2.2.1 Définition des réseaux de réluctances
Par analogie avec les modèles circuit électrique, la réluctance 𝑅 représente une résistance au
flux magnétique, le flux 𝜑 est analogue à un courant et la force magnétomotrice 𝐹 une
différence de potentiels magnétiques telle qu'une tension aux bornes d'une résistance. La force
magnétomotrice et le flux sont liés par la réluctance selon la loi de Hopkinson :
𝐹 = 𝑅 𝜑 (2.1)
Cette analogie permet de représenter des systèmes magnétiques complexes tels que les
machines à courant continu sous forme de réseaux de réluctances magnétiques. Dans cette
partie, le calcul du flux, de la force magnétomotrice et de la réluctance ainsi que leurs
hypothèses est introduit.
Figure 2.1 : Un tube de flux élémentaire définie par une section moyenne et une longueur moyenne
Nous supposons que la réluctance modélise un tube de flux d'une longueur moyenne 𝑙
𝑒𝑞, d'une
section moyenne 𝑆
𝑒𝑞et de perméabilité équivalente 𝜇
𝑒𝑞(Figure 2.1). Ainsi, à partir de la
courbe 𝐵(𝐻) du matériau ferromagnétique, nous pouvons calculer le flux et la force
magnétomotrice dans chaque tube de flux.
En effet, à partir du théorème de conservation du flux sur une surface fermée, on peut écrire :
φ = ∫𝐵⃗ . 𝑑𝑆⃗⃗⃗⃗
S
= 𝐵
𝑚. 𝑆
𝑒𝑞 (2.2)où 𝐵
𝑚est l'induction moyenne sur 𝑆
𝑒𝑞.
La force magnétomotrice est calculée à partir du champ magnétique 𝐻 circulant le long du tube
de flux. Cette force magnétomotrice est donc une différence de potentiel magnétique entre un
point A appartenant à la surface d'entrée du tube et un point B appartenant à la surface de sortie
:
F = ∫ 𝐻
B⃗⃗ . 𝑑𝑙⃗⃗⃗
A
= 𝐻
𝑚. 𝑙
𝑒𝑞 (2.3)où 𝐻
𝑚est le champ moyen entre 𝐴 et 𝐵.
D'autre part, selon le théorème d'Ampère lorsqu'une bobine alimentée par un courant I et
comportant N tours entoure un circuit magnétique, ces ampères tours 𝑁. 𝐼 constituent une force
Seq
leq
Chapitre.II : Modélisation de la machine à plots 53
magnétomotrice qui génère un flux circulant dans le circuit magnétique le long d'un contour
fermé.
∮ 𝐻⃗⃗ . 𝑑𝑙⃗⃗⃗ = 𝑁. 𝐼
(2.4)En ce qui concerne le calcul de la réluctance d'un tube de flux, nous pouvons déduire à partir
de la relation de Hopkinson (2.1), des équations du flux (2.2) et de la force magnétomotrice
(2.3), que la réluctance d'un tube de flux de perméabilité constante est exprimée par la relation
:
𝑅 = 𝑙
𝑒𝑞𝜇
0𝜇
𝑒𝑞𝑆
𝑒𝑞(2.5)
En réalité, dans les machines électriques, la saturation n’est pas la même le long d’une ligne de
champ, la perméabilité est donc non homogène. Pour cela, la modélisation par réseau de
réluctances s’appuie sur la décomposition du domaine étudié en plusieurs tubes de flux de façon
à avoir une perméabilité constante par morceaux.
2.2.2 Résolution par la méthode de la réduction de Kron
Dans les modèles de réluctances, chaque branche est constituée de réluctances et de forces
magnétomotrices (Figure 2.2). L'ensemble de ces branches forme un seul réseau. Lors de la
modélisation d’une machine électrique, les réseaux de réluctances considérés deviennent
complexes en raison du nombre de réluctances mises en jeu. La démarche de résolution du
système magnétique s’appuie sur la méthode de Kron que nous présentons ici.
Chaque réseau est constitué de 𝑏 branches et 𝑛 nœuds. Chaque branche 𝑖 du réseau, contient
une réluctance 𝑅
𝑖, une source de flux magnétique 𝐸
𝑖, un flux 𝜑
𝑖et une différence de potentiel
à ses bornes 𝐹
𝑖(Figure 2.2). On retrouve donc 2𝑏 inconnues (𝐹 et 𝜑 dans chaque
branche).
Figure 2.2 : Composition d'une branche dans un modèle réluctant
Afin de retrouver ces inconnues, il est nécessaire d'établir pour l'ensemble des branches et des
nœuds du réseau, la loi des mailles et la loi des nœuds. L’ensemble des équations est mis sous
la forme matricielle :
{
𝐹 = 𝑍 𝜑 − 𝐸
∑ 𝜑
𝑖 𝑏 𝑖=1= 0
(2.6)
54 Chapitre.II : Modélisation de la machine à plots
𝑍: matrice diagonale de taille b qui représente l'ensemble des réluctances.
𝜑 : vecteur de taille b des flux de l'ensemble des branches.
𝐸 : vecteur de taille b des sources de potentiels magnétiques dans toutes les branches.
𝜑
𝑖: les flux entrants ou sortants du nœud i.
Lorsque le réseau dispose d'un nombre élevé de nœuds, il devient difficile de résoudre le
système d'équations. Pour cela, la méthode de réduction de Kron peut être utilisée. Elle consiste
à réduire la taille du système moyennant des matrices de connexions dans la loi des mailles et
des nœuds.
Le principe de ces matrices de connexions est basé sur l'établissement d'un arbre et d'un
co-arbre. En effet, un arbre est formé d'une chaîne de branches entre deux nœuds en passant par
l'ensemble des nœuds du réseau. Le co-arbre est l'ensemble des branches restantes du réseau.
Cette méthode peut être expliquée à travers un exemple simple. Dans un réseau orienté, comme
le montre la Figure 2.3, l'arbre est composé de 𝑎 = 𝑛 − 1 branches et le co-arbre de 𝑏 − 𝑛 + 1
branches. Celles-ci sont affectées aléatoirement comme dans la Figure 2.3. Chaque maille est
définie par une seule branche du co-arbre et d'une ou plusieurs branches de l'arbre, où chaque
maille prend le sens de la branche du co-arbre.
Figure 2.3 : Un réseau connexe constitué de 5 nœuds, 8 branches et forme 4 arbres et 4 mailles
Ces mailles donnent donc lieu à 𝑚 = 𝑏 − 𝑛 + 1 équations basées sur la loi des mailles et 𝑎
équations basées sur la loi des nœuds. Ainsi, les matrices de connexions 𝐴 et 𝐶 sont définies
telles que :
{ 𝐹 = 𝐴 𝐹
𝑎𝜑 = 𝐶 𝜑
𝑚(2.7)
𝐴 : matrice de taille 𝑏 × 𝑎 est une matrice de connexion des différences de potentiel
magnétiques.
𝐹
𝑎: vecteur de taille 𝑎 est le vecteur réduit des différences de potentiel aux bornes des branches.
𝐶 : matrice de taille 𝑏 × 𝑚 est la matrice de connexion des flux.
Chapitre.II : Modélisation de la machine à plots 55
La relation entre les flux de l’arbre et les flux des mailles est définie dans la matrice 𝐶à partir
de la loi des nœuds et de la relation entre les tensions du co-arbre. Les tensions de l’arbre sont
définies par la loi des mailles suivant une convention récepteur pour chaque maille comme le
montre la matrice 𝐴 ci-dessous.
𝐶(𝑖, 𝑗) = {
1 𝑠𝑖 𝜑
𝑗𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒𝑛𝑡 à 𝑙𝑎 𝑚𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒 𝑖 𝑒𝑡 𝑐𝑖𝑟𝑐𝑢𝑙𝑒 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑒 𝑚ê𝑚𝑒 𝑠𝑒𝑛𝑠 𝑞𝑢𝑒 𝜑
𝑖,
−1 𝑠𝑖 𝜑
𝑗𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒𝑛𝑡 à 𝑙𝑎 𝑚𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒 𝑖 𝑒𝑡 𝑐𝑖𝑟𝑐𝑢𝑙𝑒 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑒 𝑚ê𝑚𝑒 𝑐𝑜𝑛𝑡𝑟𝑎𝑖𝑟𝑒 à 𝜑
𝑖,
0 𝑠𝑖 𝜑
𝑗𝑛
′𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒𝑛𝑡 𝑝𝑎𝑠 à 𝑙𝑎 𝑚𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒 𝑖.
𝐴(𝑖, 𝑗) = {
1 𝑠𝑖 𝐹
𝑖𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑢 𝑚ê𝑚𝑒 𝑠𝑒𝑛𝑠 𝑞𝑢𝑒 𝐹
𝑗𝑒𝑡 𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒𝑛𝑡 à 𝑙𝑎 𝑚ê𝑚𝑒 𝑚𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒,
−1 𝑠𝑖 𝐹
𝑖, 𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑒 𝑠𝑒𝑛𝑠 𝑐𝑜𝑛𝑡𝑟𝑎𝑖𝑟𝑒 à 𝐹
𝑗𝑒𝑡 𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒𝑛𝑡 à 𝑙𝑎 𝑚ê𝑚𝑒 𝑚𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒,
0 𝑠𝑖 𝐹
𝑖𝑛
′𝑎𝑝𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒𝑛𝑡 𝑝𝑎𝑠 à 𝑙𝑎 𝑚ê𝑚𝑒 𝑚𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒 𝑞𝑢𝑒 𝐹
𝑗.
Suivant les règles qu'impose l'établissement de ces matrices de connexion, à partir de l'exemple
choisi Figure 2.3, nous trouvons :
𝐶 =
[
1 0 0 0
0 1 0 0
0 0 1 0
0 0 0 1
1 1 0 0
−1 −1 1 0
−1 0 0 1
0 0 1 −1]
, 𝐴 =
[
−1 1 1 0
−1 1 0 0
0 −1 0 −1
0 0 −1 1
1 0 0 0
0 1 0 0
0 0 1 0
0 0 0 1 ]
Une fois que ces matrices sont établies, leur orthogonalité est vérifiée par A
tC = C
tA = 0. Cette
étape nous assure que ces matrices sont bien calculées. Le système étant orthogonal, la
résolution se fait directement par l'équation déduite de (2.6) et (2.7). Ainsi :
{𝐶
𝑡
𝐹 = 𝐶
𝑡𝐴𝐹
𝑎= 0
𝐶
𝑡𝑍𝐶𝜑
𝑚= 𝐶
𝑡𝐸
(2.8)