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Dans le champ des contraintes que l’on peut appliquer aux composants de puissance, il existe une frontière entre régime de fonctionnement normal et régime extrême. Cette frontière est définie par les contraintes limites applicables au composant [Vallon, 03].

Ces contraintes limites peuvent être liées au packaging ou aux puces semi-conductrices (IGBT et diode).

Thermique : en effet l’assemblage d’un module IGBT (bonding / puces / brasures /

substrat / semelle) est très sensible au cyclage thermique. La durée de vie de cet assemblage dépend de l’amplitude de ce cyclage.

Electrique : les puces étant soumises à des potentiels élevés, il est nécessaire d’avoir

une bonne isolation entre les puces ainsi qu’entre ces puces et l’environnement extérieur. Le substrat AlN ainsi que le gel silicone joue ce rôle ; cependant une tension trop importante peut provoquer un défaut d’isolement.

Environnementale : le boîtier du composant protège les puces contre les agressions

liées à l’environnement du module (humidité, attaques chimiques…). Un environnement trop sévère peut altérer le fonctionnement du composant (corrosion). Il y a ensuite les contraintes électriques limites applicables aux puces semi-conductrices. Ces limites forment la frontière entre le régime de fonctionnement normal et les différents régimes extrêmes.

Les passages entre le régime normal et les régimes extrêmes peuvent être de deux types : • Contraintes statiques trop importantes (tension à l’état bloqué, courant à l’état

passant, température des puces),

• Contraintes dynamiques trop élevées (vitesses de commutation à l’amorçage et au blocage).

Ces contraintes trop élevées appliquées à une puce peuvent provenir soit de l’extérieur de la cellule de commutation (surtension sur le bus continu…) soit de la cellule en elle-même (court-circuit au sein de la cellule,…).

Nous allons maintenant lister les différents régimes extrêmes que peuvent subir les puces diodes et IGBT au sein d’une cellule de commutation.

3.7.1. Limites thermiques locales

La température critique en fonctionnement normal peut être définie comme une des quatre températures ci-dessous :

• La valeur spécifiée par les constructeurs de modules IGBT est égale à 125°C en fonctionnement continu et 150°C en régime de surcharge de courte durée.

• La température de fusion des brasures se situe entre 180°C et 200°C. Elle dépend du mélange étain-plomb utilisé. [Thebaud, 00]

• La température intrinsèque du silicium non traité se situe entre 200°C et 300°C. Cette température dépend de la quantité de dopant [Duong, 97] en particulier de la base. La règle couramment admise est que la limite en température est atteinte lorsque le nombre d’électrons intrinsèque est égal au nombre de porteurs lié au dopage [Baliga, 87]. A titre d’exemple, nous pouvons cité les boîtiers IGBT 3300 V tels que ceux utilisé dans cette étude, disposant d’un dopage ni=2.1013/cm3 et dont la température limite de fonctionnement se situe à 149°C. Au-delà de cette température, les propriétés du silicium sont considérablement dégradées. La résistivité de la puce décroît très rapidement ce qui génère un échauffement fatal pour le module IGBT.

Chapitre 1 : Etude bibliographique sur les modules IGBT

• La température de fusion des métallisations se situe à 600°C pour les métallisations en aluminium.

La première température citée ci-dessus ne présente pas une limite en soi. Il est en effet possible de faire fonctionner certaines puces IGBT à une température moyenne de 150°C [Vallon, 03]. La deuxième température peut, quant à elle, être considérée comme étant une limite de même que la troisième à ne pas dépasser sous peine de perte de contrôle du composant. De plus les limites physiques des composant sont modifiées à haute température [Wondrak, 99].

3.7.2. Avalanche électronique

Lorsque le champ électrique est élevé (>105 V/cm), les porteurs libres peuvent acquérir, entre collisions successives sur le réseau cristallin, une énergie cinétique suffisante pour briser une liaison de covalence, c’est-à-dire pour créer une paire électron-trou. Les porteurs ainsi générés peuvent à leur tour provoquer la création d’autres paires en un processus d’avalanche [Leturcq, 99].

Ce phénomène qualifié d’avalanche électronique se traduit par une augmentation brutale du courant inverse. Au-delà d’un certain seuil, le processus est autonome et entraîne le claquage de la puce. Si le courant d’avalanche n’est pas maîtrisé, l’énergie dissipée au sein du composant peut devenir très importante, entraînant sa destruction par dépassement de la température de fusion du silicium [Vallon, 03].

La tension de claquage par avalanche électronique dans le silicium représente une limite à ne pas atteindre, en statique comme en dynamique. Cette valeur dépend de la quantité de dopant, de la température et est rarement atteinte. Elle correspond à une valeur idéale pour une jonction semi-infinie. La tenue en tension de la terminaison de jonction peut faire chuter cette valeur de 10 à 20 % selon la technologie choisie (terminaison plane diffusée, anneau flottant, puce biseautée…) [Baliga, 87].

3.7.3. Retournement ou latch-up

Le latch up est lié à la formation d'une structure NPNP parasite résultant de la proximité de deux transistors bipolaires (réels ou parasites) l'un NPN l'autre PNP.

Le retournement dit statique se produit lorsque ce transistor parasite intrinsèque à l’IGBT entre en conduction. Cette mise en conduction est due à un fort courant parcourant la résistance parasite de la couche P+ prise entre les couches N- et N+. Dans ce cas la grille de l’IGBT ne peut plus bloquer le composant et ce défaut irréversible provoque la destruction du composant de puissance. Le latch-up est sensible à la température par l’intermédiaire de la mobilité des trous de la couche P+. Sur les composants actuels, ce retournement se produit lorsque l’IGBT conduit de forts courants.

Le retournement dynamique se produit quant à lui lorsque l’IGBT est soumis à un transitoire de forte puissance correspondant à la présence simultanée d’un fort courant et d’une forte tension localisés dans la couche vitale du composant. Ce retournement peut se

de base N dépend du dopage et du nombre des porteurs qui y transite. Si la densité de courant est importante (300A/cm²), elle peut modifier la répartition du camp électrique [Baudesson, 00]. D’une manière générale, la valeur de courant pour laquelle se produit le latch-up dynamique est inférieure à celle du latch-up statique [Baliga, 87].

3.7.4. Claquage de la grille

Une tension entre grille et émetteur trop importante induit un champ électrique important dans l’oxyde de silicium. Au-delà d’une certaine valeur (100V en statique et 50V à 20kHz) la grille entre en avalanche électronique entraînant la destruction de l’oxyde et l’impossibilité de commander le composant. Avec un champ de rupture de 107V/cm, et une épaisseur de 100nm, la tension de rupture est supérieure à 100V. Pour une épaisseur de 50nm, cette tension est inférieure à 50V [Baliga, 87].

3.7.5. Cas particulier de la diode

La limite de la diode en commutation est définie à travers une aire de sécurité appelée RRSOA (Reverse Recovery Safe Operating Area). Cette aire de sécurité de la diode est définie par les fournisseurs de module par rapport à la puissance instantanée dissipée lors de la commutation.

Une dynamique trop importante sur le courant à la fermeture de l’IGBT peut causer la défaillance de la diode de roue libre au blocage. Ce phénomène est d’autant plus important que les diodes de puissance utilisées dans les applications de type onduleur sont rapides. Ce phénomène survient lorsque le courant de recouvrement est trop élevé. La dynamique du recouvrement est alors augmentée ce qui génère une surtension inverse aux bornes de la diode. Le cas le plus critique est obtenu lorsque le recouvrement du courant s’effectue brutalement (snap off). La forte augmentation du di/dt entraîne alors une très forte surtension aux bornes de l’interrupteur pouvant provoquer la défaillance (court-circuit) de la diode ou de l’IGBT en parallèle.

Un autre mode de défaut possible pour une diode de roue libre est sa mise en avalanche dynamique. Ce phénomène apparaît lorsque les conditions de fort courant, forte tension, haute température et di/dt important sont réunies [Shammas, 95].

3.7.6. Résumé des limites de fonctionnement

La figure 19 représente les différentes limites de fonctionnement et les risques associés autour de l’aire de sécurité appelée RBSOA (Reverse Bias Safe Operating Area). En pratique, cette aire de sécurité est établie par le fabricant et fournie dans la fiche technique du composant.

Chapitre 1 : Etude bibliographique sur les modules IGBT

Fig 26. Aire de sécurité pour un composant de puissance

La tension maximale admissible Umax correspond au calibre en tension des puces IGBT

inclues dans le module (1700V, 3300V, 6500V par exemple), la limite en courant Imax

équivaut généralement au double du courant nominal, fourni par le fabricant dans la fiche technique du composant. Le fournisseur garanti le respect de la RBSOA pas un essai au point maximal sur 100% des pièces. Cependant, la détermination de cette aire est effectuée dans des conditions de fonctionnement ne correspondant pas forcément aux conditions que rencontreront les modules lors de leur utilisation. On constate donc ici une première zone de flou concernant la notion de RBSOA pour les utilisateurs de modules IGBT.

L’autre zone floue qui concerne la RBSOA vient du fait que les marges comprises entre cette aire de sécurité et la casse du composant sont inconnues même de façon qualitative et variable d’une famille de composant à l’autre.

Le retour d’expérience sur les modules IGBT utilisés en traction tend à montrer que les défaillances rencontrées au sein de la chaîne de traction sont essentiellement dues à des problèmes de robustesse en commutation des IGBT. De ce constat est né l’idée d’investiguer sur la notion d’aire de sécurité des modules IGBT et d’approfondir la connaissance du comportement de ces modules au sein de cette aire.

L’idéal pour tout utilisateur de module IGBT est de connaître son comportement dans l’ensemble de son aire de fonctionnement et jusqu’à la casse du composant en fonction de l’ensemble des différents paramètres, liés à l’utilisation, qui influent sur le comportement des modules. Cette connaissance permettrait au bureau d’études de définir des règles de conception afin de répondre plus précisément aux demandes des clients et d’assurer une meilleure fiabilité de ses produits.

Aujourd’hui, la validation des modules IGBT est effectuée seulement aux points jugés les plus critiques par les experts, le nombre d’essais étant rédhibitoire si on veut couvrir l’ensemble du domaine d’utilisation du module IGBT. Ainsi, aucun outil ne permet de connaître l’effet de la variation d’un facteur tel que la tension ou la température sur le comportement des modules IGBT et d’assurer, lors de l’utilisation, le non franchissement des limites de fonctionnement des modules IGBT. A fortiori, la présence d’interactions entre différents facteurs est totalement inconnue.

Pour étudier le comportement d’un module IGBT, tenter d’optimiser le positionnement de son point de fonctionnement par rapport à ses limites et mieux anticiper les distributions statistiques des paramètres caractéristiques de son fonctionnement, il est nécessaire

d’identifier des performances clés qui présentent un seuil de fonctionnement qu’il est important de ne pas dépasser.

Il est admis que les modules IGBT sont plus tolérants en courant et que le stress du composant est surtout dû à la tension commutée [Azzopardi, 03]. Les performances sur lesquelles notre attention se portera seront donc associées à cette tension.

Un pic de tension, appelé surtension, a lieu lors du blocage des IGBT. Cette surtension génère un champ électrique responsable d’un stress important sur le composant IGBT. De plus, les fabricants des modules donnent une limite de vitesse de commutation au blocage, appelée dV/dt, ce qui laisse à penser à la présence d’un risque en cas de commutation trop rapide. On sait notamment que la vitesse de commutation influe sur la dissipation, dans le composant, du champ électrique, générateur de stress à l’intérieur des puces semi- conductrices. A l’amorçage du composant, le stress engendré par une vitesse de commutation élevée est ressenti par la diode anti-parallèle, plus résistante que l’IGBT, ce qui rend le phénomène moins dangereux pour le module.

Nous nous pencherons donc, dans ce travail, sur la surtension et la vitesse de commutation ayant lieu au blocage de l’IGBT.

Le respect de cette aire de sécurité lors du fonctionnement des modules IGBT doit permettre de ralentir les phénomènes de vieillissement qui se traduisent par les mécanismes de dégradation développés ci-après.

Après avoir présenté la structure, le fonctionnement, les mécanismes de dégradation et les limites que présentent les IGBT, nous consacrerons la dernière partie de ce chapitre à la modélisation de ces modules.

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