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II. Matériel et méthode

II.3. La méthode ex-ante

II.3.2. Détermination des facteurs de sensibilité

II.3.2.1. Facteur de sensibilité à l’eutrophisation des eaux de surface

La méthode ex-ante base son calcul du facteur de sensibilité à l’eutrophisation des eaux de surface sur les critères morphologiques des cours d’eau pouvant être propice à des blooms algaux (à pression polluante équivalente) : pente, débit, ensoleillement, obstacles à l’écoulement. Cette approche a pour origine l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse qui l’utilise pour la première fois dans le cadre d’un projet d’étude de « caractérisation des vulnérabilités du bassin Rhône-Méditerranée aux incidences au changement climatique dans le domaine de l’eau » (Fabre et al.2013). La méthode ex-ante détermine la sensibilité des cours d’eau à partir de leurs « prédispositions physiques » à l’eutrophisation. Pour calculer le facteur de sensibilité des cours d’eau : quatre facteur morphologiques sont distingués :

Facteur morphologique lié aux seuils et ouvrages : ces paramètres influent sur le débit du cours d’eau qui détermine sa capacité d’autoépuration

Facteur morphologique lié à la présence de plans d’eau à proximité du cours d’eau : la présence de plans d’eau reliés aux cours d’eau implique l’existence d’eaux stagnantes particulièrement sensible à l’enrichissement en nutriments.

Facteur morphologique lié aux surlargeurs du cours d’eau : de même que pour les plans d’eau, la présence de surlargeurs sur le cours d’eau implique l’existence d’eaux stagnantes particulièrement sensible à l’enrichissement en nutriments.

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Facteur morphologique lié à l’ombrage : ce dernier paramètre influe sur la température de l’eau et sur l’ensoleillement, conditions nécessaires à l’apparition de phénomènes d’efflorescences algales.

Ces quatre facteurs morphologiques sont évalués pour chacun des tronçons hydromorphologiquement homogènes réalisé sous SIG (données SYRAH) (ONEMA, 2012). Ils sont ensuite agrégés par secteur hydrographique en un indice global de sensibilité. Dans cette étude, une amélioration est apportée à la détermination de ce facteur de sensibilité. Initialement déterminé à l’aide de valeurs discrètes (Aissani 2016), le facteur de sensibilité est rendu continu par l’application de l’équation 7. Le passage de valeurs discrètes à des valeurs continues constitue une amélioration de la méthode :

𝐹𝑆

𝑒𝑎𝑢 𝑑𝑜𝑢𝑐𝑒

= 𝐹𝑆

𝑠𝑒𝑢𝑖𝑙 𝑒𝑡 𝑜𝑢𝑣𝑟𝑎𝑔𝑒

× 𝐹𝑆

𝑝𝑙𝑎𝑛 𝑑 𝑒𝑎𝑢

× 𝐹𝑆

𝑠𝑢𝑟𝑙𝑎𝑟𝑔𝑒𝑢𝑟𝑠

× 𝐹𝑆

𝑜𝑚𝑏𝑟𝑎𝑔𝑒 Équation 7: Facteur de sensibilité à l’eutrophisation eau douce selon la méthode ex-ante

Détermination des facteurs morphologiques :

L’ensemble des calculs est appliqué aux tronçons de cours d’eau fourni par SYRAH, le Système Relationnel d’Audit de l’Hydromorphologie des cours d’eau au niveau national (Chandesris et al., 2008). Ces données ont été obtenues après contact avec le pôle de l’IRSTEA basé à Lyon. L’ensemble des seuils établis pour chaque sous-facteur est fixée par l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse selon des experts locaux (Fabre et al., 2013).

(1) Facteur morphologique lié aux seuils et ouvrages Ce facteur de sensibilité est élaboré à partir des paramètres suivant :

- Pente du lit du cours d’eau (%) :

𝑃𝑒𝑛𝑡𝑒 = 𝐴𝑙𝑡𝑖𝑡𝑢𝑑𝑒𝑎𝑚𝑜𝑛𝑡− 𝐴𝑙𝑡𝑖𝑡𝑢𝑑𝑒 𝑎𝑣𝑎𝑙𝑎𝑣𝑎𝑙 (𝑚) 𝐿𝑜𝑛𝑔𝑢𝑒𝑢𝑟 𝑑𝑢 𝑡𝑟𝑜𝑛ç𝑜𝑛 (𝑚) × 100

Les altitudes sont calculées à partir du MNT 75x75m de la BD ALTI® (IGN) auquel on applique l’outil « pente » (slope) d’ArcMap. Les longueurs de tronçon sont directement fournies par SYRAH. Le recoupement des données permet d’obtenir la pente moyenne pour chacun des tronçons. Trois classes de pente sont définies : Faible (0-0,3%) ; Moyenne (0,3-10%) ; Forte (>10%).

- Taux d’étagement (%) déterminé par la présence d’obstacles à l’écoulement référencés dans le Registre des Obstacles à l’Ecoulement (ROE) développé par l’ONEMA où les hauteurs d’obstacles sont répertoriées (Figure 20) (ONEMA, 2014). Le taux d’étagement est obtenu à partir de la formule suivante :

𝑇𝑎𝑢𝑥 𝑑′é𝑡𝑎𝑔𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡 = ∑ ℎ𝑎𝑢𝑡𝑒𝑢𝑟 𝑑𝑒𝑠 𝑜𝑏𝑠𝑡𝑎𝑐𝑙𝑒𝑠 à 𝑙

é𝑐𝑜𝑢𝑙𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡(𝑚) 𝐴𝑙𝑡𝑖𝑡𝑢𝑑𝑒𝑎𝑚𝑜𝑛𝑡− 𝐴𝑙𝑡𝑖𝑡𝑢𝑑𝑒𝑎𝑣𝑎𝑙(𝑚) × 100

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Figure 20 : Schéma illustrant la hauteur maximale sur terrain naturel (Source : REO version 6.0, 2014)

Trois classes sont définies à partir de ce taux : Faible (0-30%) ; Moyen (30-60%) ; Fort (>60%) Selon la méthode initiale, ces deux paramètres sont ensuite croisés pour déterminer le facteur morphologique de sensibilité liée aux seuils et ouvrages. Or, rendre le croissement de ces deux paramètres continu pose des questions d’ordre méthodologique. Après une analyse de sensibilité des différentes nouvelles façons de calculer ce facteur morphologique sur le facteur de sensibilité à l’eutrophisation d’eau douce (Annexe 5 figure 1), le choix de considérer uniquement le facteur morphologique lié à l’étagement est fait. Le facteur morphologique lié aux seuils et ouvrages se calcule alors de la manière suivante :

𝐹𝑆

𝑠𝑒𝑢𝑖𝑙 𝑒𝑡 𝑜𝑢𝑣𝑟𝑎𝑔𝑒

= 𝛼 𝐹𝑆

é𝑡𝑎𝑔𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡

× 𝛽 𝐹𝑆

𝑝𝑒𝑛𝑡𝑒

a

vec β pente = 0 (Annexe 5 tableau 1). d’où

𝐹𝑆

𝑠𝑒𝑢𝑖𝑙 𝑒𝑡 𝑜𝑢𝑣𝑟𝑎𝑔𝑒

= 𝐹𝑆

é𝑡𝑎𝑔𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡

Équation 8 : Simplification du facteur morphologique lié aux seuils et ouvrages

(2) Facteur morphologique lié à la présence de plans d’eau à proximité du cours d’eau Ce facteur de sensibilité est dérivé du taux de plan d’eau obtenu à partir des données récoltées par SYRAH selon la formule suivante :

𝑡𝑎𝑢𝑥 𝑑𝑒 𝑝𝑙𝑎𝑛 𝑑 𝑒𝑎𝑢 = 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑝𝑙𝑎𝑛𝑠 𝑑

𝑒𝑎𝑢 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑒 𝑙𝑖𝑡 𝑚𝑎𝑗𝑒𝑢𝑟 − 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑙𝑖𝑡 𝑚𝑖𝑛𝑒𝑢𝑟 (𝑘𝑚2) 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑙𝑖𝑡 𝑚𝑎𝑗𝑒𝑢𝑟 − 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑙𝑖𝑡 𝑚𝑖𝑛𝑒𝑢𝑟 (𝑘𝑚2) × 100 Le lit majeur est défini comme correspondant à 12 fois la largeur à plein bord théorique. La largeur à plein bord est fixée à partir de l’ordre de Strahler6

selon la table de conversion présentée dans le tableau 2 (Annexe 5). A noter que la fiabilité de cette estimation est relativement faible. Les surfaces de plans d’eau dans le lit majeur (« surf_pland ») et les surfaces du lit mineur (« surf_theor ») sont contenues dans les données de SYRAH® (Annexe 5). Cette méthode, développée par le SYRAH®, est uniquement appliquée au cours d’eau d’ordre de Strahler strictement inférieur à quatre. Elle est représentée schématiquement comme la proportion de plan d’eau dans le lit majeur (Figure 21)

6

La méthode de classification de Strahler permet de hiérarchiser les réseaux hydrographiques en attribuant à chaque ramification une valeur entière indicatrice de l’importance du cours d’eau. La règle d’attribution : « un drain d’ordre n+1 est issu de la confluence de deux drains d’ordre n ».

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Trois classes de taux de plan d’eau sont définies : Faible (<5%) ; Moyen (=5%) ; Fort (>5%)

Figure 21: Représentation schématique du taux de plan d’eau pour un tronçon (avec en bleu foncé : le lit majeur ; en rouge : le lit mineur ; en bleu clair : le plan d’eau ; en bleu clair rayé : la surface de plan d’eau dans le lit majeur)

(3) Facteur morphologique lié aux surlargeurs du cours d’eau

Ce facteur de sensibilité est dérivé du taux de surlargeurs obtenu à partir de la formule suivante : 𝑡𝑎𝑢𝑥 𝑑𝑒 𝑠𝑢𝑟𝑙𝑎𝑟𝑔𝑒𝑢𝑟𝑠 = 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑙𝑖𝑡 𝑚𝑎𝑗𝑒𝑢𝑟 (𝑘𝑚

2)

𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑙𝑖𝑡 𝑚𝑖𝑛𝑒𝑢𝑟 𝑡ℎé𝑜𝑟𝑖𝑞𝑢𝑒 (𝑘𝑚2)× 100

Ce facteur ne concerne que les cours d’eau d’ordre de Strahler supérieur ou égale à quatre. Il complète par conséquent le facteur précédent. Les surfaces de lit mineur théorique (« surf_theor ») et celles de lit majeur théorique (« surf_CEau ») sont obtenues grâce à la base de données de SYRAH® Les seuils pour la définition de l’indice de sensibilité issu du taux de surlageur sont : Faible (0-100%) ; Moyen (100-150%) ; Fort (>150%)

Aucune manipulation SIG n’est nécessaire à l’établissement des sous-facteurs de sensibilité (2) et (3) du fait que l’ensemble des données soient contenues dans SYRAH®.

(4) Facteur morphologique lié à l’ombrage

Ce dernier facteur de sensibilité est obtenu à partir du taux de conservation des ripisylves autours des tronçons. Pour chaque tronçon, une zone de 10m est ajoutée à la largeur pleins bords théorique respectivement sur les 2 rives (fonction « buffer »). La largeur plein bord étant spécifique pour chaque tronçon, ce corridor l’est également. Ce corridor est ensuite croisé à la couche « végétation » de la BDTOPO® (fonction « intersect »). Le taux de conservation est alors calculé selon la formule suivante :

𝑡𝑎𝑢𝑥 𝑑𝑒 𝑐𝑜𝑛𝑠𝑒𝑟𝑣𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑒𝑠 𝑟𝑖𝑝𝑖𝑠𝑦𝑙𝑣𝑒𝑠 = 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑣é𝑔é𝑡𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑒 𝑐𝑜𝑟𝑟𝑖𝑑𝑜𝑟 (𝑘𝑚2) 𝑆𝑢𝑟𝑓𝑎𝑐𝑒 𝑡𝑜𝑡𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑢 𝑐𝑜𝑟𝑟𝑖𝑑𝑜𝑟 (𝑘𝑚2)

Une première série de seuils est établie à propos de ce taux de conservation : Faible (0-30%) ; Moyen (30-60%) ; Fort (60-100%). Ce taux de conservation est ensuite croisé avec l’ordre de Strahler de chaque tronçon pour défnir l’indice de sensibilité à l’ombrage tel que présenté dans le Tableau 1.

Tableau 1 : Définition de l’indice de sensibilité à l’eutrophisation lié à l’ombrage (source : Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse

_

= taux de plan d’eau

_

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II.3.2.2. Facteur de sensibilité à l’eutrophisation des eaux côtières

La méthode ex-ante base son calcul du facteur de sensibilité à l’eutrophisation des eaux côtière sur les critères morphologiques de la zone côtière susceptible de favoriser une prolifération algale. Elle reprend la méthode établie par Håkanson et al (2008) qui développe un indice de sensibilité (SI) à l’eutrophisation des zones côtières. Cet indice porte sur deux paramètres morphologiques, facilement accessibles, considérés comme essentiels dans la description du renouvellement de l’eau et des flux internes propres à une zone côtière :

- L’ouverture, ou exposition de la zone côtière (Ex) : Elle est définie comme le rapport entre la longueur de la section séparant la zone côtière de l’océan (At, Figure 22) et la surface de la zone (A, Figure 22). On choisit de définir la section At comme le produit de la longueur de l’ouverture de la zone côtière (L) par la profondeur moyenne de celle-ci (DmL).

𝐸𝑥 = 𝐴𝑡𝐴× 100 avec 𝐴𝑡 = 𝐿 × 𝐷𝑚𝐿

- Le ratio dynamique (DR) : Il est égal au rapport entre la racine carré de la surface de la zone et sa profondeur moyenne (Dm, Figure 22). Ce ratio est une représentation des dynamiques internes de transport de l’eau, des sédiments et des polluants.

𝐷𝑅 = √𝐴 𝐷𝑚× 100

Figure 22 : Principaux paramètres décrivant le fonctionnement hydrologique d’une zone littorale (Source : Håkanson et al., 2008)

L’ensemble des paramètres de la méthode, à savoir L, DmL, At, A, Dm dépend directement de la délimitation de la zone côtière. La délimitation de la zone côtière ne doit pas se faire de manière arbitraire mais doit suivre l’approche dite par « goulot d’étranglement » (Pilesjö et al., 1991). Cette approche consiste à tester différentes délimitation de baie, c’est-à-dire différentes positions de la section (At1,At2,etc.) chacune associée à différentes surfaces (A1, A2, etc). La délimitation de baie présentant l’exposition minimale est choisie afin de se baser sur le cas le plus défavorable, celui d’eutrophisation potentielle maximale.

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Håkanson et al (2008) classifie les zones côtières en fonction de leur ouverture (Tableau 2). Généralement, les zones qualifiées de systèmes ouverts (avec une exposition relativement élevée) seront peu sensibles à l’eutrophisation, grâce à une capacité de renouvellement de l’eau importante.

Tableau 2 : Classification des zones côtières en fonction de leurs expositions (Ex), (Source : Lindgren et Håkanson, 2007)

A partir des paramètres Ex et DR déterminés précédemment, l’indice de sensibilité défini par Håkanson et al (2008) se calcule de la sorte :

si DR ≤ 0.25, 𝑆𝐼 = √((DR/0.2 5)/Ex) si DR ≥ 0.25, 𝑆𝐼 = √((0.25/DR)/Ex)

Cet indice de sensibilité à l’eutrophisation aux variations logarithmiques - entre 0 (insensible) et 100 (extrêment sensible) (Annexe 6) - doit ensuite être transformé par l’équation 6 afin d’obtenir un facteur de sensibilité aux variations linéaires [0-1] :

𝐹𝑆𝑚𝑎𝑟𝑖𝑛=log(𝑆𝐼) 2

Équation 9 : Facteur de sensibilité à l’eutrophisation marine selon la méthode ex-ante