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Cette expérience est nouvelle et correspond à l’association de deux thématiques déjà existantes au Laboratoire Kastler Brossel : l’étude des nanocristaux d’une part, et l’utilisation de fibres étirées pour le couplage d’autre part. Ces deux sujets font ici l’objet d’une mise en contexte à travers un état des lieux des connaissances et des travaux effectués sur le sujet.

2.3.1 Les nanocristaux

Au cœur de plusieurs thèses réalisées au laboratoire, les nanocristaux de semi-conducteurs sont la pièce maîtresse de mon stage. Leurs propriétés permettent en effet de faire d’eux des sources de photons uniques lorsque l’excitation est satisfaisante. Au fil de cette dernière décen-nie des progrès importants ont été réalisés en matière de synthèse contrôlée de nano-structures

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cristallines. Inférieures à la centaine de nanomètres, ces structures voient leurs propriétés op-tiques et électroniques dominées par les effets du confinement quantique, effets détaillés dans les propriétés générales.

Structure

Les nano-bâtonnets, ouDots-in-Rod en anglais (littéralement “Points-dans-Bâtonnets”), sont des nanocristaux de semiconducteurs II-VI obtenus par synthèse chimique, via une méthode proposée par Carbone et al. [?] dite de croissance “ensemencée”. Le bâtonnet de CdS (sulfure de sadmium) contient un cœur sphérique de CdSe (séléniure de cadmium), placé non pas au centre de la structure mais déporté sur un côté. La méthode de croissance ensemencée permet de créer un rapport d’aspect (longueur/diamètre de la coquille) de 10 pour 1. Les nanocristaux fabriqués avec cette méthode présentent l’avantage, entre autres, d’avoir une probabilité moins importante de former des agrégats, ouclusters, que leurs premières versions sphériques [?]. Le problème desclusters est qu’il est alors impossible d’exciter un seul nanocristal, et donc de bien contrôler l’unicité des photons émis. Ce sont des amas plus ou moins importants de nanocristaux qui sont excités et émettent à la place ; il devient impossible d’observer les effets escomptés. Nous verrons dans le paragraphe2.3.1que le contrôle de leur fabrication est important car leur rapport d’aspect influe directement sur leurs propriétés optiques.

d t

l

CdSe CdS

30 - 70 nm

3 nm 7 nm

Figure 2.1 – Schéma d’unDot-in-Rod avec ses paramètres géométriques.

dest le diamètre du coeur,l la longueur du nano-bâtonnet et tson épaisseur. Y figure aussi les valeurs typiques correspondantes

Propriétés générales

Les propriétés optiques de ces nanocristaux sont dues à la répartition spatiale des porteurs de charges que sont les électrons et les trous. L’écart entre les bandes interdites est de 1,68 eV pour le CdSe et de 2,46 eV pour le CdS. En raison de l’alignement des bandes, les bandes de valence des deux matériaux sont décalées de 0,78 eV, ce qui induit un fort confinement pour les trous dans le CdSe [?]. En revanche, le décalage entre les bandes de conduction est plus faible et n’est pas clairement défini dans la littérature, il y est compris entre [−0,3; 0,3 eV], ce qui n’implique pas de confinement important des électrons. En fait le confinement électronique dépend du diamètre du cœur ; on peut pour cela se réferer à [?].

Le processus d’émission des photons uniques est initié par la recombinaison d’une paire électron-trou et régulé par effet Auger. Une paire électron-trou, en se recombinant, va céder

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une certaine quantité d’énergie de recombinaison qui sera transférée à une autre paire électron-trou. Ce processus nommé relaxation non-radiative par effet Auger se répetera ainsi de proche en proche jusqu’à la dernière paire électron-trou qui n’aura plus de paire à qui transmettre son énergie de recombinaison et qui la libérera donc sous la forme d’un photon. On peut dire que si l’effet Auger est efficace, les photons devraient bien être émis un par un. Dans le cas contraire, les paires électron-trou se recombineront individuellement et émettront chacune des photons. Un effet Auger efficace conditionne donc la qualité de ces sources de photons uniques.

-a a0

Figure 2.2 – Schéma des fonctions d’ondes des trous (ligne continue) et des électrons (ligne pointillée) dans des nanocristaux de type alpha et béta.

a) Dans un nanocristal de type I, les deux porteurs de charges sont confinés.

b) Dans le nanocristal de type II, le confinement des électrons n’est pas réduit au cœur de CdSe, réduisant l’efficacité de l’effet Auger, et donc la probabilité d’unicité des photons émis.

Cet effet est facilité par un fort confinement des charges. Si les trous et les électrons sont fortement confinés, leur recombinaison sera probable et l’effet Auger limitant les multi-émissions de photons sera efficace, on dit que c’est un nanocristal de type I. En revanche, si les électrons ne sont pas soumis à un confinement suffisant, ceux-ci sont délocalisés dans la coquille de CdSe. Trop éloigné les unes des autres pour que l’effet Auger soit suffisamment efficace, les paires électron-trou auront tendance à émettre chacunes des photons. On dit alors que c’est un nanocristal de type II. Sittet al. [?] suggèrent dès 2009 que la différenciation des nanocristaux en types I ou II dépend fortement de la structure des nanocristaux. Ils relèvent que les cœurs d’un diamètre supérieur à 2,8 nm ont une interaction entre excitons attractive, en raison de la localisation des deux porteurs de charges, et sont donc de type I. À l’inverse, les cœurs d’un diamètre inférieur à 2,8 nm ont une interaction entre excitons répulsive et sont de type II. En conséquence, les propriétés optiques de ce type d’hétérostructures sont fortement dépendantes de leurs caractéris-tiques géométriques. La coquille joue elle aussi un rôle important, elle protège le cœur. Par sa taille plus importante que ce dernier, elle tient éloignées les charges extérieures qui réduiraient le rendement quantique. La forme de bâtonnet est elle aussi un avantage : d’une part elle facilite un positionnement ordonné en comparaison à une structure sphérique, d’autre part l’anisotropie

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autorise une polarisation de l’émission [?][?]. Nous disposons de plusieurs sortes de nanocristaux, dont les paramètres et propriétés sont variées et référencées dans le tableau2.1issu de [?].

n échantillon diamètre du cœur épaisseur du bâtonnet longueur du bâtonnet

DRT 42 2,9 nm 4 nm 22 nm

Table 2.1 – Récapitulatif des nanocristaux étudiés au laboratoire.

Généralités

Pour exciter le nanocristal, il faut une lumière suffisamment énergétique, qui se situe dans le bleu à 404 nm. L’absorbtion a lieu dans la coquille. Le photon émis par recombinaison dans le cœur du nanocristal est lui nécessairement moins énergétique, il se situe dans le rouge à environ 630 nm, selon les échantillons. Une étude détaillée de la dynamique d’émission de ces nanocristaux a été menée par Godefroy Leménager et Mathieu Manceau au cours de leurs thèses respectives [?] [?]. Cette différence de longueur d’onde entre lumière d’excitation et photons émis nous permet de filtrer la lumière d’excitation lors de la collection. La lumière d’excitation, si elle n’est pas filtrée, augmente le niveau de bruit, ce qui, d’une manière générale, fausserait les mesures. De plus, comme les photons d’excitation ne possèdent pas de propriété d’unicité, leur présence rendrait caduque la recherche de photons uniques parmis le flot de non-uniques. Les nanocristaux peuvent fonctionner pendant une assez longue période. En revanche, une excitation intense peut les détruire : on parle de photo-blanchiment, c’est à dire qu’ils émettent de moins en moins [?]. Cela est du à la création de nouveaux pièges de charges sur la surface ou dans le cristal (photo-oxydation). Pratiquement, les nanocristaux sont en solution colloïdale dans du chloroforme. Ils sont au besoin dilués dans du toluène, protocole que l’on détaillera en2.5.4.

2.3.2 La fibre étirée

L’idée de produire des fibres optiques de diamètre très fin est liée à l’essort de la fibre op-tique, très utilisée dans les télécommunications et les laboratoires de recherche. L’amélioration des procédés de fabrication de ces fibres - déclenchée en 2003 par les travaux de Limin Tonget al.

publiés en 2003 - a permis d’obtenir des fibres optiques de quelques centaines de nanomètres avec une transmission proche de 100 % [?]. Au laboratoire notre groupe se sert déjà des fibres étirées pour fabriquer des pièges dipolaires à atomes froids [?]. Ces fibres ont un diamètre d’envi-ron 500 nm en leur partie la plus fine et nous nous servid’envi-rons du montage et du protocole existants pour réaliser nos nanofibres [?].

Une fibre optique commerciale est constituée de trois couches concentriques [?] : le cœur, la gaine et le revêtement de protection.

Le coeur (oucore) :

Généralement en silice, bien que quartz et plastique soient également possibles, le cœur est le constituant à travers lequel se propage la lumière. Très pure, cette silice peut être dopée afin de modifier son indice de réfraction dans un souci de performance.

La gaine optique (oucladding) :

Elle est constituée des mêmes matériaux que le cœur qu’elle entoure, à savoir de silice. Cependant c’est une silice de moindre qualité car elle n’est pas destinée à voir de la lumière se propager en son sein. Ses propriétés optiques sont malgré cela exploitées car elle doit, grace à un indice

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125125380 20050 -10010

a)

b)

c)

x

x

x I

I I

Figure 2.3 – Structures, modes de propagation et modes de sortie comparées des trois types de fibres évoquées.

a) Dans une fibre multimode à saut d’indice, le cœur admet un nombre important de mode en son sein. Ceux-ci se réfléchissent à l’interface cœur-gaine, ce qui engendre des pertes.

b) Dans une fibre multimode à gradient d’indice, les différents faisceaux sont ramenés graduellement vers le centre grâce à une variation progressive de l’indice de réfraction du cœur.

c) La fibre monomode n’accepte qu’un seul mode de propagation.

Figure 2.4 – Indice de réfraction en fonction du diamètre de la fibre.Dans le cas présent, nous sommes en présence d’une fibre monomode étirée ne présentant aucune couche entre le cœur d’indicen1et l’air d’indice n2

de réfraction plus faible que celui du coeur, empécher la lumière de quitter ce dernier. Toujours dans un souci de performance, cette silice peut elle aussi être dopée afin de réduire un peu plus son indice de réfraction.

Le revêtement de protection (oubuffer) :

Cette couche n’intervient pas dans la transmission de la lumière et sert à assurer la protection et la flexibilité de la fibre pour en faciliter sa manipulation.

Sur la figure 2.3sont représentées les trois catégories de fibre : les fibres “à saut d’indice”, les fibres “à gradient d’indice” qui sont toutes les deux des fibres dites multimodes, et les fibres monomodes.

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