l’évaluation de l’efficacité des protocoles de dépistage et prise en charge des mères présentant une dépression postnatale (Matthey, Kavanagh, Howie, Barnett et Charles, 2004 ; Teissedre et Chabrol, 2004 ; Kozinszky et al., 2012), une psychose puerpérale (Blackmore, Rubinow, O’Connor, Liu, Tang, Craddock et Jones, 2013 ; Boyce et Barribal, 2010 ; Glover, Jomeen, Urquhart et Martin, 2014) et un état de stress post-traumatique suite à l’accouchement (Reynolds, 1997 ;

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Ayers et Pickering, 2001 ; Ayers, 2004 ; Andersen, Melvaer, Videbech, Lamont et Joergensen, 2012 ; George, 2013).

En 2003, Matthey et collègues ont proposé une nouvelle approche concernant les états de détresse psychologique suite à l’accouchement. Les auteurs ont critiqué comme étant simpliste la perspective d’inclure dans les protocoles de recherche seulement des outils d’évaluation de la dépression du postpartum chez les femmes, ce qui exclut un nombre important de femmes et d’hommes qui expérimentent des difficultés psychologiques significatives pendant la transition vers la parentalité. Les auteurs soulignent l’importance d’évaluer les symptômes de dépression et d’anxiété chez les mères et pères et de reconceptualiser le cadre psychopathologique en tant que trouble de l’humeur suite à l’accouchement à la place d’une dépression postnatale.

Concernant la détresse psychologique pendant la grossesse, les études ont mis en évidence que les états dépressif et anxieux pendant la période prénatale ont un impact négatif significatif sur le déroulement de la grossesse et sur le développement du fœtus et de l’enfant (Huizink et al., 2003 ; Glover, 2014). De plus, les femmes qui présentent des niveaux accrus d’anxiété pendant la grossesse sont plus à risque de développer des symptômes cliniques de dépression postnatale et des troubles de l’humeur (Matthey, Barnett, Howie et Kavanagh, 2003 ; Sutterdallay, Giaconnemarcesche, Glatignydallay et Verdoux, 2004). Les facteurs sociaux et de santé qui sont à la base du développement d’une symptomatologie anxieuse pendant la grossesse et après l’accouchement (Henderson et Redshaw, 2013) doivent être alors évalués afin de dépister les situations à risque.

En ce qui concerne la dépression chez les femmes enceintes, les résultats publiés dans la littérature montrent que sa prévalence est équivalente à celle de la dépression postnatale (Rubertsson, Waldenström et Wickberg, 2003). De plus, la présence d’une symptomatologie dépressive pendant la période prénatale est associée à des taux plus élevés de morbidité obstétricale et néonatale ainsi qu’à des perturbations affectives et du comportement (van Bussel, Spitz et Demyttenaere, 2009). Quand la dépression maternelle se présente dans un cadre de comorbidité, cela pose un risque significatif pour le développement précoce des enfants (Carter, Garrity-Rokous, Chazan-Cohen, Little, et Briggs-Gowan, 2001).

En ce qui concerne la santé mentale des hommes pendant la transition vers la parentalité, plusieurs auteurs considèrent que ce problème reste sous-estimé dans le domaine de la santé

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périnatale (Musser, Ahmed, Foli et Coddington, 2013). Malgré les évidences que les hommes aussi éprouvent des changements importants pendant la transition vers la parentalité (Musser

et al., 2013) et que celles-ci influencent la façon dont les pères vont construire leur relation avec l’enfant, peu d’attention est allouée à cette réalité clinique et psychosociale. Néanmoins, une paternalité active fait de plus en plus partie du cycle de vie de chaque homme.

Les transformations opérées au niveau économique, social et d’organisation familiale depuis les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix ont entraîné des changements dans les perspectives à être père (Settersten et Cancel-Tirado, 2010 ; Singley et Edwards, 2015). Aujourd’hui, la société attend que les pères soient pleinement engagés dans leur rôle parental et dans le caregiving. Étant donné que cela représente un clivage abrupte par rapport à ce qu‘était la place de l’homme au sein de la famille quelques années en arrière, les pères d’aujourd’hui sont alors confrontés à un nouveau défi. De plus, la génération précédente n’a pas pu transmettre les stratégies adéquates pour faire face à ce qui est demandé aux pères au moment présent. En conséquence, des troubles psychologiques apparaissent dans les mêmes proportions que les nouveaux pères rencontrent des difficultés pour construire et gérer leur rôle parental.

De même, le fait que pendant la transition vers la parentalité les pères puissent involontairement être mis à la marge par leur partenaire et par les professionnels de santé constitue aussi un facteur de risque pour la santé mentale des hommes (Gawlik, Müller, Hoffmann, Dienes, Wallwiener, Sohn, … et Reck, 2014).

Les processus psychologiques inhérents à la transition vers la paternalité peuvent représenter un potentiel de développement si elle se passe dans de bonnes conditions, notamment au niveau personnel (ex., l’âge), social, psychologique et économique (Settersten et Cancel-Tirado, 2010). Par contre, l’absence d’éléments protecteurs (ex., environnement social de soutien) et/ou la présence de facteurs négatifs (ex., faible qualité de la relation conjugale) augmentent la vulnérabilité des pères pendant la transition vers la parentalité, ce qui peut entraîner une augmentation de la détresse psychologique. La littérature montre qu’environ 9% des futurs pères présente une symptomatologie dépressive et que 12% des hommes sont significativement en détresse durant la grossesse et jusqu’au postpartum

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