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Partie 1 : Introduction

A. Les apports des « OMICS » dans la compréhension des cancers

II. La transcriptomique : appréhender l’oncogenèse par l’expression des

3. Déceler les cellules immunitaires au sein des tumeurs

L’analyse du séquençage de l’ARN d’une tumeur permet de déceler quel microenvironnement est présent dans la tumeur et notamment quelles sont les

31 | P a g e populations de cellules immunitaires présentes. Chaque type de cellule immunitaire exprime des marqueurs spécifiques, leur présence et leur quantité permettent donc de déterminer quelles populations sont présentes et d’en déduire leur quantité relative. Le microenvironnement tumoral peut donc être composé de quantités différentes de lymphocytes T CD4 et CD8, cellules B, éosinophiles, neutrophiles, natural killer (NK), macrophages et mastocytes (Thorsson et al., 2018). L’expression des gènes de chacun des sous types, en plus de leurs marqueurs spécifiques, a été analysée en lignée puis à l’intérieur de tumeurs pour créer une méthode informatique appelée CIBERSORT qui permet de déterminer quelles populations sont présentes au sein des tumeurs ainsi que leur proportion (Newman et al., 2015).

Les lymphocytes T sont reconnus principalement par l’expression de TCRA, le récepteur alpha des cellules T et de LEF1, un facteur de transcription de la différenciation des lymphocytes. Chaque sous-population de lymphocytes T exprime en plus des marqueurs spécifiques comme CD4 ou CD8 mais aussi la cytokine IL9 pour les lymphocytes mémoires (Abbas et al., 2005). Dans une tumeur, les lymphocytes T sont largement reconnus comme protecteurs puisqu’une proportion haute de lymphocytes T dans les tumeurs est corrélée à un bon pronostic (Fridman et al., 2017). Cependant, il est aussi souvent retrouvé, dans le microenvironnement, des cellules T régulatrices ou Treg dont le rôle physiologique est de limiter l’auto-immunité, rôle détourné dans les tumeurs vers un effet immunosuppresseur (Ohue and Nishikawa, 2019).

Les cellules B sont représentées par plusieurs marqueurs comme CD20, CD19 et BAFFR, le principal récepteur de la voie de signalisation qui maintient la survie des cellules B, PAX5, un facteur de transcription spécifique du lignage des cellules B et CD79 A et B, deux composants du récepteur antigénique des cellules B (Abbas et al., 2005). Dans la plupart des cancers les cellules B infiltrées sont associées à un bon pronostic (Wouters and Nelson, 2018).

Les éosinophiles expriment un ensemble de marqueurs de surface tels que IL- 5Rα, ST2, CCR3 et CCR5 (Grisaru-Tal et al., 2020) qui permettent de les reconnaitre. Leur présence est liée à un bon pronostic dans certains cancers comme le cancer

32 | P a g e colorectal, du sein et de la prostate mais aussi à un mauvais pronostic dans le cas du lymphome de Hodgkin (Sakkal, Miller and Nurgali, 2016). Parmi les effets anti- oncogéniques des éosinophiles, il y a leur capacité cytotoxique et de recrutement d’autres cellules immunitaires. Leur fonctionnalité pro-tumorale est liée à la sécrétion de facteurs de croissance et à l’activation de l’angiogenèse (Grisaru-Tal et al., 2020).

Les neutrophiles ont des marqueurs bien établis : FCGR3, un marqueur membranaire ; NCF4, intervenant dans la mort intracellulaire des microorganismes internalisés ; VNN2, permettant la migration des neutrophiles (Abbas et al., 2005). Les neutrophiles sont retrouvés en nombre important dans le sang des patients avec un cancer mais aussi infiltrant la tumeur (Shaul and Fridlender, 2019). Il y a une corrélation, dans les tumeurs solides, entre survie et la présence de neutrophiles circulants : plus il y a de neutrophiles circulants, plus la survie est augmentée dans la plupart des tumeurs solides (Templeton et al., 2014). Les neutrophiles associés aux tumeurs ont des rôles différents selon le type de cancer et leur localisation dans celui- ci. Ils peuvent être anti-tumoraux avec une action cytotoxique directe ou pro-tumoraux en stimulant l’angiogenèse, la motilité cellulaire, la migration, l’invasion et en modulant les autres cellules immunitaires du switch immunosuppresseur (Shaul and Fridlender, 2019).

Le gène spécifique le plus exprimé par les natural killers est KLFR1, une lectine qui stimule la cytolyse (Abbas et al., 2005). Les NK ont un rôle cytotoxique sur les cellules tumorales et un rôle important de recrutement des autres cellules immunitaires. Ces cellules peuvent aussi être à l’origine de l’échappement immunitaire lorsque les tumeurs empêchent leur reconnaissance en exprimant les molécules du complexe d’histocompatibilité de classe I (Choucair et al., 2019).

Les macrophages expriment fortement MMP9, une métalloprotéase de la matrice, ainsi que plusieurs chimiokines, telles que CCL24, CXCL1 et CXCL3, dont l’expression sera perdue une fois le macrophage complètement différencié (Abbas et al., 2005). Dans la grande majorité des cas, les macrophages sont pro-tumoraux dans les cancers solides. Ils permettent la croissance tumorale en produisant des facteurs pro-angiogéniques, mais surtout en supprimant la réponse immunitaire. Pour ce faire,

33 | P a g e ils produisent des facteurs immunosuppresseurs comme IL-10, TGF-β et la prostaglandine E2 pour recruter des cellules T régulatrices immunosuppressives

(Ostuni et al., 2015).

Les mastocytes sont caractérisés par l’expression à la membrane de CD117 (KIT) et FcεRI, un récepteur d’IgE. Ces cellules produisent aussi des composants spécifiques comme l’histamine, la tryptase, la sérotonine, la chymase et la carboxypeptidase A3 (Derakhshani et al., 2019). Les mastocytes, comme les éosinophiles et les neutrophiles ont des rôles à la fois pro et anti-tumoraux. Ces cellules peuvent produire des molécules pro-angiogéniques et sont capables de sécréter des cytokines immunosuppressives qui activent les cellules T régulatrices (Derakhshani et al., 2019). Les mastocytes recrutent aussi d’autres cellules immunitaires au sein des tumeurs en exprimant les cytokines CCL3, CCL5 et CXCL10 qui mobilisent les cellules T cytotoxiques (Ott et al., 2003). Après interaction avec les cellules T, les mastocytes induisent la migration des neutrophiles par CXCL8 (Salamon et al., 2005). L’effet des mastocytes sur une tumeur dépend du type de tumeur, de la localisation des mastocytes dans la tumeur et du grade de celle-ci (Komi and Redegeld, 2019).

III. Pour une compréhension plus globale : l’analyse de l’épigénome