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C) Stratégies employées visant à améliorer la compréhension et l’expression

2.3. La cotation

2.3.1. Choix et mise en place de la cotation

Trouver un système de cotation qui soit à la fois simple, facile à s'approprier et précis ne fut pas simple. Pour ce faire, nous avions initialement opté pour des cotations différentes pour chaque item pour une précision maximale. Nous avons, dans un second temps, homogénéisé le système de cotation qui permette l'obtention d'un profil de communication à la suite de l'évaluation. Pour ce faire, nous avons alors simplifié et harmonisé la cotation. Malgré la volonté d'obtenir un système de cotation homogène, il n'a pas été possible de coter toutes les parties de l'échelle de manière identique. En effet, nous nous sommes heurtées au problème de la cotation d'informations qualitatives et quantitatives dans une même échelle.

Dans la partie destinée à l'analyse des facteurs explicatifs des troubles de la communication, la cotation se fait de 0 à 3 (0 pour l'absence d'atteinte et 3 pour une

atteinte sévère). Il nous a été suggéré d'inverser cette cotation pour plus de cohérence avec le reste de l'outil dans lequel 3 points sont attribués pour un comportement normal et 0 pour un comportement pathologique. Pour autant, nous avons choisi de garder la première cotation après discussion avec d'autres cliniciens. Ce choix s'explique tout d'abord par le fait que la partie « analyse des facteurs explicatifs des troubles de la communication » n'entre pas dans le score total de l'évaluation de la communication. D'autre part, il nous a semblé plus logique de révéler l'absence de trouble par un zéro et la sévérité de l'atteinte par un chiffre élevé.

Les passations avec les soignants ont révélé que plusieurs cotations pouvaient correspondre aux capacités actuelles du patient. Prenons l'exemple d'un échange avec un soignant au sujet des « réactions gestuelles ou posturales ». Ce dernier nous a répondu observer chez le patient, à la fois des réactions gestuelles automatiques (0 point) et des gestes oui/non fiables de la tête (1 point). Face à la réalité du terrain, nous nous sommes ainsi accordées pour cocher toutes les cases qui correspondent à ce que l’on observe, et de ne retenir pour la cotation que la note la plus élevée, révélatrice de ce que le patient peut faire de mieux.

A plusieurs reprises des soignants nous ont répondu avoir observé un des comportements de communication évalués dans l'échelle, mais très rarement. Il a alors été indispensable de trouver un moyen de faire figurer la reproductibilité des réponses dans la cotation de l'échelle, en veillant à ne pas complexifier la cotation et à garder une bonne cohérence entre les items. La solution trouvée fut de séparer l'item de cotation « en réponse » en deux items distincts plus précis. Le premier item de cotation« en réponse rarement », coté 1 point traduit la présence d'un comportement de communication fluctuant, tandis que le second « en réponse toujours ou presque », coté 2 points, indique la présence de comportements reproductibles.

2.3.2. L'aspect subjectif des résultats

La plus grande critique que nous pouvons apporter à cet outil concerne l'interprétation des actes communicationnels chez les patients en phase d'éveil de coma en général et plus particulièrement chez les patients en état végétatif ou pauci- relationnel. Comment savoir si l'acte de communication observé est bien réel et intentionnel et non purement réflexe et involontaire? Par exemple, Mme R. ouvre

parfois les yeux quand une personne entre dans sa chambre ; est-ce une réaction au bruit ou la preuve d'une conscience fugace de son environnement ? Les propos de Laureys et al. (2002) peuvent en partie répondre à cette interrogation. En effet, ces derniers expliquent que les patients en état végétatif conservent leurs réflexes et peuvent être réveillés par des stimuli douloureux ou sonores. Lorsque ces malades semblent éveillés, leurs yeux bougent, ils déglutissent, grimacent, ils peuvent sembler ou encore gémir, mais sans raison et sans relation avec une stimulation qui aurait pu provoquer ces réactions.

Que penser également d'un patient en état végétatif/pauci-relationnel qui grimace seul dans sa chambre? A quelques reprises, l'item « douleurs » a été source de désaccords entre les soignants. Pour un même patient, il est arrivé qu'un soignant nous réponde que le patient communiquait spontanément ses douleurs (grimaces, gémissements) (coté 3 points) et qu'un autre nous informe que ce même malade ne communiquait pas ses douleurs (coté 0 point) puisque, seul dans sa chambre, le patient continuait à grimacer. L'un des aspects de la communication définit par Harding (1983) cité par Nader-Grobois (2006) est la communication intentionnelle. Elle détermine la capacité des partenaires à utiliser sciemment leurs comportements comme moyen de signaler quelque chose à l'autre. Dans l'exemple cité ci-dessus, cet aspect fondamental de la communication est absent: lorsqu'il grimace seul dans sa chambre, le patient ne cherche pas à transmettre une information à l'autre. Nous pensons alors que seule une observation attentive et prolongée ainsi que la reproduction de l'évaluation à des intervalles de temps réguliers pourraient permettre une éventuelle interprétation des actes communicationnels de ces patients.

Bien que cet outil soit en partie quantitatif et permette l'obtention d'un score, l'évaluation qualitative ne doit pas être négligée au risque d'obtenir une évaluation faussée. En effet, les résultats quantitatifs pris isolément sont un mauvais reflet de la réalité clinique. En d'autres termes, deux patients peuvent obtenir une note similaire à l'échelle mais posséder des aptitudes communicationnelles différentes. C'est le cas par exemple, de M. A. en état pauci-relationnel et de M. S. en phase d'éveil de coma et très apathique. Ils obtiennent respectivement un score total de 4/44 et 6/44 lors de la première évaluation. Si nous nous limitons aux scores bruts, ces derniers révèlent de sévères troubles de la communication. Nous relevons chez M. A. uniquement des comportements de communication fluctuants présents sur stimulation. Il ne

communique sur aucun thème. L'étude de son dossier médical révèle toutefois un bon niveau de conscience (WHIM à 60) au jour de l'évaluation. L'analyse qualitative nous informe sur le fait que ce patient agit seul (boit, se couvre, participe à sa toilette...), sans jamais communiquer, ce qui explique en partie la faiblesse de la note finale. L'apathie et l'hypospontanéité expliquent également l'absence de gestes et de mimiques afin de compenser ses troubles expressifs. En le stimulant fortement, des échanges sont tout de même possibles. Le profil communicationnel de M. A. est différent. Ce dernier n'obtient qu'1 point pour le contact visuel rare sur stimulation et 3 points pour l'expression spontanée des douleurs. Contrairement à M. S., M. A. possède des capacités communicationnelles qui sont en réalité bien moindres. Cinq semaines plus tard, l'évaluation des deux patients montre une absence progrès pour M. A. mais une évolution de la communication de M. S. favorable et rapide.