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1.2 Introduction aux galaxies

1.2.2 Courbes de rotation des galaxies

Comme nous l’avons mentionné précédemment, les disques des galaxies spirales sont animés par un mouvement de rotation ce qui signifie que les étoiles et le gaz orbitent de manière quasi circulaire et en général les mouvements de dispersion sont négligeables comparée à la vitesse de rotation. Dans cette section, nous allons traiter des principales caractéristiques des courbes de ro-tation (RCs) des galaxies spirales qui sont une propriété fondamentale de ce type de galaxies et permettent de mieux comprendre leur nature.

La RC d’une galaxie est la vitesse de rotation des étoiles et du gaz au sein de celle-ci en fonction de la distance par rapport au centre galactique. La mesure de cette quantité a été et est encore l’un

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Figure 1.10: Évolution de la morphologie de galaxies observées dans leHubble Ultra-Deep Field. Du haut vers le bas sont présentées différents types de galaxies. Les quatres premières lignes montrent de galaxies irrégulières tandis que les deux dernières rangées montrent respectivement des spirales et des elliptique. Le redshift est indiqué en haut de chaque image et augmente de lagauche vers la droite. Figure deElmegreen et al.(2007).

des meilleurs outils pour tracer la distribution de masse des galaxies. Même si la "masse manquante" fut originellement détectée dans les amas de galaxies parZwicky(1933), l’étude des RCs des galaxies a fourni de fortes évidences pour l’existence de la matière noire. En effet, dès les premières études des RCs (Freeman,1970;Rubin et al.,1980;Bosma,1981;Persic & Salucci,1988;Broeils,1992), la forme non compatible avec la prédiction Képlérienne de la distribution de masse lumineuse (étoiles + gaz) de celles-ci montra déjà que la masse dynamique qui en dérivait était beaucoup trop impor-tante comparée à la masse lumineuse. Au lieu d’observer une décroissance de la vitesse de rotation à grand rayon, un plateau de vitesse était systématiquement mis en évidence avec des vitesses at-teignant au maximum≈ 300 km s−1. Cette inconsistance suggérait alors qu’une large fraction des galaxies était composée de matière noire. Il a été montré que la forme et l’amplitude de la RC sont étroitement reliées au potentiel gravitationnel de la galaxie et peuvent donc être utilisées pour ob-tenir des informations sur chacune des composantes de la galaxie (Noordermeer et al.,2007).

Tandis que le maximum de la vitesse de rotation est relié à la masse dynamique de la galaxie, la forme interne de la RC fournit des informations sur le gradient du potentiel. Pour des galaxies disques (spirales), la RC est généralement décrite par une partie linéaire croissante (∼ du type

rotation solide) et une partie plateau (e.g.Bosma,1981;Begeman,1989;Swaters et al.,2009). Chez la plupart des galaxies, la contribution du disque peut ainsi suffire à expliquer les propriétés des RCs observées jusqu’à∼ 2 rayons caractéristiques du disque (Kalnajs,1983;Palunas & Williams,

2000). Pour des galaxies dominées par un bulbe, la RC présente cette fois une augmentation très rapide à faible rayon, souvent suivit par un léger déclin, et une partie plateau à plus grand rayon (e.g.Casertano & van Gorkom,1991;Noordermeer et al.,2007).

La relation entre les propriétés optiques des galaxies et leur RCs a été le fruit de nombreuses études au cours des dernières décennies (e.g.Rubin et al.,1985;Corradi & Capaccioli,1990;Persic & Salucci,1991). Un grand nombre d’auteurs ont notamment souligné que la forme du profil de lumi-nosité des galaxies et de leur RCs étaient étroitement liées (Kent,1987;Casertano & van Gorkom,

1991;Broeils,1992;Sancisi,2004;Swaters et al.,2009). Ceci montra ainsi la connexion étroite qui existe entre la densité de masse totale et lumineuse.

Pour mesurer la RC d’une galaxie, nous pouvons utiliser le décalage Doppler des raies d’émis-sion du gaz de la galaxie (Bertin & Lin,1996). Du fait que la galaxie est en rotation, un côté de celle-ci a tendance à s’approcher de l’observateur tandis que l’autre s’éloigne. Cela résulte en un changement de la longueur d’onde émise par la galaxie et il est possible d’en déduire directement la vitesse de rotation (moyennant la connaissance de l’inclinaison). De telles mesures ont été tra-ditionnellement réalisées avec des observations dans le domaine radio, principalement en utilisant la raie d’émission de la transition hyperfine à 21 cm de l’atome d’hydrogène (raie nommée HI). Le fait de tracer cette raie HI a permis d’étudier la plupart du contenu du gaz de la galaxie, qui peut s’étendre bien au-delà de son rayon visible (ou optique5) (Bosma,1981;Allen et al.,1978), tandis que la distribution spatiale du HI est souvent faible voire absente dans les régions centrales de la galaxie. Cependant, les observations radio HI souffrent d’une faible résolution spatiale en compa-raison avec les observations optiques. Les observations radio utilisant la raie CO ont également été utilisées pour tracer le gaz moléculaire. Aujourd’hui, les observations CO fournissent de meilleures résolutions angulaires et spectrales (de 1 à quelques km s−1), mais dans des champs très restreints.

En comparaison, les observations des raies d’émission dans le visible ou proche infrarouge telle que la raieHα, [O iii], [N ii] permettent d’avoir des données à des résolutions angulaires de l’ordre de la seconde d’arc. La raieHα est généralement la raie d’émission la plus brillante dans le visible et proche infrarouge due à sa forte abondance dans l’Univers. Au sein des galaxies spirales, cette raie retrace le gaz ionisé dans les régions HII autour d’étoiles jeunes et massives. Au cours du siècle der-nier, la plupart des observations de cette raie se sont faites avec des spectrographes à fente longue (voirErroz-Ferrer et al.(2015) pour une revue de ces études). Cependant, depuis les deux dernières décennies, la spectroscopie 3D regroupant les observations avec les IF U (Integral Field Unit) et les interféromètres Fabry-Perot (FP) ont permis de cartographier à de bien meilleures résolutions les champs de vitesse des galaxies. Les données notamment obtenues avec les IF U ont un énorme poten-tiel pour contraindre à la fois les propriétés morphologiques et cinématiques des galaxies. Comme l’illustre la figure1.11, les données issues des IF U sont particulièrement efficaces pour contraindre la dynamique des disques des galaxies lorsque celles-ci sont combinées à des données profondes en photométrie et des spectres HI.

Ces deux traceurs (HI etHα) restent en général assez complémentaires puisque les parties

cen-5. La rayon optique se définit comme l’isophote qui contient 83% du flux dans la bande photométriqueI ; cela cor-respond en moyenne à≈ 3.2rdoùrdest la taille caractéristique du disque de la galaxie qui suit généralement un profil de luminosité exponentiel.

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Figure 1.11: Illustration des différentes parties de la courbe de rotation (rouge), de la dispersion des vitesses (rouge), du profil de luminosité d’un bulbe et d’un disque étendu (jaune) pour une galaxie massive typique. Cette figure nous montre comment la combinaison de données à différentes longueurs d’onde permet de contraindre de façon optimale la dynamique et la morphologie des galaxies. Figure deTaranu et al.(2017).

trales sont bien observées avec le gazHα (ou [O iii]) tandis que le HI sonde plutôt les parties ex-ternes de la galaxie. De nombreuses études combinent ainsi les mesures de raies Hα et HI pour obtenir des RCs couvrant plusieurs rayons caractéristiques de la galaxie (Lelli et al.,2013; Martins-son et al.,2013).

La forme des RCs des galaxies spirales montre que la vitesse de rotation totale d’une galaxie se décompose selon la vitesse de rotation de chacune de ses composants (Martinsson et al.,2013;

Erroz-Ferrer et al.,2016;Korsaga et al.,2018). On peut alors écrire d’une manière générale :

vrot =qv2

disque+ v2

bulbe+ v2

halo (1.25)

oùvdisque,vbulbeetvhalosont respectivement les vitesses de rotation circulaire du disque, du bulbe et du halo de matière noire. Nous faisons remarquer que les deux premiers termes (disque + éven-tuellement le bulbe) sont les termes prédominants à faible rayon ( jusqu’au rayon optique) et qu’ils suffisent à décrire les courbes de rotations observées dans l’optique (ou proche infrarouge) tandis que le terme de halo domine à plus grand rayon mais nécessite des observations radio HI.

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