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6. Les interactions virtuelles. La conquête en ligne

6.2 Critères de sélection

Car il faut que tu saches, Sancho, si tu ne le sais pas encore, que deux choses par-dessus tout entrainent l’amour : ce sont la beauté et la bonne renommée. Or, ces deux choses se trouvent dans Dulcinée au degré le plus éminent, car en beauté personne ne l’égale, et en bonne renommée bien peu lui sont comparables. Et pour tout dire en un mot, j’imagine qu’il en est ainsi, sans qu’il faille rien ôter ni rien ajouter.

L’ingénieux hidalgo Don Quichotte de la Manche Miguel de Cervantès Saavedra

La multiplicité d’essais de rapprochement virtuel que font les hommes vers les femmes ne veut pas dire que ceux-ci, comme elles, à l’heure de répondre, n’appliquent pas des critères de sélection. Au contraire, ces critères sont faciles à reconnaître. Le graphique 7 présente ce qui, au

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début, attire l’attention des utilisateurs des sites de rencontre à l’heure de visiter le profil d’autrui. Le graphique 8 analyse les mêmes résultats, mais classés par genre.

Le graphique 9, pour sa part, signale quel type d´évaluation font les utilisateurs de quelques attributs de l’autre personne, tels que : « l’âge », la « photographie » le « niveau d’éducation », les « goûts », le « métier » et le « revenu ». Les internautes devaient classer ces attributs dans les catégories suivantes : « très important », « important », « indifférent », « assez important », « pas important » (voir Annexe 1). Le graphique 10 présente les mêmes résultats que le graphique 9, mais classés par genre. Dans le but d’être plus intelligible dans la présentation des résultats des graphiques 9 et 10, les catégories « important/très important » et « assez important/rien d’importance » ont été regroupées.

Graphique 7 : Quelle est la première chose qui attire votre attention lorsque vous regardez le profil d’une autre personne pour la première fois ? (Fréquences absolues)

0 5 10 15 20 25 30 35 40

Âge Photographie Goûts Niveau

d'éducation Profession 33 38 11 17 1

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Graphique 8 Quelle est la première chose qui attire votre attention lorsque vous regardez le profil d’une autre personne pour la première fois ?

Graphique 9 : Quelle est l’importance que vous attribuez au profil d’une autre personne ?

0% 20% 40% 60% 80% 100% Age Photographie Goûts Niveau d'éducation Profession 45,5% 52,6% 54,5% 29,4% 100,0% 54,5% 47,4% 45,5% 70,6% 0,0% Masculin Fémenin 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% Goûts Photographie Niveau d'éducation Âge Profession Revenu 79% 87% 77% 81% 46% 23% 18% 7% 12,9% 12,9% 39% 38% 3% 7% 10% 6% 15% 38%

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Graphique 10 : Quelle est l’importance que vous attribuez au profil d’une autre personne ? a) Goûts b) Photographie

c) Âge d) Niveau d’éducation

e) Profession f) Revenus 43,8% 72,7% 50,0% 56,3% 27,3% 50,0%

Important/trés important Indifférent Assez important/pas important

Masculin Fémenin N= 61 50,9% 50,0% 50,0% 49,1% 50,0% 50,0%

Important/trés important Indifférent Assez important/pas important

Fémenin Masculin N= 61 42,0% 75,0% 100,0% 58,0% 25,0% 0,0%

Important/trés important Indifférent Assez important/pas important

Masculi Fémenin N=62 47,9% 62,5% 50,0% 52,1% 37,5% 50,0%

Important/trés important Indifférent Assez important/pas important

Masculin Fémenin

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Dans le graphique 7, nous pouvons observer que la première chose qui attire l’attention des utilisateurs des sites de rencontres, hommes ou femmes, c’est la photo de profil (voir graphique 8). Cette information est en accord avec les réponses des utilisateurs interrogés. Comme ils l’indiquent, à travers la photo, ils peuvent percevoir si la personne est ou n’est pas captivante.

« Alors, évidemment, la première chose qu’on fait c’est chercher une fille attirante ou avec une photo attractive… » (Homme 30-39 ans)

« Au début la photo est la manière la plus simple de savoir si une personne est ou n’est pas attractive… » (Femme 20-29 ans).

« Moi, je pense que tout est dans le regard… car, quand tu fais un like, c’est parce que quelque chose t’as plu, c’est-à-dire, si tu le connais pas, tu commences par ce que tu vois dans la photo… » (Femme 30-39 ans)

Le graphique 9, montre que la photographie est l’attribut le plus important dans le profil de l’autre personne. Cette valorisation est partagée aussi bien pour les hommes que pour les femmes (voir graphique 10b). Par conséquent, la croyance populaire -très répandue au Chili- qui dit que l’homme valorise plus l’apparence physique que la femme, ne semble pas pertinente dans ce cas-là. 42,9% 52,2% 47,8% 57,1% 47,8% 52,2%

Important/trés important Indifférent Assez important/pas important

Masculin Fémenin N= 60 42,9% 54,2% 55,6% 57,1% 45,8% 44,4%

Important/trés important Indifférent Assez important/pas important

Fémenin Masculin

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Les utilisateurs sont conscients que l’appréciation des autres à travers une photographie peut être stéréotypée et créer des préjugés. Toutefois, ils affirment que sur les sites de rencontre il n’y a pas d’autre manière de juger l’autre.

« Alors, nous jugeons une personne par sa photo, bien que nous faisons tous partie d’une société avec des préjugés, vraiment, tout entre par le regard… » (Homme 20-29 ans)

Le récit précèdent appuie l’affirmation d’Eva Illouz (2012) qui dit que l’attrait sexuel est un des critères les plus importants au moment d’établir des relations de couple dans la société contemporaine. Néanmoins, la photographie a aussi une autre fonction majeure et essentielle. La photographie n’est pas seulement un critère d’évaluation du charme de l’autre, mais aussi un signe de son existence. La photographie est un élément central de l’identité virtuelle (Ardèvol, 2009), mais en même temps, elle est aussi une manifestation de l’existence « réelle » (hors ligne) de l’autre personne. Ce signe de la « réalité » aurait un certain degré rassurant dans une atmosphère de suspicion. Comme le dit un utilisateur lorsqu’il a été interrogé sur ses impressions la première fois qu’il a visité un site de rencontre :

« Au début, j’avais un peu plus de confiance parce que j’avais vu des photos, contrarièrent à sur Terra (salle de tchat) où il n’y avait pas d’images. Je l’ai connue sur Messenger ou je ne sais plus, sur Facebook qui à cette époque-là existait déjà. Au début, j’avais un peu plus de confiance, parce que je pouvais rechercher des profils où qui avaient des photos, mais je ne cherchais pas des profils, par exemple, avec une photo un peu bizarre, je ne parlais pas avec cette personne… » (Homme 20-29 ans)

C’est pourquoi les femmes, qui sont la plus méfiance de ces espaces virtuels, ont comme règle de ne pas répondre à des messages de quelqu’un qui n’a pas de photo sur son profil.

« Parler avec quelqu’un sans photo, euh… moi, je ne le fais pas, cela ne me donne pas de confiance, alors non, je le fais pas… » (Femme 20-29 ans).

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Bien que la plupart d’entre elles soient conscientes qu’une photo peut ou peut ne pas correspondre à la réalité (hors ligne) de quelqu’un.

« Moi je ne réponds pas, parce que je sais rien de l’autre personne derrière l’écran, même si une photo peut représenter un mensonge, je crois que la photo donne un peu de sécurité… » (Femme 40-49 ans).

Quelques femmes interrogées dans une situation similaire -sur la réalité de la photographie- ont indiqué qu’elles ne se sont jamais posé la question de l’authenticité de la photo, c’est-à-dire, l’identité hors ligne de leurs interlocuteurs. De cette manière, en poursuivant la réflexion, on peut appuyer la thèse de Susan Sontag qui explique que : « le vrai primitivisme moderne n’est pas la contemplation d’une image comme quelque chose de réel […]. Plutôt la réalité ressemblée de plus en plus à ce que les caméras nous montrent » (2012 : 157). Par là, on peut dire que sur les sites de rencontre la photographie ne remplit pas seulement la fonction du corps ou est une représentation de cet, la photographie est le corps de l’autre sur le net. Olga Sabido dit :

« Le corps n’est pas quelque chose d’évident, il n’est même pas empiriquement comparable stricto sensu, car nous ne voyons jamais des « corps » (cf. Le Breton, 2002), mais des hommes, des femmes, des garçons, des filles, des personnes âgées […], c’est-à-dire, nous ne voyons pas des corps mais « des corps socialement différenciés » (Bourdieu, 2003 : 38 » (2007 :208) (en italique dans le texte original).

Sur les sites de rencontre, les utilisateurs ne voient pas simplement des photographies, mais des hommes et des femmes, des jeunes ou des personnes âgées, grandes ou petites, minces ou grosses, blondes ou brunes, pour nommer quelques caractéristiques possibles, et finalement, des personnes attractives ou non.

L’âge est un critère important à prendre en compte au moment où les utilisateurs accèdent au profil d’autres utilisateurs. Même si le proverbe dit « l’amour n’a pas d’âge », sur les sites de rencontre l’âge est un critère déterminant (voir graphique 9), peut-être encore plus que dans le

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monde hors ligne. On peut en rendre responsable l’offre faite par les sites de rencontre concernant les rencontres intergénérationnelles. Tandis que hors d’Internet il est possible d’affirmer que -à l'avis de cet étude - les endroits les plus courant pour une rencontre romantique tels que les bars, les cafés et les discothèques se différencient habituellement par groupes d’âge : lieux pour les adolescents, les jeunes adultes, les adultes, les personnes âgées, les sites de rencontre chiliens se caractérisent par leur généraliste (Lardellier 2014), et par conséquent, les différentes générations de célibataires peuvent se rencontrer dans un même endroit. Pour cette raison, il n’est pas difficile de trouver des récits qui commentent ce phénomène.

Ainsi, les utilisatrices de sites de rencontre ont affirmé qu’elles ont reçu de nombreux messages virtuels d’hommes de différent âge, certains très jeunes et d’autres très âgés. C’est peut-être pour cette raison que l’attribut « âge » est plus important pour les femmes que pour les hommes (voir graphique 10d). L’importance de l’âge peut être observée dans les récits suivants.

« … on peut mettre des filtres pour éviter les personnes âgées ou très jeunes […] je veux pas parler avec toutes ces personnes, des gens très âgées ou très jeunes, comme par exemple 20 ans » (Femme 20-29 ans).

« Par exemple, l’homme de 36 ans, j’ai bien réfléchi avant de lui parler, je lui parle ou je ne lui parle pas ? Finalement je lui ai parlé… et il m’a répondu… Il était historien, ça me semblait intéressant et je me suis dit, bon, je lui parle. Voilà, dans ce cas-là, le sujet de l’âge ne fut pas de problème… » (Femme, 20-29 ans).

« Pas trop jeune, majeur depuis un an, c’est un petit garçon (rires) parce que je crois que les hommes sont plus immatures… » (Femme 20-29 ans).

Un phénomène assez fréquent parmi les utilisateurs interrogés est l’interaction entre jeunes hommes et femmes plus âgées. Il n’est pas possible d’affirmer que ce phénomène soit propre à Internet, mais nous pouvons dire que ce moyen facilite ce type d’interactions. Plusieurs interrogées entre 30, 40, 50 ans et plus disent recevoir des nombreux messages d’hommes plus jeunes qu’elles. D’une part, la plupart de ces messages sont rejetés par certaines femmes en

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arguant que ces jeunes hommes pourraient être leurs enfants et d’autre part, il y a des femmes qui n’ont pas de problème avec ce type de messages et qui peuvent aussi établir des interactions avec leurs prétendants virtuels. Certaines ont même établi des relations de caractère sexuel-émotionnel avec eux, soit d’une façon virtuelle, soit d’une manière réelle (hors ligne).

Pour leur part, les hommes interrogés sont aussi conscients de ce phénomène. Tandis que quelques-uns se plaignent des femmes qui cherchent des jeunes hommes sur les sites de rencontre :

« En général, je vois des femmes qui cherchent des hommes plus jeunes qu’elles. Quelque chose d’amusant, je crois. Moi, avec 53 ans je suis un peu hors du « marché » ou loin du cercle des femmes qui m’intéressent, même si je considère que je suis en forme pour mon âge » (Homme 50-59 ans).

D’autres hommes, en revanche, n’ont pas de mal à reconnaître qu’ils cherchent des femmes plus âgées qu’eux, surtout quand elles sont attractives ; on désigne ce genre de femmes sur Internet par l’acronyme MILF46

« … Eh ben, moi aussi je cherchais des meufs sexy, pas des grosses femmes repoussantes, alors, j’ai commencé à sortir avec beaucoup de femmes comme ça s… » (Homme 40-49 ans).

« Entre deux et dix ans plus que moi, minces […] C’est le premier critère. La règle est : elle ne doit pas peser plus que moi ha haha… » (Homme 30-39 ans).

Au-delà de la demande masculine et de la tendance de quelques-uns à chercher des femmes plus âgées, l’observation l’étude des sites de rencontre permet d’affirmer qu’il y a une tendance parmi les hommes à privilégier une large tranche d’âge, alors que les femmes sélectionnent leurs

46 Mom I’d like to fuck (MILF) littéralement « mère que j'aimerais baiser ». En français l'acronyme peut être traduit par MBAB (« Mère bonne à baiser »). Il sert à désigner une mère sexuellement attirante https://es.wikipedia.org/wiki/MILF (consultée le 7 Juillet, 2015).

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interlocuteurs à partir d’une tranche d’âge davantage restrictive. Indépendamment de la tranche d’âge sélectionnée, il est clair que sur Internet, et plus spécifiquement sur les sites de rencontre, l’âge est un critère important, il serait encore plus important que dans le monde hors ligne. Un autre critère important, par ordre décroissant, est le « niveau d’éducation » (voir graphique 7). Le graphique 8 montre que ce sont principalement les femmes qui valorisent en grande partie cette caractéristique. Elles représentent 70,6 % des interrogées lorsqu’elles devaient répondre à : Quelle est la première chose qui attire votre attention lorsque vous regardez le profil d’une autre personne pour la première fois ? Contre seulement 29,4 % des hommes.

Cela corroborait que les femmes, comme l’indique Eva Illouz (2012), adoptent une attitude endogamique ou d’hypergamie, autrement dit, elles cherchent un conjoint avec un niveau d’éducation égal ou supérieur à elles. Toutefois, cette interprétation n’aurait pas beaucoup de sens si nous prenions en compte certains objectifs que les femmes explicitent au moment de visiter les sites de rencontre, comme par exemple : « la curiosité », « faire la connaissance avec quelqu’un » ou « passer le temps ». Nous reviendrons sur ce point par la suite.

Le graphique 9 souligne que vis à vis du niveau d’éducation, la réponse « important/très important » a été choisie par 77,4 % des sondés, tandis que la réponse « indifférent » a été sélectionné par 12,9 % des interrogés. La catégorie « assez important/rien d’importance » ne représente que 9,7 %. Le graphique 10 permet d’observer que pour l’option la plus sélectionnée : « important/très important », les hommes et les femmes présentent quasiment le même pourcentage : 52,1 % pour les premiers contre 47,9 % pour les deuxièmes.

Le critère suivant, dans l’ordre décroissant (voir graphique 7), a été « goûts ». Le graphique 8 permet d’observer que ce critère est légèrement plus important pour les hommes (54,5 %) que pour les femmes (45,5 %). Le graphique 9 montre les goûts considérés comme « important/très important » dans 78,8 % des cas et comme « assez important/pas important » dans seulement 3,2 % de cas. Cela concorde avec ce qui a été proposé par Illouz (2012), qui affirme qu’outre l’aspect physique (capital sensualité), l’autre facteur clef pour attirer l’attention des gens est « l’affinité psychologique ». L’affinité psychologique peut se décrire comme la combinaison des préférences, des loisirs (hobbies), des intérêts et des attentes similaires parmi d’autres éléments.

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Sur les sites de rencontre, les goûts seraient le critère fondamental au moment de sélectionner le profil d’un autre utilisateur, mais il serait aussi un autre élément crucial pour établir une interaction en ligne. Le graphique 10 montre que les femmes donnent plus de valeur positive à cette caractéristique : 56,3 % pour la réponse « important/très important » contre 43,8 % pour les hommes pour la même réponse.

L’une des dernières caractéristiques choisies a été « profession » qui n’a été sélectionné qu’une fois (voir graphique 7). Le graphique 9 démontre que la profession a été considéré comme « important/très important » dans 45,9 % des cas, bien en dessous des autres réponses proposées. Le graphique 10f indique que ce sont les femmes qui donnent une importance majeure à cet attribut : 57,1 % le considèrent « important/très important » pour seulement 42,9 % des hommes.

Pour finir, la catégorie « revenu » n’a jamais été choisie pour répondre à la question : Quelle est la première chose qui attire votre attention lorsque vous regardez le profil d’une autre personne pour la première fois ? La faible valorisation de ce critère se constate dans le graphique 9, où le « revenu » est qualifié de « important/très important » dans seulement 23,4 % des cas, tandis que 38,3 % des interrogés y ont répondu par « indifférent » et « assez important/pas important ». De cette façon, comme dans le monde hors ligne, et comme l’indique Illouz (2009), sur les sites de rencontre le revenu des gens n’est pas une caractéristique à prendre en compte au moment d’établir une possible relation affective. De cette manière, dans l’amour virtuel, il semble que les personnes utilisent encore la théorie des « mondes hostiles » (Zelizer, 2009) pour justifier leurs critères de sélection de couple.

Néanmoins, la question suivante peut être posée : Pourquoi le revenu n’est pas considéré comme un critère de sélection par les utilisateurs des sites de rencontre comme l’est le niveau d’éducation alors que les deux éléments déterminent le niveau socioéconomique et la classe sociale des gens ? Cette question est particulièrement pertinente au Chili où « l’universalisation » de l’accès aux études supérieur est récente –ultérieure aux années 1980- et hautement inégale quant aux couches socioéconomiques (Scheele, 2015).

Comme il a déjà été mentionné, « revenu » et « niveau d’éducation » conduisent, dans l’imaginaire romantique moderne, à des conceptions divergentes dans le processus de sélection de couple. Tandis que le revenu des personnes est vu comme un critère de sélection de couple matérialiste,

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utilitariste et froid, totalement loin des sentiments ; le niveau d’éducation est associé aux caractéristiques individuelles qui sont loin de la logique utilitaire et de classe. Cela s’approche de caractéristiques individuelles de personnalité, comme par exemple : l’effort personnel, le surpassement, le dévouement, la valorisation de la connaissance, le raffinement des goûts, etc. Toutes ces caractéristiques sont très appréciées pour un futur partenaire, particulièrement la dernière.

Les goûts seront un élément clef dans le processus conversationnel (interaction) –en ligne et hors ligne- et c’est à travers ce processus que les interlocuteurs détermineront s’ils sont ou pas compatibles pour former un couple. Le niveau d’éducation sera un élément clef au moment de créer des affinités. Ci-dessous, dans les récits suivants, quelques utilisateurs sont déjà conscients de cela :

« Je me concentre sur les universitaires, notamment parce que…. Un technicien, il peut être électricien, en effet… mais de quoi on parlera ? Est-ce qu’on parlera d’éthique ? Tu vois ? » (Femme 50-59 ans).

« Bon, quelques fois j’ai vu par exemple, des nanas qui étaient vraiment canons, mais bonnes, très bonnes, mais tu vois elles viennent de terminer le lycée, elles font des travaux ménager chez elles, bah non ! » (Homme 40-49 ans).

En revanche, d’autres personnes interrogées ne seront pas si directs, mais ils discriminent aussi par niveau d’éducation :

« Ouais, je dois reconnaître que ça ne marche pas comme ça, ce n’est pas tellement important le sujet des études, mais il peut l’être en relation avec les goûts, ce qu’on fait ou ce qui est important pour quelqu’un. Je voyais si elles aimaient lire ou sortir ou faire quelque chose et tout cela commençait à m’attirer et voilà j’envoyais des messages, ce n’était pas quelque chose de visuel… belle… pas du tout… » (Homme 40-49 ans).

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D’après Illouz (2009 ; 2012), notre culture accepte la sélection rationnelle des personnes sur la base de qualités morales ou de personnalité, mais ce n’est pas le cas d’autres caractéristiques comme celles que nous considérons comme instrumentalisés, comme par exemple, les ressources économiques. Ainsi, le niveau d’éducation va avoir un double intéret. Il permet aux personnes de choisir un partenaire en se basant sur des prétendues caractéristiques « individuelles », comme les valeurs, les goûts et les intérêts. En assumant, comme l’imaginaire romantique l’a fait il y a des siècles, les spécificités « uniques » et « extraordinaires » de la personne aimée ; cela permet aux individus de sélectionner quelqu’un de socialement similaire, autrement dit, un semblable d’un point de vue social, culturel et économique allant ainsi dans le sens du

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