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A.1 Les dépôts : optimisation des conditions de croissance

CHAPITRE IV : Films minces FeRh épitaxiés sur MgO (001)

IV. A.1 Les dépôts : optimisation des conditions de croissance

Nous avons fait le choix de procéder à un co-dépôt des deux éléments, fer et rhodium, à partir de deux cibles élémentaires, afin de conserver une grande souplesse pour ajuster la composition.

IV.A.1.1 Ajustement de la composition

Les vitesses de dépôt des deux cibles ont tout d’abord été étalonnées séparément. Pour chaque élément, deux dépôts d’une durée identique (15min) sur un substrat de verre ont été réalisés à température ambiante pour deux valeurs de courant différentes : 20 et 30 mA.

Les épaisseurs déposées ont été déterminées à partir de la réflectivité des rayons X aux petits angles. La réflectivité a été effectuée sur un diffractomètre Panalytical Empyreana équipé d’une source Co Kα1 (λ = 0,1789 nm, soit E = 6930,8 eV) et d’un monochromateur germanium Ge(220).

La figure 4.1 montre un exemple de spectre de réflectivité obtenu sur une couche de Rh déposée sur un substrat de verre à 20 mA pendant 15min. La courbe bleue représente l’ajustement.

Figure 4.1 : Courbe de réflectivité du Rh déposé sur un substrat de verre à 20 mA pendant 15min. La courbe bleue représente l’ajustement de la courbe rouge. Le meilleur ajustement est obtenu pour une épaisseur de 13 nm.

Afin de déterminer l’épaisseur déposée, nous avons ajusté les courbes de réflectivité au moyen du logiciel SimulReflec (développé au Laboratoire Léon Brillouin par Frédéric Ott). La réflectivité dépend de plusieurs paramètres : des paramètres « matériaux », des paramètres « appareil » et enfin des paramètres d’interaction « matériau-appareil ». Les paramètres typiquement matériaux sont la nature de l’élément et en particulier sa densité atomique, mais également l’épaisseur déposée, l’empilement de différentes couches (le cas échéant), la rugosité de chaque couche… ; Le principal paramètre appareil est l’énergie de la source RX utilisée (ici 6930 eV). Enfin la diffusion atomique de l’élément considéré varie essentiellement en fonction de la longueur d’onde du rayonnement, l’angle d’incidence étant rasant. Ces facteurs de diffusion sont tabulés sous la forme d’un terme réel (f1=f0 + f’) et d’un terme imaginaire (f2=f’’). Les valeurs numériques utilisées pour les facteurs de diffusion sont reportées en annexe.

Les épaisseurs déduites des ajustements pour les dépôts de 15min à différents courants sont données dans le tableau 4.1. Les vitesses de dépôt en nm/min de chaque cible pour un courant donné sont aussi calculées.

Intensité θ (°) 0,5 1 1,5 2 2,5 1 0,1 0,01 I 0,001 0 0,0001

Tableau 4.1 : Epaisseurs déduites des ajustements pour des dépôts de 15min à deux courants 20 et 30 mA.

Clairement, les deux éléments ne se déposent pas à la même vitesse. La cible de fer étant magnétique, elle perturbe le processus de pulvérisation magnétron et l’efficacité de la pulvérisation diminue. Si l’on fixe la vitesse de dépôt du rhodium à 20 mA et en supposant que le flux d’atomes varie linéairement avec le courant appliqué, il serait nécessaire d’appliquer un courant de l’ordre de 38 mA sur la cible de fer pour obtenir une épaisseur identique à celle du rhodium pour un temps donné de co-dépôt. Notons cependant que les phases cristallines du fer (cc) et du rhodium (cfc) ont des densités atomiques différentes et ne contiennent donc pas le même nombre d’atomes dans une même épaisseur. Or nous cherchons à approcher la composition équiatomique dans les couches de fer-rhodium. Il sera nécessaire d’appliquer différents courants sur la cible de fer pour ajuster la composition.

Enfin, notons qu’à chaque changement de cibles, il faut procéder à un nouvel étalonnage, l’efficacité de la pulvérisation se modifiant avec l’usure de la cible.

IV.A.1.2 Choix de la température de dépôt

Des couches de FeRh de 5 nm d’épaisseur ont été déposées sur MgO (001) à différentes températures afin d’observer les phases obtenues et les modes de croissance suivant la température de dépôt. Les courants de dépôt ont été fixés à 20 mA sur la cible de Rh et 38 mA sur la cible de Fe. La figure 4.2 présente des images haute résolution (HREM) de sections transverses des films de FeRh élaborés respectivement à 200 et 700°C. Les deux films sont cristallins mais n’appartiennent pas à la même phase.

 Le film déposé à 200°C est dans une phase cfc, métastable, la phase γ. Comme observé sur la transformée de Fourier dans l’encart, la relation d’épitaxie avec le substrat est : γFeRh(001)[010]//MgO(001)[010] Epaisseur (nm) Vitesse de dépôt (nm/min) Rh à 20mA 13,3 0,88 Fe à 20mA 6,9 0,46 Rh à 30mA 19,6 1,31 Fe à 30mA 10,4 0,69

Le paramètre de maille déterminé à partir de la TF est aγ = 0,374 ±0,005 nm.

 Le film élaboré à 700°C montre d’autres caractéristiques. Il présente une croissance de type Volmer Weber (3D), comme cela a été mis en évidence dans l’étude du mouillage de l’alliage FeRh sur MgO par Ayoub et al. [1]. Les hautes températures favorisent la structure cc et l’ordre chimique B2. Ceci est confirmé par la présence des pics de surstructure (h+k+l = 2n+1) dans la TF de l’image. Sur la TF, on mesure le paramètre de maille a=0,303 ±0,005 nm. Les indices de réflexion sont en accord avec une croissance épitaxiale de FeRh(B2) sur MgO avec la relation d’orientation (cf. chapitre II §II.4.1) :

α’’FeRh(001)[110]//MgO(001)[010]

L’apparition de la phase γ à des températures de croissance modérées ne dépend pas du substrat et a été observée sur des substrats de verre [2] ou de quartz [3].

Figure 4.2 : Image haute résolution d’une vue transverse d’un film de FeRh de 5 nm épitaxié sur MgO (001) à 200°C (gauche) et 700°C (droite). Ces températures correspondent aux températures du substrat lors du dépôt. La transformée de Fourier (TF) dans l’encart montre la nature des phases structurales du FeRh. Les schémas reproduisent les relations d’épitaxie déduites des images haute résolution et des TF correspondantes.

Avec la valeur du paramètre de la phase γ mesurée précédemment, on trouve que le désaccord paramétrique f à l’interface avec MgO (aMgO = 0,421 nm) est de -11%. Avec un tel désaccord paramétrique, on peut s’attendre à ce que la couche de FeRh-γ relaxe plastiquement à l’aide de dislocations de désaccord paramétrique (ou dislocations de misfit).

L’image HREM à gauche dans la figure 4.2 a été filtrée de façon à ne conserver que les plans (020) perpendiculaires à l’interface. Ainsi, les dislocations, localisées à l’interface FeRh-γ/MgO sont mises en évidence sur la figure 4.3. Elles apparaissent comme des points sombres régulièrement espacés. L’interface a été agrandie et les dislocations ont été matérialisées par le symbole . Ce sont des dislocations coins avec un vecteur de burger :

b = 

 <110> a

Cependant, sur la figure on a accès au vecteur de burger projeté avec |b|proj = 

 <100> a

Ainsi, la distance entre dislocations est donnée par d = |l|mn:o

q .

Ces dislocations sont espacées en moyenne de 9 plans atomiques de FeRh, ce qui est en accord avec l’espacement théorique entre dislocations de misfit pour avoir une relaxation complète d’une couche de paramètre 0,374 nm sur MgO.

Figure 4.3 : Reproduction de l’image de gauche de la figure 4.2 après filtrage de Fourrier autour de la réflexion 020.

2 nm .

Concernant la phase B2, la valeur du paramètre de maille est de aα’’ = 0,2987 nm et le désaccord paramétrique à l’interface avec MgO est faible (√2 aα’’ - aMgO)/ aMgO = 0,34%. Le FeRh (type B2) croit sur Mg0 sous une très faible contrainte en compression.

Nous avons observé l’apparition de grains cristallisés dans la phase B2 à des températures inférieures à 700°C. Cependant, cette phase coexiste alors avec la phase γ. Pour l’élaboration de films minces, nous avons choisi de déposer le FeRh à 550°C, température pour laquelle on observe un bon mouillage de FeRh sur MgO et la présence de nombreux grains en phase B2. Les grains sont aussi plus gros qu’à 700°C.

Afin d’obtenir un bon ordre chimique, nécessaire à l’obtention de la transition AFM-FM au-dessus de la température ambiante, les films doivent être recuits à haute température dans la gamme 600-800°C (cf. chapitre I §I.3.3) [3], [4].