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Contrôler les pièces fabriquées par EBM

Chapitre 2. Maîtrise de la qualité en fabrication additive par EBM

2.3 Contrôler la qualité tout au long du procédé

2.3.4 Contrôler les pièces fabriquées par EBM

Dans beaucoup de cas industriels, la caractérisation de la qualité des pièces passe par leur étude approfondie après fabrication. Pour étudier une pièce fabriquée, il existe deux types de contrôle : destructif et non-destructif. Le contrôle destructif suppose d’avoir un procédé répétable contrairement au contrôle non

-destructif. Pour ces deux types de contrôle, d’anciens et de nouveaux procédés de contrôle ont été adaptés

ou développés afin de satisfaire les nouveaux besoins de la fabrication additive. Cette partie propose une revue de quelques dispositifs proposés pour la caractérisation des pièces en Ti-6Al-4V fabriquées par EBM.

2.3.4.1 Les contrôles destructifs

La première catégorie de contrôle est le contrôle destructif. Cela consiste principalement à mettre la pièce à évaluer en condition d’utilisation et tester ses limites ou catégoriser le matériau dont elle est faite en

effectuant des essais mécaniques sur des éprouvettes témoins.

Dans le cas où la pièce est évaluée, les essais peuvent se faire, selon la pièce, par des essais classiques

(traction, compression, flexion, etc.) ou sur un banc d’essai. Cette pratique implique la destruction de la pièce.

Il faut donc que cette pièce soit fabriquée en plusieurs exemplaires. Dans l’industrie, plusieurs possibilités sont

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dans un même lot et plusieurs de ces exemplaires sont testés afin de qualifier les autres. Dans ce cas, les pièces

doivent être fabriquées, orientées et supportées à l’identique. Similairement, certains industriels réalisent la qualification d’un lot de fabrication entier en vue de le répéter plusieurs fois dans les mêmes conditions.

Ces deux possibilités de caractérisation ne sont valables que si le procédé donne une bonne répétabilité

de fabrication d’une pièce à l’autre et d’une production à l’autre. Or, rien ne prouve que le procédé soit répétable : le nombre de paramètres humains est déjà important dans la préparation de la machine (exemples : le positionnement de la plaque de départ, la calibration du faisceau d’électrons ou des positions

du râteau, …) mais il existe plusieurs phénomènes aléatoires qui impactent la qualité de fabrication. Les

interruptions du faisceau d’électrons illustrent bien le phénomène aléatoire.

Ces solutions ont été souvent utilisées auparavant et sont encore en pratique aujourd’hui. Mais les industriels s’intéressent désormais davantage aux moyens de contrôle non destructif.

2.3.4.2 Les contrôles non destructifs

Cette seconde catégorie recoupe toutes les méthodes de caractérisation des pièces sans dégradation. Il existe un nombre important de méthodes, nous allons donc limiter l’étude à celles qui sont utilisées ou

s’appliquent le mieux aux pièces faites par EBM.

Les défauts externes

Parmi les solutions existantes, la plus simple à mettre en place et probablement la moins coûteuse aussi est le contrôle visuel. Ce type de contrôle permet rapidement de détecter des défauts géométriques classiques (délamination, défaut de forme, etc.) et de faire un premier tri sur la qualité des pièces fabriquées. Ce contrôle

ne permet pas d’investiguer plus loin la qualité des pièces ni de réaliser une caractérisation des défauts

observés. Il s’applique donc bien à la détection de défauts critiques.

Pour ce qui est de la validation des qualités géométriques ou dimensionnelles, il est possible d’utiliser les

outils classiques de métrologie. Dans un premier temps, cela permettra de qualifier la forme et les dimensions

des pièces et de leurs surfaces fonctionnelles. Pour les formes plus complexes (issues d’optimisation topologique par exemple), la pièce peut être scannée afin d’être comparée avec la CAO et de montrer les

écarts géométriques et dimensionnels.

Les défauts internes

Pour la détection des défauts internes, tels que les pores et la délamination fermée, il existe plusieurs solutions. Avec les pièces fabriquées traditionnellement, des outils ont déjà été développés par le passé. La magnétoscopie, le contrôle par ultrasons en sont des exemples fréquemment utilisés dans l’industrie. Ils

présentent cependant des limites avec les pièces fabriquées par EBM. Comme facteur limitant, il y a la rugosité des pièces, la complexité des géométries à contrôler et surtout la présence des pores sphériques qui apparait comme un défaut et qui complique la détection de la délamination et des pores plans.

Dans la littérature, d’autres méthodes sont utilisées pour détecter les défauts internes. La méthode

Archimède permet d’évaluer la densité de la pièce fabriquée, en comparant avec la densité du matériau, la

porosité du matériau est estimée. Son principe simple consiste à mesurer la masse et le volume de la pièce pour obtenir une valeur de porosité. En général, il s’agit de mesurer à l’aide d’une balance de précision la

masse de la pièce et la masse d’eau déplacée par son immersion (en vue de calculer son volume). Cette méthode présente un avantage économique certain mais révèle quelques limites. La Figure 2.23 est un exemple de limite : les pores observables en rouge sur la figure sont communicants avec l’extérieur.

Cependant, ils pénètrent dans la matière de manière conséquente, parfois sur toute la hauteur. La méthode

d’Archimède ne permet pas de détecter ce type de défaut car les pores sont ouverts et ne comptent plus dans le volume fermé de la pièce. En outre, la petite taille des ouvertures ne laisse pas présager la profondeur des

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défauts et une inspection visuelle ne rendrait pas la pièce défectueuse. Avec une telle pièce, la méthode

d’Archimède évaluerait cette pièce comme valide [Slotwinski & al, 2014 ; Wits & al. 2016].

La tomographie se trouve être la plus utilisée, la plus précise, efficace et pertinente des méthodes de détection de défauts internes. La tomographie permet aussi de caractériser les défauts internes et de faire la distinction entre un pore sphérique, plan ou la délamination. Il existe de nombreuses techniques de tomographie qui se différencient par la source d’énergie (neutrons, positons et autres), par la manière de détecter les particules/ondes émises ou par la catégorie des particules/ondes captées (transmises, diffractées,

etc.). Dans notre cas, c’est la tomodensitométrie à l’échelle microscopique qui nous intéresse. Littéralement,

il s’agit de microtomodensitométrie à rayons X. Nous ferons référence à cette technique par le raccourci

tomographie dans la suite du document.

Figure 2.23 Tomographie reconstituée d'une pièce poreuse (volume poreux représenté en rouge) [Tammas-Williams & al. 2016b]

La tomographie est utilisée à plusieurs reprises dans les études de ce manuscrit, son fonctionnement est détaillé dans les points suivants. La tomographie fonctionne selon le principe schématisé sur la Figure 2.24. La pièce analysée est irradiée avec une source de rayons X. Le faisceau est projeté sur un scintillateur qui transforme les rayons X en photons. Puis les photons sont captés par une caméra qui reconstitue une image

numérique. Les rayons X sont atténués lorsqu’ils traversent de la matière dense. Ainsi, le scintillateur reçoit

une plus ou moins grande intensité de rayons X transmis et cela se traduit par une émission proportionnelle de photons. Finalement, la radiographie montre une projection de la densité de la pièce analysée. Ensuite, en utilisant toutes les radiographies prises sous différents angles de la pièce, le volume tridimensionnel de la pièce est reconstitué.

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Le résultat obtenu est une succession d’images correspondant à des coupes numériques de la pièce analysée. Avec des logiciels de traitement d’images, les images peuvent permettre de représenter le volume en trois dimensions en faisant apparaître les défauts (comme sur la Figure 2.23). Il est donc possible de détecter, mesurer et caractériser les défauts internes des pièces fabriquées par EBM grâce à cette technologie.

Figure 2.24 Schématisation du principe de la tomographie

Malgré ces atouts, la tomographie a aussi quelques limites, notamment en ce qui concerne la taille limite de la pièce analysée (par exemple, au-delà plusieurs millimètres de Ti-6Al-4V, les rayons émis par une source à faible énergie sont trop absorbés pour être détectables), la contrainte qu’il y a entre dimensions de la pièce et précision de la mesure et d’autres détails qui sont des cas particuliers. Il s’agit également d’un procédé onéreux qui a un impact sur le prix final d’une pièce [Thompson & al. 2016a].

Ici la tomographie sert à détecter les défauts internes d’une pièce, mais une tomographie peut également permettre une analyse des défauts externes d’une pièce. Elle peut notamment être utilisée pour mesurer la rugosité d’une pièce ou pour faire de la métrologie dimensionnelle comme le montrent Kruth & al. dans leurs travaux [Kruth & al. 2011]. Un même outil peut ainsi qualifier une pièce sur plusieurs critères.

Ces différents outils et méthodes de contrôle permettent la détection de la non-qualité et le cas échéant la validation des qualités des pièces testées. En détectant la non-qualité au plus tôt dans le processus, les pertes financières et temporelles sont réduites. Mais cela permet surtout de mieux identifier les causes de ces défauts. Lorsque les causes sont identifiées, des stratégies, facteurs correctifs et diverses règles peuvent être mis en place pour limiter les défauts voire les supprimer. Cet aspect constitue une partie importante de la maîtrise de la qualité.

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