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Le contrôle politique du territoire dans l’Empire ottoman avant les Tanzimat

Chapitre 1 : Historiciser la fonction préfectorale en Turquie

1.2. Le contrôle politique du territoire dans l’Empire ottoman avant les Tanzimat

L’organisation étatique ottomane, de l’époque de la fondation de l’État au sens moderne du terme jusqu’à la veille des réformes du 19ème siècle, était surtout marquée par une quête de domination où le sultan calife, à travers ses bureaucrates ayant le statut de kul (serviteur du sultan), ne permettait guère l’organisation de la société autour d’intérêts privés. Cenk Reyhan s’interroge sur le degré de mise en pratique de la description idéalisée de cette situation dans laquelle toute sorte de relations individuelles et publiques étaient dominées par l’État ottoman qui visait un centralisme administratif et politique à travers le système de tımar au niveau spatial (horizontal) et à travers le système de kul au niveau sociétal (vertical). Il discute les fondements du centralisme de l’organisation sociale ottomane qui ne peuvent pas être réduits aux politiques coercitives du pouvoir politique et qui relèvent aussi du consentement populaire. Pour Reyhan, il

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s’agissait d’une volonté d’étendre la politique hégémonique du pouvoir politique tant par les outils de répression de l’État que par les outils idéologiques et il existait, de ce fait, une quête de persuasion et de consensus permanente dans laquelle divers médiateurs se relayaient.43

Dans la société ottomane où le moyen de production principal était la terre, le contrôle sur cette dernière était la principale priorité de l’État. L’autorité de l’État sur la terre était liée au contrôle permanent sur la propriété de la terre et sur les familles ayant une influence dans la province. Symboles de la quête de centralisme sur les axes à la fois horizontale et verticale, les systèmes de tımar et de kul figurent aussi parmi les institutions de base de l’organisation sociale ottomane. Toutefois, selon İlber Ortaylı, il ne faudrait pas avoir de jugements exagérés à propos de ces systèmes, ni les considérer comme des produits d’une préférence entièrement consciente ou comme des institutions uniques spécifiques à l’Empire ottoman. Pour Ortaylı, de telles institutions peuvent également être observées dans d’autres empires traditionnels. Le tımar en tant que système ayant des buts financiers, administratifs et militaires dans lequel les revenus d’impôt sont entièrement ou en partie transférés à un officier sous le titre dirlik en échange de certains services, est un mode de partage d’autorité auquel l’État traditionnel se réfère, soit faute d’outils de contrôle technologiques, soit en raison de l’insuffisance quantitative et qualitative de la bureaucratie44. Ce partage d’autorité ressemble aux modes d’administration indirecte par l’usage d’intermédiaires privés des sociétés féodales qu’évoque Weber en utilisant le concept de « décharge »45. Quant au système

43 Cenk Reyhan, Osmanlı’da Kapitalizmin Kökenleri : Kent-Kapitalizm İlişkisi Üzerine Tarihsel- Sosyolojik Bir Çözümleme [Les origines du capitalisme dans l’Empire ottoman : une analyse historico-

politique sur les rapports entre la ville et le capitalisme], İstanbul, Tarih Vakfı Yurt Yayınları, 2008, pp. 94-100.

44 İlber Ortaylı, Türkiye Teşkilât ve İdare Tarihi [L’histoire de l’organisation étatique et de

l’administration turques], Ankara, Cedit Neşriyat, 2010, p. 124.

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Ce concept utilisé par Weber pour les sociétés féodales n’ayant pas et ne pouvant pas établir d’appareil bureaucratique, qualifiait le besoin éprouvé à l’égard des interventions indirectes des intermédiaires privés pour l’exercice du pouvoir. Voir, M. Weber, Histoire économique. Esquisse d’une histoire universelle de

l’économie et de la société, Paris, Gallimard, Bibliothèque des Sciences humaines, 1991 (1923 pour

l’édition originale). Nous empruntons ce terme à Béatrice Hibou : voir, Béatrice Hibou (dir.), La

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de kapıkulu, il eut une vie relativement courte dans l’histoire ottomane dans son schéma classique et n’a pas pu constituer le point de focalisation du pouvoir46. Mais du fait que les fonctions militaires et administratives avaient été accordées aux kuls provenant du système de devchirmé (ramassage), l’aristocratie et les éléments féodaux dans la province n’ont pas pu avoir un contrôle sur la terre, ni établir un vrai pouvoir autonome. Cette structure fut durable pour un certain temps du fait que les kuls « devchirmé » qui voulaient toucher les tımars les plus attrayants ont dû soutenir le renforcement de l’État central. Cependant, « l’aristocratie de kul » qui était arrivée à occuper des fonctions importantes (comme vizir, garde-rôle, kazasker, beyler-bey, sandjak-bey) dans cette structure, a commencé, à partir du 17ème siècle, à s’emparer de certaines ressources sociales dans le centre et dans la province et à représenter les intérêts (de classe) privés différenciés des intérêts de l’État auquel elle s’était identifiée auparavant47. Non seulement la transformation de ces agents en acteurs locaux considérés auparavant comme garants de la structure centraliste, mais aussi, dans le même temps, le renforcement en nombre et en puissance de différents acteurs du pouvoir local dans la province et l’émergence de nouveaux rôles administratifs et politiques que ces acteurs arrivèrent à assumer, ont largement secoué la position privilégiée des kuls dans l’appareil d’État. Ce chapitre qui a pour but d’historiciser les efforts déployés par l’État pour asseoir son contrôle sur la terre dans la période de transition de l’Empire à la République, se focalise sur les dynamiques (parallèles au développement social déjà mentionné) de positionnement des préfets en tant que représentants du gouvernement central dans la province, le transfert des rôles centraux aux acteurs qui ont une influence locale – y compris les préfets –, et les conséquences de ces processus.

Les principes et les orientations de l’organisation administrative de l’État ottoman dans la période qui précède les réformes des Tanzimat sont en dehors du contenu de cette thèse et nous n’avons pas le but de mettre en lumière un tableau complet concernant

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İlber Ortaylı, op.cit., 2010, p. 209.

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ladite période. Cependant, pour mieux comprendre la période des Tanzimat où les efforts de centralisation furent déterminants, ainsi que l’héritage légué à la République par cette période, il faut bien saisir un point concernant la participation des souverains locaux à la direction du pays. En effet, même si le centralisme administratif qu’on essayait d’installer dans le système étatique ottoman au 19ème siècle avait le souci d’empêcher le renforcement des forces locales qui secouaient et menaçaient l’autorité de l’État central, ces dernières n’étaient toutefois pas des acteurs émergés subitement en raison d’une lacune résultant de la faillite de l’approche centraliste. C’était, en fait, toujours l’aristocratie locale qui régnait essentiellement dans la province si l’on tient compte du fait que « même aux 15ème et 16ème siècles, le beyler-bey et le sandjak-bey, qui n’étaient en fait que des coordinateurs, étaient représentés par ceux qui avaient une influence locale, comme voïvode, âyân, kadı régent, ou soubachi, dans les sous-unités plus petites »48. Par « eşraf » et « âyân » (nobles et notables) qui renvoient à des statuts ayant une influence locale, nous entendons donc également les bureaucrates provinciaux qui étaient des extensions de l’administration centrale. En ce sens, les termes « eşraf » et « âyân » désignent tous les souverains locaux qui se trouvent entre le centre et la province et qui ne sont pas homogènes de par leur origine49. C’est la raison pour laquelle le système d’âyân a engendré une structure qui ne peut pas être ignorée quand on traite de l’administration provinciale et qui crée une configuration institutionnelle très étendue dans laquelle s’incarne la quête de l’auto-légitimation de l’État, ce qui en a fait une part inséparable de l’administration du pays.

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İlber Ortaylı, op.cit., 2010, p. 357.

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Le découpage administratif et les gouverneurs avant les Tanzimat

Il ne serait pas erroné d’affirmer que, dans l’État ottoman à l’ère classique, il existait une quête d’équilibre à la fois au niveau de l’organisation centrale et de l’organisation provinciale, et qu’avait été adopté un modèle qui l’aurait garanti. Dans l’organisation centrale, une séparation fonctionnelle entre les domaines exécutif, judicaire et financier avait été effectuée afin d’empêcher qu’il soit établi une supériorité par l’un de ces trois offices sur les autres. Parallèlement, il est possible d’observer les conséquences d’une tendance similaire dans l’organisation provinciale. Par exemple, la quête d’une sorte d’équilibre est démontrée par la relation supplétive et en même temps limitative qui se trouve entre le bey qui représente le pouvoir exécutif du sultan dans les unités de

beylerbeyilik et de sandjak, et le kadı qui représente le pouvoir judiciaire au niveau de la

sous-préfecture et qui, étant directement lié au sultan, est indépendant dans ses jugements. Selon ce modèle, le bey ne peut punir personne sans le jugement du kadı, alors que le kadı ne peut faire appliquer son jugement sans le pouvoir du bey50.

Quand nous observons l’organisation administrative du gouvernement du pays, nous voyons que l’unité administrative la plus grande était le beylerbeyilik/eyalet51 sous la direction d’un beyler-bey. Les beylerbeyilik étaient constitués des unités administratives qu’on appelait sandjak ou livâ qui étaient sous l’administration de sandjak-bey. Au cours de l’évolution de la formation sociale ottomane, d’abord le niveau de sandjak, et ensuite celui de beylerbeyilik a gagné de l’importance dans l’organisation administrative52. Mais dans la logique organisationnelle de l’administration provinciale ottomane, l’unité

50 Cenk Reyhan, op.cit., p. 104.

51 C’est à partir de la seconde moitié du 16ème siècle que le terme « eyalet » qui vient du mot arabe iyālah

et qui veut dire « conduite, exécution » a commencé à être utilisé officiellement pour le beylerbeyilik. On voit aussi dans quelques textes le terme « vilayet » qui n’implique pas une qualification spécifique pour ce type d’unité administrative et qui pouvait être utilisé pour n’importe quelle unité administrative, qu’elle soit petite ou grande. En 1591, le mot eyalet est officiellement adopté pour cette unité, et l’expression

beylerbeyilik a continué à être utilisée pour désigner la position d’un beyler-bey. Halil İnalcık, « Eyalet », İslam Ansiklopedisi, vol. 11, 1995, pp. 548-550.

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fondamentale fut le sandjak53, et ce, surtout jusqu’au 19ème siècle54. Et les beyler-beys eux-mêmes se sont établis dans les sandjaks centraux qu’on appelait « sandjak de pacha ». Bien que le sandjak fût l’unité fondamentale de division administrative dans la période d’expansion de l’Empire, un besoin est apparu pour contrôler les sandjaks dont le nombre avait augmenté avec les conquêtes de la Roumélie à partir de la deuxième moitié du 14ème siècle. Après que Mourad 1er eut nommé son mentor Şahin Pacha comme commandant des beys en Roumélie, et qu’ensuite, Bayezid 1er eut laissé Kara Timurtaş Pacha comme beyler-bey en Anatolie pour un but similaire quand il a dû passer en Roumélie, la conséquence fut la division de l’État en deux grandes parties administratives en prenant les détroits du Bosphore et des Dardanelles comme ligne de partage : c’est ainsi que les beylerbeyilik de Roumélie et d’Anatolie sont nés. Apportant une nouveauté à la structure administrative de l’État, cette institutionnalisation est devenue un mécanisme de contrôle utilisé pour diriger les territoires élargissants de l’empire et gérer les problèmes de plus en plus nombreux dans l’organisation provinciale ottomane. C’est pour cette raison qu’il faut considérer les beylerbeyilik/eyalet dans l’administration ottomane comme une unité de contrôle plutôt qu’une organisation administrative d’ordre supérieur55.

Le régime foncier fut toujours déterminant dans la division administrative et territoriale de l’État ottoman. Dans cette perspective, nous pouvons dire qu’à la fois l’unité de

beylerbeyilik/eyalet et celle de sandjak ont été formées dans le cadre du système de dirlik (concorde). Les besoins financiers, administratifs et militaires de l’État qui ont

évolué avec le temps ont imposé quelques modifications dans l’étendue et la nature de

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Le terme sandjak n’était pas utilisé pour désigner une unité administrative dans la période de genèse de l’Empire ottoman. Ce sont plutôt des termes comme subaşılık ou vilayet qui étaient utilisés pour désigner des découpages administratifs, alors que le mot sandjak renvoyait à l’organisation militaire. C’est à partir du 15ème siècle qu’il a revêtu le sens de « région administrative » à côté de sa signification militaire qui voulait dire « direction et commande ». Il était utilisé pour qualifier soit le dirlik qui désignait une troupe militaire d’une tranche de revenu spécifique dans le système tımar, soit la région où se trouvaient les soldats timariotes liés à ce sandjak. Avec le temps, le premier sens fut progressivement abandonné pour laisser sa place au sens d’unité administrative qualifiant la région sous la direction du sandjak-bey qui était lui-même lié à l’eyalet. İlhan Şahin, « Sancak », İslam Ansiklopedisi, vol. 36, 2009, pp.97-99.

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İlber Ortaylı, op.cit., 2010 ; Halil İnalcık, op.cit., 1995 ; İlhan Şahin, op.cit., 2009.

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cette division administrative. Au plus petit niveau des échelons administratifs, nous voyons, par exemple, que les sandjaks sont constitués de districts (kaza) et de sous- districts (nahiye). C’est seulement à partir du 16ème siècle que ces derniers, qui étaient plutôt de petites unités auparavant, ont acquis un caractère administratif plus marqué. Au sens général, le kaza désigne le domaine où le kadı exerce ses compétences et où le tribunal est fondé. En ce sens, il a la qualité d’une unité juridique plutôt qu’une unité administrative. Quant aux nahiye, ils peuvent être considérés comme de petites unités géographiques émergées lors de l’établissement du système de dirlik/timar. Les unités de kaza et de nahiye possèdent donc des caractéristiques à la fois militaires et juridiques qui sont complémentaires56. Les villages qui constituent les nahiye sont aussi constitués de diverses zones d’impôt qui peuvent être des timar libres (les has du sultan et les vakf du sultan et du vizir ; les has et les zeamet des hauts fonctionnaires et soldats, ou des hauts administrateurs comme les beyler-beys, sandjak-beys, les nişancı, les trésoriers, les secrétaires de divan, les sergents, les çeribaşı, les subaşı, les dizdar) ou des timar non- libres (timar de sipahi). Cette division administrative que nous décrivons ici de manière trop générale, nous donne une vue générale sur l’organisation de l’État sur le territoire.

Concernant le régime foncier et la division administrative, le premier point à souligner est le fait que les administrateurs dirigeant les unités administratives principales du pays, c’est-à-dire les beyler-beys et les sandjak-beys exerçaient leurs fonctions administratives en se servant des possesseurs de timar et de zeamet57. Responsables de l’administration des kaza, les soubachi eux-mêmes étaient des possesseurs de timar libre et c’est en raison de cette qualité qu’ils étaient également qualifiés de zaim58. Les fonctions principales des administrateurs provinciaux auxquels des régions d’impôt de tailles diverses étaient confiées, étaient d’assurer la sécurité et de créer une force militaire qui

56 Le fait que les cahiers tahrir prennent comme base le kaza et non le nahiye (puisque ce dernier était

conçu pour désigner le fonctionnement du système timar) est un indicateur de cette relation entre le kaza qui est le domaine d’autorité du kadı et le nahiye qui se trouve en son sein en tant qu’unité militaire. İlhan Şahin, « Nahiye », İslam Ansiklopedisi, vol. 32, p. 307.

57 İsmet Giritli, Amme İdaresi Teşkilatı ve Personeli [Organisation et personnel de l’administration

territoriale], İstanbul, İstanbul Üniversitesi Yayınları, 1975, p. 41.

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constituait l’échine de l’armée ottomane. L’administration provinciale ottomane se basait donc sur un mécanisme protecteur qui assurait l’ordre public et qui levait l’impôt pour le faire. Les administrateurs provinciaux étaient alors des commandants militaires plutôt que des gouverneurs civils59. Même s’il est possible de parler d’un ordre hiérarchique qui aligne le beyler-bey, le sandjak-bey, les soubachi et les sipahi timariotes, il s’agit là d’une hiérarchie militaire plutôt qu’une centralisation administrative.

Au lieu d’évaluer le régime de la propriété foncière publique (dit « mirî ») de l’État ottoman et le système de tımar comme un contrôle central dur de l’État sur la terre, il faudrait les considérer au contraire comme un reflet de l’absence de contrôle central. Comme nous l’avons déjà souligné, il serait plus convenable d’accepter l’absence d’une administration centralisée et d’une bureaucratie publique développée qui résulte, en effet, de l’état de la technologie et de la structure économique agraire. İlber Ortaylı évoque la réflexion célèbre de Machiavel sur l’Empire ottoman et la comparaison qu’il fait entre ce dernier et la France comme un témoignage de l’époque, pour démontrer qu’il était très difficile de s’emparer de l’Empire ottoman où le sultan avait un règne absolu et où toutes les parties du pays étaient strictement liées à son autorité, mais qu’il serait très facile de la diriger au cas où il serait conquis, tandis qu’il était facile de s’emparer de la France où, au contraire, les seigneurs féodaux se rebiffaient au roi, mais que sa direction serait très difficile une fois envahie. Ironiquement, les pays comme la France n’ont pas pu être conquis alors que le pays ottoman a progressivement perdu ses territoires à partir du 17ème siècle, mais aucun envahisseur n’a pu facilement y demeurer60. Donc il faut mettre en question les approches qui voient dans la force et l’influence de l’administration provinciale ottomane le signe d’un centralisme fort et dur. Il faut également révéler jusqu’à quel point cette administration restait fermée aux principes et aux pratiques de décentralisation. Il serait donc convenable de démontrer, à partir des positions des représentants territoriaux de l’administration centrale et des

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İlber Ortaylı, op. cit., 2010, p. 469.

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développements qui ont inscrit à l’ordre du jour une réforme extensive au 19ème siècle, comment ces rôles se sont modifiés.

L’organisation administrative typique de l’Empire ottoman du point de vue des représentants territoriaux de l’autorité étatique peut être décrite de la façon suivante : deux administrateurs – dont l’un est le bey qui représente l’autorité exécutive du sultan et l’autre, le kadı qui, indépendamment du bey, représente l’autorité juridique – nommés à chaque région pour contrôler les territoires en province, et en outre, des fonctionnaires de finance nommés pour contrôler les revenus et les dépenses de l’État dans les unités administratives comme le beylerbeylik et le sandjak. Si l’on tient compte des charges que le kadı exerçait dans les domaines territorial, municipal, militaire et juridique dans la structure administrative, il est possible de dire qu’il n’existait pas un autre fonctionnaire qui avait un domaine de compétence aussi large que le sien61. Les kadıs ont aussi assumé une fonction administrative importante dans les régions de timar libre (serbest tımar) auxquels le sandjak-bey et le soubachi ne pouvaient pas intervenir62. Comme la relation entre les kadıs et les chefs militaires/administrateurs locaux de chaque circonscription territoriale le montre, ces administrateurs nommés par le centre étaient non seulement indépendants les uns par rapport aux autres mais aussi ils se contrôlaient réciproquement63. Le régime foncier en tant qu’élément principal de l’organisation

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Ibid., pp. 261-262. Le kadı appartient à la classe des intellectuels, il est un homme de droit religieux mais il fait partie des cadres civils et il est en même temps un membre de la classe militaire comme