2. ANALYSE DES MÉTHODES DE LUTTE
2.2. Processus décisionnel visant le choix d'une méthode de lutte appropriée
2.2.2. Critères d'efficacité et de faisabilité à privilégier
Dans le contexte de la problématique des EEE, il est important de choisir des critères réalistes qui permettent de discriminer les méthodes de lutte selon leur efficacité et leur faisabilité. Le tableau 2.3 présente et décrit brièvement les quelques critères pouvant être utilisés à ces fins. La décision parfaite devrait normalement tous les considérer, mais certains d'entre eux ont davantage d'importance en ce qui concerne les contraintes liées à la lutte aux EEE. À ce propos, la section précédente, traitant des différentes méthodes disponibles, semble en fait ressortir quatre principaux qui doivent donc être considérés conjointement. Il s'agit de l'efficacité technique, du coût, de l'impact environnemental et de l'acceptabilité sociale. Bien qu'il pourrait y avoir plusieurs aspects à vérifier pour chacun des critères choisis, ils doivent tous être basés sur une seule variable pour permettre d'être évalué convenablement.
Premièrement, le critère de l'efficacité technique a été considéré comme étant le plus important en raison de l'énorme difficulté à entreprendre quelques actions efficaces que ce soit dans la lutte contre une EEE donnée. Ce critère possède donc le plus grand poids avec un pointage de 80 %. L'efficacité d'une méthode signifie qu'elle permet de limiter ou de réduire significativement les individus de l'espèce indésirable ciblée, et ce, dans la zone où les efforts sont effectués. Cet effet peut être interprété en fonction de cinq rangs échelonnés de manière à faire ressortir la moins bonne efficacité possible de la meilleure. Il s'agit respectivement de l'enlèvement de moins de 25 % de la quantité totale d'individus de la population de l'espèce visée dans la zone déterminée et de la réduction de plus de 90 % de cette espèce pour les mêmes conditions (tableau 2.4.).
Deuxièmement, le coût de la méthode utilisée possède une importance majeure dans la gestion de cette problématique puisque les ressources financières sont assurément limitées. En effet, l'utilisation d'une méthode efficace peut souvent être mise de côté en raison du
manque de fonds disponibles pour la réaliser convenablement. Tel que mentionné précédemment, il est souvent essentiel de réaliser une analyse coût-bénéfice avant d'entreprendre une méthode. Le pointage de ce critère a donc été évalué à 60 % pour tenir compte de cette réalité économique qui limite souvent les actions possibles. Ainsi, les intervalles de coût ont été évalués pour aller de 0 à 4 millions de dollars par année de sorte à favoriser une méthode moins dispendieuse (rang 5) et désavantager une méthode coûteuse (rang 1) (tableau 2.4.). Le montant maximal de 4 millions de dollars représente le montant total alloué par le budget fédéral de 2005 pour la lutte à toutes les espèces aquatiques du Canada.
Tableau 2.3 : Critères d'efficacité et de faisabilité disponibles pour l'évaluation de la situation des EEE (modifié de Gangbazo, 2004, p.71)
Type de critère Critère Description
Efficacité
Efficacité technique Solution la plus efficace permettant de
résoudre le problème
Coût/année Solution possédant le meilleur rapport
coût/efficacité annuel
Flexibilité à long terme Solution pouvant être modifiée facilement au fil du temps selon les nouvelles
conditions
Impact environnemental Solution pouvant provoquer de nouveaux
problèmes environnementaux Considérations éthiques Solution pouvant engendrer des problèmes
éthiques tels que des effets pervers sur les différents groupes sociaux retrouvés sur le territoire ou des contraintes de temps dans
sa mise en oeuvre
Faisabilité
Autorité légale Le gestionnaire possède l'autorité d'agir Approbations/permis Les approbations et permis nécessaires sont
disponibles
Sources de financement Des sources de financement sont disponibles à court et long terme Administration et personnel Le gestionnaire est identifié, disponible, a la
capacité d'effectuer le travail ou doit agrandir son équipe
Intégration avec des programmes apparentés Les solutions peuvent être intégrées aux autres projets existants
Acceptabilité sociale Solution acceptable pour l'ensemble de la
société (citoyens, élus, organisations)
Les impacts environnementaux de la méthode effectuée représentent un autre critère extrêmement important à prendre en considération dans le domaine de la lutte aux EEE. En effet, il est essentiel que cette lutte soit ciblée seulement qu'à l'espèce visée. Elle ne doit
discriminatoire. En effet, la façon dont les rangs sont répartis ne permet d'aucune façon de retenir une méthode affectant plus de 4 espèces de tout groupe d'organismes indigènes partageant le même habitat que l'EEE ciblée (tableau 2.4). Ceci permet donc d'assurer un maximum de protection à l'écosystème par la diminution du risque direct ou indirect possible. Dans ce cas-ci, la survie des espèces indigènes est utilisée en tant qu'indicateur de la qualité du milieu et nécessiterait donc un suivi continuel.
Finalement, l'acceptabilité sociale se doit d'être respectée afin que la méthode employée soit acceptée par les acteurs impliqués de près ou de loin dans l'utilisation du milieu naturel visé par la lutte. Cette acceptabilité est influencée par le niveau d'implication des acteurs, de leurs valeurs personnelles, ainsi que des impacts que peut avoir la mise en oeuvre de l'action sur leur situation. Ce dernier critère possède le poids le plus faible avec un pointage de 20 %, ce qui ne signifie pas pour autant qu'il est moins important. L'acceptabilité sociale peut se déterminer à l'aide de sondages présentant explicitement les avantages et les inconvénients de la méthode employée pour la situation donnée. Les rangs de ce critère sont séparés en échelons réguliers de 20 %. Une méthode acceptée par 80 à 100 % (rang 5) d'une population obtient un avantage sur la situation opposée, soit une méthode acceptée par moins de 20 % de la population (rang 1) (tableau 2.4).