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Détermination par amarrage moléculaire du cycle

Précisions sur la Méthode

V. Détermination par amarrage moléculaire du cycle

enzymatique conduisant à la réduction de la vitK

E

en vitK

Q

par

hVKORC1

L'état hVKORC1_C51-C132 a été précédemment identifié comme fixant la vitKE et peut être considéré comme point de départ au cycle enzymatique provoquant une réduction de la vitKE en vitKQ. Cependant, deux possibilités existent concernant l'étape suivante de ce cycle catalytique.

Dans le premier cas, le résidu C43 s'associerait avec le résidu C51 pour former un pont disulfure, rompant le pont C51-C132 déjà existant ; le proton du résidu C43 serait transféré au résidu C132. L'enzyme hVKORC1 serait ainsi à l'état hVKORC1_C43-C51. Un docking de la vitKE sur cet état enzymatique a déjà effectué (Figure 3.34), montrant l'existence de 4 poses distinctes pour lesquelles la vitKE est toujours éloignée du site actif de hVKORC1. Les protons des résidus C132 et C135 serait ensuite transférés un à un au groupement époxyde de la vitKE, rompant successivement une des liaisons entre l'atome d'oxygène et les atomes de carbone en position 2 et 3.

Dans une seconde hypothèse, le proton du résidu C135 serait d'abord transféré à l'atome d'oxygène du groupement époxyde, produisant une rupture de la liaison entre l'atome de carbone en position 2 ou 3 de la vitKE et l'atome d'oxygène de son groupement époxyde. La vitamine K serait ainsi à sous forme hydroxyquinone (vitKH). Le résidu C43 formerait ensuite un pont disulfure avec C51, rompant le pont C51-C132. Le proton du résidu C43 serait transféré à C132, puis au groupement hydroxyquinone de la vitKH, achevant ainsi la réduction de la vitKE en vitKQ. La suite du cycle est commune aux deux hypothèses présentées ici. Une fois la vitKE réduite en vitKQ, les résidus C132 et C135 de hVKORC1 formeraient un pont disulfure, conduisant l'enzyme à adopter l'état hVKORC1_C43-C51_C132-C135. La vitKQ peut être relâchée hors de hVKORC1 avant ou après la reformation du pont disulfure C132-C135 (Figure

3.39). Nous avons donc procédé à une nouvelle série de dockings afin d'identifier les étapes

les plus probables du cycle enzymatique conduisant à la réduction de la vitKE et en vitKQ et de définir l'ordre de rupture des deux liaisons du groupement époxyde. La sélectivité entre les différents modèles de hVKORC1 et les deux formes possibles de vitKH a ainsi été évaluée. La notation vitKH2 correspond à une rupture de la liaison entre l'atome d'oxygène et l'atome de carbone en position 3, vitKH3 indique une rupture de la liaison entre l'atome d'oxygène et l'atome de carbone en position 2.

145 Figure 3.39. Mécanismes enzymatiques potentiels conduisant à la réduction de la vitKE en vitKQ. Les

différentes étapes possibles du mécanisme de réduction de la vitKE par hVKORC1 sont indiquées. La structure de la vitamine K est représentée à chaque étape potentielle ; les modifications induites par hVKORC1 au niveau du groupement époxyde sont mises en évidence par une coloration bleu clair. L'état enzymatique de hVKORC1 associé à chaque étape potentielle ainsi que l'état d'oxydation ou de réduction des résidus C43, C51, C132 et C135

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Nous avons donc effectué un nouveau docking de la vitKH2 ou vitKH3 sur hVKORC1_C51-C132, le résidu C135 étant cette fois considéré à l'état déprotoné (S-). Cet état simule un transfert du proton du résidu C135 au groupement époxyde de la vitamine K, juste après fixation de la vitKE sur le modèle hVKORC1_C51-C132. Les résultats montrent une pose majoritaire de la vitKH2 (regroupant 64% des poses totales), identique à l'unique pose obtenue pour le docking de la vitKE sur hVKORC1_C51-C132 (Figure 3.38). L'ELL correspondant à cette pose (-6,26 kcal/mol) est presque identique à celle de la seconde pose (-6,21 kcal/mol), qui regroupe 20% des poses totales et qui consiste en une rotation à 180° de la vitKH3 par rapport à la première pose, orientant le groupement hydroxyquinone à l'opposé du site actif. La distance entre l'atome de soufre du résidu C135 et l'atome de carbone en position 3 de la vitKH2 est de 4,7 Å pour la pose majoritaire et de 4,9 Å pour la seconde pose. Les résultats concernant la vitKH3 montrent deux poses majoritaires, regroupant chacune 43 et 49% des poses totales, et dont les ELL sont très proches (-6,68 et -6,25 kcal/mol) ; il est donc difficile de distinguer la pose la plus pertinente (Figure 3.40). De plus, aucune des deux poses ne présente de positionnement de la vitKH3 similaire et celui de la vitKE fixé à hVKORC1.

Les résultats de ce premier docking de la vitKH sur ce modèle suggèrent donc un transfert du proton du résidu C135 au groupement époxyde de la vitamine K immédiatement après fixation de la vitKE sur hVKORC1_C51-C132, rompant la liaison entre l'atome d'oxygène et l'atome de carbone en position 3 de la vitamine K.

147 Figure 3.40. Amarrage moléculaire de la vitKH tronquée sur le modèle hVKORC1_C51-C132, considérant le résidu C135 à l'état déprotoné (S-). (A) Résultats du docking de la vitKH2 tronquée sur hVKORC1_C51 -C132_C135S-. (C) Résultats du docking de la vitKH3 tronquée sur hVKORC1_C51-C132_C135S-. Les poses similaires obtenues au cours de chaque docking sont regroupées et représentées par un diagramme. Le pourcentage de poses contenues dans chaque groupe est indiqué pour les groupes les plus représentatifs (incluant plus de 10% des poses totales). Les énergies libres de liaison associées à chaque groupe de poses sont indiquées sous le diagramme. Les structures 3D des complexes hVKORC1•vitKH correspondant aux poses les plus significatives sont représentées. La structure 3D de hVKORC1 est représentée en cartoon et colorée en bleu. La structure 3D de la vitKH est représentée en sticks verts ; les atomes de carbone et d'oxygène sont représentés par des sphères. Les résidus C43, C51, C132 et C135 sont représentés en sticks et colorés en rouge. Les atomes de soufre, d'oxygène, d'azote et d'hydrogène sont colorés en jaune, rouge clair, bleu et blanc, respectivement. Le pourcentage de poses correspondant à chaque complexe est indiqué à côté des structures 3D.

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Un deuxième docking entre des vitKH2 ou vitKH3 sur hVKORC1_C43-C51 a été effectué, en considérant le résidu C135 à l'état déprotoné (S-). Ce nouvel amarrage moléculaire vise à simuler la formation d'un pont disulfure entre les résidus C43 et C51 et le transfert du proton de C43 à C132. Les résultats impliquant la vitKH2 montrent une pose majoritaire (76% des poses totales) et une seconde pose minoritaire (16% des poses totales) dont les ELL respectives sont de -6,09 et -5,64 kcal/mol. La distance entre l'atome de soufre du résidu C135 et l'atome d'oxygène du groupement hydroxyquinone de la vitKH2 est de 13,1 Å pour la première pose et de 10,3 Å pour la seconde pose. Cette seconde pose, bien que minoritaire, pourrait correspondre à un pivotement de la vitKH2 par rapport à la position qu'elle occupait dans la cavité lors du docking précédent (Figure 3.40). Les résultats concernant la vitKH3 montrent trois poses constituant respectivement 39, 18 et 32% des poses totales et dont les ELL sont comprises entre -7,07 et -5,90 kcal/mol. Le positionnement de la vitKH3 est systématiquement éloigné du site actif de hVKORC1, la distance minimale entre l'atome de soufre du résidu C135 et l'atome de carbone en position 3 de la vitKH3 est de 12,1 Å, pour la première pose (Figure 3.41).

Ces résultats renforcent l'hypothèse d'une rupture de la liaison entre les atomes de carbone en position 3 et d'oxygène du groupement époxyde de la vitamine K dans un premier temps.

149 Figure 3.41. Amarrage moléculaire de la vitKH tronquée sur le modèle hVKORC1_C43-C51, considérant le résidu C135 à l'état déprotoné (S-). (A) Résultats du docking de la vitKH2 tronquée sur hVKORC1_C43 -C51_C135S-. (B) Résultats du docking de la vitKH3 tronquée sur hVKORC1_C43-C51_C135S-. Les poses similaires obtenues au cours de chaque docking sont regroupées et représentées par un diagramme. Le pourcentage de poses contenues dans chaque groupe est indiqué pour les groupes les plus représentatifs (incluant plus de 10% des poses totales). Les énergies libres de liaison associées à chaque groupe de poses sont indiquées sous le diagramme. Les structures 3D des complexes hVKORC1•vitKH correspondant aux poses les plus significatives sont représentées. La structure 3D de hVKORC1 est représentée en cartoon et colorée en bleu. La structure 3D de la vitKH est représentée en sticks verts ; les atomes de carbone et d'oxygène sont représentés par des sphères. Les résidus C43, C51, C132 et C135 sont représentés en sticks et colorés en rouge. Les atomes de soufre, d'oxygène, d'azote et d'hydrogène sont colorés en jaune, rouge clair, bleu et blanc, respectivement. Le pourcentage de poses correspondant à chaque complexe est indiqué à côté des structures 3D.

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Nous avons ensuite étudié la sélectivité des états hVKORC1_C43-C51 (résidus C132 et C135 à l'état S-) et hVKORC1_C43-C51_C132-C135 vis-à-vis de la vitKQ, afin de déterminer si la molécule pouvait se fixer sur ces états conformationnels de hVKORC1. Nous avons donc réalisé un docking de la vitKQ sur hVKORC1_C43-C51, en considérant cette fois les deux résidus C132 et C135 à l'état déprotoné (S-). Cet amarrage moléculaire simule le transfert du proton du résidu C132 au groupement hydroxyquinone de vitKH, donc sa réduction totale en vitKQ et la formation d'une molécule d'eau (non prise en compte dans le docking). Les résultats indiquent trois poses majoritaires, regroupant respectivement 41%, 31% et 23% des poses totales et dont les ELL sont comprises entre -8,19 et -7,45 kcal/mol. La vitKQ est systématiquement éloignée du site actif de hVKORC1 (Figure 3.42). Ces résultats suggèrent que la vitamine K serait relâchée hors de hVKORC1 dès sa réduction totale en vitKQ.

Figure 3.42. Amarrage moléculaire de la vitKQ tronquée sur le modèle hVKORC1_C43-C51, considérant les résidus C132 et C135 à l'état déprotoné (S-). (A) Résultats du docking de la vitKQ tronquée sur le modèle hVKORC1_C43-C51_C132S-_C135S-. (B) Résultats du docking de la vitKQ tronquée sur le modèle hVKORC1_C43 -C51_C132S-_C135S-. Les poses similaires obtenues au cours de chaque docking sont regroupées et représentées par un diagramme. Le pourcentage de poses contenues dans chaque groupe est indiqué pour les groupes les plus représentatifs (incluant plus de 10% des poses totales). Les énergies libres de liaison associées à chaque groupe de poses sont indiquées sous le diagramme. Les structures 3D des complexes hVKORC1•vitKQ correspondant aux poses les plus significatives sont représentées. La structure 3D de hVKORC1 est représentée en cartoon et colorée en bleu. La structure 3D de la vitKQ est représentée en sticks verts ; les atomes de carbone et d'oxygène sont représentés par des sphères. Les résidus C43, C51, C132 et C135 sont représentés en sticks et colorés en rouge. Les atomes de soufre, d'oxygène, d'azote et d'hydrogène sont colorés en jaune, rouge clair, bleu et blanc, respectivement. Le pourcentage de poses correspondant à chaque complexe est indiqué à côté des structures 3D.

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En revanche, les résultats de l'amarrage moléculaire de la vitKQ sur le modèle hVKORC1_C43-C51_C132-C135 révèlent l'existence d'une pose majoritaire (comprenant 60% des poses totales et dont l'ELL est de -7,04 kcal/mol). Deux autres poses sont observées, dont les ELL sont quasiment identiques (-7,01 et -6,93 kcal/mol) et qui constituent chacune 17% et 19% des poses totales. La vitKQ est positionnée à proximité du site actif de hVKORC1 pour les deux premières poses (Figure 3.43), qui pourraient à nouveau correspondre à un pivotement de la molécule par rapport à son positionnement dans la cavité des modèles hVKORC1_C51-C132 et hVKORC1_C43-C51. Ces derniers résultats suggèrent donc l’impossibilité pour la vitKQ de se fixer sur hVKORC1 une fois le pont disulfure entre les résidus C132 et C135 formé. De plus, la coexistence des deux résidus C132 et C135 à l'état déprotoné (S-) est très peu stable chimiquement. Leur association pour former un pont disulfure C132-C135 doit donc s'effectuer très rapidement. Nous avons ainsi considéré que la vitKQ restait liée à hVKORC1 jusqu’à la formation du pont disulfure C132-C135, hypothèse renforcée par les résultats du dernier docking.

Figure 3.43. Amarrage moléculaire de la vitKQ tronquée sur le modèle hVKORC1_C43-C51_C132-C135. Les

poses similaires obtenues au cours de chaque docking sont regroupées et représentées par un diagramme. Le pourcentage de poses contenues dans chaque groupe est indiqué pour les groupes les plus représentatifs (incluant plus de 10% des poses totales). Les énergies libres de liaison associées à chaque groupe de poses sont indiquées sous le diagramme. Les structures 3D des complexes hVKORC1•vitKQ correspondant aux poses les plus significatives sont représentées. La structure 3D de hVKORC1 est représentée en cartoon et colorée en bleu. La structure 3D de la vitKQ est représentée en sticks verts ; les atomes de carbone et d'oxygène sont représentés par des sphères. Les résidus C43, C51, C132 et C135 sont représentés en sticks et colorés en rouge. Les atomes de soufre, d'oxygène, d'azote et d'hydrogène sont colorés en jaune, rouge clair, bleu et blanc, respectivement. Le pourcentage de poses correspondant à chaque complexe est indiqué à côté des structures 3D.

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L'ensemble des dockings effectués entre les différents états enzymatiques de hVKORC1 et les formes vitKE, vitKH et vitKQ de la vitamine K nous a finalement permis de postuler le mécanisme enzymatique détaillé de la réduction de la vitKE en vitKQ. Nous avons identifié l'état hVKORC1_C51-C132 comme fixant la vitKE. Le proton du résidu C135 est ensuite transféré au groupement époxyde de la vitamine K, la réduisant en vitKH2 (les résultats de docking suggèrent en effet une rupture entre l'atome d'oxygène du groupement époxyde et l'atome de carbone en position 3 de la vitamine K). Puis, les résidus C43 et C51 s'associent pour former un pont disulfure C43-C51, rompant le pont C51-C132 existant. Le proton du résidu C43

est transféré au résidu C132, puis au groupement hydroxyquinone de la vitKH2, la réduisant totalement en vitKQ et provoquant la formation d'une molécule d'eau. Les résidus C132 et C135, à l'état déprotoné S-, s'associent alors pour former un pont disulfure C132-C135. La vitKQ est finalement relâchée hors de hVKORC1_C43-C51_C132-C135. L'apport de deux protons est ensuite nécessaire pour rompre le pont disulfure C43-C51, conduisant la protéine à l'état hVKORC1_C132-C135. L'association des résidus C51 et C132 permet à l'enzyme d'adopter à nouveau l'état actif hVKORC1_C51-C132 fixant la vitKE. Le cycle enzymatique ainsi défini est présenté dans la Figure 3.44.

Les deux protons nécessaires à la réactivation de hVKORC1 une fois le cycle enzymatique effectué sont apportés par le milieu extérieur. Des données biologiques suggèrent l'intervention d'un partenaire protéique de la famille des thiorédoxines [29], fournissant à hVKORC1 les deux protons nécessaires à la rupture du pont disulfure C43-C51.

En revanche, un biais existe dans le docking réalisé. En effet, les conformations de hVKORC1_C43-C51 et hVKORC1_C43-C51_C132-C135 sur lesquelles sont arrimées la vitKH et la vitKQ sont extraites d'une simulation de DM effectuée sur l'enzyme seule. La cavité de hVKORC1 ne s'est donc pas ajustée à la vitamine K au cours de cette simulation de DM. Or, dans la réalité biologique, une fois la vitKE arrimée à hVKORC1_C51-C132, la cavité de la protéine subit l'influence structurale de la vitamine K, même lors des changements d'états conformationnels.

153 Figure 3.44. Cycle catalytique conduisant à la réduction de la vitKE en vitKQ par hVKORC1 postulé à partir des résultats de docking moléculaire. Les différentes étapes du cycle catalytique de hVKORC1, prédites

à partir des résultats de docking moléculaire, sont indiquées. La structure de la vitamine K et l'état enzymatique de hVKORC1 associés à chaque étape sont représentés. La structure de la vitamine K est représentée en vert ; hVKORC1 est schématisée en bleu. Les flèches rouges indiquent les transferts de protons entre les résidus C43, C51, C132, C135 de hVKORC1 et le groupement époxyde ou hydroxyquinone de la vitamine K. Les flèches noires indiquent les étapes de fixation de la vitamine K sur hVKORC1 et de relargage de la molécule hors de l'enzyme.

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Cette subtilité peut-être à l'origine de la variété de poses obtenues pour certains dockings, et du positionnement légèrement variable de la vitamine K d'un état enzymatique à l'autre. Néanmoins, l'obtention d'une pose unique de la vitKE sur hVKORC1_C51-C132, en parfait accord avec les données biologiques [16], constitue une base solide pour la première étape du mécanisme de réduction de la vitKE en vitKQ. Nos résultats présentent en outre une tendance nette, nous permettant de postuler le cycle enzymatique de hVKORC1 malgré le biais mentionné précédemment.

VI. Etude des interactions au sein de complexes