• Aucun résultat trouvé

1-3 Cycle cellulaire, réparation de l’ADN, apoptose et cancer

Les points de surveillance de l’ADN endommagé assurent le maintien de l’intégrité du génome. Ainsi, les cellules qui échappent au contrôle des points de surveillance, soit parce qu’un mécanisme de surveillance est affecté, soit parce que l’ADN n’a pas été correctement réparé, acquièrent l’instabilité génétique qui permet, par un processus de sélection, de conduire aux tumeurs et aux cancers (Kastan and Bartek 2004; Massague 2004).

Dans une cellule en division, si un dommage n’est pas réparé, une mutation peut être introduite dans le génome. Ces défauts de réparation peuvent induire des mutations dans des gènes régulateurs du cycle cellulaire et de l’apoptose. Ces mutations peuvent toucher des gènes codant pour des protéines comme des suppresseurs de tumeurs (régulateurs de

l’apoptose), ou toucher une région contrôlant la synthèse d’oncogènes (régulateurs du cycle cellulaire). Ainsi l’inactivation d’un suppresseur de tumeur ou la perte de régulation d’un oncogène entraînant sa surexpression, induit la perte de contrôle du cycle cellulaire amenant à un cancer (Kastan and Bartek 2004; Massague 2004).

• Mutation et réparation

Une déficience d’un mécanisme de réparation peut suffir à entraîner des mutations à la base de cancers. Dans le cas d’un système de réparation par BER déficient, une guanine oxydée conduit à une mutation GC → TA (transversion de base), liée à une mauvaise incorporation lors de la réplication (Michaels et al. 1992). De même, un déficit du NER est à la base du syndrome Xeroderma Pigmentosum (XP). Les patients XP sont déficients dans le mécanisme prenant en charge les lésions induites par les UV, et accumulent donc des mutations qui amènent très rapidement à des cancers s’ils s’exposent aux rayons (Mitchell et al. 2003). Enfin pour le NHEJ, certains patients atteints de leucémie présentent une mutation sur le gène codant pour la protéine Ligase IV et sont hypersensibles aux rayons ionisants (Jeggo et al. 1998).

De plus, certains dysfonctionnements de réparation aboutissent à des modifications génétiques par translocations, amenant à des cancers. Les translocations peuvent amener à la perte de fonction d’un suppresseur de tumeurs ou à la perte de régions régulatrices d’oncogène, et même parfois à la formation de nouveaux oncogènes. En effet, dans des leucémies myéloïdes chroniques, la liaison du chromosome 9 et 22 entraîne la synthèse d’un oncogène, la protéine c-abl-BCR par la fusion du gène BCR (Breakpoint Cluster Region) avec le gène c-abl (de Klein et al. 1982).

Dans le cas des traitements chimiothérapeutiques et radiothérapeutiques, la réparation des nombreuses DSBs engendrées peut amener à des translocations chromosomiques et à l’apparition de leucémies secondaires (van Gent et al. 2001). Ainsi, dans des cellules lymphoïdes tumorales, de nombreuses translocations impliquant les chromosomes 2, 7, 14, 22 ont été rapportées (Vanasse et al. 1999).

De manière générale, les DSBs, lorsqu’elles sont prises en charge par le NHEJ, amènent à la perte d’information génétique parfois à la base d’un défaut de régulation d’un gène.

Les principaux oncogènes et suppresseurs de tumeurs impliqués dans la cancérisation sont détaillés ci-dessous. Le processus tumoral peut aussi être le résultat d’un simple échappement apoptotique sans prolifération cellulaire, grâce à l’expression de facteurs de survie.

• Cancer et oncogènes

Dans certaines tumeurs malignes, les cyclines sont surexprimées et considérées comme des proto-oncogènes. La cycline D est surexprimée dans les cancers des poumons, du sein, gastrique et de l’œsophage (Dobashi 2005). La cycline E, indispensable à la transition G1/S, est dérégulée dans les cancers du sein et gastrique (Dobashi 2005). La cycline A est également surexprimée dans des adénocarcinomes du poumon et dans des cancers du foie (van Diest et al. 2004; Dobashi 2005).

Les protéines régulatrices des CDKs, comme les phosphatases, sont également impliquées dans certains cancers et sont même parfois à la source de la cancérisation cellulaire. La surexpression de la phosphatase Cdc25 est considérée comme un marqueur de l’agressivité de certaines tumeurs et un mauvais pronostique (Boutros et al. 2007). Les

protéines Cdc25, particulièrement les isoformes Cdc25A et Cdc25B, sont surexprimées dans des cancers du sein, des ovaires, de la prostate, des poumons, colorectaux, de l’œsophage, de la thyroïde, du larynx, gastrique, pancréatique, neuroblastique et lymphoblastique (Boutros et al. 2007). Les troubles entraînés par la protéine Cdc25 peuvent être liés à une mauvaise régulation de sa fonction. Si la protéine ne peut être dégradée par le protéasome ou séquestrée par la protéine 14-3-3 (afin d’empêcher son activité de déphosphorylation activatrice du complexe CDK-Cycline), le point de surveillance ne pourra pas être mobilisé (Bugler et al. 2006).

• Cancer et suppresseur de tumeur

Le plus connu des suppresseurs de tumeur est le facteur p53 dont la mutation est observée dans de nombreux cancers (Soussi and Lozano 2005). Des mutations dans les protéines CHK1 et CHK2 sont observées dans des cancers du colon ou des poumons (Stewart et al. 2003). Des mutations dans les gènes codant pour BRCA1 et 2, deux protéines impliquées dans la mise en place des points de surveillance, sont présentes dans de nombreux cancers (Kastan and Bartek 2004). Les patients possédant une protéine ATM mutée, souffrent de l’Ataxia Telengiectasia Mutated syndrome (ATM syndrome), c’est à dire une hypersensibilité aux rayons ionisants. Les patients NBS (Nijmegen Breakage Syndrome) possèdent une mutation sur le gène codant pour la protéine NBS1, impliquée dans la détection de dommages de l’ADN. Les patients ATM et NBS sont prédisposés aux cancers (Rotman and Shiloh 1998; Zhao et al. 2000).

• Cancer et défaut d’apoptose

Certaines tumeurs sont liées à des cellules qui ne prolifèrent pas mais échappent à la mort cellulaire, ce qui aboutit à leur accumulation dans le tissu où elles se trouvent. C’est le cas par exemple des cellules de la leucémie lymphoïdes chronique (LLC) dans lesquelles il a été observé une inhibition par phosphorylation de Bad (protéine de la famille de Bcl-2) et de la procaspase 9. Cette phosphorylation provoque l’inhibition de leur activité pro-apoptotique, en séquestrant Bad par liaison avec la protéine 14-3-3 (Franke and Cantley 1997) et en inhibant le clivage de la procaspase 9 (Cardone et al. 1998). Ces phosphorylations inhibitrices sont réalisées par la protéine Akt (protéine kinase isolée du retrovirus AKT8), elle-même activée par la PI3K (Phosphatidyl Inositol 3 Kinase), toutes deux impliquées dans l’équilibre prolifération/apoptose (Barragan et al. 2002).

Les facteurs de traduction sont de véritables oncogènes/suppresseurs de tumeurs, et peuvent conduire à une perte de régulation du cycle cellulaire, et donc à la cancérisation. L’implication de ces facteurs dans la régulation du cycle cellulaire a fait l’objet de nombreuses études, amenant l’idée d’une régulation fine et complexe, indispensable à la physiologie cellulaire et aux réponses mises en place lors de stress.

Ainsi, la partie suivante met en avant le rôle clé des facteurs de traduction dans les mécanismes de cycle cellulaire et de mise en place des points de surveillance.

2 La traduction