Chapitre 2. Mesures géophysiques appliquées au karst
2.1. Tomographie de Résistivité Electrique (TRE)
2.1.3. Correction de la température
Comme rappelé dans la PARTIE I.2.1.1, la résistivité électrique dépend de plusieurs paramètres
intrinsèques au milieu. Des paramètres extérieurs influent également sur la mesure de résistivité
électrique, notamment la température (Grolier et al., 1991). Les erreurs de mesure dues au matériel
ou à l’opérateur peuvent être négligées car aléatoires dans le temps (on considère que l’on a une
erreur de mesure, pouvant être assimilée à une gaussienne). Les mesures de TRE effectuées au cours
de cette thèse ont été faites dans des conditions de température variables, liées d’une part à la
profondeur d’investigation variable, et d’autre part, liées aux variations saisonnières. Il est donc
nécessaire de corriger les mesures de l’effet de température pour les différents blocs de résistivité
constituant un modèle de résistivité. Les travaux de Campbell et al. (1948) ont posé les bases de ce
type de correction à partir des travaux de Whitney et Briggs (1897) démontrant le lien entre résistivité
et température. Physiquement, et en faisant l’hypothèse que la circulation du courant est pilotée par
la conduction de l’électrolyte, la résistivité dépend du changement de viscosité du fluide dû à la
température.
La section suivante présente les différents modèles de correction de la littérature. Ces modèles sont
ensuite comparés dans la PARTIE I.2.1.3.2.
Les différents modèles de correction de l’effet de la température
où : 𝜌
𝑇𝑟𝑒𝑓est la résistivité à la température de référence, 𝜌
𝑇est la résistivité à la température de
mesure et 𝑓
𝑇est le facteur de correction de la température (calculé sur des valeurs de conductivité)
(Besson et al., 2008).
Il existe dans la littérature différents modèles de calcul de ce facteur de correction. Tous les modèles
sont valables entre 0°C et 50°C. Pour tous les modèles, on notera T la température au point de mesure
et T
ref la température de référence i.e., la température à laquelle les mesures sont ramenées.Modèle ratio
Le modèle le plus couramment utilisé pour la correction de température en TRE a été établi par Keller
et Frischknecht (1966) (Équation I.7) :
𝑓
𝑇= 1
1 + 𝛿(𝑇 − 𝑇
𝑟𝑒𝑓) Équation I.7
avec 𝛿 le coefficient de compensation de la courbe de température, usuellement égal à 0,025 °C
-1en
géophysique.
Modèle exponentiel
Le modèle exponentiel prend trois formes (Équation I.8 - Équation I.10) :
i) Le modèle exponentiel a été initialement développé par Sheets et Hendrickx (1995), puis
modifié par Corwin et Lesch (2005), à partir de la table de conversion de Richards (1969).
Il est donné dans l’Équation I.8 :
𝑓
𝑇= 0,4470 + 1,4034 ∗ 𝑒
−26,815𝑇Équation I.8
Ce modèle n’est valable que pour des températures de mesure de 3°C à 47°C et pour une
température de référence de 25°C. Les données utilisées sont des mesures réalisées sur
des extraits de sols à différentes températures.
ii) Wells (1978) propose un autre modèle exponentiel, plus général :
𝑓
𝑇= 𝑒
0,0285∗(𝑇𝑟𝑒𝑓−𝑇)−0,000167∗(𝑇𝑟𝑒𝑓2 −𝑇2)Équation I.9
iii) Un autre modèle exponentiel est proposé par Besson et al. (2008). Une erreur de signe
était présente dans la publication originelle de Besson et al. (2008) et a été corrigée par
Ma et al. (2011). J’ai constaté une erreur dans l’article de Ma et al. (2011) (au niveau de
l’équation 11), il faut lire 0,02226 et pas 0,2226. L’Équation I.10 ci-dessous prend en
compte les deux corrections.
𝑓
𝑇= 𝑒
0,02226(𝑇𝑟𝑒𝑓−𝑇)Équation I.10
Modèle puissance
Ce modèle, développé par Besson et al. (2008) à partir d’expériences de calibration sur extraits de sols
s’écrit (Équation I.11) :
Chapitre 2 – Mesures géophysiques appliquées au karst
Modèle polynomial
Le modèle polynomial a été développé par Rhoades et al. (1999). Il a été développé à partir des
données de la Food and Agriculture Organization (FAO) (Richards (1969)). Il s’écrit (Équation I.12) :
𝑓
𝑇= 1 − 0,20346 ∗ 𝑇
𝑎+ 0,03822 ∗ 𝑇
𝑎2− 0,00555 ∗ 𝑇
𝑎3Équation I.12
avec 𝑇
𝑎=
𝑇−𝑇𝑟𝑒𝑓10
.
Une variante de ce modèle existe. Il s’agit du modèle d’Or et Wraith (1999), valable uniquement pour
une température de référence de 25°C, nous n’en donnons pas l’expression pas car elle est inadaptée
à nos conditions de mesures.
Comparaison des modèles
L’intervalle de température (0 à 50 °C) sur lequel les modèles de correction (Équation I.7 à Équation
I.12) ont été développés est adapté aux températures caractéristiques de la colline de Lascaux et de la
carrière de Lugasson, à l’exception des températures mises en jeu pendant les feux pour ce second site
où la température peut monter à environ 120°C dans la partie la plus superficielle de la paroi. Pour ces
données acquises en condition extrêmes, la correction de l’effet de température nécessite la
construction d’un modèle de correction spécifique. Nous reviendrons sur ce point dans la partie plus
prospective de la PARTIE III.
Le graphique en Figure I.26 présente trois modèles de correction et les données expérimentales issues
de Ma et al. (2011) donnant le facteur de correction pour une température de référence de 25°C et
pour des températures allant de 3 à 47°C.
La Figure I.26 montre que les modèles ratio et exponentiel sont proches des valeurs expérimentales
jusqu’à 50°C. Le modèle puissance s’écarte des données expérimentales dès 30°C. Le choix du modèle
de correction peut donc être restreint aux modèles exponentiel ou ratio. De manière générale, on
observe que le modèle exponentiel de Corwin et Lesch (2005) présente un RMS (root mean square)
faible (calculé comme stipulé à l’Équation I.13) avec les données expérimentales entre 3 et 47°C (de
presque 0% pour le modèle Corwin et Lesch contre 4% pour le modèle ratio).
avec n le nombre de valeurs, 𝜃̂ la valeur estimée à partir du modèle et 𝜃 la valeur mesurée.
𝑅𝑀𝑆 = √1
𝑛∑(𝜃̂ − 𝜃)
2𝑛 𝑖=1
Figure I.26 : Comparaison des trois modèles principaux de correction de température. Le facteur de
correction est calculé ici pour une température de référence de 25°C, température de réalisation des
expériences de l’US salinity laboratory Staff (1954) dans Ma et al. (2011).
Pour chacun des cas étudiés dans cette thèse, il sera donc nécessaire de choisir le modèle le plus
adapté au site étudié, que ce soit les mesures réalisées à Lascaux ou les mesures réalisées à Lugasson.
Nous préciserons le choix du modèle de correction pour chacun des sites dans les sous-chapitres
correspondants : PARTIE II.1.3.2 pour Lascaux et PARTIE III.2.1 pour Lugasson.
Remarque : dans le papier de Ma et al. (2011) reprenant les mesures de Richards (1969), une erreur est
présente dans les données expérimentales : pour les températures entre 21 et 21,8°C, les valeurs de fT
ont été remplacées par les valeurs de températures.
Dans le document
Caractérisation multi-échelle du milieu karstique non saturé.
(Page 58-61)