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Le CPRDFP et ses conventions annuelles : un dispositif à conforter

La loi du 24 novembre 200986 a substitué au plan régional de développement des formations professionnelles instauré par la loi quinquennale du 20 décembre 199387, le contrat de plan régional de développement des formations professionnelles (CPRDFP). Au-delà de l’innovation terminologique, cette nouvelle dénomination veut souligner la volonté du législateur de faire de ce document un cadre stratégique permettant une mise en cohérence des stratégies de formation portée par les différents partenaires au niveau régional, qu’elles concernent la voie scolaire, ou la formation continue, les publics jeunes ou les adultes.

Aux termes de l’article L214-13 du code de l’éducation « ce contrat de plan détermine les objectifs communs aux différents acteurs sur le territoire régional, notamment en termes de filières de formation professionnelle initiale et continue, sur la base d'une analyse des besoins en termes d'emplois et de compétences par bassin d'emploi. Il porte sur l'ensemble du territoire régional et peut être décliné par bassin d'emploi. »

Il est élaboré par le conseil régional, dans le cadre du CCREFP, sur la base des documents d’orientation qu’il produit, ainsi que ceux de l’État et les partenaires sociaux. Une concertation doit être organisée avec les collectivités territoriales concernées, Pôle emploi et des représentants d’organismes de formation professionnelle dont l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

La mission IGAS relative à l’évaluation du pilotage de la formation professionnelle par les conseils régionaux relevait dans son rapport remis en 2012, que la démarche de négociation des CPRDFP mise en place à partir de 2010 avait « à l’évidence dynamisé le partenariat et la volonté de travailler ensemble »88 autour des questions de formation professionnelle et d’apprentissage.

L’élaboration des CPRDFP avait ainsi conduit à une implication renouvelée des différents partenaires (notamment Etat et partenaires sociaux) au cours des différentes étapes : diagnostic, concertation avec les branches, élaboration de fiches actions, … Mais elle notait également que l’impact de ce nouveau cadre de travail pour les partenaires régionaux restait à évaluer sur la durée.

De fait, l’opérationnalité des CPRDFP réside principalement dans ses conventions annuelles d'application prévues à l’article L.214-13 du code de l’éducation. Ces conventions doivent préciser

« la programmation et les financements des actions. Elles sont signées par le président du conseil régional, le représentant de l'Etat dans la région ainsi que, selon leur champ d'application, par les divers acteurs concernés. »

Ce sont ces conventions qui modèlent chaque année la carte des formations et permettent la mise en œuvre des priorités du CPRDFP et la mise en cohérence des objectifs de développement des différentes voies de formation.

86 Loi n°2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.

87 Loi relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle.

88 Rapport IGAS n°RM-2012-080P.

4.2.2 Les conventions annuelles du CPRDFP : un exercice délicat de régulation assez faiblement outillé

4.2.2.1 Un exercice qui exige une concertation approfondie

Dans la plupart des régions cet exercice s’avère délicat et « sous tension ». Il cristallise des enjeux institutionnels, financiers et d’équilibres territoriaux, au cœur de négociations entre services académiques, Direccte, conseils régionaux, partenaires sociaux du niveau interprofessionnel, partenaires sociaux des branches, OPCA, chambres consulaires.

Les enjeux se concentrent principalement pour ce qui concerne l’apprentissage sur la concurrence qui peut exister entre voie scolaire et apprentissage et sur les arbitrages à opérer entre les demandes d’ouverture de section par apprentissage.

En charge de la construction et de la maintenance des lycées et de la politique régionale de l’apprentissage, les conseils régionaux ont, pour beaucoup d’entre eux, développé une stratégie visant d’une part une mise en cohérence de l’offre de formation (voie scolaire, apprentissage, contrat de professionnalisation), au plan sectoriel et territorial, et d’autre part une optimisation des moyens en appuyant le développement de l’apprentissage sur les équipements des lycées professionnels, par le soutien au développement de CFA académiques et/ ou d’UFA de CFA de branche au sein des lycées.

Cette stratégie se heurte à de nombreux obstacles liés au cloisonnement des logiques de pilotage des différentes voies de formation.

Ainsi, de nombreux conseils régionaux relèvent que l’offre sous statut scolaire pilotée par les recteurs est souvent plus sous tendue par une logique de moyens que pilotée par les besoins de l’économie locale ; dans certains cas sont aussi relevés des transferts de charge par des fermetures de classe sous statut scolaire parallèlement à une demande d’ouverture sous contrat d’apprentissage.

Les services rectoraux regrettent quant à eux la sensibilité des conseils régionaux aux

« lobbys » des branches et chambres consulaires et l’absence de critères transparents présidant aux décisions d’ouverture ou de fermeture de sections par apprentissage.

Les partenaires sociaux soulignent, de leur côté, la lourdeur des procédures d’élaboration des conventions annuelles et la faible marge de manœuvre qui leur est permise pour faire évoluer les pré-arbitrages qui leur sont proposés lors des phases de consultation.

La loi du 8 juillet 201389, tirant la leçon des difficultés parfois rencontrées dans les relations entre les autorités académiques et les conseils régionaux, a renforcé les modalités de concertation qui doivent présider à l’adoption de la convention annuelle. Elles doivent ainsi désormais procéder au titre de l’article L.214-13-1 du code de l’éducation « au classement par ordre de priorité des ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale, en fonction des moyens disponibles. Chaque année, après accord du recteur, la région arrête la carte régionale des formations professionnelles initiales, conformément aux choix retenus par la convention » précitée,

« et aux décisions d'ouverture et de fermeture de formations par l'apprentissage qu'elle aura prises. […] Les autorités académiques mettent en œuvre les ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale sous statut scolaire en fonction des moyens disponibles et conformément au classement par ordre de priorité mentionné au deuxième alinéa du présent article. »

89 Loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'École de la République.

4.2.2.2 Un exercice qui doit se fonder sur une vision prospective de l’emploi et des qualifications

Au-delà de la nécessaire amélioration des divers processus de concertation, la mission insiste sur la perfectibilité des travaux relatifs à l’évolution de l’emploi et des compétences qui doivent guider les décisions relatifs à la carte des formations.

Elle souligne de ce point de vue l’intérêt de la démarche conduite en Rhône-Alpes visant à la construction partagée d’une cartographie de l’offre existante par spécialité de diplôme et par voie de formation initiale scolaire, apprentissage, aux niveaux V et IV, et comprenant les effectifs, les places de formation et les taux d’insertion dans l’emploi90.

Elle pointe également la nécessité de développer des démarches territoriales concertées avec les branches professionnelles en s’appuyant sur les observatoires des branches, et des outils de partenariat emploi formation et de gouvernance rénovés91.

Elle relève à cet égard l’intérêt des dispositions de l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013 relatif à la formation professionnelle qui prévoit notamment le développement de démarches de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) territoriales, et une déclinaison régionale plus effective des travaux des observatoires de branche afin d’enrichir les données territoriales sur l’évolution des emplois et des qualifications.

La mission recommande que les OREF soient clairement positionnés sur l’appui à la construction de la carte des formations, et dotés des moyens nécessaires à cet effet. Leur essence partenariale92 doit leur permettre de créer les conditions d’un exercice objectif, partagé et consensuel, croisant les données d’emploi et de formation et les analyses des différents acteurs.

Elle recommande également une meilleure prise en compte dans les travaux des OREF, outre des travaux des observatoires de branches, ceux de l’observatoire des emplois de la fonction publique territoriale et de l’observatoire des métiers de la fonction publique hospitalière.

Recommandation n°21 : Veiller à conforter dans les prochains contrats de plan les moyens des OREF et les positionner explicitement sur un appui à la préparation de la carte des formations.

5 L

A FONCTION PUBLIQUE

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UN RESERVOIR D

OFFRES ENCORE INEXPLOITEES

Les notions d’apprentissage et de fonction publique sont rarement rapprochées ; en effet, l’apprentissage est très largement, dans l’imaginaire collectif, associé aux métiers physiques et manuels alors que les métiers de la fonction publique de manière très réductrice sont souvent considérés comme des « métiers de bureau », en particulier dans la fonction publique d’Etat..

90 Il est dommage que le conseil régional n’ait pu obtenir des OPCA une information sur les contrats de professionnalisation enregistrés dans la région. Il apparaît souhaitable que cette information soit produite en routine en direction des services de l’Etat et des conseils régionaux.

91 Voir infra 3ème partie

92 Cofinancés par l’Etat et les conseils régionaux dans le cadre des contrats de planles OREF sont de plus en plus adossés à des structures juridiques ad’hoc (souvent des GIP) associant les partenaires sociaux. L’accord interprofessionnel du 14 décembre 2013 demande que la présence des partenaires sociaux au sein des instances d’administration des CARIF-OREF soit généralisée de façon à favoriser l’articulation entre les politiques sectorielles (OPMQC) et les politiques territoriales.

Ainsi, le rapport d’information de l’Assemblée nationale93, rédigé par le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur « l’évaluation des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes »94, consacre 25 pages à l’apprentissage : à aucun moment, il n’évoque l’apprentissage dans la fonction publique.

Dans la réalité, les métiers offerts par la fonction publique sont extrêmement variés et peuvent aisément servir de terrain d’apprentissage.

C’est la loi n° 92-675 du 17 juillet 1992, qui a ouvert l’apprentissage au secteur public. Le chapitre II de cette loi est intitulé « expérimentation de l’apprentissage dans le secteur public industriel et commercial. »95

Son article 18 indique que les personnes morales de droit public dont le personnel ne relève pas du droit privé peuvent conclure des contrats d’apprentissage. L’article 19 précise que ces contrats sont de droit privé. L’article 20, enfin, organise le fonctionnement de l’apprentissage en collectivité publique : avis du comité technique, rapport annuel, prise en charge par les employeurs publics de la formation dans les CFA, conditions salariales et sociales.

Il convient de relever qu’à ce jour aucun cadre définitif n’a été donné à l’apprentissage dans le secteur public, son développement reste toujours placé dans le cadre expérimental de la loi du 17 juillet 1992 précité. La mission considère que, pour mieux faire apparaître la place des employeurs publics dans l’apprentissage, il est important et symbolique de lui donner une assise juridique pérenne. A cet effet, elle propose d’intégrer dans le code de la fonction publique la possibilité pour les employeurs publics de recourir à l’apprentissage.

Recommandation n°22 : Intégrer dans le code de la fonction publique une disposition législative indiquant que les personnes morales de droit public peuvent conclure des contrats d’apprentissage.

5.1 Les freins au développement de l’apprentissage dans les trois