Le genre Cyclamen appartient à la famille des Primulacées regroupant des plantes
dicotylédones telles que les mourons, les primevères ou les soldanelles (Pax, 1889). Il comprend
une vingtaine d’espèces de plantes vivaces majoritairement originaires du bassin
méditerranéen (Figure 1) (Grey-Wilson, 1988). Ainsi, l’espèce la plus septentrionale est
présente jusqu’en République Tchèque (i.e.C. purpurascens) et l’espèce la plus méridionale est
présente en Somalie (i.e.C. somalense) (Grey-Wilson, 1986; Thulin et Warfa, 1989). Certaines
espèces, comme C. repandum, ont une aire de répartition géographique large tandis que
d’autres espèces, comme C. colchicum, présente uniquement dans une zone du Caucase, ou C.
balearicum, présente uniquement dans les Baléares, sont endémiques (Grey-Wilson et Wilford,
1998; Debussche et Thompson, 2003). Certaines de ces espèces sont subdivisées en
sous-espèces, en variétés voire en formes d’après leurs caractéristiques morphologiques
(Grey-Wilson, 1997).
D’un point de vue botanique, le cyclamen (Figure 2) se distingue par un organe de réserve
semi-souterrain appelé tubercule (Lamarck et Candolle, 1805). Il permet à la plante de rentrer
en dormance pendant la période estivale (Wildmer et Lyons, 1985). Ses feuilles en forme de
cœur présentent un motif en leur centre allant du vert au blanc en passant par l’argenté. Ses
fleurs sont également remarquables puisqu’elles présentent une corolle ascendante sur le
calice, donnant aux fleurs leur allure si caractéristique (Lamarck et Candolle, 1805). Les formes,
couleurs et motifs des fleurs et feuilles de cyclamens sont très variés (Figure 3). De nombreuses
études cytologiques ont été menées sur les différentes espèces de cyclamen (Bennett et
Grimshaw, 1991; Ishizaka, 1994, 2003). Bien que la majorité des cyclamens soient diploïdes,
certains cultivars sont polyploïdes. Le nombre de chromosomes décrits chez le cyclamen varie
entre 20 et 96 selon les cultivars et/ou espèces (Grey-Wilson, 1997).
En considérant l’ensemble des espèces de cyclamen, il est possible de trouver un cyclamen
en fleur à presque toutes les périodes de l’année. Ainsi, certaines espèces fleurissent en
automne (C. africanum), beaucoup fleurissent l’hiver (C. persicum), certaines fleurissent au
printemps (C. balearicum) et quelques-unes fleurissent l’été (C. intaminatum). Selon l’espèce
considérée, la floraison peut intervenir 2 à 5 ans après le semis dans leur environnement
naturel (Grey-Wilson, 1997). Le cyclamen est décrit comme allogame bien que l’autogamie ne
soit pas totalement exclue (Affre et al., 1995; Affre, 1996). Une fois la fleur fécondée, la corolle
tombe et le fruit (capsule déhiscente) mûrit pendant que le pédoncule floral s’enroule
progressivement sur lui-même. Lorsque la capsule atteint le sol, sa maturation est presque à
terme. Le fruit finit par s’ouvrir et libère ainsi les graines (Germain, 1870). Les fourmis se
chargent alors de les disséminer par attrait pour le mucilage sucré qui les recouvre (Hildebrand,
1898).
Figure 3 : Diversité de formes, motifs et couleurs de feuilles et fleurs des différentes espèces de
cyclamen.
Les photographies présentent les feuilles et fleurs des espèces de cyclamen suivantes : C. africanum (A),
C. balearicum (B), C. hederifolium (C), C. cilicium (D), C. rohlfsianum (E), C. cyprium (F), C. libanoticum
(G), C. coum (H). Photographies d’Arnold Trachtenberg (F), de John T Lonsdale (C, D, E, G) et de Mary
Sue Ittner (A, B, H).
Le mot cyclamen dériverait du mot grec «κυκλἀμινος» signifiant cercle ou couronne, se
rapportant probablement à la forme circulaire de son tubercule (Miller, 1785). Le mot cyclamen
peut également être employé comme adjectif pour qualifier une couleur. Dans la littérature, il
est également possible de trouver le mot cyclame pour désigner un cyclamen (Cuvier, 1818).
L’autre nom vernaculaire du cyclamen est «pain de pourceau» par référence à l’attrait des
porcs pour cette plante (Jonghe, 1844). L’aspect peu commun des cyclamens a inspiré et inspire
encore de nombreux auteurs et peintres.
Cyclamen persicum est la principale espèce de cyclamen commercialisée. Ce cyclamen dit
«des fleuristes» a longtemps été surnommé à tort «cyclamen de Perse» alors qu’il provient des
côtes méditerranéennes du Liban, de Syrie et de la Turquie et non pas de Perse (Iran). La culture
du cyclamen débute pendant la première moitié du 17ème siècle. L’espèce est alors cultivée
dans quelques jardins européens où elle fleurit après 3 à 4 ans de culture (Blasdale, 1954;
Grey-Wilson, 1997). Ce n’est qu’au 19ème siècle que la culture se développe vraiment, les nouveaux
cultivars permettent alors d’obtenir une floraison seulement 15 à 18 mois après le semis. A
partir de cette période, la sélection variétale a permis de diversifier la gamme de coloris, de
taille et de forme de fleurs et feuilles et de réduire la durée du cycle de production. Aujourd’hui,
en conditions optimales, la floraison intervient 7 à 9 mois après semis. L’espèce se décline en
de nombreux cultivars, séries et hybrides F1 (Grey-Wilson, 1997). Les autres espèces de
cyclamen constituent d’attractives sources génétiques pour la sélection variétale. Dans la
majorité des cas, les hybrides obtenus sont non viables ou stériles (Ishizaka et Uematsu, 1995;
Ishizaka, 2008). L’hybridation interspécifique n’a d’ailleurs jamais été observée dans la nature.
Les seuls cas où les hybrides obtenus se sont montrés viables correspondent aux croisements
effectués entre des espèces ayant le même nombre de chromosomes (Grey-Wilson, 1997).
Cependant, l’utilisation de la technique de culture invitro de sauvetage d’embryon a permis
d’outrepasser cette incompatibilité (Ishizaka, 2008).
En production, les cyclamens sont généralement semés de janvier à mars, voire avril, pour
atteindre la floraison d’octobre à janvier selon les cultivars (Figure 4). Le semis est réalisé dans
de la tourbe et les cyclamens doivent être placés en chambre de germination à 17-18 °C avec
une humidité de 90 % pendant une vingtaine de jours à l’obscurité. Les jeunes plants sont
ensuite placés en serre à une température de 18 à 20 °C. Après l’apparition de la première
feuille, les plantules sont repiquées dans de plus grandes alvéoles pour permettre au tubercule
et au système racinaire de bien se développer. Il est courant que cette première étape de
culture soit réalisée chez des producteurs spécialisés parfois également obtenteurs. Les jeunes
plants peuvent donc être vendus aux horticulteurs qui conduisent le reste de la culture jusqu’à
la floraison (CNIH, 1986; Grey-Wilson, 1997). Environ 6 à 8 semaines après l’étape de
repiquage, les jeunes plants sont rempotés dans leurs pots finaux. Cette dernière étape de
production est généralement menée à une température variant entre 15 °C et 18 °C.
Le cyclamen est une plante sensible aux variations de température. De trop fortes ou trop
faibles températures sont responsables de l’entrée en dormance de la plante. Le substrat est
lui aussi important, il doit être drainant, aéré et d’un pH neutre de préférence. Les tourbes sont
généralement conseillées pour la culture de cyclamens (Grey-Wilson, 1997). La photopériode
n’a aucune influence sur la culture. Cependant, une forte quantité de lumière en intensité et
en durée favorise la floraison. En conditions inverses, les plantes présentent une surface plus
importante des limbes foliaires et une diminution du nombre de fleurs (Grey-Wilson, 1997;
Cheon et al., 2006).
Le cyclamen est majoritairement vendu comme plante fleurie en pot d’intérieur ou
d’extérieur. Cependant, il est également possible, bien que plus rare, de l’acheter en fleurs
coupées. Il est en vente dans les jardineries et chez les fleuristes principalement durant le
dernier trimestre de l’année. En France, au moment de la Toussaint, le cyclamen est la
troisième plante la plus achetée après le chrysanthème et la bruyère (FranceAgriMer, 2015a).
De manière générale, le cyclamen est la troisième plante fleurie en pot la plus achetée en
France (8 % en 2014) après l’orchidée (20 %) et la jacinthe (13 %) (FranceAgriMer, 2015b).
Historiquement, la production de cyclamen est principalement européenne, les principaux pays
producteurs étant l’Allemagne, l’Italie et les Pays-Bas. Cependant, le cyclamen est également
cultivé aux Etats-Unis, au Japon ou en Argentine (AIPH et Union Fleurs, 2011, Lori et al., 2012).
Très peu de données rendant compte de la production internationale ou européenne sont
disponibles. A titre d’exemples, environ 22 millions de pots de cyclamen ont été produits en
Allemagne en 2012 et au Japon en 2008 tandis que 35 millions de pots de cyclamen ont été
produits en Italie en 2007 (FranceAgriMer, 2015b).
Plusieurs ravageurs et agents pathogènes peuvent endommager les cyclamens au cours
de la production et les rendre impropres à la commercialisation. Le charançon de la vigne
(Otiorhyncus sulcatus) est l’un des arthropodes les plus dangereux pour la culture. En effet, les
adultes se nourrissent des feuilles et fleurs tandis que les larves consomment les racines et la
base du tubercule (Smith, 1932; CNIH, 1986). Les autres arthropodes redoutés sont les larves
des mouches des terreaux (Bradysia sp. et Sciara sp.), certains thrips (Frankliniellaoccidentalis
et Thrips tabaci), l’acarien du cyclamen (Phytonemus pallidus) et les chenilles du papillon
Duponchelia fovealis (CNIH, 1986; Grey-Wilson, 1997; Jagdale et al., 2004; Pozzebon et al.,
2015).
Plusieurs microorganismes peuvent être responsables de maladies sur cyclamen. La
pourriture du tubercule est due à la bactérie Pectobacterium carotovorum. Ce symptôme
typique est accompagné du jaunissement du feuillage et de son flétrissement. Il s’agit de la
seule maladie bactérienne fréquente chez le cyclamen (Chandrashekar et Diriwaechter, 1983;
Grey-Wilson, 1997). Plus rarement, Phytophthora tropicalis est responsable d’un
dessèchement de la partie aérienne de la plante. Cet oomycète détruit le système racinaire du
cyclamen (Gerlach et Schubert, 2001). Des champignons comme Rhizoctonia solani,
Thielaviopsis basicola ou Colletotrichum sp. peuvent également se développer au cours de la
culture (Grey-Wilson, 1997; Someya et al., 2000; Wright et al., 2006). Cependant, les deux
champignons les plus dangereux sur cyclamen sont Fusarium oxysporum f. sp. cyclaminis et
Botrytiscinerea (Reimherr, 1985). Très polyphage, ce dernier provoque des taches sur feuilles,
pétioles et fleurs et se développe en présence d’une forte humidité (CNIH, 1986; Kessel et al.,
Figure 5 : Symptômes caractéristiques de fusariose vasculaire sur parties aériennes et sur tubercules
de cyclamen.
Dans le document
Fusariose du Cyclamen : Détection préventive du risque et contrôle biologique
(Page 30-36)