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La variation de volume d'un matériau est systématiquement associée à une notion d'endommagement microstructural. D'après Castagnet [40], la notion d'endommagement se définit comme la création de surface de décohésion au sein du matériau au cours de la déformation plastique. Cette partie sera portée sur le processus de cavitation généré par la création de microvides ou craquelures, qui est généralement le phénomène d'endommagement induisant la plus grande variation de densité.

I.5.2 Généralités sur le craquelage :

Le craquelage est généralement plus connu sous son appellation anglo-saxonne "crazing". Il se produit par multiplication et extension de craquelures ("crazes"). D'après Schirrer [41], l'étude des propriétés physiques et mécaniques des craquelures élémentaires est très difficile à réaliser car il existe peu de moyens directs qui permettent d'examiner l'évolution de ces défauts dans un matériau de manière in situ et en temps réel. Ainsi, la majeure partie des études portant sur le

craquelage est effectuée dans les polymères transparents (généralement amorphes) car l'observation des craquelures y est aisée.

Les craquelures apparaissent perpendiculairement à la direction de plus grande contrainte principale et sont formées de deux surfaces de décohésion. Ces dernières sont reliées entre elles par des fibrilles entre lesquelles se développent des microvides (figure I-19). On distingue deux types de fibrilles : i) des fibrilles primaires traversant la craquelure d'une surface à l'autre et ii) des fibrilles secondaires reliant latéralement deux microvides, les craquelures ont un diamètre compris entre 0,01 et 1 mm et une épaisseur allant de 1 à 10 microns. Elles contiennent entre 30 et 50 % en volume de fibrilles ayant un diamètre de l'ordre de 10 nm. Ces dernières sont étirées de plusieurs centaines de pourcents. Toutes ces caractéristiques dépendent du réseau macromoléculaire du matériau (plus précisément de la nature des enchevêtrements) et de la contrainte locale au niveau de la craquelure. Le processus de craquelage a lieu en trois étapes : i) germination, ii) croissance et iii) rupture interne [19].

Figure I-19 Structure d'une craquelure [42]

a) Formation de craquelures :

La genèse des craquelures se déroule en deux étapes : i) des microvides apparaissent sous l'action d'un champ de contrainte dilatant et ii) une forte déformation plastique localisée autour de ces microvides mène à une structure fibrillaire [42] (figure I-20). La concentration de contrainte induisant une microcavité peut se produire sur une impureté ou une fluctuation de densité. L'hétérogénéité de répartition des enchevêtrements et par conséquent de leurs interactions est à l'origine de la cavitation. Les défauts se forment alors dans les régions de faible densité d'enchevêtrements. A cet endroit, les chaînes subissent localement une contrainte dix fois égales à la contrainte macroscopique menant à une rupture des liaisons covalentes. Une autre source de nucléation de microvides est due à la distorsion générée par l'intersection de deux bandes de cisaillement orientées perpendiculairement l'une par rapport à l'autre [19].

Figure I-20 Formation d'une craquelure [42].

b) Croissance des craquelures :

La croissance des craquelures se produit par formation de fibrilles et par allongement de celles-ci entre les microvides. L'allongement des fibrilles a lieu par i) un processus de fluage ayant pour conséquence une diminution du diamètre des fibrilles et par ii) extraction de matière de la masse de polymère conduisant à un maintien constant du diamètre des fibrilles [42]. Effectivement, un processus d'étirement local mène à la formation d'une nouvelle structure dans une zone active près de la frontière craquelure/ matériau solide. Un désenchevêtrement des chaînes se produit alors dans cette zone active (figure I-21). Le front de craquelure avance par un mécanisme d'instabilité de ménisque. Ce processus est décrit par l'écartement progressif de deux plaques faisant un angle entre elles. Le polymère au point de jonction des deux plaques a un comportement d’un liquide en formant des "doigts" qui s'amincissent d’une manière progressive jusqu'à se séparer pour former de nouvelles fibrilles[41].

Figure I-21 Elargissement d'une craquelure [43,44]

c) Rupture des fibrilles de la craquelure :

La ruine d'un polymère endommagé débute lorsque les fibrilles des craquelures commencent à se rompre. Il existe deux modes de rupture de ces fibrilles en fonction de la vitesse de chargement, de la température et de la structure du polymère [41,42,45] (figure I-22). Le

premier mode conduit à une rupture des fibrilles en leur milieu qui est favorisée aux températures élevées car les mouvements moléculaires permettent un désenchevêtrement aisé des chaînes. Le second processus est un mode aléatoire de rupture le long des fibrilles, qui se produit généralement à basse température car les chaînes n'ont pas assez de degrés de liberté à courte distance.

Figure I-22 Ruptures des craquelures : (a) au centre des fibrilles [45]; (b) aléatoire ex : à l'interface craque-lure - matériau solide [42]

I.5.3 Craquelure dans les polymères semi-cristallins :

Castagnet et al. (2000) [29] ont proposé un modèle de formation de craquelure dans les polymères semi-cristallins en fonction de la température d’essai (figure I-23). Au cours des mécanismes de séparation interlamellaire, la cavitation est définit comme un processus en compétition avec l'écoulement des chaînes amorphes. En effet, en dessous de la température de la transition γ, lorsque l'écoulement visqueux ne peut plus s'accommoder à la déformation macroscopique, des microvides se forment entre les lamelles une relaxation des contraintes a lieu. Au-dessus de la température de transition vitreuse, la mobilité des chaînes augmente ce qui rend la déformation macroscopique mieux accommodée. Ainsi, les processus de cavitation sont retardés et ont une amplitude plus faible.

Figure I-23 Processus de cavitation dans la couche amorphe interlamellaire des polymères semi-cristallins [25]

(a) : ε = 0,0 (b) : ε = 0,05

(c) : ε= 0,29 (d) : ε = 0,71

(e) : ε = 0,93 (f) : ε = 1,30

Figure I-24 Observation des défauts microstructuraux par MEB dans le PEHD [19]

Une observation au MEB des processus de cavitation du PEHD sous une traction uniaxiale à température ambiante à été donnée par Addiego [19]. La morphologie sphérolitique à l’état non déformé est illustrée sur la figure I-24. Pour une faible déformation, ε = 0.05, des microvides apparaissent dans les régions périphériques des sphérolites [36,46]. La visibilité de ces craquelures devient plus en plus nette, pour des états de déformation avancés. À partir de ε = 0.7, on aperçoit des phénomènes de rupture intersphérolitiques qui suivent le contour des sphérolites [36], et qui représentent le début de modification de la morphologie. Effectivement, cette morphologie sphérolitique a presque disparu à partir de ε = 0.93, sauf quelques régions

polaires des sphérolites qui restent encore présentes. Enfin, l’analyse d’Addiego met en évidence une structure microfibrillaire pour une déformation de ε = 1.3 contenant des cavités orientées parallèlement à la direction de sollicitation.

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