• Aucun résultat trouvé

L’utilisation d’arylstannanes comme agent de couplage présente plusieurs avantages. Ces composés sont souvent disponibles commercialement ou facilement synthétisables. Ils sont, de plus, peu sensibles à l’air ou à l’humidité et tolèrent un large spectre de groupes fonctionnels. Cependant, la N-arylation par les arylstannanes en présence d’acétate de cuivre aboutit à des rendements modestes.162 La transmétallation d’un groupement phényle sur le cuivre ne serait pas effective. En s’inspirant des travaux sur les dérivés silylés dans la réaction de Stille, Lam et coll.163 ont introduit une source de fluor dans le milieu réactionnel pour former un stannane hypervalent qui favoriserait l’étape de transmétallation, car comme le silicium, l’étain est fluorophile.164 Le TBAF, comme source fluorée, semble apporter les meilleurs résultats.

Cette réaction montre une grande réactivité avec des substrats variés, anilines, amides, hétérocycles azotés, à température ambiante (Schéma 62).

Schéma 62 : N-arylation par le triméthylphénylstannane

Toutefois, comme les dérivés du plomb, les stannanes présentent une forte toxicité ce qui peut limiter leur champ d’application.

162 P. Y. S. Lam, C. G. Clark, S. Saubern, J. Adams, K. Averill, D. M. T. Chan, A. P. Combs, Synlett 2000, 674-676.

163 P. Y. S. Lam, G. Vincent, D. Bonne, C. G. Clark Tetrahedron Lett. 2002, 43, 3091-3094

62 En 1998, Chan,154 Lam155 et Evans,165 trois groupes distincts publient simultanément leurs travaux concernant la formation de liaisons C-N et C-O par réaction entre un acide boronique et une source azotée, ou oxygénée. Les conditions décrites par les trois groupes sont quasiment identiques. La source azotée ou oxygénée (1 équivalent), l’acide arylboronique (2-3 équivalents), l’acétate de cuivre (1-2 équivalents), la base (NEt3 ou pyridine, 2-3 équivalents) sont mis en solution dans le dichlorométhane, le milieu réactionnel est agité à température ambiante pendant 24 à 48 heures (Schéma 63). Ces conditions relativement douces sont ainsi applicables à un large éventail de composés.

Schéma 63 : N-arylation un acide boronique dans les conditions de Chan-Lam

L’efficacité de la base varie selon les substrats étudiés. En effet, la triéthylamine sera plus performante pour les systèmes de type aniline, tandis que la pyridine sera privilégiée pour l’arylation de cycles aromatiques azotés. Cependant, les deux bases étudiées sont substrats dépendants notamment avec les imides, urées, amides et autres sources azotées.

Dans le cas de l’arylation de phénol, Evans165 met en réaction du 4-tert-butylphénol et de l’acide phénylboronique. Une analyse GC-MS du milieu réactionnel met en évidence la formation de phénol et d’éther de diphényle. Ces composés sont des sous-produits obtenus par réaction avec l’eau. Leur formation en condition anhydre laisse suggérer que l’eau est produite in situ lors de la formation de la triphénylboroxine 230 (Schéma 64).165 L’utilisation de tamis moléculaire 4Å permet d’annihiler la formation de phénol et d’éther de diphényle, les rendements sont ainsi améliorés. La présence d’oxygène est également bénéfique à la réaction. Toutefois, une atmosphère d’oxygène pur n’améliore pas les résultats.

Schéma 64 : O-arylation de l‟eau

63 l’utilisation de [Cu(OH).TMEDA]2Cl2. La réaction se déroule à température ambiante sous atmosphère d’oxygène dans le dichlorométhane. L’oxygène conduit à l’oxydation du CuII en CuIII et facilite ainsi l’élimination réductrice. Néanmoins ces conditions sont limitées à l’arylation d’imidazoles. Batey et coll.168 utilisent du Cu(OAc)2 hydraté comme catalyseur sous atmosphère d’oxygène et en présence de tamis moléculaire. L’arylation d’amines secondaires et primaires est possible dans ces conditions. Ils mettent en avant l’utilisation des sels de trifluoroborates de potassium comme agent arylant sans incidence sur les rendements. En 2004, Xie et coll.169 décrivent un système catalytique de N-arylation à base de Cu(OAc)2 hydraté, ou du CuCl, à reflux dans le méthanol. Sans surprise, l’augmentation de la température permet d’accélérer la vitesse de réaction. Les temps de réactions sont alors compris entre 10 minutes et 3 heures, au lieu de 24 à 48 heures dans les conditions initiales de Chan et Lam. Le méthanol permet de solvater les sels de cuivre et/ou de générer in situ l’ester phénylboronique de méthanol. Snapper et Hoveyda170 ont observé la formation d’ester boronique lorsque le méthanol est utilisé comme additif. De plus, Lam et coll.171 ont rapporté que les esters boroniques présentaient une réactivité similaire aux acides boroniques pour la

O- et N-arylation. Dans ces conditions, Xie169 précise que la présence de triéthylamine dans le milieu réactionnel inhibe la conversion de l’amine à aryler, la toluidine.

La chimiosélectivité de cette réaction a été étudiée par Lam.172 En introduisant une quantité égale de 4-tert-butylaniline et de 3,5-di-tert-butylphénol, Lam montre que dans les conditions classiques, Cu(OAc)2-NEt3, la N-arylation, conduisant au produit 235, est environ 9 fois plus rapide que la O-arylation, menant au composé 236 (Schéma 65). Lors de cette étude, les deux substrats utilisés ne comportent pas les mêmes substituants.

166 J. P. Collman, M. Zhong, Org. Lett. 2000, 2, 1233-1236.

167 J. P. Collman, M. Zhong, C. Zhang, S. Costanzo, J. Org. Chem. 2001, 66, 7892-7897

168 T. D. Quach, R. A. Batey, Org. Lett. 2003 5, 4397-4400.

169 J.-B. Lan, G.-L. Zhang, X.-Q. Yu, J.-S.You, L. Chen, M. Yan, R.-G. Xie, Synlett 2004, 6, 1095-1097.

170 H. Deng, J.-K. Jung, T. Liu, K. W. Kuntz, M. L. Snapper, A. H. Hoveyda, J. Am. Chem. Soc. 2003, 125, 9032-9034.

171 D. M. T. Chan, K. L. Monaco,R. Li,D. Bonne,C. G. Clark,P. Y. S. Lam, Tetrahedron Lett. 2003, 44, 3863-3865.

64

Schéma 65 : étude de la chimiosélectivité de la réaction de Chan-Lam

Inversement, Cherney173 observe dans la synthèse de la molécule 239 que l’arylation du phénol est favorisée vis-à-vis de l’aniline secondaire encombrée. Le produit de N-arylation ne dépasse pas 5% de rendement lorsqu’il est formé, ce qui montre que cette réaction est sensible à l’encombrement stérique (Schéma 66). Toutefois, différents exemples de compétition entre la O-arylation et la N-arylation mettent en évidence que celles-ci dépendent fortement du substrat étudié.174

Schéma 66 : compétition entre O- et N- arylation