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CHAPITRE 5 : Exploitation des propriétés d’ancrage de la polydopamine pour

I. Contexte de l’étude

L’athérosclérose est une pathologie artérielle dégénérative pouvant être définie comme une réponse inflammatoire de l’endothélium vasculaire conduisant au développement lent et progressif de plaques d’athéromes principalement constituées de matrices extracellulaires (protéines, glycoprotéines et glycosaminoglycanes), de cellules musculaires lisses et de macrophages remplis de dépôts lipidiques, qui s’infiltrent entre l’endothélium et la couche musculaire de l’artère 1-2 (Figure V.113).

Figure V.113 : Coupe schématique d’une artère saine et d’une artère athéroscléreuse

Bien que le processus de formation des plaques d’athéromes soit extrêmement complexe 2-3, un certain nombre de facteurs de risques ont pu être clairement identifiés. Parmi les plus importants nous retrouvons le tabagisme, l'hypercholestérolémie, l'hypertension artérielle, le diabète, la sédentarité ou la surcharge pondérale, l’âge et le sexe du patient. En raison de ces facteurs de risques, l’athérosclérose s’avère un problème majeur de santé publique si bien que les complications cardio-vasculaires qui lui sont associées, représentent la première cause de mortalité dans les pays industrialisés. En effet, la croissance de cette plaque

d’athérosclérose, conduisant à la diminution du diamètre de la lumière artérielle (autrement appelée sténose) (Figure V.114) est préjudiciable lorsqu’elle a lieu au niveau des artères coronaires et peut provoquer, dans les cas les plus graves, le décès du patient.

Figure V.114 : Coupe transversale d’une artère coronarienne présentant une sténose athéroscléreuse sévère

Depuis le milieu des années 1980, nous constatons néanmoins une diminution de la mortalité liée à l’athérosclérose, en raison notamment d’un encadrement thérapeutique amélioré. En effet, la prise en charge du patient est dominée par la nécessité d’établir un diagnostic rapide avec vérification des facteurs de risques. Une stratégie pharmacologique à base d’anti- ischémique, d’anti-coagulant et/ou d’anti-thrombotique peut être proposée et consiste à administrer des médicaments tels que les statines, les anti-agrégants plaquettaires, les héparines, les dérivés nitrés ou encore les inhibiteurs de l’enzyme de conversion 4. Ces traitements médicamenteuxont par ailleurs prouvé à de nombreuses reprises leur efficacité en réduisant significativement les risques d’infarctus du myocarde et d’accidents vasculaires cérébraux 5-8. Toutefois, dans le cas de sténose significative symptomatique, un traitement invasif de revascularisation peut être proposé au patient.

I.2. Angioplastie et stenting

I.2.1. Généralités

Au début des années 60, le geste chirurgical permettant la revascularisation artérielle était de deux types : le pontage, pour les artères de petit calibre et la thrombo- endartériectomie pour les artères de taille plus importante. Chacune de ces deux techniques

chirurgicales invasives, aux complications péri-opératoires parfois malheureuses, ont été progressivement remplacées par des méthodes moins invasives. En effet, inspiré par les travaux de Dotter et Judkins 9, le cardiologue allemand Andreas Grüntzig mit au point dans les années 70, une technique de dilatation par ballonnet, appelée angioplastie, consistant à rompre par éclatement, la plaque d’athérome responsable du rétrécissement de la lumière artérielle 10. Les résultats se sont avérés peu satisfaisants à longs termes avec un taux élevé de complications peri-opératoires (retour élastique, resténose).

Bien que le concept d’un dispositif tubulaire métallique non élastique permettant de maintenir ouverte les artères réfractaires aux méthodes classiques d’angioplastie ait été introduit par Dotter et Judkins en 1964 11, ce n’est que dans le milieu des années 80 que le stent (Figure V.115) a commencé à être implanté chez les humains 12.

Figure V.115 : Exemple d’un stent en CoCr : le stent Multi-Link Vision de chez Abbott Vascular

Les premières implantations de stents (de type Wallstent) ont été réalisées par les docteurs Sigwart et Puel en 1986. Depuis cette date, ces dispositifs n’ont cessé d’être améliorés et représentent la principale voie dans le cadre du traitement de l’athérosclérose 13. Plusieurs catégories de stents à base d’alliages métalliques tels que l’acier 316 L, le NiTiNOL ou encore le cobalt-chrome (CoCr) ont ainsi été développées. Malgré leur succès incontesté dans la diminution des risques cardio-vasculaires, deux complications post opératoires sont cependant toujours fréquemment diagnostiquées, à savoir la thrombose précoce et la resténose.

I.2.2. Complications post-opératoires

La thrombose précoce (entre 0 et 30 jours) est un phénomène aux conséquences parfois malheureuses et observé, dans la plupart des cas, 24 heures après l’angioplastie et/ou le stenting. Ce phénomène est essentiellement lié à la procédure chirurgicale en elle-même 14.

En effet, l’effort mécanique subi par la paroi vasculaire lors de l’intervention favorise la perte des cellules endothéliales pouvant conduire progressivement à la formation d’un caillot sanguin. Ce dernier est alors susceptible de bloquer l’irrigation sanguine et ainsi provoquer un dysfonctionnement des divers organes du corps humain.

Le taux de thrombose précoce lié au stenting a considérablement diminué depuis le début des années 90 (de 15-25 % à environ 1 %) notamment en raison de la standardisation du traitement médical par administration d’anti-agrégants plaquettaires 15.

La resténose intra-stent est un phénomène plus progressif qui intervient plus tardivement que la thrombose. En effet, cette réduction du diamètre interne de la lumière artérielle peut se manifester après six mois suivant l’intervention chirurgicale et touche jusqu’à 40 % des patients 16-18. Le mécanisme de resténose fait intervenir un remodelage constrictif de l’artère traitée et une réaction de cicatrisation excessive de la paroi artérielle 19- 20. L’implantation de stents a permis de régler, de manière mécanique, le problème du phénomène de remodelage constrictif mais n’apporte aucun effet bénéfique sur la prolifération des cellules musculaires lisses et la cicatrisation de l’endothélium 21.

I.2.3. Les stents actifs : une solution originale

Dans l’optique de limiter ce phénomène de resténose après implantation du stent, l’administration systémique de molécules thérapeutiques peut être proposée. Deux grandes classes de molécules sont ainsi régulièrement utilisées, à savoir les héparines qui limitent la prolifération des cellules musculaires lisses responsables de la resténose 22 et les statines qui possèdent un caractère anti-inflammatoire et qui peuvent agir simultanément sur les phénomènes de thrombose et de resténose 23.

Le concept de stents pharmaco « actifs », concept développé récemment, permet la réouverture de la lumière artérielle grâce au support métallique du stent tout en luttant contre la prolifération des cellules musculaires lisses grâce à la délivrance d’un médicament

in situ. Dans ce contexte, les agents antiprolifératifs et/ou immunosuppresseurs tels que le

sirolimus, le paclitaxel, le tacrolimus ou encore l’évérolimus sont les plus régulièrement utilisés. Toutefois, d’autres molécules comme les complexes polysaccharidiques 24, les

facteurs de croissance des cellules vasculaires endothéliales (VEGF) 25 ou des peptides 26 peuvent être également employées. Le mode d’action de ces molécules consiste à inhiber la prolifération des cellules musculaires lisses et limiter l’inflammation de la paroi artérielle tout en favorisant la réendothélialisation. Actuellement, il existe six stents « actifs » commercialisés chargés en agents antiprolifératifs qui ont obtenu le marquage CE et qui sont susceptibles d’être admissibles au remboursement 27. Parmi eux, cinq sont employés dans le cadre de traitement des lésions coronaires (Tableau V.14) et un seul pour le traitement des lésions fémorales superficielles (le stent en NiTiNOL Zilver PTX de Cook Medical, Bloomington, Indiana, USA).

Tableau V.14 : Liste des stents actifs coronaires porteurs du marquage CE et inscrits sur la Liste des Produits et Prestations Remboursables (LPPR) 27

Dans ces dispositifs, les molécules biologiquement actives peuvent être soit directement adsorbées sur le stent métallique (« polymer-free ») 28 soit stockées à l’intérieur d’une matrice polymère (DES = Drug Eluting Stent).

Parmi les matrices polymères les plus employées, nous retrouvons des polymères non résorbables à base de polydiméthylsiloxane (PDMS) 29, de poly (éthylène-co-vinyl acétate) (PEVA) associé au poly (méthacrylate de n-butyle) (PBMA) 30 employés pour les stents commercialisés sous le nom de Cypher (Cordis, Jonhson & Johnson, Warren, New Jersey, USA) 31 ou bien encore des copolymères à blocs styrène isobutylène styrène (SIBS) 32 utilisés dans la fabrication des stents de la gamme Taxus (Boston Scientific, Natick, Massachusetts, USA) 33. D’autres matrices résorbables à base de polymères biodégradables comme la phosphorylcholine (cas du stent Endeavor, Medtronic, Santa Rosa, California, USA) 34, l’acide poly (lactique) (PLA), l’acide poly (lactique-co-glycolique) (PLGA) ou l’alcool poly (vinylique) (PVA) sont également de plus en plus souvent utilisées dans la conception de stents actifs 35- 38. Nom commercial Principe actif Support métallique Matrice polymère (réf) Industriel

Cypher Sirolimus Acier 316 L PEVA/PBMA Cordis, Johnson & Johnson, Warre, New Jersey, USA Taxus Paclitaxel Acier 316 L SIBS Boston Scientifics, Natick, Massachusetts, USA Endeavor Zotarolimus CoCr Phosphorylcholine Medtronic, Santa Rosa, Californie, USA

Promus Everolimus PtCr PVDF-HFP/PBMA Boston Scientifics, Natick, Massachusetts, USA Xience Everolimus CoCr PVDF-HFP/PBMA Abott Vascular, Abbott Laboratories, Abbott Part, Illinois, USA

L’ensemble des polymères précités restent tolérés par l’organisme mais ne sont pas entièrement satisfaisants. En effet, malgré des résultats encourageant obtenus avec ces stents « actifs » à l’égard du phénomène de resténose, des taux importants de thrombose tardive sont observés. Ces échecs sont probablement attribuables au retour du stent dans son état métallique après libération de l'espèce antiproliférative, engendrant un effet inflammatoire local qui aboutit à la thrombose tardive 39. Par conséquent, la mise au point d’une nouvelle génération de stents actifs, capables de libérer de manière prolongée des principes actifs tout en limitant le phénomène inflammatoire et favorisant la cicatrisation artérielle, constitue un enjeu majeur dans la lutte contre les maladies cardio-vasculaires.

II. Stratégie de fonctionnalisation de surface pour l’élaboration