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La convection dans le manteau terrestre

2.2.1

Les principes de base de la convection mantellique

Si on résume les connaissances accumulées à ce stade, l’activité tectonique observée à la surface de la Terre (Chapitre 1) est le reflet de la convection mantellique (Bercovici et al., 2000). Contrairement à la tectonique des plaques qui est une théorie descriptive et cinématique, la théorie de la convection mantellique est basée sur des observations physiques de dynamique des fluides. Même si le manteau terrestre est composé d’un matériau polycristallin de déformation fragile en surface et élastique sur des périodes inférieures à 300 ans, il peut être considéré comme fluide sur des millions d’années (Griggs, 1939, Partie 2.1.2). La convection mantellique permet d’évacuer la chaleur de la Terre interne et nécessite des instabilités thermiques qui proviennent de la couche limite thermique supérieure froide et inférieure chaude (Turcotte & Oxburgh, 1972). La convection provient d’une instabilité de seuil appelée l’instabilité de Rayleigh-Bénard. Quand le nombre de Rayleigh Ra est supérieur à un nombre de Rayleigh critique voisin

de 103, il y a mouvement du fluide : la convection se met en place. Lorsque les plaques

de la couche limite thermique plongent par effet de densité (Partie 1.2.1.2) au niveau des zones de subduction jusqu’au manteau inférieur (Grand et al., 1997), ces plaques sont froides et leur température ne varie pratiquement pas pendant leur descente. Elles se font remplacer par du nouveau matériel : la descente de matériel est donc active et la remontée est passive (Figure 2.8).

La dynamique terrestre peut être décomposée en deux champs visibles dans les mo- dèles de convection : (1) le champ poloïdal (visible par la divergence et la convergence en surface) c’est-à-dire globalement les mouvements convectifs et (2) le champ toroïdal (cisaillant en surface) qui représente une rotation par rapport à un axe vertical qui n’est possible qu’avec des variations latérales de viscosité (Bercovici et al., 1989). L’énergie cinétique de la lithosphère est considérée à 25 % à 50 % provenant du champ toroïdal (Hager & O’Connell, 1978, 1979, 1981; O’Connell et al., 1991; Lithgow-Bertelloni et al.,

FIGURE2.8 – Schéma d’une coupe équatoriale de la Terre. Les lignes en pointillés montrent les zones où le géoïde est haut ou bas. Les hauts du géoïde peuvent refléter la densité excessive des piles thermochimiques sous-jacentes. La discontinuité à660 km et la zone de stabilité de la post- pérovskite sont matérialisées par des lignes noires. Les continents sont en vert. Les piles thermochimiques (LLSVPs) sous le Pacifique et l’Afrique sont des zones favorables à l’initiation de large panaches mantelliques. La circulation majeure dans le manteau est visible au niveau des zones de subduction couplées aux courants de retour au-dessus des LLSVPs. La figure n’est pas à l’échelle et l’épaisseur des ULVZs (Ultra-Low Velocity

1993; Bercovici & Wessel, 1994; Bercovici, 1995; Bercovici et al., 2000; Dumoulin et al., 1998) et à 75 % à 50 % pour le champ poloïdal. Cette convection est régie par des lois dynamiques non linéaires qui nécessitent des simplifications afin d’être modélisées (McKenzie et al., 1974) et qui vont être détaillées ci-après.

2.2.2

Les équations physiques de la convection

La conservation de la masse. Cette équation indique que la variation de densité ρ d’un

fluide contenu dans un certain volume v correspond à la perte d’un flux de matière au travers de la surface qui limite le volume dans un temps t. L’équation de conservation de la masse dans le cas incompressible est :

∇ · v = 0 (2.3)

Avecv le volume. Cette équation est nulle car on néglige l’inertie du système en raison de la diffusion de la température qui est très lente. On prend en compte l’énergie ther- mique mais pas l’énergie mécanique. Un argument simple permet de justifier cela : au niveau de la chaîne Empereur-Hawaï, l’angle franc formé par le volcanisme de point chaud montre un mouvement sans inertie. Le manteau n’est pas incompressible, la masse volumique varie avec la pression et avec les variations de température qui per- mettent les mouvements convectifs. Néanmoins, l’approximation de Boussinesq per- met de prendre en compte les variations de densité. Le matériau dépend alors majo- ritairement de la température (et peu de la chimie). On suppose donc que le manteau est un fluide incompressible donc la masse volumique reste constante dans l’équation précédente. D’autres approximations peuvent être utilisées pour modéliser les mouve- ments dans le manteau comme l’approximation anélastique par exemple qui prend en compte la compressibilité contrairement à l’approximation de Boussinesq (Bercovici et al., 1992; Tackley, 1996).

La conservation de la quantité de mouvement. La conservation de la quantité de mou-

vement est une notion phare de la physique dynamique qui décrit le fait que l’action d’une force extérieure sur un système induit une variation de sa quantité de mou- vement. C’est-à-dire que l’accélération d’une particule de fluide visqueux est égale à la somme des forces extérieures qui s’appliquent sur cette particule. Cette équation est comme le principe d’inertie mais prend en compte la masse des corps dans le manteau. Celui-ci est considéré comme un matériau visqueux (par approximation), d’autres ap- proximations utilisées donnent lieu à l’équation ci-dessous :

0 = −∇p + ∇ ·η



∇v + [∇v]T+ ρgα (T − Ts) er (2.4)

Avec ρ la densité,v le volume, g est la constante d’accélération gravitationnelle, α est

l’expansivité thermique, T la température et Ts la température de surface et η0 est la

viscosité au milieu du manteau pour une température de 1300 K. Cette équation est nulle car l’inertie est négligeable pour la convection dans le manteau car il n’y a pas d’accélération. Dans notre système, la réponse visqueuse est extrêmement plus rapide que la réponse thermique donc un changement de force est immédiatement équilibré. En effet, si on utilise encore l’exemple de la chaîne Empereur-Hawaï, l’inflexion est due aux changement des forces sur la plaque, le changement est absorbé dans le temps de réponse.

La conservation de l’énergie thermique. Le bilan thermodynamique se résume au

transport de chaleur. Or le flux de chaleur dans les modèles est régi par la loi de diffu-

sion de Fourier q =−kΔT qui devient l’équation ci dessous :

ρcp  ∂T ∂t + v · ∇T  = k∇2T + ρH (2.5)

avec H le taux de production de chaleur dû à décroissance radioactive, k la conducti-

Le nombre de Rayleigh Ra est le paramètre (non-dimensionné) qui va imposer la vi- gueur de convection :

Ra = ρ2cpgαΔT h3

0 (2.6)

p est la densité de référence du milieu, cp la capacité calorifique massique à pression

constante, g est la constante d’accélération gravitationnelle, α est l’expansivité ther- mique (le coefficient de dilatation thermique), dT est la différence de température entre la base et la surface du manteau, h est la profondeur du manteau, est K la diffusi-

vité thermique et η0 est la viscosité à la base du manteau pour une température de

1300 K. Le numérateur contient les forces qui font monter le fluide et le dénominateur contient les termes correspondant aux forces qui s’opposent au mouvement du fluide.

Donc pour un système comme le manteau terrestre avec g =9,81 m/s2, h =2,9× 106m,

α =2,5× 10−5K−1, =10−6m2/s, =1017 m2/set 2500 < T < 4500C , le nombre de Ray-

leigh terrestre se situe donc entre 108 et 109, ce qui est bien supérieur au nombre de

Rayleigh critique permettant ainsi la convection du manteau.