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Outre les opérations ponctuelles sur les villes traditionnelles (Intervention sur médinas), dans le même temps, a été mise en place une organisation territoriale (ingénieurs du génie), qui a évolué quelque peu au cours d'un siècle, mais dont les principes sont restés permanents, qui consiste à l'élaboration de centres urbains (La ville Coloniale) et de villages de colonisation et un réseau de routes les reliant.37

Figure 51: Médinas et villes neuves, vers un espace ouvert Source : Marc COTE «L’Algérie où l’espace retourné»

1. La ville coloniale en Algérie

Le paysage urbain algérien est caractérisé par une mosaïque de tissus, typologies engendrées par des superpositions et des juxtapositions de productions urbaines diverses. Les plus déterminantes sont les établissements ottomans puis ceux de la colonisation française.

La structure des villes coloniales : Un modèle Européen exporté. Les nouvelles fondations coloniales étaient principalement composées d’un réseau de villes appelé communément « villes coloniales ». Ces dernières devaient suivre un modèle uniforme à l’image de ce qui se faisait en Europe dans la première moitié du XIXème siècle. Il se présente comme suit : "un échiquier de rues rectilignes, qui définissent une série d’îlots, presque toujours carrés. Au centre de la ville, en supprimant ou en réduisant quelques îlots, une place est ouverte sur laquelle donnent les édifices les plus importants : l’église, la mairie, les maisons des marchands et des colons les plus riches" 38 , telles sont les caractéristiques des tissus urbains créés par le génie militaire en Algérie. A cette occasion, Malverti rajoute « les centres villes coloniaux sont avant

tout des villes militaires, le service du génie militaire se préoccupe en période de loger les troupes, par la suite, le quartier civil est tracé »39.

37 Marc Côte, L’Algérie ou l’Espace retourné, 1992.

38 BOUSRI Nahed-eddine. Les phénomènes de transformation de tissu Colonial au niveau de centre-ville « souk

ahras »

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Figure 52: Le centre-ville de la région de Levy à Sétif en période coloniale Source : http://alger-roi.fr

Ces centres villes sont ainsi l’une des empreintes de l’urbanisme colonial sur les tissus anciens de beaucoup de villes. La ville coloniale s’est superposée à la ville traditionnelle en donnant « la ville sur la ville » à la suite de grands bouleversements spatiaux. Malgré la dualité des deux systèmes urbains, la ville résultante est devenue hybride et a fini par fonctionner en symbiose. Car l’organe greffé au sein de la médina a fait l’objet d’un rejet dans un premier temps (période coloniale et post-coloniale) où la métamorphose sur son propre espace était inadmissible, commençant à partir d'une conquête par les armes suivies de la conquête par l’urbanisme et l’architecture.

L'objectif final est de former une seule ville comprenant le quartier indigène et le quartier européen. La ville ancienne transformée est rapidement trop petite pour accueillir les établissements militaires et les immeubles des Européens, un quartier nouveau est dessiné à l'extérieur de la ville.40

2. Les villages de colonisation

Les acteurs de la colonisation française s'étaient vite attelés à acquérir des terres, après plusieurs essais (fermes isolées, camps et postes avancés), l'instrument le plus abouti fut consacré par le général Bugeaud : c'est à l'aide du binôme village/périmètre de colonisation que les terres les plus importantes ont été occupées et surtout « façonnées », les structures en place ont été littéralement effacées41, remplacées par un damier et une géométrie spécifique.

Afin d'avoir une idée sur l'ampleur de ces territoires colonisés, Marc Côte relève qu'au total «

sur 200 agglomérations de plus de 7 500 habitants que compte aujourd'hui le pays (en 1993) que l'on peut qualifier d'urbaines, 32 sont les héritières de médinas, 122 sont dans le droit fil

40 Figures de l'orientalisme en architecture , Xavier Malverti

41 Marc Côte nous parle d'un renversement de la structure spatiale et sociale « comme on renverse un gant ». dans

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des villes et villages de colonisation créés ex nihilo42 , le reste correspond à des ksours sahariens...

En outre, entre 1848 et 1928, les services de colonisation officielle ont créé 631 périmètres de colonisation. Ces villages sont très typés « aux rues orthogonales, aux maisons basses. »43. La

majorité de ces villages, sont devenus les centres actuels pour beaucoup de villes. « 475 villages

de colonisation bâtis de la sorte au cours de presque un siècle, constituent l’ossature du réseau actuel des centres agglomérés dans les compagnes,»44. L'essentiel des villes actuelles sont ainsi

« façonnées » par ce qu'on pourra appeler le quadrillage et la géométrisation du territoire.

Figure 53: Village et périmètre de colonisation d'El Arrouche ( Vallée du Safsaf 1844), Plan rigide,

enfermé dans des fortifications Source : Marc COTE «L’Algérie où l’espace retourné»

Ces villages reprennent à une échelle réduite les mêmes principes de la ville, plantés au milieu de leur périmètre, ils sont très typiques des mêmes règles : les deux axes principaux orthogonaux, une centralité au croisement des axes accueillant les équipements administratifs, économiques (dock silo), culturels et cultuels (clocher de l'église).

42Ex nihilo est une expression latine signifiant « à partir de rien ». Elle est souvent utilisée en conjonction avec un terme exprimant une idée de création, comme dans « création ex nihilo », signifiant littéralement « création à partir de rien », par opposition à une « creatio ex materia », création à partir d'un matériau ou d'un substrat préexistant. 43 Marc Côte. 1992, l'Algérie ou l'espace retourné (p. 128)

74 Si la période de la colonisation triomphante a été celle des villages destinés aux colons, les deux périodes extrêmes ont été marquées par des entreprises de regroupement de la population algérienne. Dans le contexte de la guerre de conquête coloniale (1830-1870), comme dans celui de la guerre de libération (1954-1962), il est apparu indispensable aux militaires français de contrôler la population.45

Figure 54: Les Villages de Colonisation (1830-1847) Source : Wikipédia (Centre de colonisation -Algérie)

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