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4.2.1 Modèle de régression non paramétrique

Nous avons vu au chapitre 1, l’importance de la connaissance des vitesses prati-quées sur l’ensemble du réseau. Cette information est accessible avec la généralisation des véhicules traceurs qui sont capables de transmettre leur position et leur vitesse au cours du temps. Cependant, ces mesures de position et de vitesse étant générale-ment entachées d’erreurs, il est nécessaire avant toute étude de procéder à une étape de lissage. Cette étape consiste à minimiser les erreurs de mesures en calculant un estimateur du "vrai" profil spatial de vitesse. On se ramène alors à un problème de régression non paramétrique, dont le modèle peut s’écrire sous la forme suivante :

yi= vS(xi) + εv,i, i = 1, . . . , n, (4.1) où les yi sont des mesures bruitées de vitesse issues de capteurs (mesures dérivées de l’odomètre, ou mesures issues du GPS et calculées par effet Doppler) correspondant respectivement aux positions xi du véhicule, et les εv,isont des erreurs aléatoires non corrélées entre elles, de moyenne nulle et de variance σv2, correspondant aux erreurs de mesures. La fonction vS est la fonction de régression que l’on cherche à estimer.

Cependant, les positions xi du véhicule étant également des mesures issues de capteurs et donc entachées d’erreurs, les observations de la variable explicative X sont en fait les mesures wi obtenues aux instants ti, i = 1, . . . , n, telles que

wi = x(ti) + εx,i, i = 1, . . . , n, (4.2) où les εx,i sont des erreurs aléatoires non corrélées entre elles, de moyenne nulle et de variance σx2, correspondant aux erreurs de mesures de la position du véhicule. L’ob-jectif est donc d’estimer le vrai profil spatial de vitesse vs à partir des observations (yi, wi), i = 1, . . . , n, de vitesse et de position.

Une méthode classique consiste dans un premier temps à débruiter les observa-tions xi de position à l’aide d’une technique de lissage, puis à revenir au problème de régression non paramétrique (4.1). Nous avons vu aux deux chapitres précédents, l’intérêt de se placer dans un cadre fonctionnel et d’utiliser des méthodes de lissage telles que les splines pour estimer la fonction de régression vS. Cependant, l’étude

des propriétés des profils spatiaux de vitesse réalisée au chapitre 2, nous amène à prendre en compte certaines contraintes dans l’estimation de la fonction de régres-sion vS. En effet, nous avons vu à la section2.2.2.3que les profils spatiaux de vitesse n’étaient pas dérivables aux points où la dérivée s’annule. Cette propriété doit donc être vérifiée par l’estimateurvbS du vrai profil vS. Cette propriété est une contrainte difficile à prendre en compte dans le lissage et pose le problème de la modélisation des arrêts du véhicule dans l’espace vitesse×distance. Par exemple, l’utilisation de fonctions splines dans l’espace vitesse×distance n’est pas appropriée pour estimer un profil spatial de vitesse puisque dans ce cas, l’estimateur obtenubvS ne vérifiera pas cette propriété. On propose alors de pallier cette difficulté en changeant d’espace d’étude, et en se ramenant à l’espace distance×temps afin d’estimer la fonction F (t) représentant la distance parcourue au cours du temps.

4.2.2 Changement d’espace d’étude

Nous avons vu au chapitre2qu’un profil spatial de vitesse était une succession de mesures horodatées de position et de vitesse, et pouvait donc être manipulé dans les 3 espaces distance×temps, vitesse×temps ou vitesse×distance, comme l’illustre la figure4.2.

On propose dans un premier temps de se placer dans l’espace distance×temps et de chercher à estimer la fonction F (t) représentant la distance parcourue par le véhicule au cours du temps. On se ramène alors au problème de régression non paramétrique suivant :

yi= F (ti) + εx,i, i = 1, . . . , n, (4.3) où les yi sont les mesures bruitées de la distance parcourue du véhicule (issues d’un odomètre ou d’un GPS après map-matching (voir annexe A)) obtenues en chaque instant ti, et les εx,i sont des erreurs aléatoires non corrélées entre elles, de moyenne nulle et de variance σx2, correspondant aux erreurs de mesures. Notons que ce modèle est en fait une réécriture du modèle (4.2) énoncé à la section précédente. L’avantage de se placer dans l’espace distance×temps est que la seule contrainte de forme à prendre en compte dans l’estimation de F est une contrainte de monotonie. En effet, la fonction F représentant la distance parcourue en fonction du temps est une fonction croissante. Nous verrons dans la suite de ce chapitre que de nombreuses méthodes de lissage sous contrainte de monotonie ont été développées, et que cette contrainte de monotonie est moins difficile à prendre en compte que la contrainte de non dérivabilité aux points où la fonction s’annule.

De plus, après avoir effectué cette étape de lissage dans l’espace distance×temps, il est très simple de se ramener dans l’espace vitesse×distance et d’en déduire une estimation du profil spatial de vitesse. En effet, supposons que bF soit un estimateur de F tel que bF soit une fonction C2et croissante, alors on en déduit par dérivation un estimateur bF0 du profil de vitesse F0 en fonction du temps (espace vitesse×temps).

Figure 4.2 - Lien entre les trois espaces : [distance×temps, vitesse×temps] et [vitesse×distance].

Puis, d’après la définition2.1, on en déduit un estimateur cvS du profil spatial de vi-tesse vS par la transformation suivante :vcS = bF0◦ bF−1. On garde ainsi la cohérence entre les trois espaces illustrés à la figure4.2.

Cependant, si cette méthode consistant à trouver un estimateur bF de F à partir des mesures bruitées yi de position, puis à en déduire un estimateur vcS = bF0◦ bF−1 du profil spatial de vitesse vS est correcte, celle-ci ne tient pas compte des mesures de vitesse également disponibles. En effet, en pratique, on dispose également de mesures de vitesse du véhicule qui peuvent être indépendantes des mesures de position. Par exemple, les GPS actuels fournissent à la fois des mesures de la position du véhicule (latitude, longitude, altitude), mais également des mesures de la vitesse du véhicule calculées par effet Doppler (et donc indépendantes des mesures de position). De plus, si l’on dispose d’un boîtier enregistreur connecté au bus CAN du véhicule, on peut obtenir des mesures de la vitesse du véhicule qui dérivent des mesures de distance de l’odomètre et qui sont donc indépendantes des positions GPS. Plus de détails sur les différents capteurs relatifs à la position et à la vitesse du véhicule sont données dans l’annexe A. Ainsi, lorsque l’on dispose à la fois de mesures de position et de vitesse et que ces mesures sont indépendantes l’une de l’autre, il est nécessaire d’utiliser ces deux sources d’information pour estimer au mieux le profil spatial de vitesse. De plus, la précision des mesures de vitesse est en pratique meilleure que celle des mesures de position.

On propose donc d’estimer la fonction F représentant la distance parcourue par le véhicule au cours du temps en utilisant à la fois des observations bruitées de la position et de la vitesse du véhicule. Cependant, la vitesse d’un mobile en un instant t correspondant à la dérivée de sa position en t, le problème revient à estimer la fonction de régression F du modèle (4.3) en utilisant de l’information sur sa dérivée F0. On se ramène donc au modèle de régression non paramétrique (4.3) sous les deux contraintes suivantes :

(C1) Estimer la fonction de régression F (t) à partir d’observations bruitées de cette fonction (mesures de position) et également d’observations bruitées de sa déri-vée F0(t) (mesures de vitesse).

(C2) Une contrainte de monotonie sur F .

La prise en compte de ces deux contraintes est l’objet de la suite de ce chapitre.