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Détermination de la contribution intrinsèque à la dispersion des déphasages

3.4 Étude de la dépolarisation spatiale intrinsèque aux matériaux

3.4.2 Détermination de la contribution intrinsèque à la dispersion des déphasages

12 ' 1.81 rad (en noir sur la Fig. 3.10). Ce résultat est cohérent avec ce qui est attendu en théo-rie : un diffuseur multiple homogène produit un champ dont les états de polarisation se répartissent uniformément dans la sphère de Poincaré.

Quand la réflectance tend vers 0%, on peut s’attendre à ce que la phase relative se comporte comme dans le cas d’un diffuseur de surface idéal : un miroir. En effet, le peu d’énergie rétrodiffusé par un échantillon dont la réflectance tend vers 0% ne peut avoir subi, en grande majorité, qu’une simple diffusion, les diffusions multiples étant rapidement absorbées par le matériau. Cependant, la valeur d’écart type minimal (quand la réflectance tend vers 0%) σM IN = 0.77 rad est quasi quarante fois plus grande que l’écart type de la phase relative mesurée dans le champ réfléchi par le miroir miroir = 0.02 rad). On peut donc déduire que la mesure de dispersion de la phase relative par l’écart type est un estimateur biaisé pour décrire l’effet des multi-diffusions.

En revanche, après analyse des courbes présentées en Fig. 3.11, on a remarqué que la densité de probabilité de la phase relative pondérée suit une distribution proche d’une Lorentzienne circulaire.

3.4.2 Détermination de la contribution intrinsèque à la dispersion des dépha-sages relatifs

Sur la Fig. 3.11, on remarque que l’échantillon de réflectance R=2% entraine déjà un repliement (la probabilité de φ = 0 ou φ = 2π n’est pas nulle). Ainsi, pour caractériser rigoureusement ces dis-tributions, il faut utiliser des distributions circulaires. La phase relative est une variable circulaire, elle se replie sur l’intervalle [0 ; 2π]. Ainsi, sa densité de probabilité est également circulaire. l’ajus-tement de plusieurs distributions circulaires sur la densité de probabilité de la phase est proposé par régression non linéaire.

La distribution produite par l’échantillon de réflectance 2% est étudiée. Une distribution de Von Mises (VM) est utilisée, qui est l’approximation d’une distribution Gaussienne circulaire [21] :

V M (φ) = 1

exp(κ.cos(φ − φ0))

I0(κ) , 0 ≤ φ < 2π (3.11)

avec κ ∈ [0 ; ∞[ un paramètre caractérisant la dispersion de la distribution, φ0 la valeur de phase relative ayant une probabilité maximale, et I0(x) la fonction de Bessel modifiée d’ordre 0. La dis-tribution de VM ajustée est affichée en Fig. 3.13 (vert). L’erreur, par rapport à la disdis-tribution expérimentale (noire), est égale à err = 13%, le coefficient de corrélation est R2 = 0.994.

Une distribution de Cauchy circulaire (CC) est ensuite utilisée, définie analytiquement par [22] :

CC(φ) = 1

1 − ρ2

1 + ρ2− 2ρcos(φ − φ0), 0 ≤ φ < 2π (3.12) avec ρ ∈ [0 ; 1] un paramètre décrivant la concentration de la distribution. La CC ajustée est affichée en Fig. 3.13 (bleu). L’erreur est err = 23%, le coefficient de corrélation R2 = 0.980.

Figure 3.13 - Densité de probabilité de la phase φ mesurée dans le champ diffusé par le Spectralon de

réflectance 2% (noir). Régression par une Von Mises, l’erreur est 13% (vert). Régression par une Cauchy circulaire, l’erreur est 23% (bleu). Régression par une Voigt circulaire, l’erreur est 6% (rouge).

Finalement, la distribution obtenue par convolution circulaire de la distribution de Von Mises avec la Cauchy circulaire est utilisée :

CV = V M ⊗ CC (3.13)

avec ⊗ l’opérateur de convolution circulaire. Cette nouvelle distribution qu’on appellera CV (Cir-cular Voigt) est l’équivalent circulaire de la distribution de Voigt classique [23][24], obtenue par convolution d’une Gaussienne avec une Cauchy. La CV ajustée est affichée en Fig. 3.13 (rouge), l’erreur est err = 6%, le coefficient de corrélation R2 = 0.999.

Ainsi, dans le cas des faibles réflectances, la distribution de Voigt circulaire (CV) semble décrire le plus fidèlement la distribution de phase relative. Étant donné qu’elle est obtenue par convolution de deux distributions indépendantes (Cauchy circulaire et Von Mises), il peut être déduit que dans le cas de cet échantillon, les déphasages relatifs sont produits physiquement par au moins deux processus, qui suivent chacun une distribution indépendante.

Dans le cas des échantillons de plus forte réflectance (R ≥ 7%), des paramètres ρ quasi équiva-lents sont mesurés en utilisant une distribution CV ou CC, ce qui indique que la convolution de la

Figure 3.14 - Distribution de Voigt circulaire (CV (φ), vert), obtenue par convolution de distribution de

Von Mises (V M (φ), rouge) et Cauchy circulaire (CC(φ), bleu) décrivant la distribution de phase pondérée (p(φ), noire) mesurée dans le champ diffusé par l’échantillon R = 1%.

CC par une VM peut être négligée pour les échantillons de réflectance plus importante.

Ainsi, pour réaliser la mesure de ρ, une distribution CV est utilisée pour l’échantillon R = 1%, et une distribution CC pour les autres. L’évolution du paramètre ρ est affiché en Fig. 3.15 (noir), ainsi que les erreurs de description des distributions (Fig. 3.15, bleu) en fonction de la valeur de réflectance R des échantillons.

Figure 3.15 - Mesure du paramètre de concentration ρ (noir) par régression des distributions de phase

rela-tive diffusées par des Spectralons de réflectance variable. L’Eq. 3.14 est ajustée sur les mesures expérimentales (rouge). Les erreurs de description des distributions expérimentales par une distribution CV (R < 7%) et CC (R ≥ 7%) sont représentées en bleu.

L’évolution de ρ en fonction de la valeur de réflectance est continue et peut être décrite par une fonction du type :

ρ(R) = ρM IN + τρ

τρ+ R (3.14)

avec R = 100−RR , R ∈ [0 ; +∞[, ρM IN la valeur de concentration minimale (quand la réflectance R tend vers 100%), et τρ un facteur d’échelle. La régression est affichée en Fig. 3.15, on mesure : ρM IN = 0.05 et τρ= 0.05.

La valeur à l’origine ρ(0) = 1.05 est proche de la valeur attendue quand le matériau ne produit aucune multi-diffusions : 1, la distribution Dirac. Cette valeur doit être comparée avec la valeur d’écart type à l’origine mesurée précédemment : σ0 = 0.77 rad, qui représente une distribution Gaussienne d’écart type 40 fois plus grand que la distribution mesurée dans le champ réfléchi par le miroir. Ainsi, en utilisant des distributions circulaires pour caractériser la dispersion de φ, le biais produit par une mesure d’écart type est supprimé.

On a déduit plus haut qu’il y a au moins deux processus physiques indépendants à l’origine de la dispersion de la phase relative. Étant donné que la distribution en déphasage relatifs mesurés dans le champ réfléchi par le miroir (donc pas de multi-diffusions) est parfaitement décrit par une Gaussienne, on peut faire l’hypothèse que les artefacts et bruits expérimentaux produisent la partie Von Mises (approximation de la Gaussienne circulaire) de la distribution de Voigt circulaire, alors que les multi diffusions dans les Spectralons produisent la partie Cauchy circulaire. Concernant les échantillons de réflectance élevée, on peut supposer que les déphasages produits par multi-diffusions deviennent prépondérants par rapport aux artefacts et bruits expérimentaux, ce qui expliquerait le fait que les distributions CC et CV deviennent quasiment égales (ρcv' ρcc).

Dans le domaine de la spectroscopie moléculaire, lors de l’interaction de la lumière avec des atomes ou molécules, plusieurs processus provoquant un élargissement spectral des raies d’émis-sions peuvent être observés. Cet élargissement spectral est précisément décrit par une distribution de Voigt [23][24], qui s’obtient par convolution d’une distribution normale avec une distribution de Cauchy (ou Lorentzienne). La distribution normale provient d’un phénomène d’élargissement spectral inhomogène (paramètre ou processus extrinsèque à l’espèce considérée : par exemple dû à la vitesse des particules, inhomogénéités de composition ou structure), et la distribution de Cauchy provient d’un phénomène d’élargissement spectral homogène (paramètre ou processus intrinsèque à l’espèce considérée : par exemple l’incertitude des niveaux d’énergie ou la pression / température à l’équilibre). Ici, une analogie avec l’élargissement spectral est proposée, dans le cas de l’étude de l’élargissement des déphasages relatifs produits par diffusion dans un matériau. Il en est déduit que les déphasages relatifs produits par multi-diffusions dans un matériau homogène suivent une distribution de Cauchy circulaire.