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Déplacement des Italiens vers les quartiers du centre ancien ou excentrés 403

Nous avons vu qu’à Toulon le centre ancien est l’une des principales zones d’accueil pour les Italiens de la commune et qu’il peut-être considéré comme une véritable « petite

401 La rue Evenos et la rue Messine se situent dans le même secteur que la rue Taylor, principale localité d’accueil des Italiens de la commune en 1851.

402 Marius Autran, « Du bourg provençal à la cité cosmopolite », art. cit. p. 11.

403 Plan actuel de la ville de La Seyne-sur-Mer, [en ligne] : http://www.gralon.net/plan-ville/plan-la-seyne-sur-mer-34021.htm, modifié à l’aide du logiciel Paint.

Italie »404. À La Seyne-sur-Mer, le centre ancien occupe également une place importante à partir de 1872. Comme à Toulon, ces derniers semblent cependant présents sur l’ensemble de la zone sud de la commune. En revanche, la mutation géographique qui se produit à La Seyne-sur-Mer n’est pas visible à Toulon où les principales zones d’accueil des immigrés d’outremont restent plus ou moins les mêmes sur l’ensemble de la période étudiée (deuxième moitié du XIXe siècle-XXe siècle)405. Les mauvaises conditions de vie des Italiens installés près des chantiers navals sont la principale cause de la mobilité italienne à La Seyne-sur-Mer.

3. B. BRIGNOLES : UN EXEMPLE D’IMMIGRATION RURALE

Contrairement aux villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer, la ville de Brignoles est située au centre du département. Elle est donc un exemple significatif de l’immigration italienne en milieu rural. Malgré une population totale assez faible par rapport aux communes littorales étudiées, la ville accueille un certain nombre d’Italiens dont nous avons défini l’importance. Leurs régions d’origine ainsi que leur répartition géographique sur le territoire brignolais ont également été déterminées. La situation italienne de Brignoles a été comparée à celle de La Garde, dont les aspects démographiques et économiques peuvent être comparables, mais aussi à celle des villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer.

3. B. a.

La démographie italienne de Brignoles

Avec ses 16 885 habitants en 2012406 et un territoire qui s’étend sur 70,5 km², Brignoles est la sous-préfecture du département du Var. Elle est située dans un ancien bassin minier d'extraction de bauxite et dans la plaine de la rivière Caramy407. Elle est durant le grand exode

404 Cf. supra, I. 2. B. a., p. 86-94.

405Ibidem.

406 « Ville de Brignoles dans le département Var (83) », [en ligne] : http://www.conseil-general.com/mairie/mairie-brignoles-83170.htm.

407 Géographie de la ville de Brignoles, « De riches ressources naturelles », [en ligne] :

http://www.brignoles.fr/capitale-du-centre-var/geographie-432.html ; « La ville de Brignoles », [en ligne] :

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italien une commune exclusivement rurale et bien que l’économie de Brignoles se développe considérablement depuis plusieurs décennies, la ville conserve une grande partie de son patrimoine naturel. Elle fait aujourd’hui partie de ce que les opérateurs touristiques appellent la Provence Verte408. Dès la deuxième moitié du XIXe siècle, tandis que ces ressources naturelles favorisent les activités agricoles du département, on assiste à la désertion des campagnes varoises409. Comme de nombreuses communes du nord et du centre du département, Brignoles connaît une importante diminution de sa population de 1851 à 1921, contrairement aux villes littorales comme Toulon et La Seyne-sur-Mer où le nombre d’habitants ne cesse d’augmenter, comme le montre le graphique suivant.

0 20000 40000 60000 80000 100000 120000 1851 1872 1891 1911 1921 Nombre d'habitants à Brignoles Nombre d'habitants à Toulon Nombre d'habitants à La Seyne-sur-Mer

Graphique 10 : Évolution du nombre d’habitants à Brignoles, Toulon et La Seyne-sur-Mer

de 1851 à 1921410

408 La Provence Verte est constituée de quatre communautés de communes dont le Comté de Provence, à laquelle appartient Brignoles. Elle regroupe 39 villes et villages dont le patrimoine et les ressources naturelles sont exceptionnels et ont été préservés. Les trois autres communautés de communes qui composent la Provence Verte sont la Sainte-Baume Mont Aurélien, le Val d’Issole et la Provence d’Argens en Verdon. Site de l’Office de Tourisme de la Provence Verte, [en ligne] : http://www.la-provence-verte.net. Voir aussi la vidéo de présentation de la Provence Verte, [en ligne] : http://www.la-provence-verte.net/decouvrir/phototheque.php. Voir annexe 8, la Provence Verte et les 39 communes qui la constituent, p. 333.

409 Yves Rinaudo, op. cit., Tome II, p. 481-486.

410 Registres de recensement 11M 2/54, 1851, 11M 2/55, 1872, 11M 2/56, 1891, 11M 2/57, 1901, Brignoles, ADV, Draguignan ; « La population de Brignoles », [en ligne] : http://www.annuaire-mairie.fr/statistique-brignoles.html ; Registres de recensement 11M 2/283, 1851, 11M 2/285, 1872, 11M 2/287, 1891, 11M 2/289, 1901, La

Seyne-sur-Mer, ADV, Draguignan ; statistiques de l’insee, [en ligne] :

http://www.statistiques-locales.insee.fr/FICHES/DL/DEP/83/COM/DL_COM83126.pdf ; « Statistiques sur la population de La Seyne-sur-Mer, [en ligne] : http://www.annuaire-mairie.fr/statistique-la-seyne-sur-mer.html ; « Ville de La Seyne-sur-Mer dans le département Var (83) », [en ligne] : http://www.conseil-general.com/mairie/mairie-la-seyne-sur-mer-83500.htm ;

La population totale de Brignoles de 1851 à 1921 est largement inférieure à celle des villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer411. Les chiffres relatifs à ces trois communes sont présentés dans le tableau ci-dessous.

1851 1872 1891 1911 1921 Nombre d’habitants à Brignoles 5809 5376 4811 4541 3916 Nombre d’habitants à Toulon 69 474 74 800 77 747 104 582 106 331 Nombre d’habitants à La Seyne-sur-Mer 7401 10 123 14 332 22 093 23 168

Tableau 22 : Récapitulatif du nombre d’habitants à Brignoles de 1851 à 1921, en

comparaison aux villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer412

Registres de recensement 11M 2/316, Toulon Est, 11M 2/332, Toulon Ouest, 1851 ; 11M 2/320, Toulon Est, 11M 2/336, Toulon Ouest, 1872 ; 11M 2/324, Toulon Est, 11M 2/340, Toulon Ouest, 1891 ; 11M 2/ 343, Toulon Ouest, section 1 à 444, 11M 2/344, Toulon Ouest, section 445 à 854, 11M 2/345, Toulon Ouest, section 855 à 1172, 1901 ; 11M 2/ 354, 11M 2/ 355, Toulon, 1er canton, 11M 2/ 356, 11M 2/357, Toulon, 2ème canton, 11M 2/358, 11M 2/359, 11M 2/360, Toulon, 3ème canton, 1911, ADV, Draguignan ; Histoire et mémoires des immigrations en région PACA, op. cit., p. 51 ; « La population de Toulon », [en ligne] : http://www.annuaire-mairie.fr/statistique-toulon.html.

411 Cf. supra, I. 2. A. b., p. 69-77, I. 3. A. a., p. 109-116.

412 Registres de recensement 11M 2/54, 1851, 11M 2/55, 1872, 11M 2/56, 1891, 11M 2/57, 1901, Brignoles, ADV, Draguignan ; « La population de Brignoles », [en ligne] : http://www.annuaire-mairie.fr/statistique-brignoles.html ; Registres de recensement 11M 2/283, 1851, 11M 2/285, 1872, 11M 2/287, 1891, 11M 2/289, 1901, La

Seyne-sur-Mer, ADV, Draguignan ; statistiques de l’insee, [en ligne] :

http://www.statistiques-locales.insee.fr/FICHES/DL/DEP/83/COM/DL_COM83126.pdf ; « Statistiques sur la population de La Seyne-sur-Mer, [en ligne] : http://www.annuaire-mairie.fr/statistique-la-seyne-sur-mer.html ; « Ville de La Seyne-sur-Mer dans le département Var (83) », [en ligne] : http://www.conseil-general.com/mairie/mairie-la-seyne-sur-mer-83500.htm ; Registres de recensement 11M 2/316, Toulon Est, 11M 2/332, Toulon Ouest, 1851 ; 11M 2/320, Toulon Est, 11M 2/336, Toulon Ouest, 1872 ; 11M 2/324, Toulon Est, 11M 2/340, Toulon Ouest, 1891 ; 11M 2/ 343, Toulon Ouest, section 1 à 444, 11M 2/344, Toulon Ouest, section 445 à 854, 11M 2/345, Toulon Ouest, section 855 à 1172, 1901 ; 11M 2/ 354, 11M 2/ 355, Toulon, 1er canton, 11M 2/ 356, 11M 2/357, Toulon, 2ème canton, 11M 2/358, 11M 2/359, 11M 2/360, Toulon, 3ème canton, 1911, ADV, Draguignan ; Histoire et mémoires des immigrations en région PACA, op. cit., p. 51 ; « La population de Toulon », [en ligne] : http://www.annuaire-mairie.fr/statistique-toulon.html.

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À titre de comparaison, dans la ville de La Garde, qui n’est encore qu’un petit village à l’époque de la grande immigration, le nombre total d’habitants a tendance à stagner de 1851 à 1901, excepté l’année 1891 qui révèle une hausse provisoire de la population totale. 2875 individus sont recensés en 1851, 2986 en 1876, 3494 en 1891, 2398 en 1896 et 2791 en 1901413. La situation démographique de cette petite commune du sud est différente de celle des autres villes étudiées où la population totale est en constante hausse (Toulon et La Seyne-sur-Mer) ou, à l’inverse, en baisse (Brignoles). Elle est en revanche comparable, en terme quantitatif, à celle de la ville de Brignoles. On peut constater que le nombre d’Italiens présents dans ces deux communes n’est pas négligeable par rapport à leur nombre total d’habitants, comme le montrent les tableaux suivants414.

1851 1872 1891 1901 Nombre d’Italiens à Brignoles 33 305 374 565 Nombre total d’habitants à Brignoles 5809 5376 4811 4748 % des Italiens dans

la population totale de Brignoles

0,5% 5,7% 7,8% 12%

Tableau 23 : Nombre d’Italiens à Brignoles de 1851 à 1901 par rapport au nombre total

d’habitants415

413 La population totale de la ville de La Garde n’apparaît pas dans le graphique n°9 ni dans le tableau n°24 car le recensement des habitants de la commune ne prend pas en compte les mêmes années. Il a été effectué dans le cadre du Mémoire de Master intitulé L’Italie à La Garde de 1850 à nos jours. Registres de recensement 11M 2/ 141, 1851,

11M 2/142, 1876, 1896 et 1901, La Garde, ADV ; registres de recensement de 1888 à 1893, de 1895-1896, La Garde, Archives Municipales.

414 Le nombre d’Italiens présents à Brignoles et à La Garde ne peut être présenté dans un tableau comparatif car il a été recensé selon des années différentes.

415 Registres de recensement 11M 2/54, 1851, 11M 2/55, 1872, 11M 2/56, 1891, 11M 2/57, 1901, Brignoles, ADV, Draguignan.

1851 1876 1891 1896 Nombre d’Italiens à La Garde 56 198 411 126 Nombre total d’habitants à La Garde 2875 2986 3494 2398 % des Italiens dans

la population totale de La Garde

2% 6,6% 11,7% 5,2%

Tableau 24 : Nombre d’Italiens à La Garde de 1851 à 1896 par rapport au nombre total

d’habitants416

Durant la deuxième moitié du XIXe siècle, on remarque l’évolution constante du nombre d’Italiens à Brignoles417, comme c’est le cas à Toulon, à La Seyne-sur-Mer et dans l’ensemble du département418. La population transalpine de la ville de La Garde augmente en revanche jusqu’en 1891, puis diminue en 1896 (elle augmentera de nouveau durant la Grande Guerre et jusqu’aux années 1920, comme dans l’ensemble du département)419.

En 1851, parmi les 33 immigrés d’outremont recensés à Brignoles, on compte 21 hommes, 9 femmes et 3 enfants420. Comme dans le reste du département, la dominance masculine s’explique par la venue de célibataires ou de chefs de famille qui viennent en éclaireurs découvrir un territoire inconnu. À La Garde, les Italiens recensés la même année sont plus nombreux qu’à Brignoles, malgré un nombre total d’habitants inférieur. La situation

416 Registres de recensement 11M 2/ 141, 1851, 11M 2/142, 1876, 1891 et 1896, La Garde, ADV, Draguignan ; registre de recensement de 1895-1896, La Garde, Archives Municipales.

417 Registres 11M 2/54, 1851, 11M 2/55, 1872, 11M 2/56, 1891, 11M 2/57, 1901, Brignoles, ADV, Draguignan.

418 Cf. supra, I. 1. B. a., p. 31-35, I. 2. A. b., p. 69-72, I. 3. A. a., p. 111-114.

419 Registres de recensement 11M 2/141, 1851, 11M 2/142, 1876, 1891 et 1896, La Garde, ADV, Draguignan ; registres de recensement de 1888 à 1893, de 1895-1896, de 1914 à 1916, de 1929 à 1933, La Garde, Archives Municipales.

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littorale de la ville de La Garde et sa proximité avec Toulon explique probablement la supériorité numérique des immigrés.

En 1872, la population brignolaise totale a diminué mais le nombre de Transalpins a considérablement augmenté par rapport à 1851421. Nous avons constaté que la population locale tend à se diriger vers la ville et la désertion des campagnes par les autochtones incite les étrangers à venir combler ce manque démographique et économique. Les différences entre hommes et femmes sont de plus en plus minces puisque 124 individus de sexe masculin sont recensés contre 104 de sexe féminin et 77 enfants. Outre l’arrivée de familles entières qui rejoignent un mari venu en éclaireur, cet écart très faible peut également être la conséquence de l’emploi. En effet, la diversité des tâches agricoles à Brignoles permet aux femmes et aux enfants de travailler422. Elles ne nécessitent pas de qualifications particulières. Contrairement à la ville de La Seyne-sur-Mer qui, du fait des chantiers navals, attire prioritairement des hommes nous l’avons vu423, la ville de Brignoles et ses diverses activités sollicitent l’ensemble des Italiens, peu importe l’âge et le sexe.

Notons qu’il s’agit souvent d’activités temporaires qui ne fixent pas automatiquement les immigrés sur le territoire. En effet, parmi les 33 Italiens comptabilisés en 1851, seulement 4 noms de famille réapparaissent dans le registre de 1872. Dans un cas, il s’agit des mêmes personnes puisque les prénoms coïncident, dans les trois autres cas, il s’agit certainement de parents ou de descendants. Cela montre le caractère fluctuant de l’emploi et donc de l’immigration dans une ville agricole comme celle de Brignoles, où les tâches varient au gré des saisons424.

En comparaison, à La Garde, durant la même période, le nombre de Transalpins est également en hausse mais cette augmentation est moins significative qu’à Brignoles. Par contre, le nombre total d’habitants à La Garde n’augmente que très légèrement par rapport à

421 Registre 11M 2/55, Brignoles, 1872, ADV, Draguignan.

422 Daniel Costamagna, op. cit., p. 43.

423 Cf. supra, I. 3. A. b., p. 118.

1851 (2986 en 1876 contre 2875 en 1851) et il semblerait que les nouveaux immigrés transalpins soient les principaux responsables de cette hausse425.

Comme dans le reste du département, le nombre d’Italiens dans la commune de Brignoles continue d’augmenter en 1891. Le nombre d’hommes et de femmes sont tous deux en augmentation puisque l’on dénombre 143 hommes contre 111 femmes et 120 enfants426. Après quelques mois ou quelques années de travail saisonnier, certains immigrés saisissent l’opportunité qui leur est offerte, suite à la désertion du territoire par la population locale, de s’installer définitivement sur le territoire et d’y travailler durablement427. La même année, le nombre d’Italiens à La Garde, ainsi que la population totale de la commune augmentent considérablement par rapport au recensement de 1876. La hausse du nombre total d’habitants dépend alors en grande partie de l’accroissement du nombre d’immigrés.

La situation italienne de La Garde est bien différente de celle de Brignoles où les Transalpins viennent remplacer une population en déclin et non augmenter une population stagnante. À la fin du XIXe siècle, contrairement aux villes de Brignoles, Toulon et La Seyne-sur-Mer, la commune de La Garde connaît une baisse du nombre d’immigrés d’outremont, accompagnée du déclin de la population totale. L’attrait de la ville de Toulon, frontalière, explique peut-être un départ à la fois de la population municipale et des immigrés vers une grande ville où l’économie fructueuse offre plus d’opportunités d’emploi qu’à La Garde qui n’est à l’époque qu’un petit village.

Le recensement de 1901 révèle une hausse importante de la population italienne de Brignoles, tandis qu’une diminution de la population totale se produit. La proportion des Transalpins par rapport au nombre total d’habitants est alors plus importante. Le nombre d’individus des deux sexes ainsi que le nombre d’enfants se sont accrus puisque l’on compte 228 hommes, 187 femmes et 150 enfants428. L’installation durable de familles entières se confirme et nous verrons dans la seconde partie de ce travail qu’elle va souvent de pair avec

425 Registre de recensement 11M 2/142, 1876, La Garde, ADV, Draguignan.

426 Registre de recensement 11M 2/56, Brignoles, 1891, ADV, Draguignan.

427 Daniel Costamagna, op. cit., p. 43.

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une stabilisation professionnelle, notamment dans le secteur agricole. À titre comparatif, à La Garde, la baisse du nombre d’Italiens se poursuit429. En revanche, le nombre d’immigrés augmente de nouveau durant la période de 1914-1916, durant laquelle 205 Italiens sont recensés malgré le conflit430. Peut-être certains immigrés ayant quitté la commune pour travailler à Toulon par exemple jugent-ils dangereuse leur installation dans un port militaire en temps de guerre et préfèrent regagner le village de La Garde qu’ils ont connu quelques années plus tôt.

En résumé, la situation démographique italienne à Brignoles suit la tendance du département où le nombre d’Italiens augmente constamment jusqu’au début du XXe siècle. C’est également le cas des villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer comme nous avons pu l’observer. La particularité des villes du centre Var et du haut Var, comme celle de Brignoles, est que la population étrangère, outre l’apport économique qu’elle représente, participe au repeuplement du territoire. À La Garde, nous avons vu que la situation diverge puisqu’une diminution de la population transalpine se produit dès 1896 et le regain de l’immigration se vérifie à partir de la Grande Guerre. Sa situation limitrophe avec la ville de Toulon explique probablement les fluctuations qui touchent la commune.

La ville de Brignoles accueille donc un nombre non négligeable d’Italiens par rapport à sa population totale. Voyons quelles sont les régions de provenance de ces Transalpins qui ont choisi l’immigration rurale, en comparaison au département et aux villes littorales étudiées.

3. B. b.

Les régions d’origine des Italiens de Brignoles

Les Piémontais représentent la première population italienne du département431. Toutefois, deux cas particuliers ont été soulignés, il s’agit des villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer qui accueillent des immigrés en provenance de toute l’Italie432. Les principales

429 Registre de recensement de 1909 à 1912, La Garde, Archives Municipales.

430 Registre de recensement de 1914 à 1916, La Garde, Archives Municipales.

431 Cf. supra, I. 1. C. a., p. 48-52.

régions d’origine des Transalpins de Brignoles ont été définies afin de mettre en exergue la tendance que suit la commune. En d’autres termes, la situation à Brignoles a été analysée et confrontée à celle des villes de Toulon et de La Seyne-sur-Mer, mais aussi à celle du département dans son ensemble. La ville de La Garde, qui présente des similarités démographiques et économiques avec celle de Brignoles, a également été évoquée. Les graphiques présentés ci-dessous montrent les régions de provenance des Italiens de Brignoles en 1851 et en 1872.

Piémont Sardaigne Ligurie

Graphique 11 : Les origines régionales des Italiens de Brignoles en 1851433

Piémont Ligurie Lombardie Toscane Campanie Emilie-Romagne

Graphique 12 : Les origines régionales des Italiens de Brignoles en 1872434

433 Registre de recensement 11M 2/54, Brignoles, 1851, ADV, Draguignan.

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En 1851, sur les 33 Italiens présents dans la commune, 28 sont originaires du Piémont435. Une nette dominance piémontaise qui est la conséquence d’un phénomène général qui touche l’ensemble du département. On peut également penser que le caractère agricole de la ville de Brignoles justifie la venue d’immigrés en provenance de régions montagneuses, habitués aux travaux agraires. En 1872, les Piémontais sont toujours largement majoritaires avec 148 individus pour 305 immigrés italiens au total, mais on remarque la diversification des origines régionales des Transalpins de Brignoles. En effet, tandis qu’en 1851 seulement 2 Sardes, 1 Ligure et 2 Transalpins dont l’origine régionale n’est pas indiquée viennent s’ajouter aux 28 Piémontais, en 1872, on compte 40 Ligures, 17 Lombards, 11 Toscans, 6 Campaniens, 2 Italiens en provenance d’Émilie-Romagne et 81 Italiens dont l’origine régionale n’est pas indiquée dans le registre de recensement436.

Notons que les deux Sardes recensés en 1851 n’apparaissent plus dans le recensement de 1872. Le problème relatif à l’origine réelle des immigrés recensés comme Sardes a déjà été mentionné et on peut constater que l’importante diminution, voire la disparition de cette communauté entre 1851 et 1872 est visible dans chaque ville étudiée437. La présence importante de Ligures et d’autres Italiens originaires de régions côtières, voire du sud de la péninsule en 1872, remet en cause le choix de Brignoles en fonction des similarités entre région d’origine et territoire d’accueil.

La diversification des régions de provenance va de pair avec l’augmentation de la population italienne en 1872. Elle se vérifie d’ailleurs dans l’ensemble du département, à Toulon et à La Seyne-sur-Mer nous l’avons observé438, mais aussi à La Garde où l’on remarque une dominance piémontaise avec notamment les villes de Bra, Alba, Barbaresco et Pocapaglia et la présence de Lombards, de Ligures, de Toscans et d’immigrés en provenance

435 Registre de recensement 11M 2/54, Brignoles, 1851, ADV, Draguignan.

436 Registre de recensement 11M 2/54, Brignoles, 1851, ADV, Draguignan ; registre de recensement 11M 2/55, Brignoles, 1872, ADV, Draguignan.

437 Cf. supra, I. 1. C. a., p. 47-48, I. 2. A. c., p. 78-81. Rappelons que les informations transmises dans les registres

de recensement sont parfois imprécises et très diverses et qu’on ne connaît pas toujours la ville d’origine.

438 Cf. supra, I. 2. A. c., p. 77-84, I. 3. A. b., p. 119-121. Rappelons qu’à Toulon et à La Seyne-sur-Mer, les origines

du Frioul439. Le phénomène de diversification des origines à Brignoles peut aussi résulter d’une immigration interdépartementale. Les Italiens arrivés dans les villes côtières pour y travailler, notamment ceux employés dans les grandes industries toulonnaises ou seynoises, se déplacent souvent au gré des travaux proposés lors des périodes de chômage440. D’une manière générale, le nombre d’Italiens par région de provenance à Brignoles reflète très bien la situation du département, les Piémontais étant majoritaires. La présence non négligeable de Ligures rappelle le cas de Toulon et de La Seyne-sur-Mer où ils sont, avec les Piémontais, les principales populations441.

3. B. c.

Une concentration italienne au centre ville

Les similitudes entre Brignoles et les villes littorales étudiées se vérifient aussi dans la répartition géographique des Italiens. En effet, nous allons voir que le phénomène de regroupement communautaire connu à Toulon et à La Seyne-sur-Mer se reproduit au centre