• Aucun résultat trouvé

181. La notion de régularité a été historiquement utilisée pour la première fois dans

l’article 40 alinéa 1er de la loi du 25 janvier 1985 qui prévoyait que : «Les créances nées

régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées à leur échéance lorsque l'activité est poursuivie»299. Selon un auteur, la régularité doit s’apprécier par rapport à l’interdit. En d’autres termes, la naissance des créances postérieures régulières ne peut pas provenir d’actes interdits, à l’image de la poursuite illicite de l’activité de

l’entreprise en période d’observation300 ou encore la poursuite non autorisée de

l’activité en liquidation judiciaire301.

De manière concrète, la régularité de la naissance de la créance postérieure bénéficiant du traitement préférentiel s’apprécie selon l’étendue des règles de contrôle dévolues aux organes de la procédure collective et au débiteur. De ce fait, la régularité de la naissance des créances postérieures dépend du respect par l’organe, à l’origine de la naissance de ladite créance, des pouvoirs qui lui ont été conférés par le jugement d’ouverture.

182. De nos jours, c’est l’article L622-17-I du Code du commerce, applicable en

sauvegarde et en redressement judiciaire, qui exige la régularité de la naissance des

créances postérieures302. L’article L641-13-I du même Code reproduit l’exigence de la

naissance régulière de la créance postérieure en liquidation judiciaire303.

En droit OHADA, c’est l’article 117 de l’AUPC qui exige la régularité des créances nées postérieurement après le jugement d’ouverture de la procédure collective, puisque «toutes les dettes nées régulièrement, après la décision d’ouverture, de la continuation de l’activité et de toute activité régulière du débiteur ou du syndic, sont des créances contre la masse (…) »304.

299 C’est nous qui soulignons.

300 P. LE CANNU, op. cit., 7e éd., n°760. 301 J.L. VALLENS, op. cit., éd. 2007, n°3118.

302 C.com., art. L622-17-I : « Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les

besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ».

303 C.com., art. L641-13-I : « Sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le

jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé en application de l'article L641-10 ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant ce maintien de l'activité ».

92

183. Par conséquent, le débiteur peut-il, par son fait ou sa faute, faire naître, au profit

de la victime, une créance délictuelle ou quasi délictuelle ?

La réponse à cette question a fait naître en France, un vrai débat doctrinal. Ainsi, pour

les uns, la réponse est affirmative sans aucune distinction305. Pour d’autres, une

distinction s’impose selon que le comportement du débiteur s’inscrit dans le

prolongement de l’activité professionnelle du débiteur306. Cependant, les juges français

ont eu l’occasion de préciser, sous l’empire de la loi de 1985 modifiée en 1994, que l’article 40 était applicable à la créance de réparation de la victime, lorsque le partage

des pouvoirs entre les organes de la procédure et le débiteur a été respecté307.

Cependant, en droit de l’OHADA, selon un auteur, tout fait juridique, délit ou quasi- délit, est bloqué par l’effet du dessaisissement partiel ou total du débiteur. De ce fait, « les créances de réparation de délits et quasi-délits commis par le débiteur après le jugement d’ouverture sont inopposables à la masse »308.

184. A cet égard, la question de la régularité de la naissance des créances postérieures

se pose dans le cadre des créances nées, d’une part, de la continuation des contrats en cours (Section 1) et d’autre part, pour les créances nées de la conclusion des nouveaux contrats après le jugement d’ouverture de la procédure collective (Section 2).

305 M. CABRILLAC, L’article 40 de la loi nouvelle et les nouveaux privilèges de procédure, Rev. proc.

coll. 1986, n°11 p.13 s.

306 V. entre autres C. SAINT-ALARY-HOUIN, op. cit., n°594, p.371 ; F. PEROCHON, op. cit., n°760,

p.378.

307 Com. 13 octobre 1998, n°95-21.988, Bull. Civ. IV, n°240 (en matière de contrefaçon). 308 F.-M. SAWADOGO, op. cit., n°175, p.170.

93

Section 1 : La régularité des créances nées de la continuation

des contrats en cours

185. La question du domaine de la continuation des contrats en cours est très

importante dans le cadre de la détermination du périmètre des créances postérieures. En effet, cette question se pose plus précisément en matière de maintien, de plein droit ou autorisé, de l’activité du débiteur.

En outre, la continuation des contrats en cours a aussi son importance en liquidation des biens, puisqu’elle permet à l’organe de la procédure collective d’obtenir un meilleur

produit de la liquidation par l’achèvement des fabrications en cours, par exemple309.

186. Par ailleurs, deux questions principales sous-tendent l’étude des créances nées de

la continuation des contrats en cours, à savoir la détermination du contrat en cours lui- même (Paragraphe 1) et l’importance de l’intervention de l’organe de la procédure pour asseoir la régularité des créances nées de la continuation des contrats en cours (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La détermination du contrat en cours

187. La détermination du contrat en cours renvoie, d’une part, à une incursion dans la

notion même de contrat en cours (A) ; avant d’aborder, d’autre part, la question des contrats exclus de la continuation des contrats en cours (B).

A- La notion de contrat en cours

188. L’AUPC n’a pas défini la notion de contrat en cours à laquelle il fait référence

dans ses dispositions énumérées sous la neuvième section intitulée l’ « Exécution des contrats en cours ».

En revanche, le droit français a depuis longtemps donné une définition à la notion des contrats en cours310.

Cette définition était également appliquée par les juges dans la plupart des pays membres de l’OHADA avant l’entrée en vigueur de l’AUPC, c'est-à-dire sous l’empire

309 F.M. SAWADOGO, op. cit., n° 189, p.181.

310 F. DERRIDA, La notion de contrat en cours à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire,

94 de la loi du 4 août 1889 sur les faillites. De ce fait, il semble que la même définition de la notion de contrat en cours reste aujourd’hui encore applicable, même si aucune décision de la Cour suprême de l’OHADA n’a été rendue en la matière.

189. Dans le mesure où la continuation des contrats en cours ne concerne que le

contrat en tant qu’acte juridique constitué par l’accord de volontés et destiné à produire des effets juridiques, est un contrat en cours celui qui continue à exister au jour du jugement d’ouverture de la procédure collective et dont les prestations à la charge du

débiteur, sous procédure collective, n’ont pas encore été exécutées311.

190. Il découle de ce qui précède que les contrats dont la condition suspensive s’est

réalisée avant le jugement d’ouverture ne sont pas des contrats en cours au jour du

jugement d’ouverture312. Ne sont pas également des contrats en cours, les contrats

rompus antérieurement au jugement d’ouverture de la procédure collective. C’est ainsi que la clause résolutoire insérée dans un contrat de crédit-bail immobilier qui a pleinement produit ses effets avant le prononcé du jugement d’ouverture, fait échapper

ledit contrat au domaine des contrats en cours313.

191. En retenant le critère selon lequel un contrat, pour être en cours, ne doit pas être

totalement exécuté au jour du jugement d’ouverture, certains auteurs font correspondre les contrats en cours à la seule catégorie des contrats à exécution successive314. Cette opinion a été par la suite abandonnée par la doctrine majoritaire qui précise que les contrats en cours ne peuvent pas être limités à la catégorie des contrats à exécution successive. Ainsi il pourrait s’agir de contrats à exécution instantanée dont l’exécution a

été différée315. Cette précision permet de prendre en compte, parmi les contrats en

cours, les contrats affectés d’un terme ou d’une condition suspensive, ainsi que ceux

dont l’exécution a été momentanément suspendue316.

192. C’est la jurisprudence qui intervient pour compléter les prémices de la définition

de la notion de contrat en cours dégagées par la doctrine. En ce sens, les juges ont

311 J.-Ph. HAEHL, art. précité, LPA n°17, 8 juillet 1996.

312 Com. 18 novembre 1980, D. 1981, n°131, note A. H., JCP éd. Cl 1981. 9780, no 18, obs.

CABRILLAC et ARGENSON.

313 Com. 9 mai 1995, D. 1995, IR 148.

314 Pour l’exclusion des seuls contrats à exécution successive, v. P.-M. LE CORRE, op. cit., n°431.22,

p.634 ; F. M. SAWADOGO, op. cit., n°189, p.189.

315 F. PÉROCHON, op.cit., n°761, p.378 ; C. SAINTALARY-HOUIN, op. cit., n°550, p.344 ; J.

VALLANSAN, Difficultés des entreprises, 6e éd., 2012, coll. Droit et Professionnels, Litec, n°103.

95 procédé à une étude casuistique pour relever la prestation caractéristique de chaque

catégorie contractuelle, afin de déterminer si le contrat est ou non en cours317.

Cette recherche de la prestation caractéristique se déroule de la même manière que dans le cadre de la délimitation entre les créances antérieures et postérieures, pourtant les conséquences ne sont pas les mêmes étant donné qu’il s’agit ici de savoir si le contrat

est ou non en cours318.

193. La situation diffère lorsqu’il s’agit d’un bail commercial. En effet, l'ouverture

d'une procédure collective n'entraîne pas la résiliation automatique du bail commercial.

Il en est de même en droit de l’OHADA où l’AUPC prévoit la continuation du bail des immeubles affectés à l’activité professionnelle du débiteur à l’ouverture d’une

procédure collective319.

De ce fait, le bail commercial renouvelé après délivrance d'un congé est un nouveau bail, le précédent cessant par l'effet du congé, par conséquent, il ne constitue pas un

contrat en cours dont l'administrateur peut exiger l'exécution320.

En présence d'une clause résolutoire, la résiliation du bail peut être acquise automatiquement avant le jugement d'ouverture, dans ce cas, le contrat n'est plus en

cours d'existence, ni d'exécution et la question de sa poursuite ne se posera pas321. Pour

cela, outre un commandement de payer resté infructueux pendant un mois, il faut que le preneur ne puisse plus obtenir du juge des référés la suspension des effets de la clause, ce qui requiert une décision passée en force de chose jugée, donc insusceptible de voies

317 Com.9 avril 1991, Bull. civ. IV, no 127; 22 octobre 1996, D. 1996, IR 263; 1er février 2000, D. 2000,

AJ 144, obs. A. LIENHARD, Rev. proc. coll. 2002. 182, obs. F. MACORIG-VENIER ; pour la cession de parts sociales : Com. 22 octobre 1996, Defrénois 1997. 467, obs. P. LE CANNU, Rev. proc. coll. 1998. 290, obs. F. MACORIG-VENIER. Com. 2 mars 1999, Act. proc. coll. 1999, no 91, obs. J. VALLANSAN, LPA 1er févr. 2000, p. 21, note Ch.-H. GALLET. Com. 5 mai 2004, D. 2004, AJ 1525, obs. A. LIENHARD, Act. proc. coll. 2004, no 139, obs. F. PÉROCHON, Rev. proc. coll. 2004, 225, obs. Ph. ROUSSEL-GALLE. Com. 7 mars 2006, Act. proc. coll. 2006, no 93, obs. M.-H. MONSERIE-BON ; Com. 2 mars 1993, D. 1993. 572, note Ph. DEVESA ; 14 décembre 1993, D. 1995, somm. 7, obs. F. DERRIDA ; 13 avril 1999, D. 2000. 257, note P. LIPINSKI ; Cass. 1re civ. 28 mars 2000, Defrénois 2000. 720, obs. J.-L. AUBERT, D. 2000. 482, note S. PIEDELIEVRE ; Com. 19 janvier 1999, RJDA 1999, no 307 ; Soc. 13 mars 1997, D. 1997, IR 83 ; Com. 19 mai 2004, Rev. proc. coll. 2004. 224, obs. ROUSSEL-GALLE.

318 De toute façon, le jugement d’ouverture de la procédure collective est la ligne de démarcation

permettant de considérer qu’un contrat est ou non en cours.

319 Cf. art. 97 AUPC.

320 Cass. ass. plén., 7 mai 2004, D. 2004. AJ 1451, obs. A. LIENHARD ; D. 2004. Somm. 2142, obs. P.-

M. LE CORRE.

321 Voir B. MEUKE, Brèves observations sur le sort du bail commercial dans les procédures collectives

96

de recours, avant le jugement d'ouverture322. Conformément aux dispositions de l'article

L143-2 du Code de commerce, le bailleur devra penser à notifier aux créanciers inscrits sur le fonds sa demande de constat de la résiliation du bail par le jeu de la clause

résolutoire, sous peine d'inopposabilité de plein droit de la résiliation à leur égard323 .

Néanmoins, la possibilité de continuer les contrats en cours n’empêche pas que certains contrats soient exclus du domaine de la continuation des contrats en cours et ce, dès l’ouverture d’une procédure collective.

B- Les contrats exclus de la continuation des contrats en cours

194. La continuation des contrats en cours obéit à une règle (1) qui souffre de

quelques exceptions (2).

1) La règle de la continuation des contrats en cours

195. L’article L622-13 du Code de commerce comme l’article 107 de l’AUPC,

prévoient que le cocontractant ne peut se prévaloir d’aucune disposition légale ou clause contractuelle pour fonder la rupture du contrat par la simple ouverture d’une procédure

collective contre le contractant324. En outre, toute clause de résolution pour un tel motif

est réputée non écrite.

Cette disposition commune aux deux législations objet de la présente étude permet de protéger les cocontractants contre les ruptures abusives des contrats, pourtant en cours, dès lors qu’une procédure collective a été ouverte.

Les juges français ont eu l’occasion d’affirmer que : « La résiliation du contrat de concession notifiée par le concédant quelques jours avant la mise en redressement judiciaire du concessionnaire, mais après que celui-ci a déclaré son état de cessation des paiements, n'est pas nulle dès lors que, fondée sur une autre cause que le dépôt de bilan, elle n'est pas entachée de mauvaise foi ou de fraude de la part du concédant, dont

322 Com.12 juin 1990, D. 1990. 450, 2e esp., note F. DERRIDA ; 9 déc. 1997, Loyers et copr. 1998,

no 129 ; CA Douai, 6 mars 2007, Loyers et copr. 2007, no 247 ; Civ. 3e, 9 janv. 2008, Loyers et copr. 2008, no 83, obs. Ph.-H. BRAULT.

323 Civ. 3e, 12 juillet 2006, no 05-14.396, D. 2006. AJ 2242, obs. Y. ROUQUET.

97 il n'est pas établi qu'il connaissait l'état de cessation des paiements ou sa déclaration au moment où il a mis en œuvre la clause résolutoire »325.

2) Les exceptions à la règle de la continuation des contrats en cours

196. Cependant, certains contrats sont expressément exclus du champ d’application

de la continuation des contrats en cours. En d’autres termes, ces contrats exclus ne donneront pas naissance à des créances postérieures, puisque le jugement d’ouverture de la procédure collective entraîne automatiquement leur résiliation.

197. L’exclusion des contrats en cours est beaucoup plus marquée en droit de

l’OHADA où certains contrats ne peuvent pas donner naissance à des créances postérieures dans la mesure où ils ne seront pas continués à l’ouverture d’une procédure collective.

C’est l’article 107 de l’AUPC qui prévoit cette exclusion en disposant que : « Hormis pour les contrats conclus en considération de la personne du débiteur et ceux prévus expressément par la loi de chaque Etat partie, la cessation des paiements déclarée par décision de justice n'est pas une cause de résolution et toute clause de résolution pour un tel motif est réputée non écrite»326.

198. Ainsi, l’AUPC exclut du domaine des contrats en cours, les contrats prévus

expressément par la loi de chaque Etat partie et les contrats intuitu personae. En ce sens, ces contrats sont résolus de plein droit par l’effet de l’ouverture d’une procédure collective.

a- L’exclusion des contrats expressément prévus par la loi de chaque Etat partie

199. Ce premier cas d’exclusion, uniquement contenu dans le droit uniforme des

affaires, pose deux difficultés majeures : une difficulté de compréhension et une difficulté de justification.

a-1) Une exclusion incompréhensible

200. L’AUPC et la jurisprudence communautaire n’ont pas donné de définition

précise de l’expression « contrats expressément prévus par la loi de chaque Etat

325 Com. 19 mars 2002, RJDA 2002, no 908. 326 C’est nous qui soulignons.

98 partie », ce qui a le mérite de faire perdurer l’ambigüité profonde du texte. En effet, il peut ressortir d’une première lecture de la disposition ci-mentionnée que l’AUPC accepte que les Etats parties puissent valablement prévoir, dans leur législation nationale, que certains contrats nommément désignés peuvent prendre fin du fait de l’ouverture d’une procédure collective.

201. C’est la doctrine qui essaie de pallier le manque de détermination du contour de

l’expression utilisée dans l’AUPC. En effet, un auteur a fait l’effort de déterminer les

contrats pouvant faire l’objet de cette exclusion327. On peut ainsi trouver parmi les

contrats pouvant faire l’objet d’une exclusion expressément prévue par la loi nationale de l’Etat partie, des contrats variés dont les marchés publics. Ces derniers seront résiliés de plein droit et sans indemnité par les pouvoirs publics adjudicateurs, lorsque le cocontractant n’avait pas l’autorisation du tribunal pour continuer l’exploitation à la

survenance d’une procédure collective328.

a-2) Une exclusion injustifiée

202. La question de la justification de l’exclusion des contrats expressément prévus

par la loi nationale se pose. Il s’agit surtout de savoir si l’exclusion prévue par l’article 107 de l’AUPC n’est pas contraire à l’article 10 du Traité de Port Louis conformément auquel « les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats Parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure ». En d’autres termes, la disposition qui concerne le pouvoir d’exclusion de certains contrats par la volonté des Etats parties n’est-elle par contraire à l’esprit général du droit de l’OHADA ?

Les contrats exclus, par renvoi de l’AUPC à la loi de chaque Etat partie, sont généralement, nous le pensons, des contrats importants pour l’épanouissement et la survie de toute entreprise, surtout lorsque celle-ci est en difficulté. De ce fait, la loi de l’Etat partie qui exclurait la continuation de certains contrats en cours, contredirait, purement et simplement, les objectifs de l’AUPC qui tiennent au redressement de l’entreprise.

327 J. M. NYAMA, OHADA, Droit des entreprises en difficulté, Cerfod, 2004, p.358 et s. 328 Civ. 31 juillet 1912 : D. 1913. 1. 81, cité par A. AZIBER SEÏD.

99

203. Par ailleurs, nous constatons un risque possible d’émergence de droits nationaux

résiduels en marge du droit africain unifié des affaires, du fait de l’apparition d’une liste

incontrôlable de contrats exclus établie par chaque Etat partie selon son bon vouloir329.

Cette liste conduirait à une réapparition de l’insécurité juridique et judiciaire que le Traité de Port Louis a voulu pourtant supprimer par un important effort d’uniformisation du droit des affaires en Afrique.

Sur le plan pratique, la latitude que l’expression de l’AUPC donne aux Etats parties risque de conduire à des incohérences et donc à mettre en œuvre l’échec total de l’objectif poursuivi par la continuation de l’activité et son corolaire la continuation des contrats en cours : le sauvetage de l’entreprise en difficulté.

Hormis les contrats expressément prévus par la loi de chaque Etat partie, l’AUPC permet également d’exclure du champ de la continuation des contrats en cours, les contrats conclus intuitu personae.

b- L’exclusion des contrats conclus intuitu personae

204. L’AUPC a maintenu l’exclusion des contrats intuitu personae du domaine de la

continuation des contrats en cours. Cette exclusion donne lieu à des conséquences qu’il serait opportun de déterminer.

b-1) Le maintien de l’exclusion des contrats intuitu personae en droit de l’OHADA

205. Bien qu’une partie de la doctrine considère que le caractère intuitu personae

tend à disparaitre dans le domaine contractuel en France, il retrouve tout son sens en

droit de l’OHADA330. Cependant, l’exclusion des contrats intuitu personae du domaine

des contrats en cours compromet indéniablement le redressement efficace de l’entreprise dans la mesure où elle coupe cette dernière de son environnement naturel qui est le contrat331. En effet, la continuation des contrats intuitu personae peut être indispensable au sauvetage de l’entreprise, au même titre que tous les autres contrats conclus par l’entreprise dans le cadre de son activité.

329 A. AZIBER SEID, op. cit., n°41, p. 42.

330 V. entre autres : D. KRAJESKI, L’intuitu personae dans les contrats, thèse université de Toulouse 1 –

Sciences sociales, 1998, Doctorat et notariat, coll. des Thèses, 2001 ; AZOULAI, L’élimination de l’intuitu personae dans le contrat, in La tendance à la stabilité du rapport contractuel, LGDJ, 1960.

100 Le droit français des procédures collectives a connu une disposition analogue dans les législations antérieures à celle du 25 janvier 1985. L’article 37 de la loi du 25 janvier 1985 a in fine supprimé l’exclusion des contrats intuitu personae du domaine des

Documents relatifs