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2. Définition, prévalence et étiologies de la déficience intellectuelle

2.1. Définition

Les anomalies du développement sont des atteintes graves qui entrainent un handicap cognitif et/ou physique. Ces anomalies apparaissent avant l’âge de 22 ans et donnent lieu à des atteintes chroniques. Elles incluent des syndromes d’origine génétique qui peuvent être polymalformatifs avec ou sans déficience intellectuelle. En 1992 l’Organisation Mondiale de la Santé a défini, dans la Classification Internationale des Maladies (CIM-10), la déficience intellectuelle (DI), appelée auparavant retard mental, comme « «une condition de développement arrêté ou incomplet de l'esprit, qui se caractérise surtout par une déficience des compétences manifestées pendant la période de développement, ce qui contribue au niveau global de l'intelligence, à savoir les capacités cognitives, linguistiques, motrices et sociales» (1). En 2001, cette définition est complétée par la notion de handicap (2).

En 2010, The American Association on Intellectual and Developmental Disabilities (AAIDD) définit la DI comme « un handicap caractérisé par des limitations importantes tant dans le fonctionnement intellectuel (raisonnement, apprentissage, résolution de problèmes) que dans le comportement adaptatif, qui couvre une gamme de compétences sociales et pratiques quotidiennes. Cette incapacité apparait avant l'âge de 18 ans »(3).

Ces éléments sont repris en 2013 par l’American Psychiatric Association (APA) dans la DMS-5 (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders – 5) qui précise que la DI est définie comme une faiblesse généralisée des capacités mentales avec un impact sur le fonctionnement adaptatif dans 3 domaines différents :

- le domaine conceptuel (le langage, la lecture, l'écriture, les mathématiques, le raisonnement, les connaissances, la mémoire, le temps, l'espace, l'argent).

- le domaine social (l'empathie, la responsabilité sociale, le jugement social, les compétences de communication interpersonnelle, la méfiance/naïveté appropriée, la capacité à créer et maintenir des relations amicales, la capacité à résoudre les problèmes sociaux).

- le domaine pratique qui se focalise sur l'autonomie (hygiène, utilisation de moyens de transport, responsabilités professionnelles, gestion du budget, gestion de l'emploi du temps, organisation du travail).

Ce trouble survient pendant la période du développement (4).

Afin d’évaluer le fonctionnement intellectuel, des tests psychométriques standardisés (comparaison des individus, en fonction de l'âge et de la culture, à d'autres

Tableau 1 – Critères de gravité de la déficience intellectuelle d’après le DMS-5.

D’après Déficiences intellectuelles : Expertise collective – Synthèse et recommandations Etiologies de la déficience intellectuelle, 2016

individus d'une même population), tels que les tests de Weschler (WPPSI chez les jeunes enfants (5), WISC chez les enfants et adolescents (6) et WAIS chez l’adulte (7)), sont utilisés afin de définir un quotient intellectuel (QI) composé d’un quotient verbal et d’un quotient non verbal ou de performance. Ces tests portent sur le raisonnement, la résolution de problèmes, la pensée abstraite, la faculté de jugement, l'apprentissage académique, l'apprentissage par l'expérience. Le fonctionnement intellectuel est dit déficitaire si le QI est inférieur à la moyenne de la population générale, d’environ deux écarts-types, soit inférieur à 70. En effet, le QI moyen et l’écart-type ont été fixés par convention à 100 et 15 respectivement

.

Avant l'âge de 3 à 5 ans, on parle plutôt de quotient de développement (QD) que de QI. Le QD peut se mesurer par l'échelle de Brunet-Lézine révisée ou par l'échelle de Bayley (BSID). Ces tests s'utilisent également chez des individus plus âgés en cas de DI profonde.

Le degré de sévérité de la déficience a longtemps été corrélé uniquement au QI : la déficience était légère, modérée, sévère et profonde si le QI était compris entre 70 et 55/50, 55/50 et 40/35, 40/35 et 25/20 et inférieur à 20 respectivement (4).

Cependant, comme nous l’avons vu précédemment, la DI implique une limitation dans le comportement adaptatif. Il existe alors d’autres tests permettant de l’évaluer comme le Vineland Adaptive Behavior Scale-Second Edition (Vineland-II) (8) ou l’Adaptive Behavior Assessment System, Second Edition (ABAS- II) (9). En prenant ainsi compte de cette définition dans sa globalité, des critères de gravité de la DI ont été posés d’après la DMS-5 (table 1).

La DI peut être classée selon les résultats des tests psychomètriques, mais elle peut également être classée en fonction de :

- sa forme syndromique (DIS), où elle est associée à une ou plusieurs autres anomalies comme des traits dysmorphiques, des malformations congénitales, des anomalies métaboliques, ou des comorbidités.

- sa forme non syndromique (DINS) où la déficience est dite isolée.

La frontière entre ces deux formes est parfois floue car des troubles psychiatriques sont parfois difficiles à mettre en évidence dans la DINS (10).

Les comorbidités rencontrées très fréquemment dans les DIS sont d’ordre neurodéveloppemental tels que l’autisme, la schizophrénie ou encore l’épilepsie. Selon la classification internationale des pathologies, 14 à 39% des individus avec DI présenteraient des troubles psychiatriques (1,11,12). Quant à l’épilepsie, Roberston J et al., dans une revue de la littérature de 2015, retrouvent une prévalence moyenne de 22.2% (95% CI 19.6–25.1) et confirment que la prévalence est croissante selon la sévérité de la DI. En effet, elle est de 9.8% (95% CI 7.6–12.5), 30.4% (95% CI 25.5– 35.7) et 41.6% (95% CI 32.1–51.8) dans la DI légère, modérée et sévère

Figure 1 – Cercle illustrant la diversité allélique et phénotypique d'un sous-ensemble de gènes impliqués dans des maladies du développement neurologique. Les mutations dans un même gène provoquent des phénotypes différents.

Par exemple, des mutations dans le gène DCX peuvent entraîner une DI et une épilepsie

chez les filles, une lissencéphalie chez les garçons et un double cortex chez les filles et

les garçons. Des mutations dans le gène PEX7 peuvent entraîner des troubles

attentionnels, des troubles du spectre autistique et une DI.

D’après W F. Hu, M H. Chahrour, et C A. Walsh. Annu. Rev. Genomics Hum. Genet. 2014.

Tableau 2 – Principales étiologies de la déficience intellectuelle.

D’après Déficiences intellectuelles : Expertise collective – Synthèse et recommandations Etiologies de la déficience intellectuelle, 2016 (29)

respectivement (13). Cette fréquence d’association de comorbidités est expliquée par le partage des mêmes voies de signalisation ou de gènes impliqués dans les pathologies neurodéveloppementales (figure 1) (14–17).

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