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XIV. Etudes précliniques

XIV.1. Conséquences fonctionnelles

XIV.1.1. Déficit fonctionnel

Dès 24 heures de reperfusion, les études comportementales permettent d’effectuer un suivi. En parallèle avec le mRS, le score neurologique, de par sa facilité d’application reste encore largement employé aujourd’hui car il permet d’avoir une chronologie de l’évolution de ce score au décours d’une ischémie-reperfusion. Toutefois, les items varient quelque peu selon les études. Plus largement employé, le score de Bederson permet de mesurer l’état général de l’animal (Bederson et al, 1986). Chez un animal ischémié, 24 heures suivant la reperfusion, le score de Bederson est moyenné à 2,5 chez des animaux non traités (Kraft et al, 2010 ; Crumrine et al, 2011) reflétant un déficit modéré accompagné d’une faiblesse du côté controlatéral à la lésion. Le test de préhension qui permet d’étudier les réactions tactiles et proprioceptives ainsi que le tonus musculaire met en évidence un déficit modéré dans plusieurs travaux effectués dans un modèle transitoire d’ischémie cérébrale allant de valeurs proches de 0 (Plaisier et al, 2008b) à une valeur de 2 (Kraft et al, 2010) reflétant une atteinte motrice sévère à 24 heures. La coordination motrice et l’équilibre, étudiés à l’aide du rotarod mettent en évidence un déficit de l’animal déterminé par rapport aux performances des rats avant opération. Une diminution de 65 % du temps passé sur le rotarod à suivre le rythme imposé est observée (Plaisier et al ; données non publiées). La fonction somato-sensitive et motrice, mise en évidence par le test du ruban adhésif montre chez des rongeurs ischémiés un déficit évalué à 0,5 reflétant l’occultation et l’inaptitude à retirer les morceaux d’adhésifs des pattes avant à 24 heures de reperfusion (Plaisier et al, 2008b). Le test du placement des pattes, permet d’observer les facultés sensori-motrices et proprioceptives de l’animal. Celui-ci consiste à scorer le placement des pattes avant et des pattes arrière lors de stimulations tactiles. En post-ischémie, un déficit au niveau des pattes avant et des pattes arrière est observé dès le lendemain de l’opération (Roof et al, 2001).

Dès 24 heures de reperfusion, plusieurs aspects fonctionnels sont déjà affectés tels que les aptitudes proprioceptives, sensori-motrices, somato-sensitives, la coordination motrice et l’équilibre. Il convient donc d’étudier les récupérations qui peuvent s’opérer par la suite. Une semaine après l’ischémie, la récupération est présente au niveau des fonctions proprioceptives, somato-sensitives et somato-motrices, en revanche, d’autres déficits apparaissent tels que l’asymétrie d’utilisation de la patte avant par le biais du test du cylindre. 1 mois après l’opération, lors de la phase de consolidation, les changements s’opérant au niveau fonctionnel sont encore plus importants, témoignant d’une période charnière.

A 3 jours de reperfusion, le score neurologique reflète encore un déficit modéré (Van der Zijden et al, 2008a) mais une récupération progressive est visible dès 7 jours de reperfusion (Karki et al, 2010). Progressivement, une absence de séquelles (Freret et al,

- 44 - 2006) ou un léger déficit (Virley et al, 2000 ; Van der Zijden et al, 2008a) en comparaison des rats sham perdurent entre 1 et 2 mois de post-ischémie. Ce déficit persiste jusqu’à 1 an de post-ischémie sur des rats ischémiés-reperfusés (Karki et al, 2010).

Le rotarod (figure 33) démontre encore un déficit majeur à 3 jours de reperfusion avec 55 à 60 % de perte comparée au conditionnement et une récupération progressive à partir du 4ème jour de post-ischémie (Bouet et al, 2007 ; Plaisier et al, données non publiées). En revanche, cette coordination motrice et cet équilibre ne sont plus affectés à 6 mois après un arrêt cardiaque puisque ce test ne démontre plus aucune différence entre les groupes. A 18 mois de post-ischémie, il apparaît une diminution du temps passé sur le rotarod par les deux groupes de rats probablement en raison de leur vieillissement (Kiryk et al, 2011).

Figure 33 : Schéma du rotarod

En parallèle à ce test, le suivi des animaux par le test de préhension montre une récupération progressive bien qu’incomplète de cette fonction motrice de 3 à 7 jours de reperfusion (Plaisier et al, 2008b). En ce qui concerne la locomotion, le test de marche sur les barreaux est employé à plus long terme car il nécessite une récupération de la part de l’animal. Pour cela, le rat doit parcourir une plate-forme sur une distance de 100 cm sur des barreaux placés à 1 m de hauteur afin de rejoindre un compartiment dans un délai imparti. Les résultats mettent en évidence une récupération dès 1 mois de post-ischémie chez les rats ischémiés (Virley et al, 2000).

Par ailleurs, une asymétrie mesurable par le test du cylindre, peut apparaître dans l’utilisation des pattes avant. Dans un modèle d’occlusion permanente de l’ACM, la patte ipsilatérale est plus souvent utilisée afin d’explorer le mur et retomber sur ses pattes au détriment de la patte controlatérale de 7 jours à 1 mois de post-ischémie. Les animaux sham ne manifestent aucune préférence à utiliser l’une ou l’autre des pattes avant (Roof et al, 2001). Les propriétés sensori-motrices et les habiletés proprioceptives, par le biais du test du placement des pattes montre un déficit des quatre pattes qui perdure jusqu’à 1 mois de post-ischémie (Roof et al, 2001). En revanche, une autre étude met en évidence une récupération fonctionnelle de la patte arrière controlatérale à 1 mois de post-ischémie, tandis que le déficit

- 45 - existant au niveau de la patte avant controlatérale perdure au-delà de 2 mois de post-ischémie (Freret et al, 2006). De même, le test du glissement des pattes sur une roue en rotation permet de calculer un indice qui va refléter les erreurs commises (les glissements) et ce test met en évidence un déficit chez des rats ischémiés de 7 à 12 mois de post-ischémie au niveau de la patte controlatérale (Karhunen et al, 2003).

Cependant, ces tests ne permettent pas d’apprécier des déficits plus fins. Les fonctions somato-sensitives et motrices sont étudiées par le test du ruban adhésif qui permet un suivi à très long terme en modulant la taille des morceaux d’adhésif à retirer (figure 34). Plus le morceau est de petite taille, plus le déficit observé sera finement détecté. Ce test met en évidence à 3 jours de reperfusion, une tendance à récupérer (Plaisier et al, 2008b) se confirmant à 7 jours de reperfusion, par un succès à retirer le morceau d’adhésif ipsilatéral à la lésion mais un échec à retirer du côté controlatéral malgré les efforts tentés par l’animal (Bouet et al, 2007 ; Plaisier et al, 2008b). A distance de l’opération, ce test met en évidence un déficit de la patte controlatérale des rats ischémiés se traduisant par un temps supérieur et des échecs répétés à retirer le morceau d’adhésif à 1 mois de post-ischémie (Virley et al, 2000 ; Freret et al, 2006), 2 mois de post-ischémie tandis que la patte ipsilatérale a récupéré (Freret et al, 2006) et perdurant jusque 1 an de post-ischémie (Karki et al, 2010) démontrant une perturbation irréversible des fonctions somato-sensitives et motrices au décours d’une ischémie-reperfusion.

Figure 34 : Test de retrait de l'adhésif (Park et al, 2010)

Le test de l’escalier est très discriminant pour observer les déficits de la dextérité et de l’habilité des pattes avant, néanmoins il nécessite un conditionnement ainsi qu’une restriction alimentaire. Dans un modèle transitoire d’ischémie focale à 1 mois de post-ischémie, un déficit est présent chez les rats ischémiés ce qui restreint leurs capacités à récupérer les granulés avec chacune des pattes avant, avec cependant, un déficit plus modéré de la patte ipsilatérale (Virley et al, 2000). Ces difficultés perdurent jusqu’à 2 mois après la reperfusion. En revanche, plus aucun déficit n’est observé quant à la patte ipsilatérale (Freret et al, 2006).

- 46 - En conclusion, les capacités fonctionnelles des rats sont perturbées au décours d’une ischémie cérébrale, avec une récupération variable au cours du temps en fonction de la difficulté de la tâche à accomplir.